Je m’appelle Émilie, j’ai 29 ans.
Je suis ingénieure en modélisation statistiques, j’habite à Marseille et je suis féministe radicale, critique du genre.
Je suis devenue critique du genre … En fait, ça a commencé assez tôt, parce que, dans ma famille, mon père participe beaucoup aux tâches ménagères avec ma mère, je veux dire c’est 50/50, et j’ai toujours entendu les gens dire que ma mère avait de la chance, parce que mon père « l’aidait » à la maison. Et, déjà, je ne comprenais pas le mot « aider » : pourquoi mon père l’aidait, et que ma mère, c’était tout entendu qu’elle devait le faire ? Et ensuite, pourquoi, alors que mon père est valide – il a deux bras, deux jambes – pourquoi il ne peut pas participer aussi aux tâches qui incombent au domicile qu’il occupe communément avec ma mère ?
Donc, déjà, il y a eu ça, où je me disais, « pourquoi lui, ça paraît être un super héros des temps modernes, et pourquoi, pour ma mère, c’est normal ? » Donc : première question que je me suis posée, finalement assez jeune.
Après, ensuite comme j’étais plutôt forte en maths et en matières scientifiques « dures», j’ai toujours entendu dire que j’étais « forte dans ces matières, pour une fille».
Donc déjà, pourquoi « pour une fille » ? Est-ce que mon cerveau été modifié parce que je suis une femme, et que du coup je dois être nulle en maths, et ne pas avoir de logique ?… Je ne pense pas ! Et puis surtout, ça m’amusait, mais ça m’énervait aussi, parce que je voyais au lycée, dans le regard de certains garçons qui étaient dans ma classe, que quand j’étais meilleure qu’eux, en fait ça les vexait encore plus que si un garçon avait été meilleur qu’eux. Et du coup, je me disais « Mais en quoi est-ce si honteux de te faire battre par une fille, en fait ? » Parce que oui, je suis logique, je sais résoudre une équation et je sais réfléchir, mais pourquoi si c’est moi qui suis meilleure que toi c’est plus humiliant pour toi que si c’était n’importe quel autre garçon de la classe ? Donc il y avait ça, là aussi je me suis questionnée, je me suis dit : « Mais en fait pourquoi, parce que je suis une fille, je devrais être nulle ? Je devrais être plutôt littéraire ? Je ne sais pas, voilà ».
Toutes ces questions-là continuaient à se poser dans ma tête.
Après, il faut savoir aussi que moi, depuis que je suis jeune, j’ai des problèmes gynéco, j’ai eu une première opération des ovaires, j’avais 13 ou 14 ans. Et donc depuis cet âge-là, je vais quand même souvent chez le gynécologue. J’ai été très tôt confrontée à la gynécologie, c’est-à-dire… Désolée, mais devoir montrer ton corps à un parfait inconnu, avoir des chirurgies qui sont quand même invasives, (parce que quand tu as des opérations, tu sais qu’à un moment tu vas être toute nue sur la table d’opération, et être complètement endormie)… À l’époque, je n’avais pas encore entendu parler des histoires des toucher vaginaux illégaux, et tout ça… Parce que sinon, je pense que je n’aurais jamais pu être opérée. Voilà, il y a tout ça. J’ai eu vraiment des problèmes aux ovaires, des problèmes gynécos.
Et il y a aussi les règles. Alors je ne dirais pas que j’avais des règles hémorragiques mais j’avais des règles très abondantes, et comme je suis anémiée, ça me fatiguait énormément. Et je pense que la première fois qu’on m’a dit : « mais t’as tes règles ou quoi ? » , j’ai pété un câble…. Bien sûr, c’était un homme qui m’avait dit ça ! « Tu sais ce que c’est d’avoir ses règles ? Tu sais ce que c’est d’être fatiguée ? Tu sais ce que c’est de ne pas pouvoir ouvrir une bouteille d’eau, tellement tu es mal ? » Il y a eu toutes ces remarques. Là aussi, je ne comprenais pas en quoi c’est drôle de se moquer d’un truc qui est, pour certaines femmes, hyper handicapant ? Il n’y a rien de drôle dans tout ça. Et puis, pourquoi on te colle tout de suite le cliché de : quand t’as tes règles, t’es hystérique (d’ailleurs, mot hyper sexiste). Pourquoi on te dit que t’es folle quand t’as tes règles ?
Tu me dis ça mais tu ne sais même pas ce que c’est. Donc : juste, tais-toi !
Autre chose qui m’a interpellée, ensuite, dans mon développement, quand j’ai commencé à avoir plus de formes, c’est que j’ai bien vu que le regard des hommes changeait, et notamment, je me souviens, le regard hyper sale, alors qu’en fait j’étais toute jeune, par des vieux mecs. Je me disais, mon Dieu, que ça me dégoûtait ! J’étais hyper mal à l’aise avec mon corps à cause de ça. Alors que chez moi, à la piscine, avec mes parents, il n’y a pas de soucis. Mais à la plage, des fois il y a des hommes qui posent des regards sur toi qui te mettent très très mal à l’aise.
Et aussi autre chose : j’aime bien le sport, et on m’a toujours répété qu’il ne fallait pas y aller trop fort avec le sport parce qu’après tu n’as pas un corps qui est très féminin… Que trop d’épaules, ce n’est pas féminin. Que trop d’abdos, ce n’est pas féminin, etc… sauf qu’en fait, pourquoi je me priverais de faire un truc qui me fait, moi personnellement, me sentir très très bien dans mon corps et dans ma tête, pour juste correspondre à une image de ce que toi tu attends de la femme ?
Le pire, c’est que des fois, tu te prends des remarques de personnes que tu ne connais pas. Tu n’es pas mon copain, tu ne relationnes pas avec moi : pourquoi tu te sens obligé de me faire une remarque, en fait ? Truc que les femmes ne font jamais, et pourtant je pense qu’on pourrait s’en donner à cœur joie sur la plage, tu vois des gros mecs dégueulasses, hyper poilus, qui vont critiquer une nana… Mais eux, est-ce qu’ils sont Mister Univers ? Je ne pense pas ! Et je pense que la critique envers eux, serait beaucoup plus aisée. Et pourtant, on ne le fait pas.
C’est un peu tout ça, toute cette façon qu’on a de juger facilement les femmes. Même les femmes se jugent entre elles ! C’est tout un truc qui m’a toujours énervée, et qui m’a amenée à me poser des questions : « Pourquoi, puisque je suis une femme, les gens ont le droit de regard sur mon corps ? Les gens ont ce droit de blagues pourries qu’ils peuvent faire, et que tout le monde rigole, alors que moi, ça ne me fait absolument pas rire ? Et pourquoi, parce que je suis une femme, est-ce que je devrais faire des trucs littéraires, de la psychologie ou, comme on dit souvent, les métiers du care, où tu es dans le soin à l’autre ? Mais ce n’est pas ce qui m’intéresse ! »
Voilà. Je ne comprenais pas pourquoi on voulait me faire entrer dans un moule qui ne m’allait pas, en fait. Tout simplement !
Et en plus, je trouve que ce moule est hyper étriqué. Tu as les injonctions à la maternité. On te dit toujours que le travail a libéré les femmes, mais franchement, moi je ne trouve pas. Il les a peut-être libérées financièrement, mais il ne les a pas libérées. Parce que si tu regardes, les femmes ont toujours les tâches ménagères, elles ont toujours à s’occuper des enfants, et en plus maintenant il faut qu’elles travaillent !
Et à côté de ça, il faut qu’elles soient–excusez-moi du terme–il faut qu’elles soient bandantes ! Donc en fait, on a des journées qui font 24 heures, il faudrait qu’on fasse du sport, à manger, s’occuper des gosses, et qu’on ait un super boulot. Mais à un moment, ce n’est plus possible ! Donc il faut peut-être un moment laisser les femmes vivre leur vie comme elles l’entendent, et puis arrêter de les saouler, alors que les hommes sont capables de faire leur lot de choses pour les aider, mais qu’ils ne le font pas… parce que de toute façon, c’est très agréable pour eux.
Et tu sais, c’est l’autorité non fondée, on a toujours fait comme ça, donc pourquoi on va changer ? C’est un truc que je n’ai jamais accepté, je pense, l’autorité non fondée. Et je pense que c’est tout ça qui m’a amenée à me poser des questions sur le genre, vraiment.
Et après, par la suite, là où je pense que j’ai vraiment compris qu’il y avait un souci, avec tout ça, c’est–ce n’est pas mon cas quand j’étais petite fille, j’étais très stéréotypée, je ne voulais mettre que des robes, je ne voulais absolument pas mettre de pantalons !- c’est des choses : c’est des collègues qui vont te dire que des choses ne sont pas féminines, que tu fais un truc qui n’est pas féminin, que ce n’est pas beau de dire des gros mots quand t’es une fille…
En fait, j’ai juste l’impression que c’est nous mettre juste des barrières pour nous empêcher d’être tranquilles, nous forcer à être toujours dans une espèce d’hypervigilance. Toujours tout mesurer, tout ce qu’on fait, être sûres qu’on est bien dans la demi-mesure. Être sûre que quand on répond, ce n’est pas trop méchamment. Être sûre qu’on est bien gentille avec tout le monde, quitte à se laisser marcher dessus… et en fait, au final, c’est juste nous empêcher de vivre !
Donc c’est pour ça, je pense, que j’ai commencé à beaucoup critiquer toute cette idéologie-là, parce que je me suis rendu compte qu’elle allait vraiment à l’encontre de nos développements, à nous, personnels, pour être épanouies !
RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie ?
Je pense que toute cette idéologie, notamment transactiviste, elle est hyper dangereuse pour nous.
Parce que déjà, truc tout bête, tu changes les définitions ! Donc en fait, si on change la définition de « femme », est-ce que je vais pouvoir lutter pour mes droits de la même façon ? Est-ce que je vais pouvoir revendiquer l’accès à des espaces qui sont basé sur le sexe, de la même façon ? Est-ce que je vais pouvoir parler des inégalités salariales de la même façon ? Etc. etc.
En fait, c’est un truc, je vais faire un parallèle hyper grossier,
si on dit qu’un éléphant est un chien, et bien les éléphants ne sont plus en voie de disparition, et ils n’ont plus à être protégés !
Donc là, c’est exactement la même chose. Je ne dis pas que les femmes, nous sommes une espèce en voie d’extinction, je dis juste que nous sommes une espèce qui est menacée, de par son sexe ! Et si on change les définitions des mots, on va nous dire qu’on n’est plus menacées, qu’il n’y a plus d’inégalités salariales, qu’on n’a plus à militer pour nos droits ! Déjà, il y a ça.
Ensuite, quand tu vois des personnes qui (je pense qu’ils sont très mal à l’aise avec leur corps, et je ne veux pas remettre en question ça, parce que je sais que ce sont des personnes qui souffrent, je le reconnais) qui, parce qu’elles souffrent, vont renforcer certains stéréotypes, c’est-à-dire dire que :
Parce que j’aime le rose, je suis une femme.
Parce que j’aime porter des jupes, je suis une femme.
Parce que j’aime me maquiller, je suis une femme.
Tu peux aimer porter des jupes, et te maquiller, et aimer le rose, et aimer la danse, et je ne sais pas quoi… ça ne fait pas de toi, pour autant, une femme !
Parce que si tu dis ça, tu enfermes des milliers de femmes qui, elles, sont contre tout ça, et à qui on va justement dire qu’elles ne sont pas féminines, et qui revendiquent, par exemple, un droit à ne pas se maquiller, un droit à ne pas s’épiler. Tu les enfermes ! Donc toi, pour te sentir mieux, tu enfermes des milliers de personnes !
Et je pense que c’est hyper illustrateur de la société actuelle, qui est d’un individualisme poussé à l’extrême.
Et que là, tu ne penses qu’à toi, plutôt que de penser à toutes les personnes qui sont en souffrance à cause de ces stéréotypes !
Et puis surtout, en fait, quand on y réfléchit deux secondes, c’est un serpent qui se mord la queue, en fait !
Parce que tu es mal à cause des stéréotypes de genre imposés à ton sexe de naissance, tu vas renforcer les stéréotypes de genre, de l’autre sexe ! Tu alimentes le système qui te fait souffrir, quelque part ! Enfin, l’autre penchant, mais c’est les deux revers d’une même médaille. Donc tu alimentes exactement le même truc qui t’a fait souffrir, de base. Je trouve que c’est complètement idiot, ce n’est pas une solution. Ça peut peut-être paraître une solution dans l’immédiat, mais en tous les cas, ce n’est pas une solution pour le long terme.
Je trouve aussi que cette idéologie-là, elle est hyper dangereuse autrement, parce que on te revendique l’accès à des espaces qui sont réservés aux femmes… Mais c’est hyper dangereux !
J’avais vu un post d’un transactiviste hyper influent… Alors, sur le post en question, (je crois qu’il a été supprimé depuis, mais sur le poste en question,) il était déguisé en fée, ça me dégoûtait ! Et en plus il disait que les petites filles n’étaient pas aussi innocentes que ça, et qu’il fallait arrêter avec cette idée-là ! Et je me dis, quand on voit ça, comment on peut laisser ces personnes-là, sous prétexte d’une idéologie de genre, accéder à des espaces où il y a des petites filles? C’est juste un encouragement à la pédocriminalité. Et en fait, ce qui m’énerve, ce que je trouve dangereux, c’est qu’il y a un tel discours victimaire de ces personnes, on en arrive à les plaindre, et que quand toi tu dis : « Réfléchis, si on laisse l’accès aux toilettes des femmes à n’importe qui qui prétend être une femme, c’est la porte ouverte pour tous les violeurs et les pédocriminels ! » tout le monde te répond : « Non, arrête, ce n’est pas vrai, c’est tiré par les cheveux, ces gens-là sont en souffrance etc. ».
Oui. Je ne dis pas qu’ils ne sont pas en souffrance. Mais on voit très bien ce que sont capables de faire certains violeurs, on ne va pas pour autant leur laisser la porte ouverte ! Enfin, je trouve que c’est surtout ce discours-là : ils sont toujours à se victimiser, ils sont toujours à abuser de l’empathie… des femmes, la plupart du temps… on se mettra avec eux et cautionner leurs agissements, qui au final ne sont pas innocents, on ne va pas se mentir non plus, pour certains ! Parce qu’ il y en a qui veulent juste se sentir mieux dans leur corps, mais ça laisse quand même la porte ouverte à des dérives qui me font, à moi, très très peur.
Et ce discours victimaire, justement, je pense qu’il faut le remettre en question, parce qu’on parle beaucoup des « crime contre les personnes transgenre ».
Oui. Bien sûr, il y a des crimes contre les personnes transgenre, et évidemment, ces personnes-là ont droit à la sécurité comme tout le monde…
Mais par contre, lors de la journée du souvenir trans, on s’est penchées sur les chiffres.
En fait, avec RadCaen, elle avait trouvé des sources qui recensaient tous les meurtres de personnes transgenres en France et aux États-Unis.
A partir de là, j’ai essayé de faire des statistiques inférentielles, pour voir si, vraiment, ces personnes-là étaient plus tuées que le reste de la population.
Donc je suis partie sur un chiffre qui était celui de l’Angleterre, je crois, qui donnait le pourcentage de personnes transgenres dans la population. Je l’ai appliqué aux populations françaises et américaines selon les données de l’INSEE et de la Banque Mondiale. Donc ça me donnait une estimation à peu près de la population transgenre.
J’ai regardé le nombre de meurtres en France et aux États-Unis des personnes transgenres. Et j’ai comparé ça au taux d’homicides pour les mêmes tranches d’âge (parce que j’avais les âges des personnes), pour les mêmes tranches d’âge et pour le même sexe. J’ai comparé ça aux taux d’homicides de la France et des États-Unis, que j’avais trouvé sur la Banque Mondiale.
…Et en fait, quand tu compares, ils ne meurent pas du tout plus que la population lambda !
Mais le problème, c’est que ça m’a demandé du temps, en fait, d’arriver à ces conclusions-là.
Et c’est dommage qu’on ne nous vende que le fait que les personnes transgenres sont plus agressées que la moyenne. Alors que pour débunker l’information, il te faille déjà un petit bagage statistiques, et en plus il te faille aller chercher un peu des données dans tous les sens ! Données qui ne sont pas forcément accessibles. Et c’est ça que je trouve dommage : c’est qu’on a un peu toutes les lumières qui sont mises sur ça, et on a aucune lumière qui est mise sur l’autre pensée, qui dit : « on va quand même vérifier l’information, et on va quand même voir si les choses que vous avancez sont vraies. »
C’est dommage, surtout qu’avec les réseaux sociaux on le voit, il y a énormément de cancel culture. Dès que tu dis un truc qui ne va pas dans leur sens, tu es une méchante terf, on va te bloquer, on va t’ empêcher de parler, et on va signaler ton post, parce qu’on va dire que c’est un appel à la haine !
Mais STOP, en fait. Il faut arrêter la pensée unique. De toute façon, pour pouvoir te faire une idée sur quelque chose, il faut que tu regardes de tous les côtés. Et je trouve qu’en ce moment, ils sont complètement en train de nous empêcher de faire ça, en fait ! C’est gravissime !
Et aussi, l’autre truc qui est dangereux, je pense, avec cette idéologie-là, c’est qu’on change la définition du mot femme, comme je le disais au début, mais la définition du mot femme, pour moi, elle est associé à tellement de choses, a tellement de combat, a tellement de souffrance, que je n’ai pas envie qu’on me l’enlève, ce mot !
Et en plus, ils sont gentils, mais on va te dire les «birthing people », « people who menstruate », etc… mais c’est juste une façade ! Tout le monde sait très bien qui sont ces personnes, tout le monde sait très bien qui donne la vie ! Donc il faut peut-être arrêter de chercher des paraphrases pour définir une femme.
Une femme, c’est une personne avec des chromosomes XX. Et tout le monde le sait ! Et juste pour leur faire plaisir, on va rentrer dans le délire, et dire « les personnes qui menstruent ? » Il faut arrêter de suivre cette masse-là, qui ne mène nulle part et qui est dangereuse pour les droits des femmes, et je suis profondément désolée qu’on soit si peu à s’en rendre compte.
RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces ? Est-ce que tu as perçu un danger dans ton entourage professionnel, personne ? Ou est-ce que tu as peur pour tes proches ? Ou, au contraire, est-ce que tu te sais en sécurité pour parler librement ?
Emilie – Je témoigne avec mon vrai nom, mais en fait, je ne me sens pas spécialement en sécurité, parce que sur mon compte à moi, féministe, c’est anonyme : je filtre mes abonnés et je n’accepte pas n’importe qui, justement parce que j’ai peur.
Je me suis fait bloquer de plein de pages, parce que j’ai commenté des choses.
Et ce qui m’a fait réagir, en fait, c’est tous les posts, quand j’ai commencé à m’intéresser un peu au féminisme, tous les postes où déjà j’ai lu : « privilège de femme cis » … et où je me suis dit, « mais… explique-moi ce que c’est, mon privilège, parce que moi je ne le comprends pas ! »
Alors, si je passe outre le fait que, parce que certains hommes de mon entourage le disent, que eux aimeraient connaître ce que c’est la grossesse, c’est peut-être notre seul privilège. Parce qu’après, on a : le viol, la prostitution, donc du viol tarifé. Le porno, donc du viol filmé. On a le harcèlement de rue, on a le plafond de verre, on a les injonctions à la maternité, donc quand je lis tout ça, je me dis que cette idéologie est une vaste blague, en fait !
Et il faut vraiment faire quelque chose, parce que bientôt, on va nous faire croire que c’est un privilège d’être une femme, et de se sentir bien dans son corps (enfin, aucune femme ne se sent bien dans son corps), de se sentir à peu près à l’aise avec son sexe et ses stéréotypes de genre qui y sont accolés… donc, déjà, il y a ça.
Ensuite il y a le « terfs, hors de nos luttes ! » Celui-là, il m’a vraiment fait réagir, pour le coup. Parce que, comment tu peux exclure d’un mouvement, qui se dit féministe, les principales concernées, qui sont les femmes ? Comment tu peux faire ça au profit d’HOMMES transidentifiés ? C’est… Enfin… Le truc implose à l’intérieur. Moi, je n’ai pas compris. Je n’ai pas compris.
Ensuite, ce qui me fait aussi beaucoup réagir, pour en parler, c’est tous les trucs que tu vois, notamment sur les réseaux sociaux, où on te dit que les lesbiennes doivent accepter les hommes transidentifiés. Autrement dit… les « femme à pénis ». Mais en fait, moi, quand je lis ça, j’ai juste l’impression que c’est mon oncle, qui est homophobe, qui va te dire que les lesbiennes, en fait, sont juste aigries, et qu’elles n’ont pas trouvé le bon mec, et que c’est pour ça qu’elles sont lesbiennes… Et bien là, c’est pareil, si tu veux forcer une femme qui aime les vulves, à relationner avec un pénis ! Et après, le pire de tout ça, c’est que c’est nous, qui dénonçons ça, qui sommes traitées de fachos ! Vraiment, expliquez-moi, parce que je ne comprends pas. Il y a donc ça, aussi.
Et ce qui me fait réagir aussi, c’est la cancel culture, tu vois, c’est un truc tout bête, mais des fois, j’ai l’impression qu’on met sur le devant de la scène des féministes (qui sont souvent libérales, on ne va pas se mentir), et qui vont parler de l’idéologie queer, etc.
Et en fait, du coup, je me mets à la place de mes parents, qui ne comprennent rien à tout ça. Ils voient ces féministes-là, qui soutiennent des hommes transidentifiés, ils vont se dire que les féministes sont folles. Et à côté de ça, on a des féministes qui sont hyper raisonnées, et qui sont logiques et qui ont du bon sens, comme toutes les féministes radicales, et qui elles, se font bloquer de partout, et qui sont victimes de la cancel culture, et qu’on n’écoute pas. Donc en fait je pense que ça dessert le féminisme, profondément, profondément ! Et que les gens pensent que tout le mouvement féministe, c’est le mouvement queer, alors que pas du tout ! Qu’on a tous perdu la tête et qu’on est tous en train de changer toutes les définitions… Il n’y a qu’à voir quand le « iel » a fait son entrée dans le dictionnaire, les réactions… Et tu vois des gens qui disent « Vite, que Zemmour monte au pouvoir pour contrer tout ça ! » Oui, c’est sûr… Super !
On va avoir Zemmour parce que tout le monde fait un amalgame entre les féministes et les queers, alors que pas du tout ! On n’est pas tous d’accord, et ça je me tue à le dire.
Et ensuite, moi j’ai peur qu’un jour, (et on le voit qu’il y a des vagues réactionnaires de partout), un jour il va y avoir une vague réactionnaire, et on va mettre tout le monde dans le même panier : les gays, les lesbiennes, les bi, les queers, les féministes. Tout le monde va trinquer juste parce que en fait, nous, on ne nous aura pas laissées parler, alors que je pense qu’on a un discours qui est beaucoup plus rationnel que la plupart des gens.
Ce qui me pousse à réagir, c’est le harcèlement que je vois partout, dont sont victimes, essentiellement Dora, Marguerite, Joanna, de « Bois mes règles », et aussi Anissia, quand elle avait parlé des thérapies de conversion, et qui s’était faite vraiment harceler aussi.
Et il y a aussi… moi, quand je dis des choses comme par exemple qu’une personne qui détient un pénis ne serait jamais une femme… J’ai déjà reçu des messages de haine, que je méritais de me faire violer avec du barbelé, et de me faire arracher les ovaires.
Voilà, il y a tout ça. Et en fait, je me dis, mais comment tu peux te dire féministe quand tu menaces des femmes, en fait ? C’est tout ce mouvement-là, qui paraît, c’est vrai qu’en surface, quand tu le vois de loin, il paraît très sympathique, très inclusif, c’est leur premier mot.
Mais en fait, quand tu regardes au final, il est très exclusif, parce que, dès que tu ne penses pas comme eux, c’est à la porte, et avec la violence.
Et tu te fais cancel. Donc c’est un truc que je trouve horrible.
RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ?
Émilie – Alors oui, des événements, j’en ai plusieurs. Déjà, il y a ce post, sur les petites filles, qui vraiment m’a dégoûtée.
Ensuite, on m’a partagé des posts sur des hommes transidentifiés qui récupéraient les serviettes hygiéniques usagées pour « calmer leur dysphorie » Haha. Ça m’a « un petit peu » écœurée.
Et aussi, il y avait un post que je crois avoir vu sur la page « radical abolitionism » où, en fait, c’était un homme transidentifié qui expliquait qu’il avait dit à son patron qu’il devait partir plus tôt parce qu’il avait des douleurs de règles… alors qu’il n’a pas d’utérus ! Et en fait, ça m’a énervée. Parce que je sais qu’il y a des femmes qui souffrent énormément d’endométriose, et je ne trouve pas ça drôle d’utiliser leurs souffrances comme une excuse. Ce n’est pas un jeu. Ce n’est pas drôle. L’endométriose, ça touche des millions de femmes, il y a des femmes qui ne peuvent pas aller travailler quand elles ont leurs règles, donc utiliser cette excuse des règles quand tu ne peux pas les avoir, c’est juste cracher à la figure des femmes. Ça m’a retourné le ventre. Voilà.
RDG – Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?
Ce que j’ai à ajouter, c’est tout simple, c’est : « Servez-vous de ce que vous avez entre vos deux oreilles, c’est-à-dire de votre cerveau.
Essayez de réfléchir, parce que c’est une idéologie qui est hyper dangereuse si on la laisse empiéter. Les droits des femmes vont reculer et tout, c’est ce que je disais au début, ce phénomène de transe identité c’est un serpent qui se mord la queue, et tant qu’on ne viendra pas à bout des stéréotypes de genre, personne ne sera à l’aise avec son corps. C’est ça, en fait, que j’ai envie de dire aux personnes qui soutiennent cette idéologie-là. Je pense qu’au fond on a la même envie : c’est que tout le monde puisse faire un peu ce qu’il veut. Mais juste, au lieu de renforcer ce qui nous fait du mal, luttez avec nous pour abolir ce qui nous fait du mal et ce qui vous fait du mal, aussi, à la base.
Et j’aimerais que les gens essayent un peu plus–bien sûr, sur votre page, la plupart des gens, la plupart des femmes sont d’accord avec ce qu’on dit là–mais j’aimerais vraiment que les gens commencent à réfléchir, à s’interroger sur toute cette idéologie, et qu’ils arrêtent de prendre le prêt-à-penser et qu’ils remettent, en question les chiffres et qu’ils essayent d’avoir une méthode de pensée qui est factuelle, en fait. Il faut toujours remettre en question les chiffres qu’on nous avance. On le fait pour les sondages à la présidentielle, et bien faites-le aussi pour tout ce qu’on vous avance, sur le discours victimaire des transactivistes, sur les histoires des droits des femmes, etc. Parce que ce n’est juste pas possible.
Et cette idéologie-là, en attendant, elle aide peut-être quelques personnes à se sentir mieux, quoique les statistiques prouvent que finalement, post-transition, on n’est pas plus heureux : le taux de suicide, je crois, et le même si ce n’est plus grave, je ne sais plus. Pour moi c’est juste un petit truc qui paraît être sympa, mais quand tu regardes derrière, ça ne changera pas les problèmes. Enfin, je ne sais pas…
Une petite fille qui va se faire exciser, elle ne va pas dire qu’elle est non-binaire pour y échapper, ça sera toujours le cas ! Donc les violences, elles sont sexuelles et il faut vraiment arrêter de penser que cette méthode-là, c’est la méthode qui va tout sauver, parce qu’elle ne change absolument rien, au contraire elle empire les choses.
S’il vous plaît signez la déclaration des droits des femmes basés sur le sexe www.womensdeclaration.com