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Rebelles du genre – Épisode 55 – Lilou

Rebelles du genre – Bonjour, aujourd’hui on va faire une interview un peu particulière, puisque c’est Lilou qui va parler, Lilou qui est une amie à moi, et que je suis particulièrement heureuse d’interroger aujourd’hui, et de recevoir dans notre podcast.

Lilou –  Je m’appelle Lilou, j’ai 18 ans. Je suis une activiste féministe radicale et étudiante en sociologie en région parisienne, depuis septembre.

J’ai fait plusieurs années de danse orientale. La danse est une pratique qui me passionne, qui me transporte, et j’exprime ma colère aussi, en dansant, ma peine, ma douleur, mon indignation. Je vis la danse comme une expérience collective sorore, forte et fédératrice, mais aussi comme profondément intime et corporelle. Se mouvoir d’une telle façon, diriger ses gestes pour réaliser un mouvement ou en enchaîner plusieurs, de manière fluide ou fragmentée. Je me rends compte que mes années de pratique de la danse m’ont permis de mieux connaître mon corps, d’expérimenter la liberté de mouvement dont nous sommes si souvent privées, en tant que femmes, dans les sociétés patriarcales. Et, à mes yeux, des espaces et des temps entre femmes uniquement, par exemple consacrés spécifiquement aux danses ou bien à d’autres activités, pourraient être bénéfiques pour contribuer à la libération des femmes. 

Et j’en ai fait l’expérience quelquefois, et c’est merveilleuse.

Du coup, je dirais que ma conscience féministe, je la développe depuis que je suis petite, mais sans avoir pu, réellement, mettre des mots sur ce que je vivais, ce que j’observais des conditions et des droits des femmes de mon entourage social et familial.

Avec ma sœur et mes cousines, on était très proches durant notre enfance, grâce à nos mères, elles-mêmes sœurs. Nous avons pu tisser des liens sorores et solides. On a vécu des moments extrêmement forts, ce qui fait aussi que je suis aujourd’hui une femme qui pense que les femmes peuvent réussir à se reconnaître, à s’allier, à se rassembler et à s’organiser, malgré la division et la rivalité que les hommes nous imposent et nous font intérioriser. Aujourd’hui, je me dis qu’heureusement j’ai été éduquée par une mère qui a de nombreuses réflexions féministes et qui voulait nous permettre, à ma soeur et à moi, de nous faire notre propre vision du monde, détachée des stéréotypes et des étiquettes sociales qui collent à la peau des femmes. C’est sûrement aussi grâce à cela que je construis mon esprit critique, petit à petit, depuis mon enfance. 

Et je pense que cet éveil à la critique du genre et elle apprentissage de savoirs assez distanciés des normes sociales et du cadre académique (j’ai fait l’école à la maison pendant 5 ans) a pour conséquence, actuellement, que je m’interroge sur les faits sociaux, que je cherche à comprendre les “pourquoi” des phénomènes que j’observe et identifie les croyances, dogmes et arnaques masculinistes qui colonisent de plus en plus nos espaces de filles et de femmes.

Ce qui me semble aussi important de souligner, c’est que ma mère nous a toujours dit, à ma sœur et à moi, qu’elle nous accepte comme on est, que nous pouvons ne pas être conformes aux stéréotypes et aux modèles sexistes. 

Elle nous a appris à connaître notre corps, à l’écouter, à l’aimer, à en prendre soin, à dire quand on a mal.

Je me rends compte maintenant, qu’en tant que fille dans une société qui hait, objectifie et sexualise les corps des filles et des femmes, j’ai eu beaucoup de chance d’avoir été éduquée comme je l’ai été, et je remercie, du coup, ma mère.

J’ai commencé à militer lorsque j’ai rencontré les femmes de l’association Osez Le Féminisme ! en septembre 2020 lors d’une action poignante qui a résonné fort en moi, intitulée “Je te crois”. J’avais 16 ans.

Puis j’ai fait la connaissance des activistes de la collective l’Amazone Avignon, tellement badass, dont j’admirais les collages depuis quelque temps.

La découverte de ces formes d’engagements politiques pour les droits des femmes m’a énormément enrichie. 

Elle est allée de pair, ou plutôt de mère, avec la découverte de la sororité politique, d’expérience en expérience, de partage en partage, d’actionne en actionne entre femmes.

J’ai compris que les liens que peuvent nouer les femmes entre elles sont incroyablement puissants.

Et cela m’a fait du bien.

Et à partir de là, j’ai enfilé mes lunettes violettes de féministe en apprentissage, qui appréhende la monde avec curiosité et détermination.

Du coup, par la suite, ça m’a fait comprendre que ces formes d’engagement politique pour les droits des femmes me paraissaient vraiment nécessaires, et je comprends que toutes les femmes ne peuvent pas s’engager de cette manière-là. Mais moi, en tout cas, c’était c’était vraiment ce dont j’avais besoin à ce moment-là, ça me parlait, et du coup j’ai pu découvrir à ce moment là d’autres formes de sororité, plus politiques, à travers les actions, à travers les caféministes, les discussions qu’on a eues, les manifestations, aussi. Et en fait, ça m’a confortée dans l’idée que, malgré la domination patriarcale, les femmes peuvent quand même réussir à nouer des liens qui sont forts, qui peuvent inspirer d’autres femmes, et qui nous rendent puissantes et qui.. qui oui, qui nous permettent aussi de surmonter les difficultés qu’on a, chacune dans notre quotidien. Tout s’enrichit mutuellement.

Et c’est à partir de là, du coup, que j’ai pu aussi en apprendre de plus en plus en me renseignant par des podcasts, des articles, notamment sur Instagram, également. 

RDG – Peut-être aussi par la formation féministe que tu as pu avoir dans Osez le féminisme, avec notamment les feminist camps?

Lilou – Oui, le feminist camp d’octobre 2021 m’a aussi permis  de connaître des femmes de toute la France, ce que je n’avais jamais expérimenté jusqu’alors et de comprendre, en fait, qu’il y avait plusieurs dimensions d’oppression patriarcale, enfin dans plusieurs sphères de la vie des femmes, et donc qu’on pouvait spécifiquement réfléchir à certains sujets, comme l’écoféminisme ou comme la lutte antiraciste, avec le féminisme… comment elle s’imbriquent. Et de partager aussi d’autres moments qui font du bien, enfin qui… oua qui nous lient et qui nous donnent de l’espoir pour continuer. Surtout parce que on pourrait se dire qu’avec toutes les violences que les femmes peuvent subir dans plein de sphères différentes, bah on pourrait ne plus avoir d’espoir pour continuer à militer, ou  justement on va être découragées, et c’est totalement légitime… mais justement ces moments-là, je pense qu’ils sont très fédérateurs et ils nous permettent de continuer.

RDG – De garder l’espoir?

Lilou – Oui, de garder l’espoir,  de… de ne pas céder.

RDG – De résister.

Lilou –  Oui, j’ai participé aux réunions mensuelles dans un premier temps. J’avais du temps que je voulais passer à m’investir dans cette association-là, parce que je sentais que j’y étais bien, j’avais été super bien accueillie, et que j’étais en surtout en accord avec les valeurs,  parce que je trouve que les valeurs, c’est très important. Et, même si j’étais en questionnement, parce que je débutais,  au fur et à mesure j’ai commencé à faire partie du conseil d’administration, et ça m’a permis aussi de partager des idées que j’avais, de mettre en commun des projets que plusieurs femmes pouvaient avoir, pour les réaliser concrètement.

Et puis j’ai aussi intégré le conseil d’administration national et ça donne une plus grande part de responsabilité vis-à-vis des membres de l’antenne locale, pour essayer aussi de faire le relais. Et ça m’a permis, par la suite aussi, d’intégrer un groupe de travail spécialement centré sur l’abolition du système porno-prostitueur, ce qui était un enjeu que je ne connaissais pas du tout avant et qui m’a complètement révoltée. Je me suis dit “Comment c’est… comment c’est possible que, dans une société qui se dit démocratique, et même à l’échelle mondiale, dans plein d’autres pays qui se disent défenseurs des droits humains, qu’il y ait la moitié, enfin même plus de la moitié de la population, à savoir la peuplesse des femmes, qui soient vendues, marchandisées, achetées? Qu’il y ait également du proxénétisme?” 

Enfin, tout ça, ça m’a complètement sidérée, et je me suis dit : “Je ne peux pas rester impuissante face à ça, en fait. C’est juste impossible. Et le fait d’intégrer le groupe abolition, je me suis dit que c’était un bon moyen de mettre ma motivation en commun avec d’autres femmes, agir par des campagnes sur les réseaux sociaux de sensibilisation, des actions plus “coup de poing”, par exemple pour le 25 novembre, voilà. Du coup, j’ai cheminé petit à petit.

RDG – Je vais te poser une question complémentaire. En fait, il y a un point que tu n’as pas développé, mais qui, à mon avis, est important : c’est le fait que quand tu as été, finalement, à l’âge un peu crucial, à l’âge où les enfants rencontrent les premières violences, en fait, notamment pornographiques, toi, tu étais à l’abri, puisque tu n’étais pas à l’école. Est-ce que tu peux développer?

Lilou – Pendant les 5 années de primaire, mes parents, donc, ont décidé de nous donner l’instruction à domicile, avec ma sœur. Et je n’étais pas confrontée au discours, au comportement des autres enfants qui étaient à l’école. Et une grande partie de certainement exposés à des images pornographiques. Le fait qu’on soit à l’écart de ça, ça m’a aussi protégée.

RDG – Moi je ne peux pas m’empêcher de penser que, quand on sait qu’en CM2, un garçon sur deux a déjà vu un film pornographique, et aussi de très nombreuses filles… Ne pas fréquenter beaucoup d’enfants qui sont victimes de ces violences-là, ça permet aussi, pendant ces années où on construit son identité d’être protégée relativement. Et c’est peut-être ce qui fait que, du coup ça t’a gardé intacte cette capacité de rébellion que tu as, et qui, aujourd’hui, est à mon avis une des sources de ton militantisme? Le fait d’avoir brutalement découvert le monde à un moment où tu étais déjà capable de comprendre qu’une violence est une violence en fait. Parce que quand on est petit, on ne fait pas la différence entre les choses, et on ne comprend pas que c’est de la violence. Et on s’habitue. Et toi tu n’étais pas habituée.

Lilou – Oui, c’est ça. Je n’étais pas du tout… même ma mère, avec ma sœur, nous a toujours expliqué que la violence ne réglait aucun problème, et que ça ne servait à rien. Et pire que ça : que c’était complètement destructeur et contre-productif. Même, du coup, l’arrivée au collège, ça fait un peu un effet de claque, en fait, qu’on se prend dans la figure, parce que je sortais un peu du monde des bisounours, si on peut dire ça comme ça, et du coup c’est assez violent quand on se rend compte que, finalement, c’est comme si j’avais un peu vécu dans une bulle. Même si j’avais des amis qui étaient à l’école, et je les voyais, et on passait du temps ensemble. Mais j’avais quand même cette sorte de barrière, un peu protectrice, qui a fait que quand j’ai su qu’il y avait autant de violences qui étaient commises contre les enfants, et particulièrement contre les filles, et également contre les femmes… ben c’était juste inimaginable. Et je me suis dit : “bah en fait, je ne peux pas laisser passer ça, quoi! Enfin, je ne peux pas vivre ma vie comme si je connaissais pas.” Alors que j’en prenais conscience enfin, voilà.

RDG –  Je pense que ça a préservé ta capacité d’indignation, en fait! En ce qui concerne, donc, le genre, la notion du genre : à quel moment tu t’es dit que tu étais critique du genre? Est-ce qu’il y a eu un moment où tu as eu une révélation? Qu’est-ce qu’il s’est passé pour que tu te dises aujourd’hui que tu es critique du genre?

Lilou – Il n’y a pas eu un déclic. C’est plus une suite d’événements qui m’ont fait prendre conscience que le féminisme est forcément critique du genre. Je pense ça à l’heure actuelle, mais c’est quand même assez récent. Même si en fait, je me dis : “Pourquoi créer d’autres cases, d’autres catégories, pour enfermer les filles et les garçons, donc les enfants, dès le plus jeune âge, alors qu’on pourrait tout simplement laisser les enfants jouer à ce qu’ils veulent et laisser les enfants se comporter comme ils veulent?” 

Critique du genre, sans nommer ça comme ça, mais je l’ai aussi pensé assez jeune. Mais là, c’est vraiment grâce à l’engagement associatif, et au militantisme et aux actions : j’ai pu comprendre les enjeux, avec la montée du transactivisme. Qu’en fait il fallait réaffirmer le fait qu’on soit critiques du genre, que ça n’allait pas de soi. Et j’ai aussi appris, notamment par les réseaux sociaux, qu’il y avait d’autres courants féministes, qui ne se disaient pas du tout abolitionnistes des stéréotypes sexistes de genre, mais qui prônaient un discours ultra-libéral…

RDG – …Avec bien sûr tout ce qui est le BDSM, la pornographie!

Lilou – Voilà ! Le non-abolitionnisme qui m’a complètement consternée… Et oui, par rapport à l’usage, aussi, des mots… La première fois que je suis tombée sur l’expression “travail du sexe”, je…  ça m’a laissée assez perplexe, et je me suis dit : “Ok, il y a certaines personnes qui se revendiquent du féminisme qui utilisent ces termes-là”… Moi je voyais que dans OLF, on utilisait “abolitionniste” et j’avais vu les campagnes qui avaient été menées par rapport à ça, contre à l’industrie pornographique aussi, et je me suis dit : “Bah déjà, la loi, qu’est-ce qu’elle dit?” Et la loi de 2016 est clairement abolitionniste. Donc, déjà par rapport à ça, ça m’a un peu mis la puce à l’oreille, et je me suis dit : « Comment peut- on prôner le libre choix, alors que la majorité des personnes prostituées, en fait, c’est des femmes? La majorité des actes sexuels, c’est des viols. Et en fait, les femmes qui sont les plus victimes de cette industrie-là sont des femmes précaires, marginalisées, racisées, étrangères, qui migrent. Enfin, l’âge d’entrée, entre 13 et 14 ans à l’échelle mondiale…” Je me suis dit : “Comment on peut oser défendre une industrie, qui en plus est multimilliardaire, alors qu’en fait il s’agit d’humaines,  d’enfants et de femmes, quoi?” Ça m’a paru complètement lunaire.

Je voulais évoquer aussi la découverte de Typhaine D, merveilleuse artiste, comédienne qui a créé la féminine universelle, qui est un mode de langage qui a pour but de féminiser la langue. Pour moi, en fait, ça a joué aussi un rôle important dans mon cheminement féministe depuis deux ans, parce qu’on m’a appris au collège, comme toutes les autres, que le masculin l’emportait sur le féminin, et toutes les règles de grammaire mascouillinistes. En fait, de l’entendre dire de la bouche d’une femme, qui exprimait explicitement que le langage était masculiniste, pour telle telle telle raison… Et qu’en fait ce n’était pas du tout neutre, comme on avait pu nous le faire croire, que c’étaient les académiciens du 17e siècle qui avaient instauré ces règles de masculinisation du langage… C’est quelque chose que j’aurais aimé savoir plus tôt. Mais que, déjà, je suis très heureuse de connaître maintenant.

Parce qu’on peut se dire : “Oui, l’école c’est trop bien, on nous apprend à parler, on développe plein de compétences, on a des liens sociaux aussi qui se créent grâce à cette instance de socialisation. Mais il y a quand même ce problème de la langue, que je ne considérais pas du tout avant, et que maintenant je prends en compte, parce qu’en fait le langage, comme Typhaine le dit,  structure la pensée. Et on ne peut pas se projeter dans l’avenir si on n’a pas les mots qui nous permettent de voir notre avenir, de voir comment on voudrait être plus tard, d’envisager des professions qui pourraient nous intéresser, mais en fait on ne sait même pas qu’elles existent pour les femmes. Je pense par exemple “autrice”, des mots de notre matrimoine qui, justement, ont été ressortis du passé, et qui, justement, étaient utilisés avant cette Académie française, et qui, en fait, ont été complètement effacées. Et c’est ce qu’explique très bien Titiou Lecoq dans son essai : “Pourquoi l’histoire a-t-elle effacé les femmes?” Et en fait, ce n’est pas l’histoire qui a effacé les femmes, c’est les hommes! Et tout ce qu’ils ont institué et organisé. Oui, ça fait mal, aussi, de comprendre qu’on n’existe pas dans le langage et on est quand même censées construire nos vies et avancer, alors que tout, dans le langage, est créé pour les, pour les hommes, quoi!

RDG – Pourquoi penses-tu que l’idéologie du genre est une menace pour les droits des femmes, pour les enfants ou pour la société, ou pour la démocratie?

Lilou – Déjà en fait je me suis questionnée par rapport à ça, et en fait avant même d’avoir compris que l’idéologie transidentitaire était une menace certaine pour les droits des femmes, l’acronyme LGBTQ+ me posait déjà problème. Et en fait, je me disais : “C’est quand même vraiment bizarre et tordu de mettre sur le même plan, le combat contre l’homophobie et contre la transphobie, et pour les personnes trans, d’en faire en somme, en faire des luttes indissociables. Je me disais : “Mais pourquoi?” Parce que pour moi, de ce que j’avais compris en tout cas, c’était quand même deux choses complètement distinctes, entre ce qu’on prétendait être, comment on voulait qu’on se définisse, et l’orientation sexuelle. 

Donc du coup, je me disais : “Mais pourquoi mettre toutes ces lettres accolées, enfin, les mettre ensemble, quoi?” 

Et du coup, entre-temps, je me suis questionnée, j’ai lu des livres, des articles, des communiqués, des tribunes. J’ai écouté aussi des podcasts, notamment ceux de Marguerite Stern, qui donne la parole aux femmes, parce qu’en fait, parce que c’est elles que j’ai envie d’entendre, et que malgré le fait que j’ai quand même fait l’école à la maison, bah j’ai pas échappé aux cours d’histoire du collège et du lycée, relatant l’histoire des hommes, en effaçant les femmes. Et en fait, j’ai compris aussi, progressivement, ben les derniers mois, les dernières années, là, qu’en fait l’idéologie de genre, elle est profondément homophobe et donc lesbophobe. Parce que, pour ne donner qu’un exemple, il est courant de lire ou d’entendre que les lesbiennes peuvent avoir des pénis, que les lesbiennes doivent aimer les femmes qui ont des pénis… ça, ça m’a complètement retournée quand j’ai lu ces phrases-là, notamment sur les réseaux. Je me suis dit : “Mais il y a rien qui va! C’est complètement justement contre l’homosexualité! Parce que si tout le monde doit aimer tout le monde, dans ce cas-là, il n’y a même plus d’orientation sexuelle… c’est, c’est… ouais, c’est complètement dangereux à ce niveau-là!

Et par rapport aussi aux enfants, je me suis dit que je ne pouvais pas tolérer une idéologie totalitaire qui, en plus, se répand de plus en plus, et qui vise en majorité des jeunes, qui mutile plus spécifiquement des adolescentes et des jeunes femmes encore en développement, encore en croissance. Parce que j’ai aussi appris que le cerveau se développait jusqu’à 25 ans, donc je me dis : “Pourquoi des traitements hormonaux, des transitions, seraient autorisés sur la simple autodétermination des enfants avant 25 ans?” 

Et donc je me suis dit, en fait, permettre à des adolescentes de prendre des hormones pour effectuer une transition médicale ou pire les y inciter sous prétexte qu’elles seraient nées dans le mauvais corps… bah en fait, c’est complètement absurde pour moi.

Et en fait, la société patriarcale dans laquelle on vit, elle est problématique, ainsi que toutes les conséquences qui en découlent, en termes de violences machistes. Et donc si en fait on ne  prend pas en considération la structure sociale, on ne peut pas expliquer pourquoi les individus auraient tel goût, telle envie, tel choix, tel comportement. 

Il y a une dimension sociologique à analyser, qui est pour moi nécessaire. Et en fait je me rends compte qu’on est obligées de rappeler aujourd’hui, que noues sommes nos corps : il n’y a pas une essence, qui serait l’esprit, et le corps, quelque chose de simplement matériel et utile. On est un tout!

RDG – Je reconnais bien là quand ton goût pour la philosophie, je vois déjà le moment où je vais illustrer ce témoignage avec le fameux collage “noues sommes nos corps” que tu avais fait l’an dernier.

Lilou – En fait, je me dis, oui, qu’une fois qu’on a aussi compris certains aspects, on peut réfléchir aux mécanisme sociaux qui s’opèrent et au rôle des instances de socialisation dans la construction des normes de féminité, en se demandant pourquoi elles sont maintenant telles qu’elles sont. Et même historiquement, c’était pas les mêmes il y a 200 ans, il y a 300 ans, au Moyen-Âge… Et ça montre bien, en fait, qu’elles varient au cours du temps, et donc elles ne sont pas naturelles ou biologiques, comme pourraient le dire certains idéologues du genre.

Je voulais aussi évoquer que, dans tous les cas, charcuter des corps en bonne santé ou bloquer la puberté – qui est quand même naturelle – d’adolescentes ou d’adolescents, en faisant totalement abstraction, premièrement, de l’état de santé psychologique des enfants et également des normes sociales et des attentes qui pèsent sur elles et eux, ne fait d’aucune personne quelqu’une de progressiste ou de bienveillante ou bienveillant. Alors que les transidentitaires essaient de nous persuader du contraire.

RDG – Oui, parfois la bienveillance c’est savoir dire non, en fait.

Lilou – D’autant plus que la réalité, c’est que les conséquences des transitions médicales, sur le développement tant physique que psychologique des jeunes concernés, sont en fait, irréversibles. Et maintenant on sait que c’est prouvé que les conséquences sont irréversibles. Que des psychiatres, que des médecins se permettent de dire dans des articles, dans des livres, même à l’université pour des profs qui défendraient l’idéologie du genre, que ces personnes-là se permettent justement de prôner le contraire, et de faire croire à des enfants (c’est de la manipulation) que c’est réversible, qu’ils pourront reprendre leur puberté 5 ans après la prise d’hormones… en fait, c’est criminel, quoi!

RDG –  J’ai même lu récemment que beaucoup de filles qui subissent une mastectomie pensent, en fait, que quand elles reprendront des hormones féminines ou qu’elles arrêteront la testostérone, leurs seins vont repousser. Et évidemment, le jour où elles s’aperçoivent que, bah non, en fait, elles ont infligé à leur corps… enfin “on” a infligé à leur corps des dommages irréversibles. C’est dramatique.

Lilou – Surtout que les enfants sont en situation de vulnérabilité. Et donc en plus, en tant qu’adultes… Enfin, selon moi, les adultes ont aussi une responsabilité vis-à-vis des enfants, en général, dans le domaine de la santé, et savoir que, justement, des adultes les manipulent à des fins financières ou idéologiques… bah c’est complètement aberrant! 

RDG – Oui. C’est incroyable. 

Lilou – Je ne pensais pas être confrontée à ça un jour. Enfin…

RDG – Oui, c’est dur.

Lilou – Je voulais aussi ajouter que devoir sans cesse répéter que les femmes n’ont pas de pénis et que les lesbiennes n’aiment pas les pénis, en fait, c’est une forme de rabaissement intellectuel, comme le dit Marguerite Stern. Puisqu’en fait, toute personne sensée en a bien conscience, et c’est la biologie. Il n’y a pas besoin de faire des études de science poussées pour le savoir. Et en tant que féministe radicale, je sais que… bah en fait on est épuisées de devoir le rappeler à longueur de temps, alors qu’en fait, on a des droits à défendre, on a des stratégies et des formes de mobilisation et d’engagement à créer et à développer concrètement, à imaginer aussi. Et ça nous… en fait ça nous… c’est pas que ça nous empêche, mais ça nous prend de l’énergie et du temps : ce temps qu’on met, justement, dans la défense de notre biologie, alors que c’est censé aller de soi.

RDG – On pourrait presque penser que c’est une stratégie masculiniste!

Lilou – Voilà! Et en fait, on est obligées de se battre contre ça, parce que sinon ça prend une telle ampleur, ça colonise tellement d’enfants, notamment, et surtout de filles… qu’on ne  peut pas laisser passer ça. C’est aussi pour ça que ce podcast existe, et c’est pour qu’on parle et que ça se sache, et qu’il n’y ait pas de complaisance, en fait, par rapport à l’idéologie transidentitaire.

Par rapport à l’acronyme TERF aussi. Je voulais revenir là-dessus, parce que c’est, en fait, une nouvelle forme de dire féminazi, hystérique, folle et compagnie… sorcière, évidemment. Et c’est une insulte en fait, ça, il faut bien le dire, je pense, qui permet de justifier, de banaliser les violences contre les femmes, comme le harcèlement, la diffamation, le lynchage (dont notamment a été victime Dora Moutot pendant plusieurs années et en particulier sur les réseaux sociaux, mais ça va au-delà) et ce n’est pas parce qu’il y a une majorité de jeunes, et même de gens, en général, qui l’utilisent de plus en plus, on le voit partout sur les réseaux, utilisé, en fait à toutes les sauces. Dès qu’en fait, une femme ose critiquer la construction sociale et l’outil d’opression qu’est le genre : BAM! TERF! Transphobe! tada! direct! C’est-à-dire qu’il y a aussi une censure, et c’est là aussi où je voulais en venir : c’est que la censure, elle passe par le fait que les transactivistes assimilent toute critique ou tout questionnement, tout cheminement par rapport à la question du genre, comme de la haine, comme de la peur envers les trans, en utilisant, justement, cette expression “transphobe”, alors que, comme le dit Marguerite Stern également, on ne se bat pas contre des personnes, ce n’est pas du tout l’objectif des féministes radicales. C’est, en fait, c’est toute idéologie qui va à l’encontre des trois des femmes contre lesquelles on s’élève, et qu’on ne laissera pas passer, sous aucun prétexte. 

Et du coup, pour évoquer la démocratie aussi, en fait le principe même, c’est qu’il existe le droit de dialoguer, de débattre, d’échanger ses idées, de les confronter au sein de la société. Et donc, en fait cette idéologie, elle est contraire à ce principe-même de démocratie, et d’échanges entre les individus. Parce que si on est tout de suite taxée de Terf, de transphobe, on ne peut même pas exprimer ce qu’on a à exprimer. On ne peut même pas argumenter, défendre nos prises de position, expliciter, donner des exemples, parce qu’on est direct censurées. 

Du coup je voulais évoquer le rassemblement pour l’IVG qui a eu lieu le 28 septembre à Paris, mais également dans d’autres villes. Et comme je l’ai dit tout à l’heure, je suis arrivée à Paris en septembre. J’ai participé à cette manifestation avec les Amazones. Donc en fait, pour établir les faits, on s’est rendues place de la Bastille pour cette mobilisation, à l’occasion de la Journée internationale pour le droit l’avortement. On portait des pancartes relatant nos expériences de l’avortement, exprimant que nous refusons un retour en arrière avec les méthodes des ceintres, et autres, qui sont très dangereuses. Et au bout d’une demi-heure de marche, alors que nous étions en tête de cortège, des adolescentes et des adolescents nous ont repérées, épiées. Ils se sont précipités derrière nous en hurlant “Terf, hors de nos luttes” et “Assez de cette société qui ne respecte pas les trans, les gouines et les pédés. Alors, déjà on peut noter, première chose, c’est que pour les trans, ils disent “trans”, mais pour les lesbiennes et les gays, ce sont des insultes, et donc, en soi, une agression lesbophobe dès le début, contre laquelle nous n’avons rien fait. Ensuite, l’une d’elles a arraché par-derrière une des pancartes, qui disait “Avorter m’a sauvé la vie” qu’une des activistes de l’Amazon brandissait, et les autres se sont rués sur des activistes, dans lequel je faisais partie. Nous sommes aussitôt allées interpeller les organisatrices en leur demandant de faire venir la police. Elles sont restées passives, et nous sommes donc allées chercher la police par nous-mêmes. Par la suite, une organisatrice a dit à l’une d’entre nous, qu’à cause de nous, elles avaient, je cite : “les flics au cul”… Donc ce renversement classique de la culpabilité qui est une technique d’agresseur, on le connaît très bien, et c’est d’autant plus insupportable en manifestation qui se dit féministe, pour défendre un droit si durement acquis. Et donc cette même organisatrice a ensuite arraché le téléphone de l’une d’entre nous pour le donner à nos agresseuses et à nos agresseurs et lui a hurlé dessus, encourageant au passage les agresseurs à se ruer sur la victime. Nous avons ensuite changé de trottoir, et avons demandé au service d’ordre de nous protéger. Certaines organisatrices nous ont dit qu’elles savaient qu’on était toujours agressées… voilà. Mais sont restées passives, et finalement des hommes autoproclamés féministes nous ont poussées et culpabilisées, certains nous ont dit que nous n’avons rien à faire là…

RDG – En manif féministe!

Lilou – En manif féministe, tout va bien, voilà! Alors que nous sommes des femmes, directement concernées par le droit à l’IVG, et nous sommes évidemment totalement légitimes à manifester ce jour-là, c’est une évidence. Et en fait, le pire, c’est qu’on est convaincues qu’on est à notre place, qu’on a le droit d’être là, que ce qu’on fait, bah… c’est juste! Alors qu’on essaie de nous faire croire le contraire, en fait, en permanence. Y compris en manifestation! Et ça, c’est quelque chose de vraiment douloureux. Je sais que moi, j’étais sidérée, en fait, juste après le rassemblement, parce que c’est une dissonance cognitive. Tu te dis “Je sais que je suis là pour la bonne cause”. Tu en es complètement convaincue. Mais il y a quand même des gens qui s’infiltrent, qui colonisent nos espaces, qui se font passer, en plus, pour des féministes, et d’autres qui se font passer pour des femmes, qui se croient tout permis. La police, d’autant plus, est à côté. Ils sont là, ils sont dans la rue, ils ne font rien. Le service d’ordre, c’était également… pas ça. Et c’est…

RDG – En fait, c’est le fameux, comment dire… le fameux panneau de Noustoustes qui disait :  “Terfs, hors de nos luttes!” Littéralement, ils sont en train de faire ça, c’est-à-dire qu’ils sont en train d’exclure les femmes qu’ils jugent des Terfs, hors de nos luttes… C’est-à-dire qu’ils exproprient les féministes des luttes féministes. Et c’est vrai que… ça pique un peu.

Lilou – Oui. Et pour citer un autre rassemblement qui a eu lieu à Paris, et auquel j’ai aussi participé. On s’est rassemblées en soutien aux femmes iraniennes le 24 septembre, donc quelques jours avant la manifestation pour l’IVG. Et une femme iranienne, quelques minutes après que nous soyons arrivées, s’approche de nous et nous dit : “Vous savez, des non-binaires aussi sont tués en Iran!”  Alors là, on reste bouche bée. 

RDG – C’était une femme iranienne, tu es sûre?

Lilou – Il me semble, oui.

RDG –  D’accord.

Lilou – Pour moi cette phrase montre à quel point, en fait, cette femme était colonisée par l’idéologie transidentitaire, parce que tout est ramené aux trans, aux non-binaires, aux  genderfluid… et bla bla bla,  alors qu’en fait, on était mobilisés pour les femmes, parce que on est des femmes, et qu’on voulait soutenir nos soeurs en Iran. Et c’est quand même… c’est pareil, en fait, que la manifestation pour l’IVG : c’est nous déposséder de nos propres actions, mobilisations, alors qu’en plus, on reprenait le slogan “Jin, Jiyan, Azadi” des femmes iraniennes qui veut dire “femme, vie, liberté”. Et, en fait, on pensait bien faire, mais apparemment, ça n’a pas été reçu comme un soutien!

RDG – Là, il ne s’agit que d’une seule femme.

Lilou – Après, oui c’est sûr. Jusqu’à preuve du contraire, il y a quand même peu, voire pas du tout d’hommes qui sont obligés de porter le voile en Iran, donc le voile est bien un outil patriarcal, et pas un vêtement anodin. 

On peut également faire un parallèle entre les mobilisations féministes d’aujourd’hui et les luttes, par exemple, qu’ont menées les suffragettes en Angleterre dans les années 1920, par exemple, à propos du droit de vote. Imaginons que les femmes féministes à cette époque-là avaient crié haute et forte qu’elles “se sentaient hommes”, comme le disent les transactivistes aujourd’hui, aucune loi n’aurait permis aux femmes d’être éligibles et de voter. Et donc on en serait encore au suffrage – dit universel – uniquement masculin! 

Et donc enfin, pour moi ça montre à quel point le transactivisme est absurde et contraire à la défense des droits des femmes basés sur le sexe. Pour répondre à celles et ceux qui croient en une convergence des luttes.

RDG – La question du droit de vote, le droit à l’avortement, ou demain le droit de ne pas porter le voile, c’est bien basé sur le sur le sexe en fait! 

Lilou – Et du coup depuis septembre je suis à la à la fac et j’ai constaté que l’idéologie du genre est aussi très présente dans le milieu universitaire, autant du côté des profs, en fait certaines et certains utilisent le mot “genre” pour “sexe” et inversement, donc ça crée un flou, surtout pour la majorité, je pense, des étudiantes et des étudiants qui ne sont pas forcément sensibilisés sur ces questions-là. Bah en fait, ça noie… l’un est utilisé pour l’autre, on ne sait plus la frontière entre les deux. Enfin notamment, en plus je suis en sociologie, donc je me dis que c’est quand même particulièrement problématique. Même au niveau des statistiques :  comment on peut mesurer les inégalités sociales et économiques et les violences commises par les individus si on ne garde pas cette variable du sexe ? Parce que si on la remplace par la variable du genre, et qu’en plus certains individus disent changer de genre tous les jours, toutes les semaines, tous les ans… ça devient hors sol, on n’a plus de statistiques, et on ne peut pas faire des études qui soient scientifiquement correctes et rationnelles, quoi. 

Ça montre aussi que, du coup, le transactivisme est complètement irrationnel, en plus d’être misogyne, lesbophobe, et contraire…

RDG –  Et bien sûr derrière les études qu’on ne peut pas faire, il y a toutes les décisions publiques qu’on ne peut pas prendre, de protection. 

Lilou – Oui, toutes les mesures de protection qui découlent des statistiques établies, varient selon les résultats de ces statistiques, donc qui protéger quand on ne sait pas qui commet les violences et qui les subit? Oui, c’est problématique!

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions ou des menaces, ou est-ce que tu te sens en sécurité? Est-ce que tu peux parler librement?

Lilou – Je ne me sens pas en danger de prendre la parole sur ce sujet, que ce soit dans mon cercle familial ou amical. Mais néanmoins, je sais que toute femme qui critique ou s’oppose au transactivisme à l’heure actuelle, prend le risque de subir du harcèlement, de la diffamation, ou des menaces. Mais il y a quand même cette question qui me préoccupe toujours : “Allons-nous céder à cette violence?”

Personnellement, je témoigne sous ma réelle identité, parce que je ne veux ni me taire ni me cacher. 

Et également parce que j’ai décidé de dénoncer toute forme de misogynie, qu’elle vienne des masculinistes, de l’extrême-droite, ou de ceux qui se prétendent aujourd’hui progressistes, donc les idéologues du genre ultralibéraux. 

Et tout simplement parce que c’est insupportable de devoir vivre dans une société,  et même dans un monde où les femmes, en tant que classe sociale, sont assassinées, torturées, violées, vendues, harcelées, agressées, humiliées, insultées par la classe sociale des hommes. 

Et en sachant ce que je sais aujourd’hui, je n’ai plus envie d’être complice de toutes les atrocités que les femmes sont obligées d’endurer au cours de leur vie. Ce n’est même pas une question, en fait. Je ne peux pas faire autrement, quoi!

Je souhaite aussi témoigner au nom des femmes de ma famille qui sont décédées aujourd’hui et qui ont été silenciées et violentées par des hommes. Parce que je pense que ça joue aussi dans mon engagement aujourd’hui, et que, ouais, mon histoire aussi fait que j’en suis là aujourd’hui, et que je n’aie pas envie de perpétuer ce silence, en fait, qui leur a été imposé. 

Je comprends tout à fait qu’elles n’aient pas pu parler, que c’était trop dur. Du coup, je me sens aussi responsable de prendre la parole aujourd’hui.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Lilou – Oui, du coup j’ai une anecdote.

En octobre, je suis allée voir un des spectacles qui étaient proposés dans un des théâtres de ma fac, qui était une conférence spectaculaire intitulée “Histoire de graffeuses”, créée et animée par une enseignante d’histoire de l’art et comédienne qui se revendique féministe… et queer. 

Alors déjà ça m’a fait un peu hausser les sourcils. Je me suis dit “Je vais quand même y aller, et je vais voir comment elle présente les choses.” Elle a donc présenté plusieurs dizaines d’oeuvres de street art réalisées par des femmes au cours des époques de l’histoire. Bien sûr en les nommant,  ça paraît assez cohérent, en insérant des anecdotes de sa vie personnelle de temps en temps… jusqu’au moment où des collages, notamment “Stop féminicides” apparaissent sur la toile du vidéoprojecteur. Et donc, à ce moment-là, j’attends avec impatience qu’elle nomme Marguerite Stern, créatrice des collages contre les féminicides en février 2019 à Marseille, je la rappelle. 

Mais non. Au lieu de cela, elle enchaîne avec la présentation d’autres œuvres, laissant le doute s’installer chez les spectatrices et les spectateurs : qui a bien pu inventer cette technique des lettres noires peintes sur des feuilles blanches A4, elles-mêmes collées sur des murs de plusieurs villes de France? 

On n’en sait rien!

A la fin de la conférence, je me permets alors de m’approcher d’elle et de lui rappeler que, par souci d’honnêteté intellectuelle, bah elle se doit de nommer Marguerite Stern… à part si, bien sûr, elle n’en a pas la connaissance, mais bon, ça me paraissait assez évident.

Et que de plus, sans Marguerite Stern, les collectives de l’Amazone ne seraient pas nées partout en France, à Berlin, à Londres… et les féminicides n’auraient pas eu la visibilité autant médiatique, et l’impact en fait, sur l’opinion publique qu’ils ont aujourd’hui. 

Et pour moi, c’est une réalité objective, et donc non discutable en fait. Elle a créé les collages, voilà!

Pourtant, elle me répond qu’elle a choisi de nommer seulement les artistes qu’elle aime et qu’elle apprécie et justifie cela par la subjectivité de son travail.

Alors déjà, ça commence à me mettre en colère… et après elle me dit quelque chose comme “Marguerite, avec les positions qu’elle tient maintenant par rapport aux personnes trans, c’est trop violent, c’est transphobe.” N’argumentant en rien ce qu’elle avance, bien sûr. Et pour moi, cela prouve bien qu’elle sait déjà, premièrement, QUI est à l’origine des collages. Parce que quand je lui ai dit “Marguerite Stern”, j’ai vu qu’elle connaissait. Et en plus, elle sait les positions qu’elle tient aujourd’hui. Donc ça prouve bien qu’elle est au courant et en fait, en refusant de dire que c’est Marguerite Stern qui a inventé la technique des collèges comme mode d’activisme radical, aux valeurs bien précises et contre toutes les violences machistes, elle la dépossède de sa création, et participe en même temps à l’effacement des femmes et des féministes de l’histoire. 

Et pour moi, ça, c’est c’est complètement insupportable.

Et ces mots m’ont attristée et m’ont mise à la fois en colère, parce qu’oser invisibiliser la créatrice des collages, tout en se prétendant féministe… mais quel culot!

RDG – Dernière question : est-ce que tu as quelque chose à ajouter? 

Lilou – Oui j’aimerais rajouter que, malgré la cancel culture, le lynchage misogyne, notamment celui de Dora Moutot, comme je l’ai évoqué tout à l’heure, le harcèlement, la diffamation dont sont victimes de nombreuses féministes radicales en France et même dans d’autres pays, comme JK Rowling, malgré aussi la peur que nous avons, de parler de la réalité des violences que nous subissons chaque jour – parce qu’on est tout le temps culpabilisées – les mascus et les transidentitaires essaient de nous expliquer ce qu’est une femme, alors qu’on est des femmes…

… malgré tout ça, j’aimerais inviter toutes les femmes qui la peuvent à lutter contre notre oppression systémique par les hommes et les idéologues du genre, aujourd’hui, d’une manière ou d’une autre. Parce que nous sommes toutes légitimes et surtout, plus nous serons nombreuses à nous mobiliser, à prendre la parole, à initier des actions, à créer des espaces aussi en non-mixité pour les femmes, moins les anti-féministes pourront déverser leur haine sur nous, tant sur les réseaux que dans la vie réelle.

Car on sait bien qu’ils ne peuvent pas être sur tous les terrains, sur tous les tableaux. 

Donc c’est ça que je voulais rappeler.

Et je finirai par une citation d’Andrea Dworkin qui résonne très fort pour moi, qui est une féministe abolitionniste lesbienne brillante que j’aurais énormément aimé rencontrer. 

Elle dit, s’adressant aux femmes : “Souvenez-vous, résistez, ne cédez pas.” 

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe : 

http://www.womensdeclaration.com 

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