Andréa – Je m’appelle Andréa, j’ai 19 ans. Je vis en région parisienne mais je suis née en Alsace à Colmar. Je suis étudiante en photographie et je témoigne aujourd’hui pour me faire entendre sur la question du transactivisme car, malheureusement, je trouve que les stories sur Instagram aujourd’hui ne sont plus suffisantes, et que ce n’est qu’une toute petite partie du militantisme pour faire avancer les choses.
J’ai commencé à me revendiquer féministe vers mes treize ans, à peu près à la même période durant laquelle j’ai commencé à m’intéresser à l’écologie et à la cause animale. Mais en réalité, cette révolte contre les injustices dans le monde, et plus particulièrement celle liée aux femmes, a existé très tôt en moi, sans forcément mettre de mots dessus.
Par exemple, quand j’étais petite, je ne comprenais pas que le rose soit associé aux filles et le bleu aux garçons. Ça me paraissait complètement infondé, voire ridicule.
Quand j’avais onze ans, j’étais un jour habillée en pantacourt (donc un pantalon qui arrive au niveau des genoux) et mon père a sorti un truc comme: “ Ah, il faudrait peut-être que tu commences à t’épiler les jambes.”. Je ne m’étais jamais souciée de mes poils auparavant et depuis ce jour, j’ai commencé à complexer dessus et à vouloir me mutiler en les retirant.
Plus tard, quand j’avais quinze ans et demi, j’ai vite compris, en me renseignant régulièrement sur les sujets féministes, que non, les poils sur une femme ne sont pas sales et que c’est normal d’en avoir à la puberté. J’ai donc décidé d’espacer énormément mes épilations, ce qui faisait que, par période, on distinguait pas mal mes poils, ce qui s’est accompagné de critiques et de remarques.
Autre exemple, quand j’avais à peu près seize ans, j’étais déjà beaucoup dans le militantisme, notamment sur Instagram. J’ai publié une photo de moi torse nu (et bien évidemment avec les tétons censurés pour éviter la suppression), en expliquant dans la légende de la photo qu’il n’y avait rien de vulgaire à ce qu’une femme soit torse nu, que c’est très injuste qu’on ne dise rien aux hommes, que le corps d’une femme n’est pas sexuel.
Ma mère l’a très vite appris et elle m’a dit que c’était vraiment pas bien ce que j’avais fait, que c’était de l’exhibition. J’ai alors répondu que non : quand mon père ou mon frère se mettent torse nu en public, ça n’a pas l’air de poser problème à qui que ce soit. Et en général, quand un homme se met torse nu en public, on ne va rien dire, même si légalement c’est interdit. Mais dans les faits, ce n’est pas quelque chose qui est reproché aux hommes. Elle m’a rétorqué que ce n’était pas pareil et à partir de ce moment-là, je n’ai jamais autant été révoltée. Je me suis donc davantage renseignée sur le féminisme. Ça a été un déclic pour moi.
Un an plus tard, quand j’avais 17 ans, je fréquentais un garçon de mon âge qui se revendiquait ouvertement féministe. Les poils ou même les règles, ça ne le dégoûtait pas. Je me sentais en sécurité avec lui. Et pourtant, un jour, il m’a doigtée sans mon consentement alors que je lui avais dit non, explicitement, bien avant qu’il commence.
Et à ce moment là, je me suis dit que si même avec un homme qui se revendique féministe je ne suis pas en sécurité, je ne suis en sécurité avec aucun homme.
Toutes ces expériences et plein d’autres que je viens de raconter m’ont poussée à questionner ce système patriarcal et à être féministe.
A ce stade là, je ne connaissais pas encore les différentes branches du féminisme.
Encore en 2020, comme la plupart des femmes de mon âge, je tenais des propos comme “Les femmes trans sont des femmes.”. J’ai été pro LGBT et soi-disant inclusivité parce que je pensais bien faire et que penser autrement que comme ça était problématique. Je pensais réellement que c’était une bonne chose. À tel point que la première fois que je discutais avec une féministe radicale sur Instagram, Pauline, une photographe, je l’ai unfollow car ce qu’elle me disait remettait totalement en question ce que j’avais entendu jusqu’à maintenant.
À cette époque, je suivais aussi Dora Moutot, et même si je ne partageais pas son point de vue sur le genre, je continuais de la suivre car elle parlait de plein de sujets qui étaient intéressants.
Mon peak trans s’est produit cette année en 2022, lorsque j’ai visionné une interview de Dora Moutot qui expliquait toute la problématique autour des propos qu’elle a tenus de A à Z. J’étais encore pro-trans, mais je me suis surprise à être d’accord avec absolument tout ce qu’elle a dit.
J’ai donc complètement changé d’avis sur la question du genre et de la transidentité.
Désormais, je suis d’avis que chacun devrait pouvoir exprimer sa personnalité sans associer ça à un genre, car le genre ne fait que rajouter des cases qui sont, selon moi, non seulement oppressantes, mais aussi divisantes.
C’est oppressant car voir des hommes se mettre en talons, se maquiller, puis prétendre qu’ils sont des femmes, est insultant, car ça réduit le fait d’être une femme à des stéréotypes qui nous oppressent. Car, encore aujourd’hui, en tant que femme, lorsqu’on ne remplit pas tous les critères stéréotypés qui nous sont associés, nous pouvons nous prendre des remarques du style : “Tu te délaisses.”.
Je trouve que c’est divisant et les cases de la communauté LGBT en général le sont.
De plus, on ne peut pas “se sentir” quelque chose qu’on n’a jamais été. C’est matériellement et scientifiquement impossible.
Pour les trans activistes, être femme ou homme ne sont que des concepts. Sauf que le sexe n’est pas un concept mais une réalité.
Alors oui, je reste d’avis que les personnes trans existent et que leur malheur est bien là. Je ne leur souhaite en aucun cas de se faire harceler. Et bien sûr, ces personnes ont besoin d’aide.
Malgré ça, le mouvement transactiviste est encore aujourd’hui gorgé de beaucoup de contradictions. Par exemple, on dit beaucoup qu’une personne transgenre est née dans le mauvais corps. Du moins, c’est ce que certaines personnes trans prétendent. Alors qu’en même temps, ils disent que ce sont deux choses distinctes.
Il y a plein de petites contradictions comme ça dans ce mouvement en général.
C’est toutes ces raisons qui m’ont amenées à être féministe radicale et non juste féministe “intersectionnelle”, comme certaines personnes peuvent le nommer, ou “libérales”. J’ai vraiment envie de me battre pour les droits des femmes jusqu’au bout. Et malheureusement, aujourd’hui, le genre est un obstacle aux droits des femmes.
Je pense que cette idéologie est une menace pour les femmes car elle les empêche d’avoir des espaces spécifiquement réservés à elles. Même dans certaines prisons, des violeurs qui se prétendent femmes se retrouvent dans les mêmes cellules que des femmes. À partir de ce moment-là, la sécurité des femmes, qui n’était déjà pas acquise, régresse.
Si tout le monde peut se prétendre femme, alors les statistiques sur les femmes et les violences faites aux femmes sont totalement faussées.
Aussi, dans le sport, le transactivisme est un problème car des femmes se retrouvent en compétition avec des mâles qui se prétendent femmes. Donc l’issue des résultats n’est plus du tout juste. S’il y a des catégories basées sur le sexe, ce n’est pas pour rien.
C’est une menace pour les lesbiennes, car refuser de coucher avec un homme transidentifié est vu comme transphobe, alors qu’on parle bien d’orientation sexuelle et pas d’orientation de genre.
C’est une menace aussi pour les enfants, notamment les adolescents, car c’est toujours une période très difficile, l’adolescence, au niveau du rapport au corps, au niveau de l’acceptation de soi. N’importe quel adolescent qui est un peu perdu pourrait mettre ce mal-être sur le dos de la transidentité en voyant sur les réseaux sociaux que se sentir mal dans son corps, c’est probablement de la transidentité, alors qu’il y a plein d’autres raisons qui peuvent pousser les adolescents à se sentir mal avec leur corps.
Dans le pire des cas, ça peut les inciter à prendre des hormones dans le dos des parents. Parce qu’aujourd’hui, avec internet et certaines associations trans, c’est hyper facile de se procurer des hormones sans autorisation parentale. Et c’est même normalisé qu’un enfant prenne des hormones, même avec l’autorisation parentale, alors qu’il y a un âge légal pour se faire tatouer, par exemple. C’est bien parce qu’il faut attendre une certaine maturité pour prendre une décision qui aura un impact définitif sur sa vie et sur son corps.
Je pense aussi que c’est un danger pour la société car on change les définitions des mots. Et de façon générale, si un mot peut englober tout et n’importe quoi, plus rien n’est clair, ça devient le flou total.
Maintenant, quand on va voir un psy pour dysphorie de genre, c’est facile d’avoir accès à une transition hormonale et physique. C’est devenu la solution par défaut, alors que la dysphorie peut être due à plein d’autres choses.
Et de façon générale, je trouve que prendre des hormones, c’est se déconnecter de sa vraie nature, et surtout c’est super dangereux.
Donc n’il y a même pas seulement que les transitions hormonales qui me posent problème, mais la contraception hormonale également. Aujourd’hui, en tant que femme, quand on veut avoir une contraception, ça nécessite souvent de prendre des hormones et donc d’avoir énormément d’effets secondaires.
Aujourd’hui, beaucoup de femmes ont de la peine à arrêter la pilule ou à revenir à un cycle “naturel” parce qu’il y a énormément d’effets secondaires et ça modifie énormément le corps.
Je suis aussi pour une sorte de retour à la nature par rapport à tout ce que nous ingérons chaque jour dans notre corps et aussi dans le fonctionnement de la société en général.
Rebelles du genre – Qu’est ce qui t’a décidé à témoigner sous ta réelle identité ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions ? Est-ce-que tu as déjà été menacée ou est-ce que tu aurais, éventuellement, rencontré des dangers par rapport à cette question là ? Ou est-ce que, finalement, tu témoignes de façon ouverte parce que tu sais que tu ne cours absolument aucun danger ?
Andréa – Je ne pense pas que je cours “aucun danger” dans le sens où, en s’exposant sur les réseaux sociaux avec cette opinion ouvertement, on peut se prendre des menaces, on peut se faire harceler, recevoir des messages de personnes qui, tous les jours, vont nous dire : “C’est pas bien de penser comme ça car c’est transphobe”.
Mais j’ai quand même décidé de témoigner sous ma réelle identité car je n’ai pas envie que ça soit un tabou, de simplement rétablir des vérités qui devraient simplement être du bon sens, selon moi.
J’estime que je n’ai pas à avoir honte de mes propos.
Oui, j’ai déjà subi des pressions à cause de ça. J’ai reçu un message me traitant de transphobe et de plein d’autres noms ignobles, juste parce que je suis critique du genre alors que je n’ai attisé la haine envers personne. Je ne suis pas pour que les personnes trans se fassent harceler. Encore une fois, ce n’est pas du tout mon but. Pour moi, tout le monde est victime de cette idéologie : les personnes qui ressentent la dysphorie comme les femmes, surtout.
Mais voilà, j’ai affiché mes opinions critiques du genre et j’ai reçu ce message suite à un débat que j’ai eu avec une ancienne amie, qui n’a pas été d’accord avec moi, qui m’a bloquée, et qui a sûrement envoyé un de ses potes m’envoyer un message pour me faire peur, je pense.
J’avais partagé je ne sais plus quel post concernant la transidentité. À partir de là, cette amie a pris connaissance de mes nouvelles opinions (parce que c’est très récent, ça ne fait que depuis cette année que je me considère comme féministe radicale et critique du genre.). Et de là, elle n’a même pas pris le temps d’écouter les vocaux que je lui avais envoyés pour lui expliquer mon point de vue.
Directement, elle m’a traitée de transphobe et m’a dit qu’elle était super déçue. Elle m’a bloquée et je pense que c’est un de ses amis qui est venu me contacter par message parce qu’elle est beaucoup dans le milieu militant, dans les manifs pour le climat, dans tout ça… Et je pense qu’elle a un gros réseau de personnes, disons.
Au delà de ça, j’ai perdu contact avec une dizaine de connaissances et amies car je suis devenue critique du genre. Ces personnes ont vu que j’étais abonnée à Marguerite Stern sur Instagram, que je re-partageais les posts, et que c’était soi-disant super violent. Alors que, selon moi, ce qui est super violent, c’est qu’on essaye d’effacer le mot femme et que les hommes puissent s’introduire partout où ils veulent juste en prétendant qu’ils sont des femmes. Sachant qu’on se sent déjà pas en sécurité dans la rue, si on peut plus se sentir en sécurité nulle part, ça m’inquiète, tout simplement.
J’ai aussi un jour publié une story sur Instagram en faisant une sorte de mise à jour des opinions qui avait changé en moi. Il y en avait par rapport au transactivisme, mais aussi par rapport à d’autres sujets sociétaux. Et suite à ça, j’ai perdu plus d’une centaine d’abonnés parce que dedans, bien évidemment, j’expliquais que pour moi, une femme est une femme et que, selon moi, il faut supprimer le genre car il oppresse absolument tout le monde, les hommes comme les femmes. C’est ça le pire, ça oppresse littéralement tout le monde.
Et suite à ça, j’ai perdu plus d’une centaine d’abonnés, ce qui n’est en soi pas une grande perte, parce que si ces personnes se désabonnent à cause d’une différence d’opinion, c’est qu’elles ne valaient pas tant le coup que ça.
Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marqué concernant la transidentité ou le transactivisme ?
Andréa – Je n’ai pas forcément d’anecdote à part que j’ai été très choquée de recevoir des insultes de la part de quelqu’un par message. Ça s’est produit qu’une seule fois, mais je n’avais jamais vraiment conscientisé ce que ça faisait de se prendre des insultes à cause d’une certaine opinion, de se faire harceler. J’avais beaucoup vu que Dora Moutot et Marguerite Stern, par exemple, s’étaient faites harcelées, j’en avais conscience. Mais le fait que ça m’arrive à moi, ça m’a énormément choquée.
C’est vrai que pendant les quelques jours qui ont suivi ça, j’étais extrêmement stressée. Je me suis dit : “Mais si ça se trouve, ce message va se suivre de plein d’autres messages, de plein d’autres personnes et ça peut prendre une énorme ampleur.”.
Moi qui fait de la photo, j’ai besoin de visibilité, aujourd’hui, sur les réseaux sociaux pour promouvoir mon travail. Si énormément de personnes commencent à me “cancel” et essayent de réduire ma visibilité, ce n’est pas bon pour moi professionnellement. Plus tard, étant donné que je veux être à mon compte, la visibilité sur les réseaux sociaux, c’est absolument primordial.
Au-delà de ça, c’était juste très choquant de se faire insulter comme ça. Ni bonjour, ni rien du tout, mais je me prends juste des insultes.
Rebelles du genre – As-tu quelque chose à ajouter ?
Andréa – Oui, je pense que, pour conclure, il faut se libérer du genre et le supprimer à long terme. J’ai conscience que c’est quelque chose qui est super ancré dans la société et que ce n’est pas du jour au lendemain que ça va disparaître. Mais pour moi, il faut tout faire pour le supprimer petit à petit pour qu’il soit totalement éradiqué. On devrait pouvoir se sentir libre de porter ce qu’on veut, de faire le métier qu’on souhaite, peu importe notre sexe. Et ça serait vraiment libérateur pour les femmes et pour les hommes, pour tout le monde en fait, de supprimer le genre. Sauf pour l’industrie pharmaceutique, évidemment, qui a son compte à gagner là-dedans.
Rebelles du genre – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît, signez la Déclaration des droits des femmes basées sur le sexe