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Rebelles du genre – Épisode 62 – Axelle

Axelle – Je suis Axelle, je vis sur Strasbourg. J’ai 25 ans et je suis détrans, c’est-à-dire que pendant 7 ans à peu près je me suis identifiée comme un homme. J’ai pris de la testostérone pendant 5 ans et j’ai fait une mammectomie, avant de réaliser que c’était une erreur. 

Je vais commencer par le début, ça va être plus simple pour comprendre l’ensemble des choses.

J’ai subi des agressions sexuelles et des viols, depuis l’âge de 8 ans à peu près, tout au long de ma vie ça m’est arrivé. A l’âge de 14 ans je suis partie à la rue parce que j’étais dans un environnement soit violent soit trop pauvre.

Rebelles du Genre –  Bonjour et bienvenue sur le podcast Rebelles du genre. Nous sommes des femmes, militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basés sur le sexe, et donc notre biologie. Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes et le genre en est le moyen.

Nous sommes les rebelles du genre. 

Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. 

Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste et commencent souvent par soutenir cette idéologie. 

Puis, elles ouvrent les yeux, constatent sa violence et la refusent. Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre et qui témoignent de leur parcours. 

Écoutons leur parole.

Axelle – Et ça me semblait comme être la meilleure des solutions. Donc de 14 à 18 ans, j’ai été la majorité du temps soit à la rue soit chez des gens que je venais de rencontrer, autant dire que j’ai encore vécu de nombreuses agressions de mieux. Au bout de 4 ans d’errance, je n’en pouvais plus, c’était très compliqué. Et un peu avant ça j’ai découvert une sorte de secte menée par un homme qui a le contrôle sur plusieurs familles et, même si on ne le dit pas ouvertement, il est connu pour récupérer toutes les jeunes femmes qui viennent dans son cercle de prière pour faire du sexe avec elles, consenti ou non. Et j’ai fait partie de ces jeunes femmes, je n’avais même pas 18 ans je pense. Et le réconfort que j’ai pu trouver dans la foi à ce moment-là s’est totalement brisé et j’ai fini par trouver un autre réconfort dans l’idée que pour échapper à toutes ces agressions et pour échapper à tous les violeurs, il fallait que je devienne un homme. Et aussi que si je ne correspondais pas aux stéréotypes féminins, ça veut dire que j’étais un homme. Et j’ai fini par y croire dur comme fer. 

Et j’ai commencé à transitionner médicalement à partir de 18 ans. A partir de là, ça a été très compliqué. La testostérone… au début, en général, quand on prend la testostérone les premiers mois on est très fatiguée, je ne l’ai appris que récemment, comme les trois quarts des effets secondaires que je connais maintenant. C’est entre personnes detrans, on se le dit parce qu’en fait dans la communauté trans c’est tabou et on n’en parle pas. Il faut dire que tout va bien tout le temps et que c’est parfait… Et du coup j’ai passé un an, comment dire, toute la réalité de tout ce que j’avais vécu m’est un peu tombée dessus à ce moment-là et en même temps j’étais en plein début de transition… Alors pour la transition, il faut savoir que je suis allée, comme les trois quarts de personnes trans à l’époque, qui ne sont pas passées par la SOFECT et tout ça, je suis allée au Planning Familial de Grenoble. A l’association Rita j’ai rencontré d’autres personnes trans, et globalement les trois quarts venaient d’ailleurs, parce que c’était le seul endroit qui était connu pour donner des attestations très rapidement, des ordonnances très rapidement et un suivi hormonal assez facilement quoi. Et libre. Et sans attente. C’était vraiment sur Internet, dans les réseaux trans, on se passe les infos, des médecins, des chirurgiens, etc. Et à l’époque c’était la meilleure solution si on ne voulait pas passer par les équipes officielles, qui ont leur part de… ils ne sont très clairement pas géniaux non plus on va dire…J’ai entendu parler de beaucoup d’abus là-bas.

Mais du coup voilà, donc, à 18 ans ,je suis allée à Grenoble pour ça. J’ai eu un rendez-vous où c’était juste une première rencontre avec des personnes trans, donc pas de médecin, que des personnes trans. C’était juste histoire de… voilà de faire acte de présence. Et le deuxième rendez-vous, du coup le premier rendez-vous avec le médecin,  j’ai eu immédiatement une ordonnance pour faire des prises de sang et pour avoir de la testostérone. Il faut savoir qu’on ne m’a pas posé une seule question vis-à-vis de mon orientation sexuelle, des agressions potentielles que j’ai pu vivre… Littéralement le rendez-vous c’est : je suis arrivée, on m’a dit « c’est quoi tes pronoms», on m’a demandé quelle était mon genre, je leur ai avoué qu’à ce moment-là que je ne savais pas si j’étais un homme ou si j’étais non binaire, et on m’a dit que c’était totalement normal et que ce n’était pas un souci.

Et ensuite, on m’a expliqué qu’il fallait que je fasse des tests sanguins et qu’après je pourrais avoir de la testostérone. Et voilà, c’est tout ! C’était tout ce qu’il fallait et voilà… 

RDG – Donc, en résumé, tu vas au planning familial de Grenoble et tu repars avec une ordonnance.

Axelle – Exactement, et toutes les personnes trans qui en parlaient sur Internet avaient très bien compris que ça fonctionne comme ça. Et c’est pour ça que ça a eu autant de succès. Je me souviens qu’à une période, le planning familial de Grenoble a commencé à arrêter d’accepter des gens qui ne venaient pas de là-bas, parce que ça a tellement explosé, il y a tellement de personnes qui voulaient y aller qu’ils étaient surchargés. Il n’y avait plus de place.

RDG – Je crois que par la suite tu as eu affaire à d’autres plannings familiaux ?

Axelle – C’est ça, oui. Il y a eu le planning familial du 84. En fait, avant de voir comment c’est, un suivi dans un autre planning, j’ai continué d’avoir mon suivi à Grenoble même si je ne vivais pas là-bas. C’est-à-dire qu’on m’envoyait mes ordonnances par mail. Donc normalement, j’étais censée les voir une fois tous les six mois, pour voir comment ça allait, pour vérifier les tests sanguins et tout ça, les résultats… Et en fait, à chaque fois je leur disais que c’était trop loin, c’était trop compliqué pour moi et que je ne m’étais pas encore rendue au planning familial… A cette époque-là, je ne suis pas sûre non plus que le planning familial de là où j’habitais faisait ce genre de choses. Ils étaient encore en formation, je crois. Donc j’ai continué ça globalement pendant quatre ans. On m’a prescrit ma testostérone principalement par mail et je me souviens que un peu avant de ne plus être suivie par le planning, j’avais essayé de parler du fait que, par exemple, j’avais une vulvodynie : ça veut dire que j’avais mal à la vulve de façon inexpliquée… C’est-à-dire que techniquement, ma vulve était en bonne santé, je n’avais pas d’IST, je n’avais rien… J’avais juste mal et c’est quelque chose qui est très peu recherché… Il y a très peu d’informations dessus. A la base, je pensais que c’était lié à mes agressions, parce que souvent ça arrive après des agressions ou des violences gynécologiques. Et je pense que c’était lié, mais j’ai aussi découvert durant ma détransition que la testo y était probablement aussi pour quelque chose. C’est-à-dire que là, ça fait quelques mois quasiment un an que j’ai arrêté la testo et je n’ai quasiment plus mal. Et j’ai parlé avec d’autres femmes détrans qui m’ont rapporté exactement la même chose. Et est pareil, je ne savais pas… Enfin bref. 

RDG – Du coup, tu en as parlé au médecin quand même de cette douleur ?

Axelle – Ouais, il y a un moment où j’ai fini par lui en parler. J’avais beaucoup de mal à en parler parce que j’avais énormément honte étant donné que c’était lié à des histoires d’agression… Et que voilà… Et elle m’a dit que non, tout allait bien… Elle m’a inspectée, elle m’a dit que non non tout était ok, j’étais en bonne santé. Et là, j’ai aussi mentionné le fait que c’était peut-être lié à des agressions et qu’à ce moment là je commençais à essayer de chercher une aide psychologique pour gérer en fait tout ce que j’avais vécu parce que je commençais à avoir des difficultés assez sérieuses dans ma vie de tous les jours, juste pour sortir, etc. Et du coup, elle m’a dit “non non, c’est rien” et puis six mois plus tard, elle m’a renvoyé un mail qui me demandait si j’avais toujours mal. Et je lui dis que oui et elle m’a dit “ah ben dans ce cas vous avez une vulvodynie”, puis c’est tout. Peu longtemps après, elle m’a dit que j’habitais trop loin, qu’elle ne pouvait plus me suivre et qu’il fallait que je trouve quelqu’un dans le planning de la ville où j’habitais à l’époque qui ne fait pas de suivi trans. Donc, je me suis retrouvée un peu du jour au lendemain sans rien. Elle ne m’a jamais aidée à parler du fait que j’avais vécu beaucoup d’agressions. C’était vraiment juste des mails pour ma testo, c’est tout.

RDG – Venant d’une association créée par des féministes pour défendre les droits sexuels et reproductifs des femmes, c’est quand même vraiment triste 

Axelle – Oui ! 

RDG – Tu peux nous parler de la suite de ton parcours de transition  ?

Axelle – Avant de transitionner médicalement vraiment juste avant j’ai rencontré cet homme transidentifié, et globalement c’était un moment dans ma vie où j’étais perdue. Je venais de sortir d’une secte, j’avais globalement perdu toute foi en tout et je cherchais vraiment juste un moyen de continuer à vivre, en fait. Et je n’en pouvais plus des hommes, du regard des hommes, d’être considérée comme vraiment un objet sexuel constamment, et d’avoir l’impression que c’était uniquement ce que les hommes et le monde attendaient de moi. J’avais vraiment envie de trouver un échappatoire à ça parce que je n’en pouvais plus, et la religion n’avait pas aidé. Il me fallait quelque chose et donc j’ai rencontré cet homme et donc cet homme transidentifié m’a parlé de féminisme. Je pense que depuis toujours j’ai aimé l’idée du féminisme parce que je suis une femme, et que j’ai toujours voulu avoir des droits égaux et faire ce que je veux… Mais je n’avais jamais trop cherché non plus… Et cet homme m’a parlé de féminisme et du coup, il faut bien comprendre que c’était du féminisme libéral. Je lui ai dit que je n’en pouvais plus de la vie, parce que dans tous les cas j’allais me faire agresser et que je ne voulais plus me faire agresser, jamais jamais… Et il m’a dit “De toute façon, ça va arriver, donc autant prendre du pouvoir et autant être payée pour” et, en gros, il m’a expliqué comment me prostituer. Il faut savoir que j’avais à peine 18 ans. Globalement il m’a fait la pub du porno et de la prostitution comme un outil de pouvoir des femmes, et clairement je voyais que, pour lui, c’était une part énorme de sa transition aussi, comme beaucoup d’hommes transidentifiés que j’ai connus par la suite : le fantasme de se dire que le pouvoir de la femme, c’est le sexe, et que ces hommes-là peuvent jouer à ça, et en plus en bénéficier et recevoir des compliments de la part d’autres hommes, et recevoir de l’argent… Et il y a très très clairement une espèce de narcissisme, et vraiment quelque chose de… C’est un fantasme, je pense. Enfin, bref. Et cet homme m’a expliqué ça, et du coup je suis partie à Strasbourg avec l’idée de… Bon voilà, je suppose : “je viens de la rue, il va falloir que je me prostitue et c’est pas grave, ce sera moi, ce sera féministe et c’est moi qui contrôlerai la situation”. Il faut savoir que j’ai essayé. Je n’ai pas réussi, parce que c’était juste horrible. Parce que j’ai découvert que c’était vraiment juste une agression de plus, et que l’homme allait juste me payer après, et c’est tout. Il n’y avait pas de pouvoir, il n’y avait pas de dignité. J’étais toujours un objet sexuel. C’était juste que je devais prétendre que j’étais ok avec ça. Donc, je n’ai pas continué longtemps dans cette voie, heureusement. Après, j’ai commencé la testo, et après avoir commencé la testo, j’ai eu une mastectomie. Voilà, pareil : le chirurgien est très connu à l’époque – dans les cercles trans, en tout cas, que je connaissais – parce qu’il faisait des mastectomie pas trop chères entre guillemets. C’est-à-dire qu’en fait, au début, j’avais entendu parler d’un chirurgien qui faisait les meilleures mastectomies qui, à partir du moment où il a eu du succès, a littéralement augmenté chaque année son prix d’au moins 1000 euros. C’est-à-dire que, quand j’en ai entendu parler la première fois, il les faisait à 2000 euros, je crois… 3000 ? Quand j’ai voulu le faire avec lui, il était à 6000 et la dernière fois que j’ai checké – et c’était il y a quelques années –  il était à quasiment 10000. Je ne sais pas où il en est maintenant mais, clairement, il a compris que c’était un bon filon. Et du coup, moi, comme je n’allais pas mettre 6000 euros dans une mastectomie – je n’avais pas les moyens – je suis allée à Toulouse voir Monsieur… Il était connu pour être l’un de ceux qui avaient des résultats pas trop mal et en même temps qui n’était pas trop cher par rapport à d’autres, quoi. Et voilà ! Et du coup, j’ai eu un rendez-vous avec lui et après on en a décidé de la date, et quelques mois plus tard, j’ai eu ma mastectomie alors qu’il savait totalement que j’étais à la rue à ce moment-là… Parce que je suis retournée à la rue : j’étais en squat pendant quelques temps. Et puis après, au moment où j’ai mon opération, j’ai eu beaucoup de problèmes, et j’ai eu une ou deux semaines dans un Airbnb. Et après, j’étais dehors, en plein hiver. Et lui, il savait totalement ça. Le chirurgien savait, je veux dire : ça se voyait ! J’avais des habits sales et déchirés… ça se voyait que j’avais pas de maison, quoi. Et c’est sans parler de toutes mes cicatrices de scarifications. Mon corps entier est quand même couvert de cicatrices, surtout à l’époque. ça se voit moins maintenant, mais à l’époque c’était quand même très visible et il ne m’a posé aucune question à ce niveau-là. Il m’a juste demandé quelle spécification, où est-ce qu’on met le téton, quelle technique on fait… Et après, c’est tout. Il m’a dit “est-ce que j’ai des questions”, et comme j’avais déjà regardé 15000 vidéos qui parlaient de ça, je lui ai dit que c’était bon et que je savais tout. Et voilà. Enfin bref, j’ai eu cette opération normalement. En plus, j’étais censée avoir deux mois de repos ; du coup je n’ai eu que deux semaines dans un Airbnb à me débrouiller seule. Et après ça, j’ai été à la rue et parfois chez des amis, et parfois en squat… Enfin donc, autant dire que ma convalescence n’était pas très reposante, voilà. Et après ça, j’ai continué de vivre en tant qu’homme – entre très grand guillemets, parce que ça ne veut rien dire – on va dire que, voilà, j’ai trouvé un travail “en tant qu’homme”, j’ai continué à vivre en squat chez les amis, à peu près n’importe où. Donc, il y avait un toit au-dessus de ma tête.

RDG – Est-ce que tu as transitionné socialement ? Je veux dire, tu as changé de prénom ? Comment ça s’est passé, et au niveau de l’état civil ? 

Axelle – Ah oui, pardon… J’ai totalement oublié de parler des choses légales ! Du coup, en réalité, j’ai transitionné socialement assez jeune, mais par à-coups. C’est-à-dire que, je me souviens, quand j’avais 13 ans, je crois… Parfois, je me faisais passer pour un garçon, et puis finalement je me disais “non non, c’est du délire”… Et pareil, à 16 ans, ça m’était arrivé, mais bon… Je n’avais aucun passing, c’est-à-dire que tout le monde voyait bien que j’étais une femme, donc ça ne marchait pas du tout. Mais, du coup, c’est quand même un truc que j’ai toujours un peu fait.

Et puis après là où j’ai commencé à vraiment transitionner socialement, sérieusement, c’était à peu près au moment où j’ai commencé la testo. Et j’ai changé de prénom dès que j’ai pu également. On m’avait dit que c’était très compliqué, que j’allais mettre des mois, que je devais passer devant un juge, etc. Il faut savoir qu’à l’époque une loi venait d’être changée et c’était beaucoup plus simple de changer de prénom. C’est à dire que je suis allée à la mairie et j’ai dit « voilà je suis trans, tout le monde m’appelle comme ça, maintenant je veux être appelée comme ça » et ils m’ont dit “OK”. Et j’ai dû attendre quelques mois et après j’avais tous mes papiers qui pouvaient être changés, voilà. Et aucun… rien… Globalement c’était beaucoup plus simple que ce que je pensais et je me souviens que j’avais un peu de dissonance cognitive, parce que sur Internet tous les transactivistes râlaient sur le fait que c’était si dur de changer de prénom, etc. Et qu’on est une population opprimée et tout ça. Et je me suis dit « ah tiens c’est marrant, parce que moi j’ai vraiment pas de soucis quoi, ma vie est quand même vachement simple depuis que je transitionne ».

RDG –  Sur la partie prise en charge médicale, la Sécurité Sociale a pris en charge par exemple ta testostérone ? Comment ça se passait ? Tu payais tout où il y avait des choses remboursées ?

Axelle – Alors je ne sais pas comment ça marche pour les gens qui n’ont pas le même fonctionnement que moi, mais j’étais à la CMU complémentaire, donc je ne payais rien sauf les aiguilles. Et le Planning Familial de Grenoble donnait des aiguilles, y compris d’ailleurs toutes sortes d’aiguilles. Comme j’ai été en squat, une fois ou deux je leur ai demandé des aiguilles intraveineuses pour mes amis, je n’ai jamais rien fait de ce genre mais j’avais des amis qui en avaient besoin et donc le Planning Familial donne seringues, aiguilles, désinfectants, tout ce qu’il faut. Donc en soit je n’avais rien à payer.

Et ensuite, du coup, après ma mastectomie, la vie a continué son cours. Je me souviens que je me disais que j’étais très contente au début d’avoir fait une mastectomie parce que, pour moi, ne pas avoir de seins c’était la liberté, parce que toute ma vie j’ai été sexualisée à cause de mes seins. Et j’ai toujours aussi eu envie d’être sportive et, entre guillemets, efficace et me dire que je ne pouvais pas faire certains mouvements ou certaines choses pareilles que les hommes parce que j’avais des seins, ça me posait énormément de problèmes. Ce qui est assez ironique parce qu’ après mon opération, et c’est toujours le cas alors que ça doit faire quatre ans, parce que depuis mon opération j’ai régulièrement des douleurs et je ne peux pas faire certains mouvements comme avant,  donc en réalité ça m’a juste encore plus… Ce que je voulais c’est être libre de pouvoir faire du sport comme je voulais et en fait ça m’a encore plus handicapée là-dedans en fait. Bon après je peux faire un minimum de mouvement mais c’est toujours compliqué. Et j’ai toujours des douleurs, il faut encore que j’aille voir mon médecin parce que je pense que ce n’est pas normal que j’ai aussi mal. Et après j’ai discuté avec d’autres femmes detrans qui ont eu des mastectomies et beaucoup rapportent aussi des douleurs.  Et ça c’est quelque chose aussi, on nous ment énormément là-dessus. Moi on m’a dit « il y aura deux mois qui seront très difficiles et après ça, comme neuf, tout va bien ». Non, non en fait. Mon corps ne sera jamais à la même performance qu’avant. Ce ne sera jamais comme avant et j’ai perdu de la mobilité, j’ai perdu des capacités et ça c’est quelque chose que… il faut savoir, c’est que les opérations trans, on nous dit que ce n’est rien et que ça va nous faire sentir mieux. Non, non en fait, ça a des conséquences pour le restant de notre vie et on ne le dit pas assez. Et je pense que c’est important de le souligner.

RDG – Est-ce que tu peux développer ? Du coup, aujourd’hui, tu dirais les conséquences physiques, matérielles, sur ton corps :  il y a quoi ?

Axelle – Au niveau santé :  il faut savoir aussi que j’ai arrêté la testo parce … en fait il y a une fois où j’ai arrêté la testo parce que j’avais des douleurs terribles à l’utérus. C’est-à-dire que c’était le genre de douleur où je n’étais pas loin de m’évanouir et je ne pouvais pas tenir debout. C’était littéralement impossible de tenir debout, j’avais trop mal, je ne pouvais pas. Et d’ailleurs j’en ai parlé à la médecine du Planning Familial, qui m’a dit de prendre des antidouleurs ou sinon si les antidouleurs ne fonctionnaient pas je pouvais juste me faire enlever l’utérus, voilà. Globalement elle m’a dit « oh c’est normal, c’est pas grave ». Donc OK. Et du coup j’ai ces douleurs qui ont continué et à un moment j’ai arrêté la testo, pendant un an, j’ai repris après, à cause de ces douleurs justement. Il y a eu plein d’autres choses en réalité. Du coup là ce que je réalise actuellement, je n’avais pas tout compris à l’époque, mais ce que j’ai découvert, maintenant que j’ai à nouveau arrêté sur le long terme : déjà je pense que ça a une incidence sur mon utérus, je ne sais pas exactement quoi, je pense que je vais essayer de faire une échographie tôt ou tard. D’ailleurs, on peut souligner le fait que j’ai tenté d’en passer une mais l’échographiste ne voulait m’en faire passer une car j’avais l’apparence d’un homme.

Voilà je pense que c’est une anecdote plutôt intéressante aussi sur les difficultés qu’on peut rencontrer quand on a une apparence différente de notre sexe. Du coup voilà j’essaye de trouver une échographiste qui veuille bien me le faire. Sinon, et bien clairement il y a 15000 problèmes au niveau du vagin de… je ne sais même pas exactement qu’est-ce qu’il se passe, parce que je ne m’en occupe pas trop, je ne suis pas trop au courant de qu’est-ce qu’il se passe là-bas. Mais un truc qui est sûr c’est que le vagin s’atrophie, l’utérus aussi, tout s’atrophie aussi globalement et aussi, comment dire, la paroi devient beaucoup plus fragile et ce qui peut amener quelques problèmes. Il y a aussi… j’avais une vulvodynie pendant un temps. Ma supposition c’est que c’est lié à la testostérone, parce que j’ai discuté avec d’autres femmes detrans qui ont eu le même problème et j’ai remarqué que depuis que j’ai arrêté la testostérone peu après je n’avais plus du tout mal. Alors que du coup la vulvodynie c’est quand on a mal à la vulve, alors qu’on est techniquement en bonne santé, c’est juste qu’on ne sait pas pourquoi on a mal. Ca peut être juste au niveau des lèvres, ça peut être juste au niveau du clitoris, juste à l’entrée, voilà. Et il n’y a vraiment pas de cause apparente. Et ce que j’ai découvert c’est que quelques mois après avoir arrêté la testostérone je n’avais plus mal alors que j’ai eu mal pendant littéralement des années et des années et c’était horrible. Voilà. Et si j’avais su que c’était la testostérone qui causait ça, j’aurais arrêté bien avant parce que ça m’a pourri la vie.

RDG – Est-ce que ça a eu des effets sur ton caractère ? sur ta santé mentale ?

Axelle –  Ouais alors j’avais peur d’arrêter la testo, et je sais que pour avoir discuté avec d’autres femmes trans qu’on est pas mal à avoir cette peur d’arrêter la testo, parce que souvent sous testo, en tout cas pour mon cas, j’avais beaucoup plus d’énergie. Les premiers mois de testo sont affreux, mais après ça on est sous stéroïdes quoi c’est du dopage, et donc il y a vraiment un côté où on se prend moins la tête, on a plus d’énergie. Evidemment la libido, en général, elle explose pas mal, après ça dépend des gens. Certaines personnes disent qu’elles s’énervent plus facilement, je n’ai pas spécialement remarqué ça. Je pense que j’étais moins triste tout le temps. C’est à dire que j’ai l’impression que mes émotions étaient plus stables, c’est-à-dire que j’étais pas non plus très heureuse, j’étais pas très malheureuse, j’étais juste dans un espèce d’entre-deux un peu gris alors qu’avant la testo mes émotions allaient dans tous les sens. Et c’est quelque chose, j’ai eu vraiment peur d’arrêter la testo pour ça, parce que je savais que pour moi c’était aussi un moyen chimique de stabiliser mes émotions, voilà.

RDG – Il y a eu également je pense un effet sur ta voix…

Axelle – Ouais du coup là et bien comme j’ai arrêté la testo depuis quelque temps ma voix est légèrement un peu plus aiguë, mais je veux dire je peux essayer de descendre, quoi que je ne peux pas trop descendre non plus. Mais à un moment je parlais et les gens pensaient que j’étais un homme. Donc oui. Et le cartilage au niveau de la gorge, ce qui fait qu’on parle avec une voix grave comme ça, ne change pas non plus c’est à dire que la pomme d’Adam ce n’est pas vraiment une pomme d’Adam pour les femmes qui prennent de la testo, mais il y a quand même un changement au niveau de la gorge et ça ça ne change pas non plus. Il y a aussi la pilosité. Je m’épile le visage toutes les semaines, ce qui est insupportable. Il va falloir que je fasse du laser si je veux en venir à bout, et globalement la pilosité sur tout le corps aussi. Les cheveux… mais je n’ai pas trop eu ce problème, mais enfin si un peu, mais on perd nos cheveux sous testo et la ligne des cheveux est un peu plus loin.  J’avais énormément d’acné en étant sous testo, c’était une horreur, tout le temps que j’étais sous testo j’avais des boutons partout c’était affreux.

RDG – Bref pour tout ton corps c’était bazar quoi.

Axelle– Ah c’était complètement le bazar, c’était complètement le bazar. Maintenant que j’ai arrêté en fait je me rends compte à quel point mon corps est beaucoup plus stable maintenant. A l’époque c’était… globalement c’était : juste après une injec’ j’allais être hyper active et j’allais avoir une tonne de boutons et à la fin des quelques semaines avant de faire mon injec’ j’étais au bout du rouleau et j’avais mal… Et enfin, en fait, je me rends compte que je me suis fait subir une tonne de choses physiquement, je ne m’en suis pas rendue compte avant de détransitionner en fait. J’avais peur de detransitionner parce que… pour plein de raisons. Mais un truc qui est sûr en fait c’est que si j’avais su à quel point je me sentirai mieux et en meilleure santé en détransitionnant, je l’aurais fait mais direct en fait, direct.

RDG – D’accord.

Axelle – Du coup mes années en squat queer, globalement l’identité trans était politisée et du coup pour moi c’était vraiment un idéal féministe de rébellion, etc. Globalement, je dis souvent que trans c’est le nouveau Punk ou le nouveau Emo ou un de ces trucs là parce que c’est vraiment juste… je le vois vachement comme un truc de jeunes femmes, et d’hommes un peu plus vieux, qui veulent se rebeller et qui ont une crise, je ne sais pas comment …

Du coup j’ai vécu en squat queer. La quantité de personnes transidentifiées que j’ai vues en squat est énorme. Ils aiment bien justifier ça en disant que c’est parce que les trans sont un groupe marginalisé et que c’est très difficile de vivre en tant que personne trans. Je dirais plutôt que c’est parce qu’ il y a certains groupes où l’identité trans est juste une espèce d’idéal révolutionnaire qui va au-dessus des normes et du capitalisme. Et qu’il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens qui viennent d’un environnement bourgeois qui se retrouvent en squat à transitionner en partageant des ampoules de testo parce que c’est le truc classe à faire quoi. Donc il y a ça. J’ai vu énormément de choses. J’ai vu des hommes transidentifiés, d’une quarantaine, cinquantaine, soixantaine d’années même. Il y en a un, j’avais vu, une soixantaine d’années il avait un, entre guillemets, petit copain, c’est à dire une femme transidentifiée, je ne sais même pas si elle avait 18 ans. En tout cas, elle n’avait pas plus de 20 ans c’est sûr. Honnêtement je suis à peu près sûre qu’elle avait 17 ans et il faut savoir que j’ai découvert qu’elle est tombée enceinte après que je l’ai vue, donc assez glauque et vraiment ça m’a un peu fait poser question, je me suis dit :  tiens c’est étrange quand même une…, à l’époque bon voilà je disais une femme trans, de 60 ans qui était très caractérielle, comme un homme en fait, si on veut jouer dans les stéréotypes là elle n’y était pas quoi. Et du coup cet homme, en robe, qui parlait fort et qui faisait des blagues complètement pourries, qui sortait avec cette femme transidentifiée qui avait à peine 18 ans et qui était très timide et qui ne parlait jamais pour elle, toujours l’homme qui parlait. J’avais vraiment juste l’impression de voir un clip des années 50 sauf qu’ils ont inversé leurs vêtements, quoi. Du coup, ça, ça m’a fait poser pas mal question. Après il y a plein de choses que j’ai vues et que maintenant je me rends compte des aberrations que c’était. A l’époque c’était tout au nom du féminisme et de l’anticapitalisme et de l’idéal queer, enfin bref. Comme par exemple tout le lien avec la porno-prostitution et la communauté trans. Tous les liens avec tous les milieux fétichistes assez hardcore et, comment dire, cette idée que tout est une construction sociale. J’ai vu beaucoup de gens, je ne pense pas que ces personnes étaient majeures, et souvent c’était des femmes transidentifiées. Il y a vraiment un pattern que je vois partout, c’est des femmes jeunes transidentifiées et des hommes. Il y en a des jeunes mais beaucoup moins. Et sinon des hommes, quand même entre 40 et 60 ans quoi. Et voilà, et les hommes ont commencé à parler de fetish, de proposer de tourner un porno, m’ont proposé de… j’ai vraiment l’impression que pour eux c’est l’occasion d’avoir leur pire conduite, tant qu’ils mettent une jupe, littéralement, c’est impossible de critiquer ce qu’ils font. Je me souviens, en squat, il y avait littéralement des hommes transidentifiés qui agressaient d’autres personnes, ou alors vraiment qui harcelaient, qui menaçaient, il y en a qui étaient violents ou alors qui prenaient sous leur aile des jeunes personnes transidentifiées. Là pour le coup que ce soit des hommes ou des femmes, ça ne changeait rien, souvent des mineurs et qu’ils leur montraient toutes les beautés du milieu trans et qu’en fait des années après les jeunes personnes finissaient par se sentir horriblement mal, voire se suicider parce qu’en fait elles réalisaient qu’elles avaient été manipulées en fait par des hommes qui ont profité de leur instabilité psychologique et qui les ont fait transitionner pour rien voilà. Et ça c’est un truc d’ailleurs que j’aimerais vraiment noter, c’est qu’on parle tout le temps du suicide trans mais je pense que c’est un argument complètement pourri parce qu’en réalité la seule étude qui parle des pourcentages complètement extrêmes, en réalité, elle a été recalée quelques années plus tard voilà. Et aussi parce que j’ai pas mal de mes ami.e.s qui étaient transidentifié.e.s ou alors qui ont été transidentifié.e.s à un moment et qui se sont suicidé.e.s et avant leur suicide je me souviens qu’on parlait du fait qu’ils avaient envie de detransitionner. Et ça je pense que c’est très important de le dire et d’arrêter de compter les suicides des personnes transidentifiées comme un suicide trans parce que je pense que souvent c’est des suicides detrans voilà. Après je n’aime pas l’argument du suicide et après je pense que c’est intéressant à savoir, mais, voilà, je ne vais pas non plus m’étaler dessus mais, je, voilà, je pense que c’est un détail important on va dire. J’aimerais mentionner un homme avec qui j’ai fait du sexe une fois, qui pareil, je pense qu’il doit avoir 20 ans de plus que moi. D’ailleurs c’était juste avant que je détransitionne et ça a été vraiment cette rencontre là qui m’a fait un peu réaliser à quel point tout ça c’était malsain. Et cet homme il est transidentifié, évidemment, il est dans le milieu kink, fetish, etc. et quand on s’est vu je lui ai expliqué que moi quand je voyais les hommes j’avais peur, parce que j’ai vécu beaucoup d’agressions. 

Parce que j’ai vécu beaucoup d’agressions.

Globalement, je suis très fragile mentalement, et du coup il m’a expliqué que la peur que je ressentais, c’était du désir, et c’est pour ça que les gens avaient des kinks, c’est pour ça que les gens avaient des fétiches et que c’était très sain d’exprimer ce désir là de cette manière. 

Et en tant que survivante d’agression, mon corps (quand j’ai peur ou quand je suis en colère) souvent a des réactions similaires au désir et c’est quelque chose qui m’a toujours dérangée, qui m’a toujours troublée et qui est très difficile pour moi. Parce que quand je suis énervée, je ne veux pas faire du sexe. Et du coup, il m’a persuadée de ça et j’ai fini par accepter de faire du sexe avec lui. C’était violent, c’était violent, globalement… J’ai juste revécu encore une fois une de mes agressions passées. C’était vraiment… C’était pareil. C’était pareil que quand j’avais 18 ans quoi. 

Et après ça (j’espère que je ne vais pas avoir trop de problèmes pour dire ça mais j’espère qu’il ne va pas me retrouver), quand il avait fini, il m’a avoué que le fait que j’étais anorexique à ce moment-là et que je n’avais pas de seins, il appréciait énormément parce qu’il était attiré par les enfants. Et que c’était pratique que j’avais l’air d’un enfant à ce moment-là, parce qu’il pouvait profiter de son fétiche légalement. 

Et d’ailleurs, j’aimerais aussi parler de cet homme transidentifié qui m’avait expliqué comment faire. Oui, c’est trash, je suis désolée.

RDG – Là j’ai les larmes aux yeux. C’est tellement révoltant.

Axelle – C’est affreux. C’est un truc récurrent et c’est pour ça que c’est important d’en parler. J’avoue que j’ai peur d’en parler, honnêtement, parce que je ne veux vraiment pas que cet homme me retrouve, mais je pense que c’est important de le savoir parce que c’est quelque chose dont il faut parler. La plupart des femmes transidentifiées ont l’air d’enfants. La plupart des femmes transidentifiées ont vraiment l’air mineures prépubères et la plupart des hommes transidentifiés qui ont des relations avec ces femmes là sont vieux. Je suis désolée. Ils ont plus de 40 ans, plus de 50 ans, plus de 60 ans même. C’est quelque chose qui revient régulièrement. 

L’homme transidentifié qui m’a expliqué comment me prostituer quand j’avais à peine 18 ans m’a dit que c’était bien que j’étais jeune, et que c’était bien si jamais je transitionnais parce que je pourrais ressembler à un jeune homme, et les clients pourraient aimer ça, et je pourrais me faire pas mal d’argent. Et à l’époque, j’avais trouvé ça logique parce que j’étais complètement perdue dans ma vie. J’ai trop vu ce schéma se reproduire encore, et encore, et encore… 

Je pense que c’est important de penser à ça parce que les transactivistes parlent de bloqueurs de puberté, d’hormones, et il y en a beaucoup d’ailleurs dans les chirurgies non-binaires où c’est vraiment avoir un corps entre guillemets “sans sexe”. Il y a beaucoup de gens qui profitent de ça par rapport à des fétiches pédophiles. C’est clair pour moi. Voilà. 

RDGClairement c’est des pédo-violeurs. 

Axelle – Ah oui, totalement

RDG – Ils se fabriquent les enfants qu’ils vont pouvoir remplacer..

Axelle – C’est exactement ça. Il faut savoir que dans chaque ville, il y a toujours des ragots, des rumeurs et tout ça, dans le milieu trans. Et à chaque ville où je suis allée, il y a toujours une histoire d’un homme transidentifié qui a pris sous son aile une jeune personne ou plusieurs jeunes personnes trans et qui en a profité pour les “aider” entre guillemets à transitionner. Et en général, ça finit par des accusations viol et du drama trans. Voilà, on en voit partout. Et ça, vraiment dans chaque ville où je suis allée, il y a toujours ce schéma là qui est reproduit. 

RDG – Ok. Merci. Je te l’ai dit 10 fois, je te l’ai dit 20 fois, mais c’est très, très important : protège des filles, protège des enfants en parlant. Oser parler, c’est refuser d’être complice. 

Axelle – Totalement. Du coup, après quelques années de transition et de galères, j’ai eu cette agression par l’homme qui m’a avoué qu’il aimait mon corps parce que j’avais l’air d’un enfant. Et donc après ça, mon état psychologique s’est dégradé comme jamais. Mon anorexie en est arrivée à un point où j’étais vraiment en danger. 

Je me suis effondrée pendant un an, deux ans, et j’ai eu la chance de tomber sur une psychologue et une psychiatre absolument formidable qui est spécialisée dans la gestion des traumas et elle a changé ma vie. J’ai cherché pendant de nombreuses années des psychologues qui pouvaient m’aider et globalement je suis toujours mal tombée. 

Petit exemple de cet homme psy qui m’avait dit que la pédophilie était absolument naturelle et qu’il fallait juste que je n’y pense pas trop et que ça allait aller. 

Enfin bref, cette femme là est la première psy que j’ai rencontrée qui a vraiment su m’aider, m’écouter. Et après 5 séances avec elle, où justement on a essayé de travailler sur le fait que j’avais l’impression d’avoir un corps d’enfant, parce que de base j’avais des difficultés par rapport à ça. Et je pense aussi que le fait que je me sente sexualisée c’était lié au fait que j’étais une femme et aussi au fait que j’ai été agressée en étant enfant donc c’était vraiment compliqué. Et du coup elle m’a… C’est assez stupide mais globalement j’ai réalisé que toute l’identité trans, j’ai cessé d’y croire après un exercice qu’elle m’a demandé de faire où elle m’a dit de me forcer à me regarder nue un maximum de temps, c’est à dire au début, j’arrivais littéralement… Je devais détourner le regard après une seule seconde et j’étais très mal et petit à petit j’ai réussi à me regarder cinq secondes, puis dix secondes etc… Et c’est comme ça que : “Ah en fait, je n’ai pas un corps d’enfant et je suis un être humain !” Et c’est là que je me suis dit : “Mais pourquoi j’ai transitionné au fait ?”

Et tout au long de ma transition j’avais pas mal de, comment dire, de dissonances cognitives, c’est à dire qu’à la fois mon discours transactiviste disait qu’il fallait que je lutte contre les stéréotypes de genre et à la fois je ne pouvais pas expliquer autrement que par des stéréotypes de genre de pourquoi je voulais être un homme. (Rires) Et du coup il y a un peu de toutes ces dissonances cognitives de mon passé qui sont revenues et c’est là où je me suis dit : “En fait ça ne fait aucun sens !”. Une grosse désillusion. Je me suis dit : “En fait, c’est juste une croyance de plus !”. C’est supposer que les femmes et les hommes sont supposés agir d’une telle ou d’une autre manière tout en prétendant détruire le patriarcat, c’est complètement absurde ! 

Et là est venu aussi un passage où j’étais tiraillé entre continuer ma transition, c’est à dire du coup je commençais à avoir envie de faire une phalloplastie, de faire une hystérectomie, une ovariectomie, parce que je me suis dit que retourner en arrière c’est impossible, je ne peux aller que de l’avant et peut-être que plus je vais de l’avant, plus ce sera facile. Donc j’ai passé quelques semaines comme ç,a quelques mois même, à réfléchir à tout ça et en fait il y a un moment où j’ai réalisé que j’allais juste me rendre dépendante à vie si j’enlevais mes ovaires : j’allais devoir prendre des hormones synthétiques pour le restant de mes jours. Et c’est vraiment ça qui m’a… C’est un peu de me retrouver face à la réalité de “là il faut que je fasse un choix net”. Aussi je ne pouvais pas continuer la testo tout en gardant mon utérus parce que ça a commencé à devenir vraiment plus supportable, même si je ne sais pas exactement ce qui s’est passé, mais je sais que je pouvais littéralement tomber dans les pommes de douleur. 

Et donc il y avait ce choix, je me suis retrouvée face à ce choix et j’ai dû  faire ce choix. Et là je me suis dit : “ Soyons réaliste, si je suis pas heureuse maintenant après avoir pris de la testostérone, vivre en tant qu’homme, ne plus avoir de seins” etc… Et là je me suis rendue compte aussi qu’ en fait toute la période où j’ai transitionné, je me répétais que j’étais au meilleur de ma vie et en fait non ! Je pense que vraiment c’était une des pires période de ma vie, c’était hyper dur et je savais dans un coin de ma tête que j’avais peur de détransitionner parce que je pense qu’au fond, je savais que c’était une erreur. Juste le soir avant mon opération, je n’ai pas dormi de la nuit globalement, parce que je me disais : “C’est sûr je vais le regretter, c’est sûr je vais le regretter” et je ne sais pas pourquoi je l’ai fait. Et beaucoup d’autres femmes detrans avec qui j’ai discuté ont la même expérience. Il y a des moments juste avant une opération, au fond on le sait en fait, donc on sait. C’est aussi pour ça d’ailleurs je pense que pas mal de transactivistes sont assez agressives parce que c’est dur de se persuader de quelque chose quand on n’y croit pas vraiment et je pense que c’est pour ça que beaucoup de personnes trans ont besoin de la validation du monde entier et de célébrer ça tout le temps parce que c’est juste très dur, ça ne tient pas la route, on essaie juste de se persuader que ça va quoi.

Voilà en détransitionnant du coup, ça a été toutes mes valeurs des dernières années qui ont été complètement bousculées, c’est-à-dire que pour moi l’idéologie trans était un moyen de détruire le patriarcat et les stéréotypes de genre etc… Et en fait, en détransitionnant, je me suis rendue compte que c’était l’exact opposé. A mes yeux actuellement, c’est juste un groupe de gens avec des problèmes psychologiques qui célèbrent le fait de se sentir mal dans son corps et qui inventent une croyance qui n’a aucune base, qui n’est pas scientifique, qui n’a aucune raison concrète d’être, qu’on peut être un genre différent du genre dans lequel on est né et je ne crois pas aujourd’hui, comme beaucoup d’ailleurs de personnes trans je crois au genre dans le sens que ce sont des catégories sociales et je pense que beaucoup de personnes trans transitionnent sous prétexte de bousculer ces catégories sociales. Ca définitivement a été mon cas et je vois beaucoup de jeunes personnes trans notamment énormément de femmes, de jeunes femmes qui utilisent la cause trans pour juste sortir des stéréotypes féminins et ce qui est compréhensible, c’est vraiment juste une idéologie régressive en fait. 

Pour moi c’était vraiment juste le résultat d’un narcissisme et d’un individualisme poussé à l’extrême et de notre époque, c’est à dire que c’est un peu comme un jeu vidéo où on peut choisir notre personnage et il y a vraiment des gens j’ai l’impression qu’ils le considèrent comme ça. Pour moi maintenant la transition c’est vraiment juste une mode de modification corporelle, c’est-à-dire qu ‘ il y a des vidéos de personnes, même sans être vraiment transidentifiées, qui s’enlèvent leurs seins, qui choisissent si elles veulent des cicatrices d’une certaine forme. Pour moi c’est vraiment juste un truc de “on considère que notre corps, c’est vraiment comme un personnage de jeux vidéo qu’on peut personnaliser à l’infini et qu’il n’y aura aucune conséquence sur le long terme”. C’est juste faux en fait et je pense qu’on pourrait accomplir beaucoup plus de choses si on était moins focalisé sur notre genre et notre apparence et surtout quand toute cette idéologie repose sur le mal-être de beaucoup de gens. 

L’argument du suicide trans et un des plus utilisés et je pense que beaucoup de personnes tout comme moi, j’ai discuté avec d’autres personnes détrans qui m’ont dit exactement la même chose, c’est-à-dire que par exemple moi j’étais désespérée, j’ai toujours eu des tendances suicidaires, j’ai fait de nombreuses tentatives dans ma vie, littéralement plusieurs fois par an et j’ai toujours attenté à ma vie d’une manière ou d’une autre, que ce soit en ayant des comportements à risques ou pas et donc quand on m’a dit : “Si tu te sens mal dans ton corps et que tu as envie de mourir c’est que tu es trans”, ça m’a donneé un échappatoire. Je me suis dit : “Oh génial je me sens super mal dans mon corps et j’ai tout le temps envie de mourir la transition ça doit être ce qu’il faut !”. Et il y a aussi un truc qu’on dit souvent entre personnes trans, on dit souvent que si tu questionnes ton genre c’est que tu es trans parce que les personnes cis ne questionnent pas leurs genres. Et je pense que c’est hyper dangereux, je pense que c’est normal en fait d’avoir de la dysphorie, je pense que ça arrive à tout le monde de se sentir mal par rapport à son genre surtout quand on est une femme et surtout quand on est agressée. Je pense que c’est vraiment ce qu’il y a de plus naturel.

RDG – Quand tu sais que le genre est un système de hiérarchisation sociale en appliquant des comportements de normes à chacun des deux sexes, bien sûr pour asseoir la domination masculine, mais quelle femme en bonne santé mentale veut correspondre à son genre ? Sérieusement ?

Axelle – Exactement. 

RDG – En tout cas aucune féministe !

Axelle – Exactement ! Totalement ! (rires) 

J’ai cru à ce mythe que la transition allait sauver ma vie et que j’allais faire moins ou alors pas du tout de tentatives de suicide et j’aimerais vraiment dire que le moment, la période de ma vie où j’en ai fait le plus, c’était pendant ma transition. C’est le moment où j’ai vraiment failli y passer et j’avais très peur de détransitionner parce que j’avais peur d’être encore plus suicidaire. Il s’est passé exactement l’opposé, c’est-à-dire qu’en regardant la réalité en face et en essayant juste d’être en bonne santé, de gérer ma vie et bien je n’ai pas fait de tentative de suicide depuis plus d’un an et c’est mon record, c’est littéralement mon record. Voilà. Et ça c’est important je pense.

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie ?

Axelle –  Alors je pense que c’est un danger pour les femmes et les enfants parce que quelle femme voudrait correspondre au genre de femme et c’est sûr ça doit exister, mais il y a quand même un truc c’est que là actuellement, l’idéologie trans est en train de dire si tu n’es pas d’accord avec les stéréotypes de genre féminins qui sont censés être innés et mystérieusement définir qui tu es, c’est que tu es trans et pour être vraiment trans, il faut transitionner médicalement. Et je pense que c’est extrêmement dangereux déjà parce que ça veut dire, ça veut dire quoi, ça veut dire que les femmes “cis” entre guillemets, déjà je rejette le terme “cis”, je n’ai jamais été d’accord avec le genre de femme et je ne serai jamais d’accord et ça ne fait pas de moi quelqu’un de trans. Si des personnes veulent se définir comme trans ok, mais qu’on ne dise pas à des gens qu’ ils sont d’accord avec une idéologie quand ils ne croient pas. Non ça ne fonctionne pas comme ça, c’est comme les religions on peut tout le monde peut croire en ce qu’il veut mais on peut pas demander aux gens de croire en quelque chose qui n’est pas réel pour lui.

Toute cette idéologie du genre “cis/trans” ça voudrait dire que les femmes “cis” sont en accord avec les stéréotypes de genre féminin, ça voudrait dire qu’ elles sont en accord avec le fait d’être agressées ? Parce que je tiens quand même à dire qu’ il y a des transactivistes, notamment américains, qui disent, qui ont écrit sur des livres noir sur blanc, qu’ être une femme c’était être pénétrée et être un objet sexuel et être un objet de désir. C’est écrit noir sur blanc par des transactivistes qui font des vidéos notamment pour les enfants et personne ne dit rien, mais bon bref. Et donc je pense que c’est insinuer qu’une femme c’est un tas de stéréotypes et je pense que c’est très dangereux. 

Et je pense aussi qu’ il y a quelque chose que les personnes transidentifiées n’ont peut-être pas compris, c’est que le genre n’est pas une personnalité, c’est à dire que je vois tout le temps des jeunes femmes qui correspondent même à certains stéréotypes, tu les vois dans la rue, elles ont l’air de femmes, elles ont été très bien ce n’est pas un souci du tout et ce qui me fascine c’est que toutes utilisent des pronoms neutres ou alors masculins et c’est clairement juste un moyen d’échapper au patriarcat ou alors c’est juste des jeunes personnes à qui on dit que “si tu aimes jouer au foot ça veut dire que tu es quand même un peu un mec quoi” et c’est ridicule ! Et au fond il y a beaucoup de transactivistes qui disent “non mais c’est pas ça !” et en même temps la seconde d’après ils vont te dire exactement ça ! Cela n’a juste aucun sens !

Honnêtement je pense que c’est dangereux et on commence à voir de plus en plus de personnes détrans qui parlent. Ça y est, il y a des gens qui commencent à faire des procès, notamment aux États-Unis et dans les pays anglophones. Par exemple, une des femmes détrans assez connue en ce moment c’est Chloé Cole qui a été transitionnée à 13 ans ! Maintenant elle a 18 ans et elle parle énormément de ça et elle essaie de faire changer les choses parce qu’ elle se sentait mal comme les trois quarts des jeunes à 13 ans et on lui a dit “ça veut dire que tu es trans” et on l’a transitionnée et maintenant elle le regrette et c’est terrible ! Et je pense que les personnes soit mineures ou majeures, parce que c’est plus facile de parler du fait que c’est pas ok de transitionner des mineurs, mais j’ai transitionné en étant majeure et j’aimerais aussi parler quand même du fait qu’ on m’a juste aidé à me mutiler. Je me mutilais déjà de base, on m’a juste aidé à me mutiler encore plus. Je détestais mes seins, c’est-à-dire que pour moi c’était la cause de tout et forcément j’allais vouloir me mutiler à cet endroit. Et on m’a dit : “Oui bien sûr, évidemment !”

Et du coup je pense que c’est très dangereux pour les personnes qui ne sont pas stables mentalement et qui ont plein de problèmes psychologiques, vraiment. Et je pense que c’est aussi dangereux pour les enfants, parce que il y a clairement un lien avec la pédophilie : je veux dire dans tous les milieux sur Internet, dans le milieu trans etc, tout le monde le sait, je veux dire tout le monde le sait qu’ il y a des pédophiles et qu’ ils vont toujours prendre sous leurs ailes des jeunes et faire des trucs avec eux. Les gens de ma génération qui ont traîné sur internet dans ces milieux-là le savent, tout le monde le sait, tout le monde le sait, et je pense que c’est vraiment dangereux à ce niveau là. Et je pense aussi que c’est dangereux globalement pour tout le monde mais surtout pour les enfants qui grandissent en ce moment avec cette idéologie, je pense que c’est dangereux d’insinuer que notre corps doit refléter qui on est dans le sens où ça doit refléter notre personnalité. Insinuer que si tu as des seins ça veut dire que tu aimes le rose ou je ne sais quelle autre chose, c’est mauvais ! Ça ne fait du bien à personne. 

Et je pense aussi que c’est dangereux pour la démocratie parce que je vois beaucoup l’extrémisme queer juste comme une autre forme de radicalisation : ça passe par internet et puis après les gens vont dans des squats. J’ai connu des villes où les transactivistes vandalisaient les centres LGBT parce que ce n’était pas assez Queer pour eux. J’ai vu beaucoup de jeunes qui comme moi étaient perdus dans leur vie, avaient besoin de se dire qu’on pouvait changer le monde et on s’est dit que ça pouvait être comme ça et on s’est radicalisé. Et pour moi c’est juste une autre radicalisation. Et j’ai envie de dire aux personnes LGBT ou même aux personnes hétéros qui soutiennent cette idéologie, j’ai envie de leur dire : les transactivistes ne sont pas de votre côté. Les transactivistes à part quelques rares, mais la plupart des transactivistes, leur idéal c’est détruire toutes les normes. Globalement en fait, tu prends toutes les normes, tu les détruis : que ce soit l’âge, l’orientation sexuelle, tout, tout en fait. Le but c’est vraiment juste du chaos et en soi, oui à l’époque ça me semblait bien le chaos parce que j’étais jeune et rebelle et en fait je réalise maintenant que pour les enfants et pour tout le monde, ça ne va nulle part, surtout quand derrière cette idéologie c’est des hommes pédophiles qui poussent tout ça. 

RDG – Aujourd’hui tu témoignes anonymement, pourquoi ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces ? Est-ce que tu te sens en danger ou est-ce qu’ au contraire, tu te sens en sécurité pour parler de ce sujet librement ?

Axelle – Alors je témoigne anonymement. Alors déjà en tant que personne détrans qui ne croit plus en idéologie du genre, je sais que je me suis déjà reçu des menaces de mort, bon en ligne, certes, mais ça me donne quand même une certaine idée du sentiment que les transactivistes ont vis-à-vis des gens comme moi et aussi parce que j’ai été du côté des transactivistes, j’ai vu ce qu’ils faisaient, et je ne veux pas, je ne veux pas avoir de problèmes.

Et aussi, j’aimerais travailler, un jour, quand j’arrive à aller mieux. 

Tout ce que j’ai raconté, c’est des choses dont je ne parle pas.

Déjà, parce que c’est très difficile socialement, de dire qu’on ne croit pas au genre. 

L’idéologie du genre est partout, c’est terrible! 

Quand j’ai commencé à transitionner, c’était beaucoup moins répandu que maintenant, et c’est vraiment… c’est triste de voir comment toutes les personnes qui ne sont pas transactivistes et qui défendent cette idéologie… 

Qu’est-ce que vous faites? Vous défendez des agresseurs, en fait! vous défendez des gens qui prônent la mutilation, vous défendez des gens qui prônent une idéologie! C’est une secte, c’est vraiment juste une autre secte, en fait! Ce sont des croyances, et on utilise des enfants à cause de ces croyances!

Arrêtez, arrêtez de jouer à ce jeu, en fait! Si ces personnes-là veulent prétendre être d’un autre sexe, ok. Mais personnellement je ne vais pas le faire, je ne vais pas mentir pour elles. 

Bref, je m’égare.

RDG – En tout cas, je vais dire quelque chose, moi. Parce que tu témoignes anonymement, mais je voulais souligner ton courage.

Et de la part de toutes les femmes qui écoutent, de tous les parents qui écoutent, de toutes les filles qui se posent ces questions : merci! Vraiment, merci du fond du cœur. Voilà, je tiens à ce que ce soit dit, et que ça reste dans l’audio. 

Vraiment, merci pour ton courage. 

Axelle – Merci. Avec plaisir, je pense que c’est vraiment important qu’on puisse en parler, parce que c’est tellement tabou. Et je pense que c’est… Je comprends qu’il y ait des gens qui soutiennent la cause trans, parce que c’est vraiment tout un truc de victimisation, et ils jouent vraiment sur les sentiments.

Et je pense vraiment que tant que les personnes détrans, tant que les personnes qui ne connaissent pas, tant qu’on ne parle pas, en fait, ça ne va pas changer.

Et en tout cas, merci à toutes les personnes qui écoutent, et merci à toi de faire ça, c’est vraiment chouette.

RDG – Est-ce que tu as une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant, donc, la transidentité ou le transactivisme?

Axelle – Alors, des anecdotes j’en ai plein haha,  et je ne peux jamais en parler! 

Je veux parler d’un cas assez commun que j’ai vu très souvent en squat queer. Du coup, il y a souvent ces hommes transidentifiés, qui vont influencer des jeunes, qui vont souvent les agresser, d’une manière ou d’une autre.

Sur les plateformes anglophones, il y a de plus en plus de personnes qui commencent à parler du fait que les incels, les hommes extrêmement misogynes… Leurs valeurs, c’est que les femmes leurs doivent du sexe. Il y en a de plus en plus qui transitionnent, parce qu’en fait, ça marche!

C’est-à-dire qu’à partir du moment où tu es “une femme trans”, entre guillemets, et bien, tu es intouchable. En squatt queer, souvent on fait la justice un peu nous-mêmes, c’est à dire que quand il y a une agression, on essaye de faire, entre guillemets, “un petit jugement”, et d’exclure la personne… Après, ça, c’est dans la théorie, mais bon… Et à chaque fois que c’était un homme transidentifié, à chaque fois, à chaque fois, c’était tabou! C’était tabou! Parce que si on disait “ouais bah il a agressé une personne”, les gens criaient au “cissexisme” et à la transmisogynie. Parce que, insinuer que “les femmes trans”, entre guillemets, du coup les hommes transidentifiés pouvaient agresser des personnes, c’était supposer que c’étaient toujours des hommes, et que les hommes étaient tous des agresseurs. Et du coup, c’était juste impossible, en fait. Parce que tout le monde avait peur de dire quoi que ce soit sur les hommes transidentifiés. Parce que c’est vraiment une classe protégée, dans ce milieu, et ils ont tous les droits, vraiment! Et à peine on leur dit “ouais, tu parles un peu fort, là”, ou juste “j’aimerais un peu que tu évites de m’agresser” haha… et bien tout le monde est là en mode “voilà! C’est de la transmisogynie, transwomen are women… et franchement, ça fait très secte, quand tout le monde autour de toi te dit “les femmes trans sont des femmes”, et que du coup, on te dit de ne plus rien dire.

Ça, c’est un truc qui m’a marquée, surtout parce que c’est très, très récurrent, mais vraiment, incroyablement, c’est tout le temps présent, quoi. Et de partout.

Du coup, je pense c’est une anecdote assez rigolote de se dire que les hommes ont enfin trouvé un moyen de pouvoir violer les femmes en toute impunité : c’était juste en mettant des talons.

RDG – C’est un moyen DE PLUS.

Axelle – Oui, un moyen DE PLUS.

RDG – Parce que quand, tu vois, on est à plus de 99% d’impunité en France, ce truc c’est vraiment pour ceux qui veulent faire à coup sûr dans l’impunité. Mais en gros…

Axelle – Oui, c’est ça!

RDG – Tu n’encours pas grand-chose, quand tu es en France, et que tu es un agresseur.

Axelle – Clairement, clairement.

RDG – Bref, d’accord. Est-ce que tu as une autre anecdote? je crois que tu voulais parler d’une amie qui a eu une hystérectomie rapidement?

RDG – Oh oui. J’ai une amie transidentifiée qui, bien sûr, ne sait pas si elle est non binaire, un homme… ça change suivant les jours, enfin bref. Et elle est transidentifiée depuis moins d’un an, je ne sais plus exactement quand est-ce qu’elle a commencé.

Elle prend de la testo depuis très peu de temps, aussi. 

Et elle fait partie de ces nombreuses personnes qui ont pris rendez-vous avec un chirurgien. En général, c’est des chirurgiens sur Paris qui font ça. Mais il y en a un peu de partout, aussi. 

Qui a téléphoné à un chirurgien, qui a dit “Voilà, mon utérus me fait me sentir dysphorique”. Il faut savoir qu’elle ne prévoit pas, par exemple, d’enlever ses seins. Il faut savoir qu’elle compte arrêter la testostérone, d’ailleurs j’étais très inquiète pour elle, parce qu’au début, elle comptait tout enlever, et j’ai dû lui dire que, sans hormones du tout, elle allait avoir de sérieux problèmes. Ça montre bien le manque de connaissances du sujet, quoi. Et quand elle a demandé à ce chirurgien : “Voilà, je veux enlever mon utérus”. Le chirurgien a dit “ok”, donc au téléphone. Et ils ont décidé d’une date. Quelques mois plus tard, elle a eu cette opération, elle a soudainement réalisé que… enfin elle n’a rien réalisé du tout, mais elle est en très mauvaise santé depuis. Ça fait plusieurs mois, et elle ne s’en remet pas. Je pense qu’elle n’était absolument pas prête. On est plusieurs amies à essayer de l’avoir questionnée un peu, de lui avoir dit : “Tu sais que, quand même, enlever ton utérus, c’est pas rien, quoi!” Et elle disait qu’elle savait.

Elle était un peu de ces personnes trans qui veulent, comme la plupart des personnes trans, j’étais comme ça aussi, qui ne veulent rien entendre, et qui à peine on critique, on essaye de poser une question, c’est tout de suite… Elles crient à la transphobie.

Donc et du coup il se trouve… elle a pas de complications. Je ne sais pas exactement quoi, je sais qu’elle a vraiment mauvaise mine. Et elle a du mal à rester debout régulièrement, pendant de longues périodes.

Voilà : pour moi, les chirurgiens, ils font des expériences sur des gens en mauvaise santé mentale.

J’ai discuté avec une autre femme détrans, qui s’est fait enlever la poitrine – pareil,  c’était via téléphone, donc n’avait jamais rencontré les chirurgiens – quand elle est arrivée, ils lui ont demandé s’ils pouvaient faire une autre technique que ce qu’elle voulait, alors qu’ils s’étaient mis d’accord avant, parce que le chirurgien voulait montrer à ses internes… Et il faut savoir que la différence de technique, c’est à dire qu’elle avait voulu une péri aéro, j’arrive jamais à le dire “péri aréolaire”, bon bref. Voilà, une “péri”, ce qui fait beaucoup moins de conséquences sur le long terme. Et le chirurgien voulait faire une double incision, ce qui, vraiment, n’implique pas les mêmes choses, voilà. 

Et elle m’a dit c’était vraiment : “ah bah voilà, tiens. On va expérimenter cette chirurgie, quoi.” 

Et je pense que c’est important de le signaler.

RDG – C’est délirant.

Axelle – C’est délirant.

RDG – C’est-à-dire que, en gros  “j’ai envie de m’exercer, donc, du coup, vous avez choisi une technique, mais moi je vais faire la mienne, parce qu’il faut que je la montre à mes internes”…

Axelle – C’est exactement ça!

RDG – “…qui, à leur tour, pourront mutiler de nouvelles jeunes filles!” 

Axelle – Totalement, totalement… et c’est terrible!

RDG – Je ris, mais vraiment, je ris jaune!

Axelle – Non non non, aucun souci, je rigole aussi quand je suis désespérée.

Ce genre d’histoire, il y en a plein, vraiment. Et partout. Vraiment.

Je n’ai même pas abordé le thème des enfants qu’on transitionne parce qu’ils sont gays. Enfin, je veux dire, il y a quand même des cas, comme ça, où des parents voient que leur enfant est un peu non-conforme dans son genre, ou alors potentiellement homosexuel. Et ça arrive qu’ils les transitionnent. Il y a beaucoup d’enfants aux USA qui rapportent ces trucs-là. 

Alors c’est encore très tabou, et il n’y a pas trop de communication encore là-dessus, mais il y avait des ex psychologues de certains centres trans, qui disaient clairement que leurs directives c’était : “affirmer, tout le temps affirmer.” Et ils ont totalement vu des parents qui disaient clairement : “Je pense que mon enfant est gay, ce serait mieux s’il transitionnait”.

C’est un truc que je n’ai pas abordé, mais c’est aussi important à prendre en compte.

RDG– Est-ce que tu as quelque chose à ajouter?

Axelle – Un truc que j’ai observé, aussi, dans les communautés trans dans lesquelles j’étais, c’est que tout le monde, à un moment ou à un autre, finit par reproduire des stéréotypes.

Tout le monde, quel que soit ton genre, quel que soit ton sexe, tu peux faire quoi que ce soit, les oppressions reviendront toujours, d’une manière ou d’une autre.

Rajouter des paillettes dessus et prétendre que ça n’existe pas, ça ne fonctionne pas!

Donc, pour toutes les personnes qui se sentent mal par rapport à ça : “ton corps ne te définit pas. Ton corps ne définit pas ton futur. Ton corps ne définit pas qui tu peux être, et c’est toi qui choisis ton futur. Modifier ton corps, ça ne fonctionne pas. Modifier son corps pour prendre une identité, ça ne fonctionne pas. 

Ta personnalité ne devrait pas définir ton corps.

Ton corps tu es né.e avec. Ça restera ton corps à vie, et le mieux que tu puisses faire, c’est en prendre soin, le plus possible. 

Parce qu’une fois que tu fais des bêtises, comme moi, eh bien tu n’as plus qu’à… le regretter.

J’ai quelque chose à ajouter pour toutes les femmes, les jeunes femmes, même en fait, n’importe quelle fille, n’importe quelle femme. 

Toute ma vie, j’ai cherché un moyen de fuir ma condition de femme.

J’ai toujours cherché un moyen de détruire le patriarcat, de me libérer des stéréotypes, de pouvoir vivre librement, et… comme un homme, en fait! 

Et j’ai envie de dire que c’est normal de se sentir comme ça. 

Et un conseil de la part d’une femme détrans qui y est passée : j’ai vraiment essayé, et j’ai découvert que ça ne fonctionne pas. 

Et je veux vraiment dire qu’on ne se libère pas du genre en le renforçant. On ne se libère pas de notre condition de femme en s’injectant de la testostérone. On va juste se rajouter des problèmes de santé en plus, et même probablement des problèmes psychologiques.

Parce que je discute avec beaucoup de personnes détrans sur Internet, et tout le monde a des difficultés. Parce que c’est dur d’être détrans. C’est dur de faire toutes ces choses-là, pendant des années, et de découvrir que c’était la pire erreur de notre vie, et de découvrir qu’on ne pourra jamais, jamais retourner en arrière. 

J’ai perdu ma voix à jamais : je ne pourrais plus jamais chanter comme avant.

Je n’aurais plus jamais de poitrine, et… Quelque chose qui m’a fait énormément, à la fois du bien, et à la fois m’a rendue triste, c’est que toute ma vie, on m’a répété que la seule raison pour laquelle je devrais garder ma poitrine, c’est parce que j’avais de beaux seins. 

Et en fait, j’ai découvert que les seins, c’était un organe comme les autres… Pour moi c’est extrêmement misogyne, en fait, que des chirurgiens, et que beaucoup de gens se disent que, si une femme ne veut pas se sentir femme, elle va s’enlever des seins! 

C’est extrêmement misogyne!

Et se dire que, au final, c’est pas très grave, c’est juste des seins… Pour moi, je trouve ça très problématique.

Oui, les stéréotypes de genre existent. 

Oui le patriarcat existe.

Mais on ne va pas le détruire en transitionnant, ça ne fonctionne pas.

RDG – S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe :  https://womensdeclaration.com 

Rebelles du genre – Épisode 61 – Pauline

Pauline – Je m’appelle Pauline, j’ai 34 ans, je vis dans le Sud-Ouest. Je suis lesbienne, mariée, belle-mère d’une jeune femme de 19 ans et je suis survivante de violences familiales et aussi sexuelles. Je suis analyste fonctionnelle, mon travail c’est d’absorber de l’information sur n’importe quel sujet, mais moi je me centre sur le travail de mes collègues pour en extrapoler toutes les problématiques, tout ce qui pourrait en fait poser problème dans leur méthode de travail, soit pour atteindre leurs objectifs, soit dans leur bien-être. Des fois, il suffit que deux personnes se parlent, tout simplement, pour régler un problème qui peut (des fois depuis des années) créer une tension inutile au sein de l’équipe. Donc c’est mon travail de cibler ces informations là, de m’assurer que l’information circule correctement, que les gens sont dans de bonnes conditions… 

Je suis en arrêt maladie longue durée pour COVID long, donc en ce moment, je ne travaille pas.

Ce qu’il faut savoir, c’est que j’ai un frère jumeau. Ce dont je vais parler est assez intime mais, jusqu’à mes 5 ans environ je n’avais pas conscience de ce que c’était qu’être une femme ou de ce que c’était d’être un homme. Je pensais que mon frère et moi nous étions une seule entité, avec deux corps. 

À l’arrivée de ma petite sœur, nos parents ont décidé qu’ils allaient faire une chambre pour les garçons et une chambre pour les filles. On m’a séparée de mon frère et ça a été un trauma que j’ai réglé l’année dernière, en thérapie, qui a vraiment façonné ma personnalité, parce que j’ai eu la sensation d’être amputée d’une partie de mon corps. Et c’est aussi là que j’ai commencé à comprendre que j’étais supposée être une petite fille et que mon frère était un petit garçon, donc il y avait des différences fondamentales dans la façon dont on interagissait avec les autres. 

J’ai grandi dans une famille nombreuse. On est une grande fratrie dans la tradition juive marocaine. Mes parents n’étaient pas croyants mais pratiquants, jusqu’à leur divorce. 

La synagogue est un lieu extrêmement misogyne et c’est la première fois aussi où, par exemple, j’ai compris ces règles : les petites filles ne doivent pas toucher la Torah, elles ne doivent pas être devant dans la synagogue pendant les prières parce que c’est impur, parce qu’on n’est pas méritantes… C’est quelque chose qui m’a braquée contre la religion d’emblée, alors que j’aimais bien les histoires, j’aime bien lire la Bible, je trouvais ça intéressant toute la partie mythologique. Mais toute la partie purement religieuse, croyance, déjà ce n’était pas quelque chose que mes parents nous enseignaient réellement, puisqu’ils y allaient par habitude. Et cette injustice de ne pas pouvoir être avec mon frère dans ces moments-là a semé les premières graines. 

Ensuite, dans la logique assez sexiste, clairement, de mon éducation, mes frères avaient une grande liberté de mouvement et pas moi. Les filles restent à la maison, elles n’ont pas à sortir. Les garçons, par contre, sont libres de sortir quand ils veulent. Il n’y avait pas trop de logique à ça. 

Mon père était un pervers narcissique et toute la famille était complètement sous sa coupe. C’est à dire que c’est un homme qui était extrêmement charmant et charismatique à l’extérieur, et totalement tyrannique dans la sphère privée, plus tard aussi dans sa sphère professionnelle (puisqu’il avait un poste à responsabilité et il faisait la même chose dans son métier qu’à la maison).

Il a fallu que le père adoptif de ma mère décède et ce deuil-là lui a donné la force de s’échapper, de partir du foyer. Malheureusement, elle est partie toute seule. Dans les années qui ont suivi, ils ont considéré que c’était un abandon de foyer. Elle n’a pas eu la garde. On s’est retrouvés seuls, avec ce père, et moi en tant que fille aînée. J’étais un peu le bouc émissaire. J’étais la personne qui représentait ma mère dans le foyer. Je devais m’occuper de mes frères et sœurs. J’étais responsable de toutes leurs bêtises, c’était de ma faute. Donc c’est une injustice complète et ça a duré deux ans, jusqu’à ce que ma mère obtienne enfin la garde, mais elle n’a obtenu la garde que des filles.

Là encore, le genre (enfin le sexe, le genre, je sais pas trop comment dire… mais pour moi c’est le sexe), c’est ce qui a déterminé les décisions du tribunal. On a laissé les garçons chez le père et on a laissé les filles aller chez la mère. Sans logique, parce que c’est également séparer de nouveau des jumeaux, c’est de nouveau séparer une fratrie qui a grandi ensemble, parce qu’entre le plus âgé et le plus jeune, il n’y a que 10 ans d’écart. On est une fratrie qui est très, très proche, avec beaucoup d’enfants. C’était totalement absurde, mais c’est la décision qui a été prise. 

Ça a été une nouvelle période également. J’étais vraiment dans l’adolescence quand ma mère a eu la garde. J’avais 15 ans à peu près et on passait toutes les vacances chez mon père. Il profitait des instants où on était seuls pour me faire du matraquage psychologique ; c’est à dire qu’il me faisait du chantage, il me faisait du chantage au suicide, il m’expliquait qu’il allait se tuer, parce que c’est de ma faute si il avait perdu la garde de ma petite sœur, que je méritais de trouver son corps… Il me faisait voir des films sur le suicide pour vraiment me baigner dans cette ambiance, et j’ai vraiment cru, un soir, que j’allais me suicider, parce que je n’en pouvais plus. 

Je commence un petit peu à avoir des sanglots dans la voix. J’ai vraiment beaucoup de compassion pour cette jeune femme que j’étais, parce que vraiment c’est difficile de subir ça. Et maintenant je réalise, en tant qu’adulte, qu’il ne le faisait jamais devant quelqu’un. On était toujours seuls dans ces périodes-là et dans une famille aussi nombreuse, c’est pas évident d’être seuls. Pour montrer le degré de perversité, c’est impressionnant.

Malheureusement, je pense que ma mère, quand elle est partie, est partie très loin. Elle est partie dans les îles. C’est quelque chose que j’avais lu dans un article quand j’étais dans ma vingtaine, que beaucoup de femmes qui divorçaient partaient dans les départements d’outre-mer et je ne m’étais pas posé de question. 

Maintenant que j’y pense, je me dis que ma mère évitait tout simplement de se faire tuer, parce qu’à plusieurs reprises, mon père parlait de se suicider, me faisait ce chantage, mais aussi il parlait de tuer ma mère. Des fois, il partait dans de grandes diatribes là dessus, où ils fantasmait le meurtre de ma mère. 

Je me rappelle qu’une fois, ma petite sœur était présente cette fois-là, et elle est partie chez sa meilleure amie. Après, elle ne lui a plus adressé la parole pendant 6 mois. Il s’est calmé, parce que ma petite sœur, c’était la petite dernière, et il l’adorait. Donc il s’est dit : “Je suis allé trop loin.”. Mais c’était fou quand même, d’en arriver à ça pour qu’il lève le pied. 

Moi, je me suis appris à sous-réagir. C’est ce qui m’a poussée à la thérapie. Je me suis fait agresser dans le tram à Bordeaux en allant au travail par quelqu’un qui était grossophobe et je n’ai pas réagi sur l’instant. J’étais juste sidérée que quelqu’un que je ne connais ni d’Ève ni d’Adam se permette de m’agresser verbalement, de se pencher vers moi, d’essayer de m’intimider physiquement, juste parce que j’étais là. Il n’y avait strictement aucune interaction entre nous deux. J’étais vraiment en état de choc, tout le monde me disait : “Tu devrais être en colère ! Énerve-toi ! Ce n’est pas normal comme situation.” . Et moi, j’étais juste triste, je n’arrêtais pas de pleurer, je ne comprenais pas.

Quelques jours après cet incident, je me suis de nouveau fait crier dessus par une collègue en pleine réunion. Elle est venue s’excuser juste après, je lui ai dit qu’il n’y avait pas de souci et, 24 heures plus tard, là je m’énerve. Je me dis que ce n’est pas normal, ce n’est pas normal que je mette 24 heures à m’énerver. Elle s’est déjà excusée donc ça ne sert à rien. Qu’est-ce qu’il se passe? Voilà, c’est ce qui m’a poussé à aller en thérapie et la thérapie m’a aidée. Il m’a fallu beaucoup de temps pour déconstruire, comme j’avais ce mécanisme de sous-réaction.

La première fois (entre guillemets) où je me suis “énervée en public”, j’étais radieuse, parce que je n’avais jamais de colère en moi. J’étais toujours dans une attitude de non-réaction, qui était une attitude de protection que j’ai internalisée petite fille. Maintenant, en sortant de ça, j’étais trop fière. Le monsieur contre qui je me suis énervée n’était pas fier, mais moi j’étais trop fière. 

Je suis restée longtemps apolitique. Je lisais énormément, je suis restée dans ma bulle et je suis tombée sur l’idéologie queer par glissement.

Quand j’ai rencontré la personne qui allait devenir ma femme, on s’est rapidement demandé si on allait avoir un enfant. Elle était déjà mère célibataire, elle avait une petite fille de 9 ans. Est-ce qu’elle aurait un deuxième enfant ? Moi, ça aurait été mon premier. En fait, elle ne voulait pas d’enfant. La maternité a été extrêmement compliquée pour elle, mais elle ne voulait pas me refuser le droit à la maternité si c’était quelque chose que j’éprouvais. 

La question, c’était la faisabilité. En fait, ce n’est pas possible en France. Si on voulait un enfant, il fallait soit se forcer à avoir un rapport avec un homme, soit partir en Espagne ou en Belgique, avoir des grandes dépenses, supporter des hormones dont on n’a pas forcément besoin, puisque peut-être que ça aurait pu marcher sans les hormones. C’était un effort absurde, et moi je n’avais pas envie d’avoir un enfant à ce point. Et en plus, ça m’a énervée de nouveau. Ça m’a fait un profond sentiment de colère et d’injustice, parce que j’ai toujours eu le syndrome de la bonne élève. J’ai réalisé que je n’avais jamais fait une seule infraction de ma vie. J’avais toujours payé mes impôts, toujours été réglo. Et j’étais une citoyenne de seconde zone. Je n’avais pas le même droit que ma voisine si elle était mariée, parce que j’étais une lesbienne, mais si j’avais été une femme célibataire, j’aurais eu le même problème. Donc le problème n’était pas que d’être une lesbienne, c’était d’être une femme en France. On n’avait pas les mêmes droits par rapport au fait qu’on était liées à un homme, ou pas. 

Ça m’a vraiment fait une onde choc. J’ai commencé à m’intéresser à toutes les discriminations. J’ai toujours été sensible au discriminations, j’ai grandi en banlieue parisienne, j’ai vu beaucoup de discriminations sur la race, sur la religion, mais là c’était la première fois que ça me frappait sur l’homosexualité ou sur le sexisme. 

J’ai commencé à consommer du contenu sur Internet sur ces questions-là, et petit à petit je suis tombée sur des gens qui parlaient de l’idéologie queer et de transphobie. 

J’étais totalement ouverte à ces questions et en empathie avec ces personnes qui parlaient de leur souffrance. 

J’ai commencé à en parler autour de moi aussi, et ma femme était vraiment sceptique. 

Moi, je disais : “ Rien que le fait que tu sois sceptique, c’est de la transphobie.” . Ou le fait qu’elle, elle ne supporte pas du tout tout ce qui est féminin. C’est une femme qui est extrêmement androgyne. 

Je dis : “Si ça se trouve, tu es non binaire.” . 

Et je lui donnais tout le vocabulaire que j’apprenais au fur et à mesure. Ça la braquait un peu mais elle me disait : “Ok, si tu veux, c’est ton délire, moi ça ne m’intéresse pas.” . 

Elle a pas mal de misogynie intégrée, elle a toujours été très garçon (on va dire), dans la façon dont ses parents l’ont éduquée et dans la façon dont elle relationne. Elle a toujours été entourée d’hommes. Elle n’a jamais été très à l’aise avec les femmes. Elle dit : “C’est ton délire, moi je suis une femme parce que je supporterais pas d’être un homme, parce que l’homme c’est l’ennemi.”. Mais d’un autre côté, elle n’a pas d’appétence à dire : “Je suis une femme”. Le genre ne l’intéresse pas, c’est quelque chose qu’elle a complètement déconstruit, qu’elle n’a jamais vraiment voulu intégrer et donc devoir se conformer à ces stéréotypes, ça l’agaçait plus qu’autre chose.

Moi, j’étais à fond. Je me suis pris la tête avec ma meilleure amie parce qu’elle me disait : “Non, c’est inadmissible que ces gens-là viennent parler dans les écoles et confusent les enfants sur ces questions-là.” . Elle n’était pas d’accord et moi je ne comprenais pas pourquoi. Je suivais le train-train des informations, le cœur sur la main… J’étais un peu attristée de voir que les deux femmes que j’aime le plus sur la planète, ma meilleure amie et ma femme, ne comprenaient pas ces questions-là. Je trouvais que c’était un manque d’empathie de leur part, donc on a arrêté de traiter ces questions ensemble parce que ça pouvait trop être sujet de conflit. Je ne voulais pas mettre en péril nos relations pour ces questions-là. 

Quelques années après, il y a eu notre fille (donc ma belle-fille. Il faut savoir qu’on vit ensemble depuis qu’elle a 10 ans et pour moi, c’est ma fille. Je vais en parler comme ça. C’est ma fille, quand on vit avec un enfant, qu’on le voit grandir… ).

Elle nous a fait un coming out trans vers ses 14 ans et elle était hyper émue quand elle nous l’a dit. Elle était ravie que je comprenne. Bon… Sa mère était ultra sceptique et on a eu de la chance car son prénom était neutre. On n’avait pas à en changer. Quand elle nous l’a dit, elle s’était déjà coupé les cheveux sans nous demander notre avis (quelque chose qui ne nous importait absolument pas). 

On lui a acheté des vêtements de garçon et on a posé quelques questions sur ce qu’elle voulait qu’on fasse. Globalement, ce n’était rien. Et puis, ça s’est arrêté. Ça a duré à peu près un an pendant qu’elle, apparemment, se genrait au masculin au collège, ce qui faisait qu’elle était hyper cool. Elle avait la côte auprès des filles et des garçons. 

Puis comme ça, du jour au lendemain, ça s’est de nouveau changé en fille, dans sa façon vestimentaire et puis, même maintenant, elle switche en fonction des jours et de ses humeurs. Elle s’habille comme elle veut, elle se fringue comme elle veut. 

Elle a arrêté mais sans vraiment faire d’annonce pour en parler.

Je me suis un peu inquiétée quand elle a arrêté de se masculiniser, en me disant que peut-être elle essayait de se conformer aux attentes de sa mère et qu’on avait raté quelque chose, peut-être qu’elle était en souffrance dans son coin et qu’elle ne nous en parlait pas… 

Mais pas du tout. J’étais juste à côté de la plaque. Elle avait eu une dysphorie pubertaire qui était passée. Elle avait pris le temps, elle cachait ses seins pendant une période parce qu’ils venaient juste de sortir, et que c’était difficile comme période. Après, elle s’est habituée à son nouveau corps, et non seulement elle l’acceptait, elle le montrait dans d’autres types de tenues vestimentaires.

En janvier 2022, j’ai rejoins le cercle féministe d’Antastasia dont je suivais les vidéos. J’étais un peu confuse sur son contenu sur le genre. Je trouvais qu’elle disait des choses pertinentes et en même temps ça me mettait mal à l’aise. Il m’a fallu beaucoup de temps pour mûrir sur ces questions. Il m’a fallu 4 ou 5 mois pour commencer à absorber le message qu’elle essayait de faire passer et à déconstruire tout ce que j’avais appris de cette idéologie, à me dire qu’elle peut poser problème tant qu’on parle de personnes qui ont une dysphorie, qui ont une maladie mentale. 

Et encore, dans ces personnes-là (c’est un petit pourcentage de personnes) dont la solution est effectivement de faire une transition, il existe des personnes qui souffrent de dysphorie et qui n’ont pas besoin de transitionner parce que ce ne serait pas la solution. 

Je pense à la chanteuse Mathilde qui parle de sa dysphorie sur les réseaux et c’était quelque chose dont elle n’a pas le besoin . C’est très difficile pour elle de vivre dans son corps de femme, surtout quand elle est en pleine crise, mais la solution pour elle n’est pas de se prétendre homme, clairement. Et je trouve que c’est positif d’avoir ce genre de personnalité, qui en parle de façon saine. 

En tout cas, moi, par rapport à mes changements de position, j’avais un peu peur d’en parler à la maison et de clasher avec ma fille, mais il s’est avéré qu’elle aussi avait fait un 180 degrés sur les questions trans, parce qu’au lycée c’est devenu impossible d’avoir une opinion qui n’est pas pro queer. Juste impossible. Elle s’est fait insulter, elle s’est fait traiter de transphobe parce qu’elle ose dire : “Mais il faut arrêter de temps en temps, il faut remettre les choses dans un autre contexte.” . Et juste parce qu’elle essaie de dire non des fois à certaines choses qui sont dites au lycée, elle s’en est pris plein la tête. 

Finalement, maintenant à la maison, c’est quelque chose dont on parle assez régulièrement et on est toutes d’accord. Donc ma femme est assez contente. Elle n’a pas changé d’avis depuis le début et elle a attendu qu’on fasse notre cirque.

RDG – Que vous réfléchissiez ensemble, séparément et ensemble. Et voilà, c’est bien, c’est chouette cette patience qu’elle a eu et qui fait que vous ne vous êtes pas braquées. Ça s’est passé comme naturellement la plupart des dysphories pubertaires passent en fait.

Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour notre démocratie?

Pauline – Premier point : c’est l’invisibilisation des femmes dès l’instant où l’on a plus le droit d’utiliser ce mot-là. Déjà qu’en tant que femme on a tellement de difficultés à être vues, à être entendues, si en plus on ne peut même plus être caractérisées, ce n’est pas possible. 

Pour illustrer ce propos, je veux parler de ma mère. Ma mère, c’est quelqu’un qui a une belle éducation, qui a eu une belle carrière, et qui a eu des relations extrêmement toxiques toute sa vie, et qui souffre de pas mal de problèmes de santé dont malheureusement j’ai hérité. Et ça fait plus de 50 ans qu’elle a des douleurs sans diagnostic. 50 ans d’errance médicale, depuis ses 19 ans. Moi je l’ai su seulement quand j’ai commencé à avoir mes douleurs, quand je lui en ai parlé et qu’elle les a reconnues. Je ne savais même pas que ma mère souffrait à ce point toute sa vie en fait et les médecins lui ont dit : “Ce n’est pas mortel, ce n’est pas grave.”. Voilà, parce qu’ils étaient incapables de dire ce qu’elle avait, parce qu’il n’y avait pas de diagnostic clair. Ils lui ont dit de laisser tomber et donc elle a laissé tomber.

RDG – Juste pour préciser, ta mère est médecin elle-même. 

Pauline – Oui. Elle est médecin elle-même. Elle était médecin du travail donc elle a beaucoup travaillé dans la prévention, mais en fait elle a juste laissé tomber parce que de toute façon, quand on est en errance médicale, ça demande un investissement énorme de la part de la personne qui est malade, de force et de hargne pour essayer de trouver des réponses. Il faut s’acharner à encourager le médecin à faire des tests et la majorité ne veut pas parce que ça coûte de l’argent. 

Donc il y a tout un mur d’incompréhension qui se met devant nous, et globalement quand c’est des femmes, honnêtement, j’ai l’impression que ça joue. Alors en plus des femmes qui comme moi par exemple sont en surpoids… mais c’est encore pire ! Parce que tout va être mis sur le fait que c’est le poids qui est la cause de tout alors que ça n’a strictement rien à voir. Ce n’est pas parce qu’une personne est ronde qu’elle n’a pas une maladie génétique, qu’elle n’a pas quelque chose qui dans son corps et détraqué qui n’a strictement rien à voir avec les cellules graisseuses. Et ça, c’est très très compliqué. 

Donc si on ne sait même plus ce que c’est qu’une femme mais comment est-ce qu’on peut lutter pour les droites de ces personnes là ? On leur a toujours dit de souffrir en silence et maintenant on leur dit : “ Vous n’avez même plus le droit d’utiliser le mot qui vous caractérise le mieux, que vous pouvez utiliser pour vous défendre.” . C’est une violence extrême.

Aussi être une femme, c’est un parcours du combattant. Moi, dans ma famille (dans toutes les générations, dans toutes les générations que je connais, donc ma grand-mère, ma mère, ma génération), il y a eu des viols. Ça veut dire que dans ma famille, je sais que toutes les femmes de ma famille, à toutes les générations, il y en a au moins une qui a été violée, et que dans toutes les générations de ma famille, il y a au moins un homme qui était un violeur. Parce que majoritairement le viol est commis par quelqu’un de la famille, ou dans la sphère familiale en tout cas, même si c’e n’est pas la famille de sang. Et je sais ça, en fait. 

Si on peut plus désigner que ces personnes là correctement, mais c’est une catastrophe, parce que comment on va protéger nos enfants ? Enfin moi, c’est quelque chose maintenant que je suis mère… Mais ma fille… Des fois j’ai peur, comme ça, ça me prend parce que je ne peux rien faire pour la protéger. Je ne peux pas être avec elle tout le temps, je ne peux pas l’étouffer, je ne peux pas l’empêcher de vivre, je ne peux pas lui donner les armes nécessaires parce que c’est à elle de se les faire. On peut juste lui ouvrir des voies mais après c’est à elle de décider si elle les prend ou pas. 

On est dans ce monde où c’est tellement facile pour les hommes de faire du mal aux femmes, il n’y a tellement pas de retour de bâton… Il m’a fallu la thérapie pour réaliser que le seul homme avec qui j’ai relationné m’avait violée. Déjà il m’a fallu 3 ans avant que je me dise : “Ah, c’était peut-être une situation de non consentement.”.  Et ensuite, j’ai réalisé que non seulement il m’avait violée, mais il m’avait violée plusieurs fois, qu’il m’avait étranglée, j’avais failli perdre connaissance donc j’ai peut-être frôlé la mort parce qu’à 5 minutes près, c’était fini et je ne m’en rappelais pas. J’avais complètement oublié cet événement là. Pour rien, par pulsion. Enfin, juste pour exercer son pouvoir.

C’est vraiment une violence extrême ce que je vous dis, mais c’est vraiment la violence qu’en tant que femme il y en a tellement qui le vivent, et certainement des choses encore pire. Si on ne peut pas prendre ça au sérieux, si des personnes qui se maquillent vont dire : “C’est ça être une femme.” Mais c’est aberrant parce que moi je ne supporte pas le maquillage. Non mais sérieux… Et pourtant, je suis une femme.

Et en fait la vérité des femmes, c’est une vérité de résilience et c’est vraiment important, vraiment, que les femmes trouvent leur voix et qu’on ne se laisse pas silencier comme ça, pour les enfants. 

Moi, quand je pense que si ma fille avait insisté pour les bloqueurs de puberté, je l’aurais probablement appuyée dans cette démarche, quand elle avait 14 ans, parce que je croyais vraiment, sincèrement, à cette idéologie.

Et en fait, aujourd’hui, ça me donne envie de vomir quand j’y pense, que j’aurais pu l’aider à se détraquer la santé!

Moi, ayant des problèmes de santé que je n’ai pas choisis, provoquer ça sur un corps sain! Mais ça me rend malade! Que des personnes, que des enfants se rendent malades physiquement parce qu’ils sont en recherche de connexion, donc ils ont juste ce besoin des adolescents de se connecter à une communauté, mais vraiment ça me rend physiquement malade d’y penser. Et en tant que personne qui est malade, qui souffre d’une maladie chronique, donc invisible, c’est-à-dire que les gens me croisent dans la rue, ce n’est pas écrit sur mon front que je suis malade… je ne suis pas en fauteuil roulant, et c’est l’image que tout le monde a. Ou je n’ai pas de canne, ou etc. Et en fait, on propose à des gens qui sont vraiment en situation de vulnérabilité énorme, un remède miracle! 

“Fais une transition, tu verras, tous tes problèmes vont s’envoler!”

La vie ne marche pas comme ça! Et je peux comprendre en fait, ce besoin.

Surtout pour des enfants qui vont vraiment, des gens qui sont extrêmement fragilisés… Moi, il y a des journées qui sont extrêmement difficiles dans mon quotidien, même avant le COVID long, il y a des journées où faire le moindre mouvement, c’était pas possible, en fait! Mon corps refuse, parce qu’il y a tellement de douleurs, tellement de problèmes… Ça ne marche pas. Je ne pouvais pas bouger.

Si quelqu’un arrive et me dit : “attends, je peux soulager… ta solution c’est : clac! Tu fais tout ça, et après ça ira mieux!” 

Mais les gens ont besoin de ça. Et après, tu es, en plus tu es prise dans cette communauté qui te chérit, qui te dit : “oui tu souffres plus que tout le monde, et on te comprend, etc.” 

Bien sûr que c’est séducteur, et c’est hyper dangereux, c’est complètement… enfin. C’est quelque chose qui me, vraiment qui m’inquiète, en fait. Déjà quand on voit la corrélation entre le mouvement transactiviste et les algorithmes des réseaux sociaux, que en fait, c’est quelque chose qui est favorisé. Les confinements, avec … ça envoyait les gens encore plus sur les réseaux sociaux. Que les réseaux sociaux, ça a fait flamber, en fait l’idéologie queer.

Que les gens ne sentaient pas bien, parce qu’ils étaient enfermés chez eux, et étaient privés de contact social… et que tout d’un coup, maintenant, ils pouvaient faire partie d’une communauté, entre guillemets, géniale.

Et en plus, qui a ce côté magique d’être : “toi tu souffres plus que tous les autres!”

J’ai toujours vu ça, en fait : c’est que les gens veulent toujours être “le plus”.

Ils ne peuvent pas être le meilleur, bah alors il veut être celui qui souffre le plus, celui qui est le plus malheureux dans sa vie, etc.

En fait, moi ça me fait flipper : on est en train de créer une société de nombrilistes fanatiques. Ils sont haineux, ils sont dangereux et ils glorifient la victimisation!

Donc on se croit en pleine dystopie de science-fiction, mais en fait, non! C’est la réalité.

Et quand je vois le nombre de médias, de personnalités, de politiques qui suivent le train sans se poser de questions, et qui mettent en avant le droit de faire taire le personnel médical, de faire taire les parents, de faire taire les scientifiques, museler les femmes… bah ça fait peur pour notre droit d’expression et pour les personnes qui sont prisonnières de cette spirale. Les personnes qui ont suivi le mouvement, elles sont convaincues, elles vont convaincre d’autres personnes, c’est comme une contagion. Et puis un jour, elles vont se réveiller, et elles vont se dire qu’elles se sont fourvoyées. On le voit avec les personnes qui les détransitionnent : ces personnes-là, elles souffrent, mais tellement plus encore, que si on s’était occupés d’elles correctement dès le début, en fait. Qu’on leur avait apporté ce dont elles avaient besoin dès le début, au lieu d’essayer de leur dire “il suffit d’une baguette magique”. 

Donc je n’ai pas trop de conclusion à ça.

Honnêtement, c’est vraiment juste de l’horreur pure, et l’impression d’être complètement dans un monde absurde.

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner aujourd’hui sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces? Est-ce que tu te sens en danger ou en sécurité, dans ton entourage personnel ou professionnel, ou est-ce que tu te sens parfaitement libre de parler?

Pauline – Alors je témoigne sous ma réelle identité parce que je n’ai pas de présence particulière sur internet : je n’ai pas l’énergie, pour l’instant, de faire du militantisme actif, donc je ne cours pas de risque. Et je pense que c’est important de témoigner sous ma réelle identité dans l’espoir qu’il y ait des jeunes comme ma fille, en fait, qui vont se réveiller avant qu’il ne soit trop tard, avant qu’ils n’aient commis des dommages irréparables sur leur corps et leur santé. 

Il n’y a rien de romantique ou d’héroïque dans la souffrance et la maladie. Vraiment.

Ce n’est pas drôle.

Ce n’est vraiment pas drôle, donc il ne faut pas le faire.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Pauline – Oui. Je trouve ça mineur, et en même temps… Sur Facebook, en fait, il y avait une femme que j’ai rencontrée sur un groupe de fans d’une autrice lesbienne qui écrit de la science-fiction. Donc là, on est dans de la littérature de niche. Et en fait, elle a publié un article pour des goodies transactivistes! Et il y avait tellement de gens qui ont liké, qui faisaient partie de ce groupe! Et sur les objets, donc, il y avait une liste de noms d’autrices lesbiennes. Et en fait c’étaient des sacs et en fait c’était la liste des noms dans les couleurs LGBT… C’était un merchandising, mais… le fait de voir les noms de ces femmes, en fait, dont je respecte le travail, suivre l’idéologie queer… Je ne sais pas comment expliquer. En tant que lesbienne, c’est dur de trouver de la représentation qui est saine, en fait. Parce que certaines de ces autrices, quand elles écrivent des histoires, c’est horriblement nul. C’est des histoires romantiques sexistes : il y a une femme qui va être prédatrice, et une femme qui est proie, et c’est violent, et c’est juste un maquillage pour vendre, dans tous les clichés misogynes de l’amour qu’on peut imaginer. Il y en a, en fait, qui ne sont pas comme ça. Il y en a qui vont parler de vraies femmes, de parcours de femmes, de femmes qui vont être résilientes, des femmes qui vont être complexes… 

Et donc, voir le nom de certaines de ces autrices, que je respecte, sur ces objets de merchandising où il y a marqué “Sapphic with a T”… Mais c’est plus que triste, c’était rageant! Parce qu’il n’y a pas beaucoup d’espaces, en fait, qui sont pour les lesbiennes : il y a très peu de bars, et la majorité se font fermer, les uns après les autres. 

Les groupes de militantisme, on l’entend souvent sur le podcast, en fait c’est juste de plus en plus difficile d’être militante et lesbienne.

Et apparemment, en fait, même la littérature lesbienne, elle se fait grignoter par ça quoi!  C’est fou!

RDG – Quand tu parlais de merchandising, c’était donc quel type de goodies?

Pauline – C’est des sacs, des coussins, des tasses. Il y a marqué “Sapphic with a T” en plein milieu d’un texte coloré, et le texte coloré, c’est le nom, la liste des noms de ces autrices.

RDG – Comment tu le traduis, toi?

Pauline – Lesbienne avec un T.

RDG – Lesbienne à pénis, quoi.

Pauline – Voilà, c’est ça. En fait je n’ai pas de mots!

D’une certaine façon, ça m’étonne pas, parce que certaines autrices que je trouve qui ont de la profondeur, ce sont des autrices qui ont un parcours universitaire, qui sont professeures dans des universités américaines… Et en fait on est vraiment dans l’univers où elles sont le plus, entre guillemets, dans l’univers queer, on va dire : les facs.

Je me rappelle avoir lu la liste avec une angoisse, en me disant “est-ce que je vais trouver toutes les autrices j’apprécie? Vraiment? Toutes celles qui m’ont émue, qui m’ont fait réfléchir, qui m’ont prise aux tripes?” 

Heureusement, non. Heureusement il y en a qui sont absentes. Et je me dis, mais quelle force elles ont eue. Parce qu’elles y sont quasiment toutes, entre guillemets, toutes les femmes qui publient dans les années 2010-2020, elles apparaissent sur ce truc. Donc celles qui ont dit non : “waouh!” 

RDG – Oui, c’est des résistantes, en fait!

Pauline – Oui

RDG – As-tu quelque chose à ajouter?

Pauline – Alors oui. Je voudrais faire une citation de Audre Lorde, de son texte : “Transformer le silence en paroles et en actes.” Elle l’a communiqué, en fait, après avoir cru qu’elle allait mourir de cancer.

Et donc elle a écrit ça :  

“J’allais mourir tôt ou tard, que j’aie pris la parole ou non.

Mes silences ne m’avaient pas protégée.

Votre silence ne vous protégera pas non plus.

Mais à chaque vraie parole exprimée, à chacune de mes tentatives pour dire ces vérités que je ne cesse de poursuivre, je suis rentrée en contact avec d’autres femmes, et ensemble nous avons cherché des paroles s’accordant au monde auquel nous croyons toutes.

Construisons un pont entre nos différences.

Et ce sont l’intérêt et le soutien de toutes ces femmes qui m’ont donné de la force et m’ont permis de questionner les fondements-mêmes de ma vie.”

Voilà. Cette citation, je la trouve extrêmement puissante, et dans la continuité, je voulais dire un grand merci, en fait, à toutes les rebelles du genre, et à toutes celles qui m’ont réveillée, pour le travail magnifique que vous faites.

Et c’est ce qui m’a inspirée à témoigner.

RDG – S’’il vous plaît, signez la déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe.

 womensdeclaration.com 

Rebelles du genre – Épisode 60 – Marino

Marino – Bonjour, je m’appelle Marino, j’ai 67 ans, je vis à Paris, je suis retraitée et je suis une militante lesbienne radicale depuis de nombreuses années. C’était il y a longtemps et ça n’a pas cessé depuis.

Rebelles du Genre – Bonjour et bienvenue sur le podcast Rebelles du genre.

Nous sommes des femmes, militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basés sur le sexe, et donc notre biologie. 

Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes et le genre en est le moyen

Nous sommes les rebelles du genre. 

Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. 

Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis, elles ouvrent les yeux, constatent sa violence et la refusent.

Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre et qui témoignent de leur parcours. Écoutons leur parole.

Marino – Alors dans mon souvenir, lors de manifestations féministes à Paris, du vivant, d’ailleurs, de Maya Surduts, collectif national droit des femmes, CADAC, il y avait déjà des attaques du strass, qui nous perturbait les manifs, qui nous lançait du faux sang, qui nous insultait, qui essayait de nous empêcher de manifester normalement, pour le dire comme ça. Et, en fin de manifestation, il y avait souvent des altercations, qui n’en venaient pas aux mains, entre des jeunes féministes et des personnes militantes du Strass. 

Je me souviens très bien qu’une fois à Bastille, à l’arrivée, j’ai dit à Maya : “ Mais, ça prend de plus en plus d’ampleur leurs attaques, leur menaces, leurs intimidations, et il va finir par y avoir des problèmes lors de manifestations, peut-être même à la fin.”. 

Et je me souviens que Maya m’avait dit : “ Mais oui, bien sûr Marino, mais on ne peut pas les empêcher de manifester sur la voie publique”. 

Voilà, ça c’est le souvenir le plus ancien que j’ai avec le strass. 

Mon plus ancien souvenir de menaces transactiviste date de la dernière rencontre de la coordination lesbienne en France qui eu lieu en 2017 à Metz dans l’Hérault. L’association FièrEs venait depuis deux/trois ans aux rencontres. FièrEs se présente comme une association féministe radicale et révolutionnaire, créée en 2013, portée par des lesbiennes bi et trans, qui vise à détruire le cis hétéro patriarcat. 

Toujours est-il que cette année-là, Anne B avait été invitée pour intervenir sur la question trans, telle qu’elle faisait débat dans le milieu LGBT. À peine avait-elle commencé son intervention que les militantes de FièrEs la prirent à partie au prétexte des définitions ou vocabulaire employé qui ne convenait pas. Elles voulaient l’empêcher de poursuivre et l’interrompaient sans cesse, car elles estimaient que Anne déniait la souffrance des trans et ne savaient rien de ce sujet. Ce fut très difficile de leur faire entendre raison pour qu’elles arrêtent leurs attaques et qu’elles attendent la fin de l’exposé pour en débattre. 

Tout au long de l’intervention d’Anne, très perturbée par ce qui arrivait, les militantes de fier soupiraient fort, avaient presque honte, et la salle était partagée entre celles qui voulaient écouter et celles qui se sont mises de leur côté et critiquaient l’intolérance de la CLF. Il faut dire que de plus en plus de lesbiennes queer qui venaient en rencontres étaient très LGBT, alors que la coordination avait quitté l’inter LGBT en 2013 à cause de désaccords politiques et idéologique (pour faire court). Certaines auraient volontiers ouvert les rencontres aux gays, aux trans. Ces lesbiennes queer commencaient à contaminer une majorité silencieuse et passive. On avait l’impression que la poignée de militantes que nous étions demeurions isolées, alors nous étions évidemment contre la GPA, contre le système prostitueur. FièrEs, ce jour-là, a tenté de mettre le bazar, de provoquer peut-être même un putsch et à interpeller les organisatrices de façon très virulente.

En 2023, Anne n’aurait sans doute pas pu faire son intervention car l’objectif des transactivistes est de censurer et d’interdire toute parole contraire à leur idéologie. 

En novembre 2017, la CLF vote sa dissolution à l’unanimité, lors de son AG annuelle. 

De toute façon, la CLF avait vécu et les temps changeaient. Et il fallait la protéger de la récupération et de la dégradation. Il y a bien, même actuellement, la nouvelle collective lesbienne qui a repris des dossiers actions en cours, mais je n’en fais plus partie. Nous verrons ce que l’association récemment créée Agora lesbienne féministe draine comme force militante. 

Deux autres événements que je vais rapidement évoquer eurent lieu en juillet 2016 et août 2017, en Normandie, organisés par une collective. Deux rassemblements féministes et lesbiens. Mais jusqu’à la dernière minute, les lieux furent tenus secrets de peur que des transactivistes ne viennent perturber les rencontres, les saboter et les empêcher, à cause de thématiques, d’ateliers, qui auraient pu les contrarier comme l’idéologie transgenre et la disparition des jeunes lesbiennes. 

Je me souviens qu’en avril 2017, à Avignon, où j’allais souvent, il y a eu la création de l’association LGBT La Langouste à Bretelles. D’ailleurs, ce sont deux lesbiennes qui sont et étaient à l’initiative de cette création d’association. Au fil des ans, assez rapidement, (au fil des mois plutôt), il y avait toujours une problématique trans. Et je me disais : “ Mais qu’est-ce que, constamment, viennent faire les trans dans des soirées qui étaient, certes, mixte gay lesbiennes.”. Voilà, je me souviens de ça.

Et puis, je fréquente vers Villeneuve-de-Marsan, une terre lesbienne aux Pouilles, et durant l’été 2018, nous parle de ce qui se passe à Nantes depuis des mois et de la scission qu’il y a dans l’association féministe lesbienne à cause de prises de positions (je crois que c’était… alors moi je vais dire un trans parce que moi je pars du sexe d’origine vers le genre,), un trans qui veut rentrer au conseil d’administration. Là, il commence à y avoir des discussions, des conflits, des dissensions au sein de cette association. Il va y avoir la séparation, la scission et la création des 44 vilaines filles en avril 2018.  Donc il y a toute cette alerte de ce qui peut se passer dans des associations lesbiennes féministes.

Et puis du CELM, Centre Évolutif Lilith de Marseille, nous alerte de plus en plus sur la problématique du transactivisme et de leur offensive. Ça confirme ce qui s’est passé à Nantes, l’entrée dans des associations lesbiennes féministes. Peut-être faudrait-il modifier les statuts du CELM afin qu’on puisse être protégées de ce qui s’est passé à Nantes et que n’arrive pas au CA des personnes trans. 

Par conséquent, en octobre 2019, à une assemblée générale, (tout le monde n’était pas d’accord mais il y a eu peu de temps avant des échanges, des explications, pour que tout le monde comprenne bien ce qui se jouait là), il y a eu les changements de statut afin que ce soit seulement des femmes nées femmes qui puissent adhérer au CELM. 

Voilà, ce sont les trois années donc entre 2017-2019. 

Et depuis deux/trois ans, l’offensive du transactivisme dans les milieux féministes et lesbiens n’a pas cessé de prendre de l’ampleur. C’est comme un rouleau compresseur, relayé par les réseaux sociaux, les médias, dans tous les domaines : la souffrance des trans, la problématique des trans, la transphobie… C’est un tsunami qui nous tombe dessus. On est en plein dedans mais voilà, on résiste.

Il y a eu aussi le film Arte “Petite Fille” qui est absolument scandaleux et qui montre la méconnaissance de beaucoup de psychiatres, ce qui est pas le cas évidemment de Céline Masson et Caroline Eliacheff avec l’écriture de “La Fabrique de l’Enfant Transgenre” qui était grande respiration de pouvoir lire ce livre, qui arrivait au bon moment, parce qu’elles ont vraiment tout compris de ce qui arrivait aux filles et aux adolescentes et aux adolescents. 

Et puis, la manif NousToutes, l’an dernier déjà, le 20 novembre, qui est la date du fameux assassinat de la femme trans (qui a eu lieu je sais plus en quelle année).

Je fais vraiment là, très rapidement, une parenthèse : je n’ai rien contre les personnes trans mais (ce qui est important, c’est ce qui se dit après le “mais”) je suis tout à fait révoltée par le transactivisme. Ce qui est quand même différent. 

Donc, il y a eu cette manifestation qui est soi-disant pour la journée pour l’élimination des violences faites aux femmes, donc bien sûr Caroline de Haas à ce moment-là dans Nous Toutes. Et cette année, le 19 novembre, toutes les pancartes où il n’y a pas le mot femme. L’année dernière, il y en avait même par rapport à la transphobie. 

Là, la révolte atteint son acmé pour moi sur cet effacement, totalement, des femmes, et du détournement d’une date anniversaire extrêmement symbolique qui est le 25 novembre. Fort heureusement, il y a des villes en France qui résistent aussi au tsunami de Nous Toutes, qui est un groupe de personnes qui ne sont absolument pas féministes et qui sont tout à fait pour défendre la prostitution, le port du voile. Et d’ailleurs, on est évidemment des TERFS si on ne dit pas leurs slogans, si on ne défend pas leurs positions. D’ailleurs, le Strass (en tout cas c’est ce qui m’a été rapporté, c’est peut-être du rapporté/déformé mais je n’en suis pas sûre) aurait dit que cette année NousToutes les aurait beaucoup mieux accueillis que l’année dernière, Caroline de Haas. Ça montre un petit peu l’évolution de Nous Toutes.

Il y a également ce qui s’est passé en mai 2022, lorsque je me suis inscrite auprès des Culottées de Nice sans y adhérer pour un court séjour du côté de Barcelone.  Naïvement, j’ignorais que les Culottées de Nice étaient pro-trans. Je croyais que c’était une association lesbienne féministe pas forcément militante. C’est en cours de chemin que j’ai su que c’était une association qui pouvait (alors avec des guillemets) “accueillir les personnes trans”.

Il n’y avait pas de trans lors de ce séjour mais il se trouve que, la veille du départ, je me suis retrouvée à dîner avec les deux fondatrices les Culottées de Nice et de Lesbiennes SOS Homophobie. L’amie avec laquelle j’étais venue à Barcelone était avec d’autres personnes.

Au cours du dîner, elles m’ont demandé comment cela se faisait-il que je m’étais inscrite au week-end à Barcelone, puisque j’aurais pu rencontrer des trans et que j’étais à l’époque au conseil d’administration du CEL. Et elles étaient évidemment très scandalisées par les positions du CEL (évidemment TERF) et je ne pouvais vraiment pas débattre, échanger. D’abord, elles étaient quatre, j’étais seule. C’était compliqué et c’était difficile pour moi de pouvoir justifier mes positions féministes qui justifiaient justement que je ne pouvais pas être favorable au transactivisme, et je ne pouvais pas les rejoindre ni adhérer à leur association. 

RDG -D’accord, donc tu t’es retrouvée sommée de justifier comment, en tant que lesbienne et en tant que féministe, tu pouvais ne pas être d’accord avec le fait de coucher avec une femme à pénis.

Marino – Ah oui, bien sûr ! Non mais ça c’était… Je ne sais même pas si j’ai pu le dire parce que j’avais quand même une pression sur moi. Et je me rends compte que, oui, j’avais une accélération au niveau du cœur. Je me suis demandé comment allait se terminer ce dîner là. Je ne m’y attendais pas et j’ai eu l’impression d’être dans un guet-apens. 

Je n’avais pas pensé une seule seconde qu’on allait me reprocher d’être venue et de faire partie du conseil d’administration du CEL et donc par conséquent d’être une TERF. Donc c’est toujours… Quand on est pris par surprise, comme ça, dans n’importe quelle situation, c’est toujours plus difficile de rebondir, surtout quand on n’a pas d’alliées avec nous et qu’on ne s’y attend pas.

Donc c’était pénible.

RDG – Oui, c’était volontairement pénible. C’est à dire que jusque-là, quand on allait sur un événement lesbien, ce n’était pas la première question qui venait à l’esprit. C’est “est-ce qu’il y aura des hommes?”. 

Marino – Ah oui. Maintenant, si on fait la liste des associations lesbiennes féministes où seules des adhérentes seraient nées femmes et même socialisées femmes, oui, on les compte vraiment sur les doigts de la main. Si on ne modifie pas les statuts, comme on a fait d’ailleurs sur la terre lesbienne près de Villeneuve, on a également modifié les statuts pour pouvoir rester entre nous.

Quand on dit nous, c’est femmes, lesbiennes, nées femmes.

RDG – On va passer à la question suivante maintenant si tu veux bien. Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ?

Marino – Des associations lesbiennes féministes, et beaucoup d’associations féministes on va dire hétéros font partie du front féministe. Parce que le front féministe et des associations féministes ont pris conscience (l’alerte qu’on avait donné il y a quelques années avec le danger du transactivisme) que ce transactivisme pouvait amener à l’effacement des femmes, et même du mot femme, et des droits des femmes. 

Parce que le transativisme, ce n’est pas un mouvement féministe. Il défend le droit à la prostitution, évidemment ils ne sont pas abolitionnistes, ne sont pas universalistes, et ils vont défendre le port du voile, peut-être même remettre en cause le droit l’IVG. 

En tout cas, toutes les revendications et les acquis des luttes féministes depuis des années 70 sont évidemment en danger avec ces personnes là.Parce que pour moi, clairement, derrière le transactivisme, c’est le patriarcat. Et le patriarcat, c’est la haine des femmes et la haine des lesbiennes. 

Donc cela fait plaisir de voir qu’un grand nombre d’associations féministes ont rejoint le front féministe, ce qui n’est pas le cas de certaines associations féministes qui ne voient pas, je pense, ou n’en ont pas encore conscience, ou peut-être ont peur de prendre position par rapport au rejet de du transactivisme et de ce qui se passe en ce moment dans la société. 

Alors, pour les enfants, les adolescents, les adolescentes en particulier, et bien je redis ce que j’ai dit tout à l’heure avec la fabrication de l’enfant transgenre : oui, il y a un véritable danger pour tous ces enfants vulnérables, et pour au moment de la puberté, (beaucoup de filles autistes en particulier), et tous les questionnements tout à fait normaux que des jeunes vont avoir par rapport à leur sexualité ou leur orientation sexuelle ou des questionnements où l’on quitte l’enfance, où on n’est pas dans le monde des adultes, où on est dans cette période de changements pubertaires, de bouleversements physiques et psychiques. 

Et évidemment, moi, dans les années 68 70 (ou peut-être un petit peu avant) quand j’étais Tomboy, et bien on m’aurait dit : “ écoute, ne t’inquiète pas, tu pourras être un homme. Parce qu’en fait tu n’es pas née dans le bon corps, et tu pourras avoir des bloqueurs de puberté, et tu pourras même être opérée pour être un garçon (ce que tu es réellement, tu le sais), ce sera possible.”.

Je pense que j’aurais entendu ce discours là, moi, comme beaucoup de filles qui ne sont pas forcément devenues lesbiennes, je me dis : “ Qu’est-ce qui est en train d’arriver ?”. Si en plus les parents n’ont pas leur mot à dire ou pratiquement pas si dans les établissements scolaires il suffit qu’un garçon ou une fille demande à être appelé par un prénom de l’autre sexe (alors moi je dis sexe, eux ils diront genre). Je pense qu’en France, il va falloir que le gouvernement prenne conscience de ce qu’il est en train de se passer dans les écoles, dans les familles, dans la tête des enfants et des adolescents. Je pense que la Maison de Solenn, à Paris, reçoit de plus en plus d’adolescents qui veulent transgenrer.

RDG – Transitionner ?

Marino – Transitionner, merci.

RDG – En fait, si on regarde d’ailleurs, ce sont surtout des filles, on peut parler d’adolescentes que d’adolescents, et on comprend pourquoi les filles ne sont pas si bien. Alors, je voulais juste faire un petit point, vu que tu as parlé du Front Féministe. Pour celles et ceux qui écoutent, vous pouvez aller trouver le texte de déclaration du Front Féministe sur le site de Zéromacho, sur le site des Chiennes de Garde ou sur notre page facebook. Et évidemment, Rebelles du Genre est signataire et adhérante du Front féministe, bien sûr.

Marino – A partir du moment ( que ça soit pour Caroline et la chef Céline Masson ou d’autres sociologues, et de plus en plus de personnes jusqu’aux pièces de théâtre ) où il n’est pas possible d’aborder la problématique du transgenrisme, de la transidentité… Il y a tout de suite tout un vocabulaire complètement nouveau et on ne sait même plus quel mot on peut employer ou pas.

Toujours est-il que, lorsqu’il y a des menaces d’agressions, des harcèlements, des injures, des menaces de mort, qu’on empêche tout débat, tout échange, qu’il ne s’agit même pas de discuter mais qu’on veut terrifier, qu’on veut empêcher les mots, empêcher de parler, empêcher de dire, empêcher d’échanger, et qu’on menace et qu’on interdit. Pour moi c’est terriblement dangereux. Parce que c’est une façon de procéder de totalitaire, de stalinisme, des procédés des pays qui ne sont pas démocratiques. On doit se taire et on ne peut pas donner des positions qui sont différentes. D’ailleurs, on peut se poser la question : “ De quoi ont-ils peur pour empêcher le débat?” 

RDG – Qu’est ce qui t’as décidé à témoigner aujourd’hui ?

Marino – Je témoigne aujourd’hui parce qu’il s’est passé un événement en octobre 2022, lors du festival de films féministes lesbiens Cineffable, à Paris à l’Espace Reuilly (où je suis bénévole depuis que Cineffable a lieu à l’Espace Reuilly) . Il y avait une projection “Rebel Dykes”( je sais plus de quoi, de toute façon je ne voulais pas y aller). J’étais bénévole pour l’entrée des salles, pour les billets. C’était ouvreuse. 

Et puis, ce jour-là, il y avait pas mal de personnes trans qui sont venues. J’en ai vu quelques-unes, d’autres en ont vu encore plus. Toujours est-il que le lendemain sont arrivés, devant la porte de la salle à l’extérieur, trois personnes : une des organisatrices de Cineffable et deux jeunes bénévoles. L’une des deux, d’emblée, m’a accusée d’avoir tenu des propos transphobes la veille. 

Sur le moment, je ne savais pas du tout de quoi elle me parlait. Je ne comprenais pas du tout. Je me suis dit : “Mais… J’avais une conversation avec des copines, je n’ai pas souvenir…”. Elle me dit : “Oui, puis des personnes du public t’ont entendue. On nous a rapporté des propos transphobes.” 

C’est en fait une bénévole qui m’a entendue dire à ma copine, qui était près de moi dans la salle, “ Encore un homme trans.” . Parce que j’avais demandé à une personne qui était là.

Il était debout, il était avec son portable, la projection allait démarrer. Ma copine est à côté, moi je suis ouvreuse donc je vais vers lui et je lui dis : “ Est-ce que vous avez besoin d’aide ?” . La personne ne me répond pas. Imperméable, chapeau, ou grande mince. Donc là, je le regarde. Je regarde le visage, vraiment et là je me dis : “Ah bah oui, c’est un trans.” . Il devait être en échange avec quelqu’un avec son portable. Donc il est parti dans la salle. Et là, je me tourne vers et je lui dis : “Encore un homme trans” . Et il y avait une autre bénévole ouvreuse, évidemment, qui a entendu.

Voilà. Au lieu de venir me voir, j’ai bien vu qu’elles parlaient entre elles. (d’ailleurs j’ai dis : “Elles sont en train de parler entre elles et elles me regardent). Mais j’étais loin de tout ça moi. Elles ont rapporté ce qu’on considère comme un propos transphobe, parce que je n’ai pas dit “femme trans”. 

Donc je dis “homme trans” , puisque je pars du sexe de départ pour le genre d’arrivée. C’est ça effectivement qui m’a été reproché, puisque pour les queers, j’ai mégenré. On a commencé à y avoir un échange, j’explique pourquoi je disais “homme trans”, en quoi c’était problématique. Et comme je portais le badge de Cineffable, c’était inacceptable que je puisse tenir des propos transphobes. 

La discussion (si on peut dire) a continué, moi sur mes positions qu’il y a deux sexes biologiques. “ Non, non. D’ailleurs, qu’est-ce que tu fais des personnes intersexes ? ”. C’est là où j’ai dit : “Écoutez, dites moi le pourcentage de personnes intersexes, mais il y a deux genres.” Il y a le genre, il y a le ressenti… Tout le discours habituel que j’entends depuis des années de la part des transactivistes. Jusqu’à ce qu’on me dise : “Ah mais tu n’es pas bien informée pour les personnes intersexes et si tu veux on peut t’envoyer de l’information.” . Alors là, sur ce, j’ai gentiment remercié en disant que, question informations, je crois que j’avais ce que je voulais et qu’on allait peut-être en rester là. Parce que, de toute façon, on ne se mettrait pas d’accord.

Et c’est après cela que j’ai déclaré que j’arrêtais d’être bénévole Cineffable. Qu’elle trouve d’autres personnes pour ouvreuse, la caisse, bar. Puisque j’étais considérée comme transphobe, je n’avais strictement rien à faire Cineffable. Donc j’ai enlevé le badge et puis j’ai informé (bien évidemment) mon réseau de copines de ce qui s’était passé, jusqu’au communiqué de presse de Cineffable, qui dit qu’une bénévole qui a tenu des propos transphobes a été exclue. Non, non, non. C’est la bénévole qui a décidé de s’exclure, ce qui n’est pas du tout pareil. 

Ah, il faut quand même que je précise qu’une des responsables des bénévoles, suite à cet événement, enfin cet échange donc, dans Cineffable m’avait demandé de ne pas participer au débat, qu’il pouvait y avoir après des documentaires. Et sur ce, je lui avais répondu que je n’étais plus qu’une simple spectatrice, et qu’on était encore en démocratie, et que j’avais encore le droit d’exprimer des opinions, même si ça ne plaisait pas.

Voilà, c’est quand même important.

Dans ce communiqué de presse, Cineffable s’est même déclaré transphobe, parce qu’une réalisatrice brésilienne leur a envoyé un documentaire. Mais, ne pouvant être présente à Paris, avait proposé qu’une personne de l’équipe, je crois, puisse parler, enfin, présenter son film, ou être présente pour un échange… mais que c’était une personne trans. Et par mail, quelqu’un de l’organisation du festival aurait répondu que, si cette personne avait une barbe, ça pouvait poser problème. 

C’est ce qui m’a été rapporté, et à partir de ce moment-là, la réalisatrice brésilienne a décidé qu’elle ne donnerait pas son documentaire. Et c’est une des raisons pour lesquelles, dans le communiqué de presse, l’équipe de Cineffable s’aplatit, se met par terre, pour s’excuser de leur transphobie. 

On croit rêver.

Il faut savoir que la veille du dernier jour, a été tagué, sur le mur de l’Espace Reuilly, “Cineffable transphobe”.

Ce n’est qu’un avant-goût de ce qui va se passer pour ce festival dit “féministe lesbien”. Voilà. 

Bon enfin, ça, ce n’est plus mon problème.

RDG – Donc, si on revient : on a une organisation du festival qui t’exclut comme bénévole, parce que tu aurais tenu des propos qu’elle juge transphobes, et que bon, bref, te font te sentir suffisamment mal pour que tu décides de partir, et qui elles-mêmes, ensuite, commettent le péché de transphobie, c’est ça?

Marino – Il faudrait que je relise leur communiquer?

RDG – Donc elles font, quand même, j’espère qu’elles font quand même bien leur autocritique, façon Moscou… ou pas?

Marino – Non non non non. Alors attends, je vais te…  je vais être rapidement essayer de le retrouver, là, je l’ai pas loin du tout. 

Ah voilà.

“Communiquer jeudi 27 octobre. – donc deux/trois jours après –

La 34e édition du Festival international du film lesbien et féministe de Paris s’est achevée dimanche 23 octobre 2022.

Suite à plusieurs incidents transphobes, nous tenons à réaffirmer les valeurs de Cineffable.

Le festival, organisé en non-mixité, se veut un lieu d’accueil et de sécurité pour toutes les femmes, et/ou lesbiennes, permettant à toute personne se reconnaissant dans l’une de ces identités de venir profiter de films lesbiens et féministes, d’expositions et de restauration.

Cineffable soutient les personnes trans, et condamne fermement tout acte de transphobie pouvant avoir lieu au sein de l’association, du festival, et partout ailleurs.

Nous remercions les bénévoles et membres du public nous ayant signalé des comportements inacceptables lors du festival. Une bénévole, tenant des propos transphobes, a été immédiatement exclue de l’organisation.

Lors d’une séance, des propos transphobes ont été tenus par des personnes dans la salle, et notre prise de parole à la fin de la séance a été insatisfaisante et incomplète. Nous l’avons dit dimanche soir lors de la rencontre avec le public et nous le réaffirmons ici : Cineffable condamne ces propos qui n’ont pas leur place au festival. La transphobie est un délit.

Par ailleurs, en amont du festival, des échanges entre Cineffable et Erica Sarmet contenant des propos maladroits mais néanmoins transphobes de notre part l’ont mené.e à demander le retrait de son film de la programmation. Nous présentons nos excuses à Erica Sarmet et à l’équipe du film “A Wild Patience Has Taken Me Here”.

La communauté féministe et lesbienne inclut des personnes trans, qui font partie de notre public et des artistes que nous mettons à l’honneur. Nous déplorons sincèrement les propos et les faits qui ont pu vous faire douter de nos valeurs. Nous présentons nos excuses et ne cautionnons en aucun cas des propos transphobes, qu’ils soient tenus par des membres de l’équipe, des bénévoles ou des membres du public.

En vue de la prochaine édition du festival, nous nous engageons à nous former et à mettre tout en œuvre pour éviter ce type d’incidents afin que Cineffable reste un lieu accueillant et bienveillant pour tout notre public.

L’équipe de Cineffable.”

RDG – Eh bien, c’est ce qui s’appelle s’aplatir!

Marino – Voilà c’est ce que j’ai dit!

RDG –  On peut dire que là, c’est carpette!

Marino –  Et nous former avec OutTrans, je suppose.

RDG – On vous remercie pour les gifles que vous voudrez bien nous donner s’il vous plaît.

Marino – Voilà! Alors tu comprends c’est peut-être pas bien exprimé, ce que j’ai dit mais leur communiqué… ils s’aplatissent vraiment. Je ne sais plus ce que j’ai dit… se mettre à genoux, par terre… enfin bon.

RDG – Oui, c’est “carpette’!

Marino – Nous sommes transphobes, boum, boum, boum, boum…

RDG – S’il vous plaît, mettez-nous une gifle.

Marino – Se carpettiser, ça doit être un mot qu’il va falloir inventer. Tu vois un peu jusqu’où ça va?

Je t’avoue que ça m’a fait quand même beaucoup plus d’effet que je ne pensais.

Ce qui s’est passé à Cineffable est un peu traumatique, puisque ça a réactivé ce qui s’était passé au dîner avec les deux lesbiennes des Culottées et de SOS Homophobie, parce que ce sont des attaques personnelles. Et en plus, tu es seule à te défendre, ce qui n’est pas facile.

Alors au sein d’une manifestation, paradoxalement, je suis tellement en colère que dans ce cas-là, je suis une manifestante qui peut être vraiment très très en colère, et il n’y a pas grand monde qui pourrait me faire peur.

Mais il y a quelque chose qui arrive toujours aux victimes d’agression, quelles qu’elles soient, c’est qu’il y a quelque part en nous, “et si on était coupable”?

Et ça, je l’ai ressenti en me disant “Mais je n’aurais peut-être pas dû dire homme trans, mais femme trans, puisque c’est bien ça qui m’est reproché, d’avoir mégenré. Et après, bien sûr, la réflexion, le raisonnement me dit “mais non, mais non, bien sûr que non. Tu as tout à fait raison de dire homme trans et puis de dire femme trans lorsque ce sont des femmes qui vont vers le genre masculin.

Mais il y a eu ce petit flottement, un moment, cette indécision, cette hésitation “et si je me trompais?” Voilà, c’est ce que j’ai envie de dire : le doute, voilà. La question du doute.

Et les victimes se sentent toujours coupables, même si elles ne le sont pas, évidemment.

Moi, la réponse au communiqué de presse, je leur demande : “vous avez une responsabilité par rapport aux jeunes lesbiennes, est-ce que vous avez conscience de votre responsabilité, de ce qui est en train de se passer? Vous ne voulez pas débattre, vous êtes dans le déni”. 

Quand même, une lesbienne organisatrice de Cineffable, qui me dit qu’il n’y a pas deux sexes biologiques, qui a mon âge! 

Je reste effarée, sidérée.

C’est de la propagande, là : comment on lui a lessivé le cerveau? J’ai du mal à comprendre. Elle n’est pas féministe, c’est pas possible. Elle n’est pas féministe!

RDG – Est-ce que tu as une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Marino – Le mot anecdote convient parfaitement, parce que lorsque je vais beaucoup dans des événements, dans des théâtre, enfin voilà… dans des lieux où il y a des sanitaires : les sanitaires hommes d’un côté, les sanitaires femmes de l’autre, de sexe biologique, du coup je répète, parce que je me rassure avec ça. Il me semble bien qu’il y a deux sexes biologiques à l’origine. Et lorsqu’il y a une file d’attente beaucoup trop longue du côté des sanitaires des femmes, eh bien je vais du côté des sanitaires hommes, voilà!

Et il arrive quelquefois qu’on me fasse la remarque, que je suis, que je vais chez les hommes. Et je répondais, je disais : “bah et les trans, où on va, nous?” Ou je ne répondais rien, mais il m’est arrivé de le penser, et puis même de le dire très rarement. Alors maintenant, il est hors de question que je puisse dire “et nous les trans, où on va?” 

Ce qui montre qu’il y a peut-être, je ne sais pas moi, avant 2000-2015 on va dire peut-être qu’autour de 2015-2016, je ne réalisais pas ce qui pouvait se passer. Maintenant, bien évidemment, jamais je ne dirais ce que je disais auparavant. D’ailleurs, je crois que maintenant, les hommes ont pris le parti de voir des femmes arriver dans leur sanitaires, parce que de plus en plus, et pas seulement des féministes, vont dans les sanitaires hommes lorsque la file d’attente est vraiment trop importante chez les femmes. 

Voilà, c’est mon anecdote.

RDG – As-tu quelque chose à ajouter?

Marino – Ce que ce que j’ajouterai, c’est en direction des jeunes qui écoutent le podcast “Rebelles du genre” : de ne pas se décourager de ce qui arrive, de résister, de lutter, de s’opposer, de ne pas avoir peur, de ne pas répondre à la provocation, de se former mais auprès de toutes les associations féministes pour comprendre que ce qui est en train d’arriver est grave, et justement en direction des jeunes et des adolescentes, oui en particulier : bloqueurs de puberté,  prises d’hormones, opérations irréversibles et dramatiques, entre autres.

Les mammectomies… Les seins, c’est beau, il faut les garder, il faut les conserver. 

Sauf si on a une maladie grave, évidemment.

Et les hommes enceints, ça n’existe pas.

Il n’y a que des femmes, nées femmes, qui ont un appareil reproducteur, et qui peuvent mettre des enfants au monde, pour peu qu’on ait envie de la maternité, ce qui n’est pas une obligation non plus.

La contrainte à l’hétérosexualité, la contrainte à la maternité… bien réfléchir avant de tomber enceinte, mais ce que veut nous faire croire le Planning Familial ou le transactivisme… Non! 

Pas d’homme enceint, et évidemment, pas de maternité de substitution, pas de GPA, pas de location des ventres, pas d’exploitation du corps des femmes.

Ça suffit, le patriarcat.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole, et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe : womensdeclaration.com 

Rejoignez-nous, n’ayez plus peur. Ensemble, nous ferons changer les choses. Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail.

À bientôt pour un nouveau témoignage de Rebelles du genre.

Rebelles du genre – Épisode 59 – Pénélope

Pénélope – Je m’appelle Pénélope, j’ai 30 ans et je travaille dans le secteur de la santé sexuelle et reproductive en Belgique francophone et je travaille en particulier sur les thématiques de la contraceception et de l’avortement; et donc je travaille dans un milieu où il y a notamment d’autres axes de travail qui concernent les questions trans et de genre.

En fait, ces questions de terminologies transactivistes, avant, ne me questionnaient pas vraiment et j’ai rencontré certaines personnes qui m’ont plus informée sur cette question-là, ce qui m’a permis de remettre en question pas mal de dogmes. J’ai notamment un collègue qui travaille sur les questions LGBTQIA+, qui a des projets très intéressants, par exemple sur les questions de dépistage IST, VIH, etc. Je ne me posais pas la question vraiment, par exemple de l’écriture inclusive, moi je pratique l’écriture inclusive à partir d’une perspective féministe mais jusqu’à il y a à peu près deux ans, je ne me posais pas la question sur le fait de pouvoir choisir son pronom, etc. Et je me disais qu’en fait, si ça faisait du bien à certaines personnes, c’était quelque chose qui était OK et donc je n’avais pas de lecture vraiment critique sur le genre.

RDG – Bonjour et bienvenue sur le podcast Rebelles du genre.

Nous sommes des femmes militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basées sur le sexe et donc notre biologie. Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes et le genre en est le moyen

Nous sommes les rebelles du genre. Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis, elles ouvrent les yeux, constatent sa violence et la refusent.

Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre et qui témoignent de leur parcours. Ecoutons leur parole.

Pénélope – Donc c’était en juin 2021, où j’étais en contact sur les réseaux sociaux avec des féministes critiques du genre et en fait, en lisant certains statuts, je me questionnais, je ne voyais pas où était le problème à priori donc… J’ai été vers cette personne en lui demandant en fait, ben voilà, quels étaient les enjeux qu’elle soulevait parce que j’avais du mal à les identifier de prime abord et elle m’a envoyé vraiment beaucoup beaucoup de liens et d’informations, qui ont effectivement été assez percutants pour moi.

Et plus tard, en septembre 2021, j’avais rédigé une carte blanche sur la contraception avec mon compagnon qui est médecin et on a proposé à différentes associations, à différents intervenants qu’on connaissait de signer cette carte blanche et en fait, plusieurs n’ont pas voulu la signer parce que dedans, on parlait de contraception masculine et de contraception féminine. Et non de contraception dite masculine ou de contraception dite féminine. On a fait valoir les arguments qu’en fait, comme on parle d’organes génitaux, ce n’est pas la question du genre qui prime: un médecin doit savoir quels sont les organes sexuels de la personne pour pouvoir lui donner une contraception et donc ces différents intervenants, en fait… Donc c’était dans des commentaires sur un Google Doc ou quelque chose comme ça, et donc on commençait à mentionner le mot TERF. Nous on se considère quand-même comme des personnes assez progressistes donc c’est la première fois qu’on a été confrontés vraiment à cette réalité là, dans nos pratiques. Et là, on a vraiment été convaincus qu’il y avait un souci et ça nous a en fait amené à lire davantage et à nous informer davantage sur la question. Evidemment, on est… Je dis “on” parce que je parle de ces cartes blanches qu’on a rédigées à deux mais donc on est vraiment contre toutes les formes de discrimination, peu importe qui elles touchent et donc c’était très perturbant en fait d’avoir ce miroir, de nous dire “Ben non, en fait, vous êtes transphobes.” alors que nos intentions n’étaient pas du tout celles-là et qu’on ne s’était jamais imaginés avant ça pouvoir être catégorisés comme ça, en fait. On l’a reçu quand-même assez violemment.

Donc c’est un peu la suite aussi de la question parce que pour moi, c’est vraiment une question de démocratie en fait, de garantir les termes d’un débat démocratique. Pour moi, c’est extrêmement dangereux, effectivement, de qualifier des interlocuteurs ou interlocutrices de transphobes alors que ça n’est pas du tout le cas. En fait, c’est le nouveau point Godwin: on ne peut plus poser de questions, on ne peut plus même, voilà, soulever des incohérences et en fait, le fait d’utiliser cette terminologie “transphobe” ou “TERF”, ça clôt totalement le débat, ça humilie aussi les personnes qui souhaitent en parler et donc pour moi, c’est effectivement très dangereux au niveau de la démocratie.

Quelque chose qui m’a aussi interpellé, c’est qu’en général, ce sont surtout des hommes qui se prétendent femmes qui interviennent dans le transactivisme et qui vont dire en fait à des femmes comment elles doivent être femmes, comment elles doivent être féministes, comment elles doivent être progressistes, etc. Et alors que la majorité des personnes qui font la transition sont des femmes qui se disent hommes et donc ça, c’est assez interpellant de voir que même là, alors que les hommes sont minoritaires, c’est eux qui prennent encore plus de place dans le débat.

RDG – Oui, c’est vrai qu’aujourd’hui, l’immense majorité des transitions, c’est plutôt des adolescentes. Chez les adultes, ce sont des hommes mais chez les adolescentes qui sont très très nombreuses aujourd’hui, ce sont au moins à 75% des filles, donc des jeunes femmes qui transitionnent. Par contre, chez les adultes, c’est plutôt des hommes mais c’est une autre histoire (rires)… Des hommes d’un genre particulier.

Pénélope – Oui ou alors quand ils sont enfermés pour violences sexuelles où ils disent que finalement ils sont des femmes.

RDG – Ou des autogynéphiles. Voilà. Carrément, une perversion sexuelle.

Pénélope – Moi je pars du principe que à priori, une féministe, elle n’est pas d’extrême-droite, que les féministes ont toujours, souvent en tout cas, pris soin des personnes plus précaires, discriminées, etc. Et en fait, en soi, c’est une aberration de dire qu’une féministe est d’extrême-droite mais je pense que ça vise vraiment à limiter le débat, à limiter la parole et la preuve aussi, c’est que dans ce podcast-ci, par exemple, on est plusieurs à témoigner de façon anonyme, rien que ça, c’est vraiment une preuve du problème.

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ? Tu as déjà commencé à aborder cette question de la démocratie.

Pénélope – D’abord une menace pour les femmes pour plusieurs raisons.

Je dirais que, d’abord, il y a vraiment un enjeu de visibilité des combats féministes et de l’autre côté, d’invisibilisation de ces combats et qu’à partir du moment où le mot “femme” ne veut plus rien dire, vu que des hommes peuvent se dire femmes, on n’a plus en fait la terminologie et les mots pour mettre en phrases, pour conceptualiser les rapports de domination envers les femmes dans la société. Et en fait, des féministes qui ont utilisé le genre aussi dans les années 60, c’était pour dénoncer justement les rôles sociaux qui sont imposés aux hommes mais surtout aux femmes et en fait, le genre, à ce moment-là, n’est pas du tout quelque chose à performer mais quelque chose à combattre et quand on voit la façon dont se présentent les personnes trans en général, il est évident que les stéréotypes de genre sont renforcés et que c’est ceux-là mêmes qu’on voulait combattre à la base. Et donc c’est assez déstabilisant aussi mais c’est vraiment aussi nous enlever vraiment les mots en fait pour exprimer des rapports de domination.

Effectivement, quand on réfléchit pourquoi les femmes sont voilées, pourquoi les petites filles sont excisées, mariées de force, qui sont dans la majeure partie des personnes qui sont victimes de prostitution, etc., eh bien ce n’est pas parce que ces personnes se définissent femmes mais c’est parce qu’elles sont femmes au sens biologique, qu’elles ont un utérus, qu’elles ont des facultés reproductives et donc c’est ça qui est vraiment l’objet de la domination des hommes sur les femmes. Et donc à partir du moment où on ne peut plus dire “femme” pour décrire une femme biologique, eh bien à mon sens, on perd tout ça parce que le mot “femme” contient d’une part les aspects biologiques, et d’autre part, tout ce qui est associé à cette condition là donc on sait bien que les facultés reproductives, c’est quand-même un enjeu important et ce n’est pas pour rien que, notamment dans les guerres civiles, etc., qui sont encore en ce moment en République démocratique du Congo, il y a des crimes, des viols collectifs qui sont faits non pas sur des personnes qui se disent femmes, sur des hommes qui se disent femmes, mais bien sur des femmes biologiques.

Et donc je pense que ce mot “femme” a vraiment en soi tout ce qui se rattache en fait à un concept sociologique, avec tout ce qui se rattache à la condition d’être femme et donc pour moi, c’est très important qu’on puisse l’utiliser dans ce sens là et donc c’est vrai que j’ai du mal à comprendre qu’en fait, on ne puisse plus le faire, notamment aussi dans des secteurs comme le secteur du planning familial. Donc maintenant, par exemple, quand certains acteurs du planning familial font des publications sur les réseaux sociaux ou font des enquêtes, etc. donc même là, est utilisé des mots comme “personne avec utérus”, etc., moi je trouve ça extrêmement dérangeant, voilà, je me perds un petit peu (rires)… Ouais, je trouve ça très dérangeant et en fait, c’est encore plus dérangeant qu’à la base, ce sont vraiment des associations qui ont été créées par des femmes, pour les femmes, autour d’enjeux comme la contraception et l’avortement, enfin ce sont des droits qui peuvent toujours être remis en question, qu’il faut absolument continuer à préserver et à travailler, donc effectivement, je pense que, par exemple, un centre de santé sexuelle, un centre de planning familial, doit accueillir tout le monde comme il est mais à la base, l’enjeu vraiment du planning familial qui est féministe et qui est de défendre la santé sexuelle et reproductive des femmes, on le perd complètement de vue et donc ça m’interpelle aussi un peu.

Aussi, je pense qu’il y a beaucoup… toujours dans cette question aussi de moyens dans l’associatif, qu’il y a du temps, beaucoup de temps et beaucoup de moyens qui sont octroyés, notamment des subventions, etc. aux questions transgenres par des cabinets qui portent en eux la question des droits des femmes et donc c’est du temps et des moyens qui ne sont plus disponibles pour les femmes donc ça me questionne aussi.

J’ai deux enfants, dont une petite fille qui est encore assez jeune et c’est vrai que par exemple, moi, je suis assez matérialiste, la question de la non-mixité par exemple dans les toilettes, dans les vestiaires, etc. m’interpelle beaucoup. Donc par rapport à la non-mixité, moi, ça m’arrive de travailler avec… d’être en contact avec des cabinets politiques, etc. qui abordent ces questions là et donc ce que je constate, c’est que, par exemple, quand, dans certains événements publics, on fait la remarque “Il n’y a pas assez de toilettes pour femmes.” et donc à ce moment-là, les cabinets ont plusieurs options qui sont soit de mettre plus de toilettes pour femmes tout simplement, soit de mettre toutes les toilettes en non genré et en fait, tu remarques que c’est l’option qui est choisie parce qu’en plus, c’est moins cher donc ça arrange tout le monde. C’est très à la mode aussi, ça donne une image justement progressiste de la politique.

Ça me questionne beaucoup ces choix d’espace pour les femmes qui se retrouvent en non-mixité, pour plusieurs raisons. Parce que moi je pourrais partager éventuellement mes toilettes mais j’entends qu’il y a des femmes pour qui ce n’est juste pas possible et je le comprends tout à fait, je comprends tout à fait pourquoi. Et par ailleurs, j’avais aussi une amie qui me racontait que… qui est aussi dans l’associatif et qui m’expliquait que lors des assemblées générales dans son assos, en fait, il y avait beaucoup de décisions politiques aussi qui étaient prises par les femmes dans les toilettes parce qu’elles allaient s’isoler à la pause et avaient un moyen avec ces toilettes de se retrouver entre elles et que là, elles construisaient des stratégies politiques pour revenir après en assemblée générale. J’ai trouvé cette anecdote, anecdote entre guillemets, très parlante et très intéressante aussi, même les toilettes…

RDG – Ça montre à quel point on a besoin de non-mixité, tout simplement. Je trouve cette anecdote ultra parlante en fait, c’est quand-même incroyable qu’on en soit réduite à ne pouvoir parler entre nous que dans les toilettes, et même ça on nous le retire.

Pénélope – Et donc c’est vrai que ça montre qu’il n’y a pas suffisamment d’espaces en non-mixité pour que les femmes puissent construire leurs stratégies politiques et discuter entre elles et que là, même ces toilettes, eh ben en fait, on ne va plus y avoir accès non plus et on devrait les partager avec absolument tout le monde.

Au niveau des enfants, la question de la mixité des vestiaires, des toilettes, etc. me pose question aussi. Encore une fois, ben moi, ça m’arrive d’aller dans des thermes naturistes donc je vais dire, je n’ai pas de problème spécifique par rapport à ça mais quand j’imagine ma fille venir avec moi, par exemple dans des vestiaires mixtes à la piscine, on a une piscine près de chez nous, les vestiaires sont mixtes, je me dis en fait, elle va être là en train de se changer et peut-être qu’elle va avoir un pénis à hauteur de son visage et qu’en fait, si on dénonce ça, ben ça sera considéré comme non inclusif, comme transphobe, etc. mais c’est un vrai problème en soi, je n’ai pas envie que… et même mon fils, à la limite, aussi, mais dans l’autre sens donc voilà, je pense qu’il y a des lieux, effectivement, qui, à raison, doivent rester totalement non-mixtes. Pour moi, c’est vraiment important. En plus, on sait bien, voilà, qu’il y a quand-même aussi des questions d’abus, etc. alors je ne dis vraiment pas que les personnes trans sont des violeurs mais je pense que, voilà, il faut quand-même limiter les contacts dans des lieux comme ça, où on se retrouve complètement dénudé avec des hommes adultes. Ça ne devrait pas arriver, d’après moi.

RDG – Pas tous, mais suffisamment pour qu’on ait toutes peur, en fait. Évidemment, pas tous des violeurs, mais suffisamment, trop en tout cas.

Pénélope – Oui et c’est vrai que cette question de se dire qu’effectivement… C’est souvent un argument, quand on dit “Ben voilà, en prison, il y a des hommes qui commettent des agressions sexuelles et qui demandent à être en prison avec les femmes.” donc on répond souvent “Oui, mais bon, ça, c’est un cas…”. Bon, déjà, il y a plusieurs cas, quand on analyse, il y en a quand-même pas mal. C’est un cas qui est permis par la loi donc il y a des agresseurs qui profitent du cadre légal pour se retrouver dans les lieux de femmes et même si c’est 10 cas, imaginons qu’il n’y aurait eu que 10 cas jusqu’ici, bah c’est suffisamment, effectivement, pour se poser la question, pour se dire “Ok qu’est-ce qu’on fait de ça ?” donc c’est quelque chose qui peut arriver, qu’un homme qui se dise femme se retrouve dans une prison pour femmes et qu’il agresse des femmes donc on doit le dire, on doit veiller à la sécurité des femmes aussi dans les prisons qui, en plus, souvent, ces femmes-là ont été aussi victimes elles-mêmes, dans leur enfance ou plus tard, d’agressions sexuelles ou d’autres violences et donc voilà, il faut préserver cette non-mixité là aussi.

RDG – C’est un problème de violence masculine et ce n’est pas aux femmes de prendre ça en charge, en fait, c’est aux hommes de s’organiser, ce n’est pas aux femmes d’abriter, de protéger les éventuels personnes qui se pensent trans dans les prisons pour femmes, c’est aux hommes d’organiser ça. On n’a pas du tout à prendre aussi ça en charge, on n’est pas leurs mamans, quoi.

Pénélope – Oui donc je ne sais pas, effectivement, quelles seraient les solutions et peut-être que ce n’est pas notre problème à nous, enfin, je veux dire, de nous en charger mais oui, effectivement, peut-être que pour cette question de mixité/non-mixité, bah alors il faut créer des espaces pour des personnes qui se disent en transition aussi ou personnes trans.

Au niveau des enfants, il n’y a pas mal aussi de documentaires qui commencent à sortir pour l’instant. Moi j’ai regardé “Trans Train” notamment il y a un mois ou deux et je le trouvais assez parlant par rapport aux enfants où l’on voit les dérives clairement donc par exemple, les mastectomies sont autorisées dès 14 ans et donc ben je ne comprends pas en fait comment on autorise ça, alors qu’on a vraiment des cadres légaux  internationaux qui fait qu’on devrait protéger les enfants. Donc un enfant bah, il ne peut pas conduire avant 18 ans, il ne peut pas se faire tatouer etc… Mais on laisse une petite fille vivre une opération pour enlever ses seins et on sait que clairement le cerveau des enfants n’est pas encore totalement mature à cet âge-là.

Et donc voilà, que c’est normalement de la responsabilité des états de les protéger et donc moi je suis formellement contre tout traitement hormonal avant au moins 18 ans. Peut-être un peu “extrémiste” mais voilà.

RDG – En fait ce n’est pas du tout extrémiste, moi c’est 25 ans. Je pense que les études scientifiques démontrent que le cerveau mature jusqu’à 25 ans, donc jusqu’à 25 ans pas de traitement hormonal, pas de bloqueur, rien du tout pour que le cerveau puisse maturer jusqu’au bout. Ce n’est pas une question d’extrémisme, c’est une question de bon sens ! En fait on n’est pas là pour faire plaisir aux gens et les parents ne sont pas là et les institutions, les pouvoirs publics et les médecins, ne sont pas là pour faire plaisir aux enfants. Ils sont là pour les protéger ou pour les soigner, certainement pas pour les stériliser, les castrer ou les mutiler.

En tout cas moi, je ne me sens pas extrémiste de dire ça. Si dire qu’on doit protéger les enfants c’est être extrémiste, mais dans quel monde on est ? Enfin je veux dire : c’est vrai que ce que tu dis, la façon dont tu le dis, montre à quel point il y a une intolérance par rapport à ça et on se sent presque honteuses de dire qu’il faut protéger les enfants. C’est fou quand même!

Ça me sidère un peu de dire qu’on doit raser les murs, témoigner anonymement, avoir peur pour sa vie etc… Parce que tout simplement on veut protéger les enfants et en particulier les filles puisqu’on sait qu’elles sont hyper majoritaires parmi les victimes de cette idéologie.

Moi je suis assez fière, enfin je suis même très fière d’être féministe et pourtant j’ai peur, ce n’est pas normal !

Pénélope – Et par ailleurs je trouve que ce qui est très inquiétant, c’est qu’ on constate en fait, quand on regarde un peu les communications des transactivistes, que les enfants sont une cible en fait de la communication. Souvent dans les événements, les petits événements queer ou quoi qu’il ya a en Belgique, et bien on va parler des enfants, on va dire : “Oui c’est important que les enfants viennent nous voir et viennent parler de ça avec nous etc…” Et même dans la forme en fait des posts, on retrouve souvent du rose, des petites licornes ou alors il y en a qui font du merchandising avec des stickers, je veux dire des stickers avec des petits bonhommes, c’est clairement enfantin. Et donc moi j’ai l’impression que les enfants sont vraiment une cible de cet activisme, qu’il y a une volonté prosélyte de les convaincre le plus tôt possible. C’est vrai que par exemple, la laïcité par rapport à ça, on voit bien que la laïcité a pour but aussi de protéger les enfants du prosélytisme religieux et je pense qu’il faut les préserver aussi de ce prosélytisme là, peut-être encore plus d’ailleurs. 

Il n’ y a pas longtemps, il y a peu, il y a eu une polémique au niveau du Planning Familial avec une affiche que tout le monde a vu de “l’homme enceint” et c’est vrai que quand on va voir l’illustrateur de la fiche sur son compte, sur son compte Twitter ou je ne sais plus exactement où j’ai vu ça, ou Instagram, où clairement on voit le développement d’un merchandising qui est vraiment aux couleurs enfantines, qui sont même des objets enfantins. Donc les stickers je veux dire, nous en tant qu’adultes on ne va pas commencer à coller des stickers partout même si ça pourrait être sympa, mais donc je pense que le fait de sortir des stickers, de les mettre dans des couleurs très enfantines : pastels, avec des personnages etc… C’est clairement orienté vers un public enfant. Et moi quand j’ai vu ces stickers là, donc qui ont été réalisés par Laurier The Fox je me disais mais clairement ma fille adorerait ces stickers en fait et donc ça m’a questionné aussi par rapport à ça. Mais c’est une amie à moi aussi qui est féministe critique du genre et qui avait attiré mon attention sur cette forme de merchandising là.

RDG – Ok  ouais ouais, c’est clairement tourné vers les enfants, c’est du “grooming” en fait, c’est vrai.

Pénélope – Et je voyais un truc de caravane Queer à Bruxelles et ils étaient là : “Oui les enfants ! Les enfants !” Et je trouve ça hyper malsain en fait d’être à ce point…

RDG – Ils ont l’avenir devant eux et de longues années d’hormonothérapie aussi.

Pénélope –  Oui et par rapport  même au truc enfantin, moi j’ai pensé à un lien. Je ne sais pas s’il faut le dire parce que c’est vraiment une idée que j’ai comme ça, mais je me dis même les bloqueurs de puberté, on est un peu dans le syndrome Peter Pan en fait. Surtout ne pas grandir, ne pas affronter en fait, le fait de grandir quoi ! Te dire, voilà je ne grandirai pas !

Et il y a quelque chose, un rejet aussi…

RDG – Alors moi je vais beaucoup plus loin que toi. Je pense que c’est de la pédocriminalité : que ces hommes qui se transidentifient “petite fille” et qui poussent des enfants vers les bloqueurs de puberté. C’est ce que Sophie Robert nous a expliqué dans un épisode précédent sur les nullos, la nullification, les opérations qu’on appelle nullo qui consistent en fait à rendre eunuques des enfants, puis finalement les bloqueurs de puberté, les stérilisations etc… C’est de la castration finalement, ça crée des enfants, c’est à dire que ça va être des personnes qui ne vont jamais grandir, maturer etc… Ça crée tout un groupe de personnes qui vont être abusables par ces pédocriminels. Je pense que ça va beaucoup plus loin, que ce n’est pas fortuit quoi cette histoire de phénomène de l’enfant tu vois. 

Pénélope – Nan mais moi je parlais dans le chef de l’enfant tu vois. C’est que l’enfant n’a pas forcément envie de grandir et on profite de ça en fait, on lui dit : “mais tu n’es pas obligé de grandir”. 

RDG – Alors là dessus je suis d’accord complètement, c’est effrayant de grandir et notamment pour les filles parce qu’on sait ce qui nous attend, mais les garçons aussi, certains d’entre eux, tout ça. Je veux dire que si les adultes gardaient leur bon sens ce ne serait pas un problème. Le problème c’est qu’il y a des adultes qui en profitent pour les pousser et leur dire que c’est possible tout en satisfaisant leur fétiche sexuel de pédocriminel. Et ça c’est grave parce que c’est ce qui se passe sur les réseaux sociaux, enfin je veux dire là j’ai enregistré un témoignage d’une jeune femme qui parle de ce qui se passe dans les jeux en ligne, effectivement tu as des pédocriminels qui fréquentent des enfants dans les univers virtuels, il n’y a aucune loi, il n’y a rien, il y a aucune réglementation. Il y a des violences incroyables qui se passent dans les jeux en ligne en réalité augmentée et on parle de bien de ça, on parle bien de pédocriminels et aujourd’hui c’est leur terrain de jeu, il y a beaucoup de pédocriminalité. Un des moyens pour un pédocriminel d’atteindre sa cible, c’est de se prétendre transgenre. Je ne dis pas que tous les transgenres sont des pédocriminels, par contre c’est un moyen très efficace quand on est un pédocriminel d’atteindre des enfants. 

Qu’est-ce qui t’a décidé à témoigner de façon anonyme ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions ? Est-ce que tu te sens en sécurité pour parler librement de ce sujet ? 

Pénélope – Dans mon entourage proche je suis très libre d’en discuter donc c’est déjà une bonne chose. Toutefois sur les réseaux sociaux etc, je trouve que c’est vraiment compliqué parce que effectivement dès qu’on aborde la question, on est considéré transphobe d’extrême droite etc… Et donc on retombe à nouveau dans ce nouveau point Godwin et par ailleurs je fais notamment du travail comme indépendante aussi et je pense que m’exprimer librement sur ce sujet pourrait amener certaines personnes à me blacklister. Je sais qu’il y a plusieurs personnes dans le secteur associatif en Belgique qui sont blacklistées pour cette raison, donc c’est pourquoi j’ai décidé de témoigner en anonyme. C’est ce que je disais tout à l’heure par rapport au problème du débat démocratique, etc, en fait voilà, on en vient à nous censurer, à nous “canceller” nous-mêmes pour ne pas subir les répercussions d’une prise de parole et moi je me suis amenée… aussi dans certains cas parce qu’en fait quand on dit à quelqu’un à chaque fois qu’il est transphobe, à un moment je pense qu’il faut aussi s’auto analyser, se poser la question : “bon ok, pourquoi est-ce que je le suis vraiment ? Qu’est-ce que ça veut dire être transphobe ? Etc…” Et donc il n’y a pas longtemps, j’étais dans un lieu de culture pour les enfants, donc qui est dédié vraiment aux enfants et j’y étais avec mes enfants et la personne qui tenait la cafèt’ était visiblement trans ou non-binaire, en tous cas elle remettait en question les stéréotypes de genres. Et je me suis posée la question en fait, je me suis dit : “Est-ce qu’elle me fait peur ? Non pas du tout. Est-ce que sa présence me dérange ? Bah en fait, pas du tout non plus. Est-ce que je préfèrerais que cette personne ne soit pas là ? Non plus. Est-ce que j’ai peur que mes enfants soient en contact avec elle ? Non plus.” En fait ce qui me dérangerait c’est si je venais à parler avec cette personne et que je voyais qu’elle était justement dans ce dogme et dans du prosélytisme. Après il y a aussi plein de personnes qui se disent “trans”, il y en a qui détansitionnent, il y en a qui remettent en question le transactivisme, qui ne veulent pas être associés non plus à ça, des personnes qui souffrent de dysphorie de genre mais qui ne vont pas pour autant s’associer à l’activisme. Et moi j’ai fait cette auto analyse, de me dire que je n’ai pas de problème en soi avec cette personne, mais je pourrai en avoir si elle soutenait quelque chose que je trouve dogmatique, comme je pourrais en avoir avec une autre personne qui parlerait de religion à des enfants par exemple, ça pourrait me poser problème aussi.

Et par ailleurs l’anonymat aussi parce que si je témoignais sous ma vraie identité, je ne pourrai pas non plus dire tout ce que j’ai à dire donc c’est aussi pour ne pas me silencer justement et pour porter tous les messages que j’ai envie de porter via ce podcast.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Pénélope – Mais donc il y en a plusieurs, la première donc je disais dans l’introduction qu’ il y avait plusieurs associations qui n’avaient pas voulu signer notre carte blanche en estimant qu’elle était transphobe parce qu’on parlait de contraception masculine et féminine. 

Et en fait ces personnes qui n’ont pas voulu signer à carte blanche, elles sont aussi contre la contraception hormonale et donc moi ça me pose vraiment question parce qu’en fait ce qu’elles disent, c’est que les hormones sont un poison pour le corps et l’esprit. En fait, c’est aussi des personnes qui militent activement pour la contraception masculine et qui vont vraiment jouer sur l’hormonophobie pour développer leur entreprise, pour l’appeler comme ça. Et donc j’en viens à la conclusion qu’en fait ces personnes qui sont fort intégrées aussi dans l’activisme trans, vont encourager des personnes trans à faire des transitions avec des hormones, dans le même temps elles vont dire aux femmes qu’elles ne peuvent pas prendre la contraception hormonale parce qu’elle est mauvaise pour leur corps. Donc on se retrouve encore dans une situation où des hommes disent aux femmes ce qui est bon ou pas pour elle et par ailleurs ils ne permettent pas de faire aux femmes, ils le permettent aux personnes trans pour transitionner. Et donc là ça m’a vraiment posé question aussi sur ce mouvement et en fait j’ai vraiment à ce moment là aussi vu un lien entre plusieurs enjeux : que ce sont les mêmes personnes qui défendent des personnes trans, qui défendent la contraception masculine, qui défendent la prostitution, qui défendent la pornographie etc… Avec l’argument de dire qu’il faut beaucoup plus de fluidité et qu’il faut désexualiser les corps, mais il y a un message hyper culpabilisant derrière aussi sur les femmes et toutes les violences qui découlent aussi on le sait d’exploitation sexuelle.

Alors j’ai deux anecdotes encore, il y en a une qui est vraiment au niveau national donc au niveau de la Belgique : donc notre secrétaire d’État à l’égalité des chances qui s’appelle Sarah Schlitz, donc l’égalité des chances comme en France principalement on va dire en grande partie en tout cas, était développé pour l’égalité entre les femmes et les hommes mais pas que évidemment, mais force est de constater que cette secrétaire d’État passe énormément beaucoup de temps et de moyens sur les questions de transidentité. Je l’ai vue il n’y a pas longtemps dans un coloc organisé par une association féministe où en fait dans cette association là, il y a plusieurs tensions aussi dans l’équipe sur la question et donc elles avaient notamment diffusé deux films dont un film qui considère que les hommes qui se prétendent femme sont des femmes et que donc elles recueillent la parole des femmes et donc de toutes les “femmes” entre guillemets. Et en fait, cette secrétaire d’État a vraiment donné le bon point à l’association, donc elle a fait un discours dans lequel elle dit : “Voilà je vois que sont incluses les personnes trans et j’en suis très heureuse et c’est très bien”. Bon tout le monde connaît les tensions dans lesquelles se trouvent les associations et donc en fait pour avoir des subsides, il faut avoir ces bons points, il faut absolument inclure les personnes trans dans les luttes féministes, donc ça pose vraiment question.

Dernièrement cette secrétaire d’État a publié sur sa page Facebook qu’elle allait financer une recherche pour identifier les groupes conservateurs anti-genres. Donc elle finance un prof d’université pour faire ça et donc on est un peu inquiètes ici en Belgique de se demander si la chasse aux sorcières finalement est lancée et donc ça pose beaucoup de questions. Ce chercheur travaille aussi sur les questions de genre donc il s’appelle David Paternotte et il y a notamment quelques années quand ça bougeait un peu sur la législation IVG en Belgique (donc il se dit féministe allié etc…) on lui avait proposé de signer une carte blanche pour augmenter l’accès à l’avortement et donc il avait chipoté vraiment sur des formulations parce qu’on parlait des médecins. Il disait : “Mais je ne vais pas soutenir les médecins quand même, ça n’a pas de sens ! Alors que bon on parle de médecine sociale et on ne parle pas du médecin libéral dans sa tour d’ivoire, de médecine sociale qui permet l’accès à l’avortement”. Et donc je suis assez étonnée aussi avec le recul qu’il n’avait pas soutenu le droit d’IVG des femmes et que maintenant ce soit lui qui soit financé pour faire une recherche sur les anti-genres. Mais c’est très questionnant, je suis impatiente de voir ce que ça va donner comme résultat, mais c’est assez inquiétant de se dire qu’on finance ce type de recherche là et ça pose des questions même sur la liberté intellectuelle dans la recherche aussi.

Une dernière anecdote : donc c’est une de mes contacts sur Facebook qui est professeur de français je pense, donc avec des jeunes adolescents et elle avait écrit un texte qui était rigolo parce qu’en plus elle n’avait pas du tout conscience des enjeux dont on discute ici, pour elle c’était vraiment l’inconnu, elle ne s’était jamais intéressée à la question. Mais c’est quelqu’un qui aime bien écrire, elle avait écrit un petit texte en disant qu’elle voulait passer de femmes à femmes parce que elle était considérée un peu comme garçon manqué, pas assez féminine etc… Et elle s’est vraiment faite incendier, mais elle s’est faite incendier au point qu’il y a des gens qui ont écrit à sa direction pour qu’ils la virent de l’école. Et donc je me dis : “Bah voilà cette personne qui n’avait même pas du tout conscience des enjeux, qui a juste fait un exercice d’écriture, ben elle aurait pu perdre son travail”. 

Donc voilà c’est encore une fois en termes de liberté d’expression et de débats démocratiques, c’est très inquiétant aussi.

RDG – Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

Pénélope –  Ce que je me rends compte par rapport à mon propre chemin sur la question, c’est que  j’ai fait des études aussi en sciences sociales et puis je suis rentrée dans ce secteur planning et j’avais une approche vraiment très relativiste en fait de se dire : “Ben en fait chacun est libre de faire ce qu’il veut etc…”

Mais le relativisme, il a ses limites parce que, effectivement, quand ça concerne les enfants, comme on l’a vu, quand ça invisibilise les femmes, etc, il faut absolument les remettre en question. 

Et donc, j’ai eu beaucoup de chance, en fait, de croiser sur les réseaux sociaux – et c’est peut-être ça qu’il y a de bien, aussi dans les réseaux sociaux, même si il y a plein de côtés négatifs aussi – mais ça m’a permis, en fait, d’être en contact avec des féministes critiques du genre, et ça m’a vraiment, voilà : j’ai vraiment été beaucoup alimentée, à ce moment-là, en articles, j’ai recherché des livres j’ai écouté des podcasts, j’écoutais notamment les vidéos aussi du “Fou Allié”, etc. Et donc, ça m’a permis de faire évoluer ma pensée. Et je pense que ce qui est important, c’est de se donner, en fait, le droit de changer d’avis, de ne pas rester sur ses acquis, et de s’ouvrir aux autres arguments. Et on ne perd rien à le faire. Parce que le pire qui peut arriver, c’est qu’on change d’avis, effectivement. Mais on n’est pas obligées de le faire non plus. Et donc je pense qu’il faut vraiment être ouvert aussi à la discussion, au débat, et accepter, en fait, d’aller lire effectivement des arguments qui sont pas les nôtres, qui sont en désaccord avec ce qu’on pense sur le moment même. Et que ça permet, voilà, ça nous permet d’apprendre des choses, d’évoluer. 

Et enfin, moi ça a été vraiment par ce podcast, j’en profite aussi pour remercier avec ces personnes qui m’ont accompagnée sur ce chemin-là.

Donc voilà, j’aurais envie de finir en disant “Donnez-vous le droit de changer d’avis et surtout d’écouter des discours alternatifs sur ces questions-là, et vous ferez votre propre idée.” 

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe : www.womensdeclaration.com

Rebelles du genre – Épisode 58 – Julie

Julie – Bonjour, je m’appelle Julie. J’ai eu 19 ans récemment. J’habite en région parisienne, et je suis étudiante en études de psychologie, je suis en L2. Je suis féministe depuis mes 14 ans, en tout cas à mes 14 ans je ne me décrivais pas comme féministe, mais c’était l’émergence de mes premières pensées féministes.

J’ai eu une éducation plutôt classique, avec une famille, avec mon père, mon grand frère et ma mère. Avec un très très grand frère, donc je n’ai vécu qu’avec mes deux parents.

En fait, j’ai toujours eu une éducation, on va dire “critique du genre,  sur un aspect en particulier : sur tout ce qui était intellectuel.

On m’a toujours appris qu’en tant que fille, je pouvais faire tout ce que je voulais sur un point de vue intellectuel, que j’étais égale aux garçons, donc ça c’était assez génial. Longtemps, on m’a encouragée à faire de longues études, on m’a encouragée à me croire aussi intelligente que les garçons, on m’a donné la même éducation que mon frère, vraiment, ça c’était super. Par contre, il y a quelque chose sur lequel on a très fortement renforcé mon éducation genrée: c’était tout ce qui était apparence physique, on va dire. Depuis toute petite, j’ai des parents qui m’habillent de manière très coquette, qui m’encouragent à être très féminine en apparence, qui me poussent un peu finalement dans les stéréotypes de genre. C’était un peu particulier pour moi parce que du coup je voyais que ça faisait plaisir à mes parents donc j’intégrais mais en primaire quand même j’avais une personnalité qu’on appelle garçon manqué donc évidemment je me faisais beaucoup moquée par mes camarades mais en même temps, on me poussait dans cet aspect très féminin donc ça a consacré une sorte de discordance chez moi qui me mettait un peu mal à l’aise ce qui fait que quand je suis arrivée au collège, j’ai rejeté la féminité. Je me suis dit “En quatrième, j’ai pas envie d’être féminine, j’ai trop de pression sur moi.”. Les garçons aussi de mon collège pratiquaient énormément d’harcèlement sexuel, du coup j’ai vraiment eu un énorme rejet de ma féminité et j’ai voulu me masculiniser. Ca a créé des troubles graves du comportement alimentaire chez moi, j’ai voulu vraiment rejeter mon corps, mon apparence, j’ai carrément voulu me couper les cheveux, ma mère ne m’a jamais laissée faire, enfin je voulais vraiment être un garçon, je voulais être perçue comme un garçon, je voulais échapper à tout ce qui était norme de société parce que je ne me sentais vraiment plus comme moi mais j’avais pas du tout le recul de me dire que c’était pas de ma faute, que c’était le fait de la société.

Après, pendant ma quatrième, ça a progressé parce que j’ai découvert le féminisme, mais le féminisme à travers les réseaux sociaux. C’est à dire que, comme j’étais très mal dans ma peau, j’ai cherché évidemment des réponses… Donc, je suis passée par les réseaux sociaux. Donc, j’ai découvert quelques comptes féministes mais féministes libérales, entendons-nous bien… Pas directement radicales féministes évidemment. Et j’ai commencé à découvrir, alors il y avait Period Studio, il y avait… C’était tout ce qui était “Je m’en bats le clito”, enfin des trucs comme ça, c’était assez léger sur le fond et ça parlait quand même de stéréotypes, de dire qu’on pouvait être les mêmes, qu’on n’avait pas besoin d’être féminines, c’était tout ce qui était très superficiel donc par exemple c’était : pouvoir, apparence physique, body positive. Ca m’a beaucoup aidée dans un premier temps, j’ai tout de suite adhéré à ces idées, je me suis dit “Génial et tout, c’est vrai, on peut être libre et tout.” Donc là, j’ai un peu renoué, ça allait mieux pour moi mais j’avais pas encore découvert le féminisme de fond, ça restait vraiment en surface et c’est à partir de la troisième et de la seconde que j’ai découvert des thèmes qui étaient beaucoup plus importants donc de c’est à partir de ce moment-là que j’ai parlé d’abolitionnisme et de porno, j’ai découvert tout ce qui était thématique autour du porno et de la prostitution.

D’abord par rapport au porno parce qu’évidemment, au collège, qu’est-ce que font tous les mecs ? Ils regardent du porno. Les garçons de ma classe ils ont voulu me montrer un porno parce qu’ils avaient envie de… je ne sais pas, peut-être me… un peu me pornifier, de m’éduquer à ce qu’ils voulais. J’avais pas du tout envie, j’étais jeune, j’avais pas envie de regarder deux personnes faire ces choses-là, ça m’était tout à fait étranger et en fait, ils m’ont montrée la plateforme, ils m’ont montrée les visuels, ils m’ont montrée vraiment tout et ça m’a dégoûtée, vraiment, jusqu’à la moelle. Je ne me suis pas dit “Ah, c’est dégoûtant !” parce que c’est des relations sexuelles, je me suis dit “C’est dégoûtant parce que là il n’y a pas d’amour, il n’y a pas d’échanges, il y a des trucs, il y a des pratiques…”. Comment c’est humainement possible de faire ça ? Et en fait je voyais tous les garçons de ma classe qui étaient excités par ça et je voyais aussi énormément de filles de ma classe qui, pour correspondre aux attentes un peu des mecs de notre classe , étaient en mode “Oui mais c’est bon, c’est normal, c’est la découverte de notre âge.”. Comment ceci peut correspondre à la découverte de notre âge ? Et du coup j’ai commencé à aller me renseigner sur les réseaux sociaux et j’ai vu que sur les comptes féministes que je suivais, il y avait beaucoup d’encouragements au fait de consommer du porno, que ce soit avec son copain, que ce soit avec ses amis, enfin c’était présenté comme quelque chose de positif et moi ça m’a tout de suite dérangée. Donc ni une ni deux, j’ai cherché plus loin, je suis allée chercher d’autres sources et en seconde, j’ai découvert des comptes abolitionnistes et féministes radicaux donc là j’ai découvert Osez le féminisme, j’ai découvert le compte de Marguerite Stern, j’ai découvert les Amazones, j’ai découvert Bois mes règles et là ça m’a fait une révélation, je me suis dit “Bah évidemment, c’est pas possible, le porno.”. J’ai enfin mis le truc sur ce qui me dérangeait: c’est du viol tarifé, c’est pas des échanges humains, on ne peut pas faire ça aux gens, ce n’est pas de l’éducation sexuelle, ça n’a rien d’une représentation de la réalité, c’est de la maltraitance humaine, c’est de la traite d’êtres humains.

Et évidemment, quand on se rend compte du porno, on se rend compte évidemment de la prostitution. La prostitution, c’est un peu différent parce que j’ai toujours pensé que c’étaient des manières inhumaines d’acheter quand-même un humain. Je sais que ça ne paraît pas très logique mais je pense que c’est quand-même la base, enfin tu ne vas pas acheter des gens dans la rue, pourquoi t’achèterais des femmes ?

Et du coup, j’ai vraiment découvert ça sauf que, évidemment, en suivant ces comptes féministes radicaux, qu’est-ce qui a émergé ? Le sujet de la transidentité.

Et au début, moi, en ayant des comptes féministes libéraux, en fait, le genre, du coup, on ne le définissait plus déjà à l’époque comme un ensemble de stéréotypes, on le définissait maintenant de plus en plus comme un ressenti personnel, comme étant multiple, comme étant à respecter, comme étant… je ne sais pas, une essence en fait, au final. Moi, ça me déplaisait parce que comme je l’ai dit plus tôt, toute ma jeunesse, vous m’avez inculquée quand-même des stéréotypes sur mon apparence, comme j’étais femme, je devais être féminine. Je me suis dit “Mais non, si j’ai réussi à rejeter ça, c’est que ce n’est pas une essence, c’est que ça n’a pas de sens de dire que c’est une essence.”.

Et du coup, en découvrant le féminisme radical, ces choses-là, évidemment, j’ai appris à les remettre un peu en question. Quand je regardais les comptes, surtout, d’Antastesia, surtout sa vidéo qui s’appelle “Suis-je une vilaine terf ?”, je me suis dit “Mais en fait, c’est exactement ça, c’est ce que je pense.”. Mais j’étais pas tout de suite dans la logique de me dire “Oui, je suis 100% d’accord.”; non, non, j’étais encore dans la logique de me dire “Je suis gentille j’ai envie d’être gentille avec tout le monde donc je vais être gentille, je vais approuver ce que tout le monde dit.” mais sans le penser, c’est à dire que dans mon coin, je pensais “Bon, c’est un peu n’importe quoi mais je vais être gentille, je vais accorder à des mecs de se dire n’importe quoi sur les réseaux sociaux et de véhiculer cette idée.” et j’ai commencé à adopter le vocabulaire qui était employé par ces personnes-là et notamment sur Twitter. J’ai commencé à me définir comme une femme cis, une jeune fille cis, à 15 ans ça n’a aucun sens, même les adultes ils ne comprennent pas, personne de ton entourage ne comprend et j’ai commencé à adopter les pronoms, les choses comme ça et tout et en fait j’en ai parlé un peu autour de moi dans ma classe et là je me suis rendu compte que j’étais la seule débile en fait à me définir comme ça mais vraiment. J’en parlais et tout le monde faisait “Mais elle va pas bien dans le ciboulot !” et c’était pas du rejet de dire “Ah, qu’est-ce qu’elle est bête !”,  c’était vraiment juste “Mais qu’est-ce qu’elle raconte ?” et du coup, je me suis vraiment rendue compte que c’était un peu comme une bulle et qu’en fait les féministes radicales avaient raison. Il fallait en fait avoir le courage d’assumer, que c’était une minorité d’individus qui disait n’importe quoi.

Ça m’a fait mon peak trans: je me suis dit “Mais en fait, c’est vraiment n’importe quoi.”. J’avais même adhéré à l’idée de préférences génitales, je m’étais dit “Bon, ça se trouve, on s’est un peu gouré sur tout ce qui est orientation sexuelle.” Ca n’avait aucun sens, enfin je veux dire, à 15 ans on découvre tous notre orientation sexuelle, même si on ne le fait pas de manière consciente, c’est quand même des thématiques qui reviennent par rapport à la découverte de la sexualité et tout.

Je me suis dit “Tout ce féminisme libéral, tout ce transactivisme, ça avait foutu le bins dans ma tête.”,  j’avais toujours été pour le soutien de la cause LGB…T et après, évidemment, je me suis dit “Je ne comprends pas en fait ce que le T a à voir avec le LGB.”, je ne comprenais pas pourquoi la transidentité, donc en fait qui est sur un sentiment profond de soi, avait à voir avec le fait d’entretenir des relations amoureuses et sexuelles avec autrui, ça n’a pas forcément de rapport.

Plus ils définissaient des termes comme “préférences génitales”, “ identité”… et plus, en fait, moi, en tant que gentille personne, ça remodelait complètement mon rapport aux lesbiennes, aux gays et aux bisexuels. Il y avait même le terme “pansexuel”, c’était un terme que j’adoptais mais que je ne comprenais pas parce que pansexuel, ça ne veut rien dire en fait, ça veut dire que tu veux relationner avec n’importe qui selon son identité genre mais en fait, comment je peux communiquer avec mes amis avec, ma famille et avec d’autres personnes sur quelque chose aussi flou ? Quand j’essayais d’expliquer à mon entourage, ils étaient tous là en mode “Bah en fait, c’est la même chose que bisexuel.” Ah mais non tu ne comprends pas, c’est parce que il y a une identité de genre et tout et après, en écoutant au fur et à mesure les féministes radicales et en écoutant mes amis qui me disaient “Tu racontes n’importe quoi.”, je me suis rendue compte que ça n’avait aucun sens donc là j’ai vraiment commencé à être dans la critique. Plus j’écoutais de contenus radfems, plus j’écoutais de trucs aussi qui étaient importants parce qu’on a d’autres choses à faire en fait, quand on écoute les féministes radicales, évidemment, et qu’on s’intéresse à des thématiques aussi importantes que les féminicides, que l’abolitionnisme, que la porno-prostitution, que l’excision, et que tu vois après qu’on parle en plus de plus en plus de mecs qui sont en jupe, on a autre chose à faire et du coup je me disais “Je vais un peu laisser cette thématique de côté, c’est bon, j’arrête d’en parler, de toute manière ça ne sert à rien, je vais plutôt écouter d’autres choses.” et en fait, je me suis rendue compte que ça, ça marchait pas. Les transactivistes, ils ont une progression incroyable, je ne sais pas comment ils ont fait mais en tout cas, ils ont inondé toute la sphère internet de leur cité. De plus en plus, j’ai vu mon entourage qui me disait avant “Non mais c’est n’importe quoi.” finalement être contaminé par cette idéologie. J’avais des amies avant qui, par exemple, ne comprenaient rien aux termes cis et trans qui maintenant, quand j’en discute avec elles, me disent “Mais si, mais moi je suis une femme cis et elle c’est une femme trans.”. A l’époque, tu me disais bien que c’était n’importe quoi, qu’est-ce qui t’a fait changer d’avis ? “Bah je ne sais pas, c’est comme ça, écoute, on m’a dit que c’était comme ça, je respecte, je vais faire plaisir à la personne.”. Mais quel changement dans ce petit laps de temps, environ 6 mois… Je me suis rendue compte que ça avait explosé d’un coup et là je me suis dit “On a un véritable problème.” et en parallèle sur les comptes militants radfems, je voyais que la discussion était de plus en plus abordée et plus elle était abordée, et plus moi, ma pensée, elle s’affirmait et elle devenait radicale aussi sur ce sujet là.

C’est pas possible, faut vraiment qu’on redéfinisse ce que c’est le genre et il faut qu’on redonne de la place au sexe parce que le genre, maintenant, la définition qui est employée dans mon entourage, dans mes amis, et même en psycho par exemple, c’est vraiment défini maintenant comme un ressenti et plus du tout comme un ensemble de stéréotypes et dans mon entourage, les gens qui n’avaient même pas la notion de genre avant comme étant ressenti, aujourd’hui, ils emploient tous cette définition donnée par les transactions et moi je pense que c’est le point important de bascule.

Nous, pendant des années, on a essayé d’implanter une définition qui soit carrée, qui soit claire, qui soit factuelle, et qu’on peut prouver par ailleurs et eux, en un ou deux ans de confinement, ils ont réussi à gagner tellement de terrain, que même des gens qui ne parlent pas de féminisme au quotidien et de transactivisme, ils appliquent leur définition. C’est quand-même incroyable.

Mon premier peak trans, je l’ai eu en discutant avec ma meilleure amie. En fait, on a vu un poste, je crois que c’était sur Period Studio qui parlait de protections hygiéniques, c’est un thème qui est quand-même super important parce qu’on a toujours pas par exemple de gratuité pour les protections périodiques, et là c’était un poste militant qui disait “Telles personnes en France [je ne me rappelle plus du pourcentage exact] souffre de précarité menstruelle.” et en fait, le terme employé dans le poste c’était personnes qui menstruent. En fait, j’ai eu un bug. Sur le moment j’ai relu deux fois le post parce que je me suis dit “Qu’est-ce que c’est “personnes qui menstruent” ?” avant de comprendre que c’était moi la personne qui menstruait; c’était nous les femmes en fait ! Du coup, j’ai envoyé le post à ma meilleure amie: “Tu en penses quoi ? Qu’est-ce qui se passe en fait ?”. Elle ne milite pas trop, elle regarde des trucs de très loin et tout et là elle m’écrit, premier truc elle fait “Mais c’est quoi “personnes qui menstruent” ?”. Ca peut paraître peut-être un peu bête, on peut se dire “Oh là là mais elles sont bêtes.” mais en fait, pas du tout, je pense que ce n’est pas évident de choper tout ce néovocabulaire: “personne à vulve”, “personne à pénis”, enfin “personne à pénis”, personne ne l’emploie, on sait très bien pourquoi, évidemment, mais ce vocabulaire là, en plus d’être super flou et difficile à comprendre, le premier sentiment qui me soit venu en lisant ce post, c’est “Ah oui, donc là je suis exclue, les femmes sont exclues, sous le terme d’inclusivité.”.

Tout mon parcours de féministe, j’ai parlé de règles et de menstruations, surtout au collège et au lycée, c’était important pour moi d’avoir le terme “femme” parce qu’en fait, le premier truc que je disais aux mecs c’était “Fermez-là parce que vos mères, les femmes de votre entourage, ont aussi leurs règles.”. C’était important de dire cette phrase et de situer que c’était une thématique féminine parce que la plupart des hommes pensent que c’est des êtres immatériels qui ont leurs règles. Dans la tête des gens, les règles, c’est une thématique à part qui ne touche pas directement le quotidien des femmes. Pour moi, quand on parle de règles, c’était important de dire que c’étaient les femmes qui avaient leurs règles parce que c’était un problème qui nous concerne au quotidien. Tout le monde côtoie des femmes dans son entourage, dire que c’est les femmes qui ont leurs règles, les gens pensent directement aux femmes qui les entourent donc ça relie directement la thématique des règles et tout ce qu’on a comme droit à avoir dessus aux femmes de leur entourage. Là, quand j’ai vu “personnes qui menstruent”, ça ne m’a fait penser à personne. Moi, quand je dis “personnes qui menstruent”, ça ne me fait pas penser à ma mère, ça ne me fait pas penser à mes amies, ça ne me fait penser à personne, en fait. C’est hyper détaché et ça nous enlève clairement la lutte militante parce que si c’est les personnes qui menstruent donc même des femmes qui se disent hommes dedans, même si ces hommes là entre guillemets ont leurs règles, on a plus besoin de se préoccuper des femmes, on s’en fout maintenant. Comme c’est un peu le problème de tout le monde, on le réglera plus tard et on le réglera quand les hommes auront aussi envie. Non, ça ne marche pas comme ça. 

Mon second peak trans: j’ai parlé de préférences génitales tout à l’heure, c’est en discutant aussi avec une amie. Je lui ai envoyé un post et ça, c’était un fil sur Twitter, en gros. Bon, Twitter on sait que c’est un peu un monde à part etil disait “Voilà, si vous êtes homosexuel ou hétérosexuel et que vous refusez d’avoir des relations avec une personne qui n’a pas l’organe génital qui correspond au genre qui vous attire, vous êtes transphobe.” et moi ça m’a fait halluciner parce que je me suis dit “Le sexe, ce n’est pas une partie génitale.”. Dans le fil Twitter, il disait “Non, en fait, quand on a une relation sexuelle, on n’a pas forcément besoin de s’intéresser aux parties génitales.”. Alors… Comment avoir un orgasme si on ne s’intéresse pas aux parties génitales, j’ai envie de te dire ? Ca, c’est une problématique typiquement féminine: le nombre de mecs qui ignorent toute une partie de notre organe et maintenant on devrait plus s’intéresser carrément à l’organe au complet, j’ai envie de te dire… On va se faire jouir comment ? Avec le regard ? Enfin, ça ne marche pas.

Parce que je me suis aussi mise là-dedans, c’est que ça montre bien l’incompréhension totale de ce que c’est le sexe par ces personnes-là.

En fait, le sexe, c’est une donnée biologique qui détermine aussi tous nos caractères secondaires. Quand on a est attiré par un sexe, on est aussi attiré par des traits physiques, par une répartition de masse graisseuse, par la voix, par la pilosité, enfin c’est un ensemble et en fait, là dessus, ce qui était hyper intéressant, c’est que je suis allée du coup voir la chaîne du Fou Allié sur Youtube. Le Fou Allié, je trouve que ses vidéos sont incroyables, il a fait une vidéo super complète sur “Qu’est-ce qu’une femme ?” et en fait, il parle de la différence sexuelle entre hommes et femmes et il donne tous les critères qui sont déterminés par le sexe.

Le sexe, je pense que c’est la chose la plus importante pour déterminer notre corps. Comment tu peux ensuite arriver à dire que le sexe, c’est secondaire dans une relation sexuelle ou dans une relation amoureuse ? Non, le sexe c’est primordial, c’est faux de le dire. Mais ça, ça nous a fait rire, honnêtement, on s’est dit “Mais c’est pas possible…” et en fait, j’ai vu dans ses commentaires, ces personnes-là, il y avait beaucoup de gens qui insultaient, évidemment, en fait quand tu réfléchis à cette réaction, ce n’est pas normal, évidemment, d’insulter une personne, on ne souhaite pas à cette personne d’être harcelée, pas du tout, cette vague de haine, on va dire, elle a été déclenchée parce que je pense que les gens, cette fois, ils se sont sentis vraiment, hommes ou femmes, attaqués dans leur intimité et avec toutes les problématiques qu’on connaît sur la difficulté dans un monde hétéronormé à connaître bien son orientation sexuelle et être à l’aise avec ça, je me suis dit “Mais ça, c’est une bombe qui est lâchée.”, je me suis dit “Mais autant pour les personnes hétérosexuelles, et plus encore pour les personnes homosexuelles, et surtout les femmes lesbiennes !”.

Comment on peut dire qu’une femme lesbienne, elle a envie de coucher avec un pénis ?! Mais ça ! Ca m’a tout de suite fait penser au porno, ça m’a tout de suite fait penser aux vieux gars qui allument leur catégorie “lesbiennes” pornifiées et qui pensent que des lesbiennes vont les accueillir dans leurs relations sexuelles. On est exactement là dedans et ça, ça m’amène à mon troisième peak trans, c’est le rapport entre la prostitution et le transactivisme.

Nombre de figures du transactivisme, je vais citer Olivier Schiappa et Beverluxe, qui est largement secondaire mais qui fait quand-même pas mal de bruit, sont en rapport avec la prostitution. Combien d’entre eux reprennent des codes pornifiés qui concernent évidemment les femmes ?

Il y en a beaucoup, de mâles transidentifiés, qui se revendiquent lesbiennes donc ils disent avoir des relations lesbiennes et en plus, il pornifient ces relations et ça c’est un retour en arrière incroyable ! C’est à dire que maintenant, ces figures-là sont présentées comme transactivistes féministes, elles mettent en scène tout ce qui est représentations pornos, surtout des femmes, et d’une catégorie de femmes tellement oppressées, les femmes lesbiennes, je suis dit “C’est pas possible, en fait !” et ils présentent en plus ça comme du sexe lesbien alors que l’élément principal de cette relation sexuelle, c’est la pénétration avec un pénis, mais on a franchi un pas de plus, on est littéralement sur le truc du mec qui voit deux lesbiennes qui s’embrassent dans sa rue et qui vient les voir et qui dit “Ouh là là, ça vous dirait pas de faire un trio ?”. C’est ça mais à une échelle vraiment gigantesque et aussi, un autre truc, là c’est récemment mais j’ai l’impression qu’il y a un an ce n’était pas encore aussi généralisé, mais c’est le fait de parler des enfants trans.

Les enfants trans vraiment très jeunes, c’est à dire que récemment, je suis encore tombée sur un fil avec un petit garçon espagnol qui se revendique fille du coup, qui a parlé je crois au Parlement espagnol, c’était il y a à peu près un an, qui a fait un discours et tout sur la nécessité d’accompagner les enfants trans. Je me suis dit “On a foutu un petit garçon devant un Parlement, filmée en plus son intervention !”, donc à son âge, à visage découvert, sans voix brouillée ni rien, pour parler de ce sujet-là, mais on va où là ? C’est un enfant de 4 ans ! Déjà, les enfants, je pense qu’ils devraient être protégés de l’espace public le temps qu’ils puissent se construire, mais s’ils ne sont même pas protégés dans leur espace privé et qu’on dit à un enfant qui a telle préférence pour tels jouets, pour tels vêtements, pour tels… je ne sais pas, pour tels groupes d’amis… on lui dit qu’en plus, il est pas bien dans son corps, mais comment un enfant de 4 ans peut comprendre ça ? C’est impossible, déjà que c’est compliqué à figurer pour des adultes, là on a franchi un cap gigantesque.

Comment on peut dire que la transidentité peut être innée dès la naissance, comment on peut dire que des enfants de moins de 5 ans peuvent être transidentifiés ? Déjà que moi, ça me choque, en dessous de 18 ans, alors là, ma mâchoire elle s’est décrochée ! Ce n’est vraiment pas possible, quand j’ai vu cet enfant parler devant une cour d’adultes, je me suis dit “Comment ces adultes-là n’ont pas le recul nécessaire pour dire qu’on va protéger cet enfant et on va faire ce qu’il faut pour lui, pour qu’il puisse grandir normalement ?” parce que c’est pas un développement normal que de mettre un enfant sur une voie qui fait que quand il va arriver à la puberté, on va bouleverser sa vie en changeant son corps. Il n’y a aucun de ces adultes de cette assemblée qui a eu le recul nécessaire, c’est incroyablement dangereux.

Et aussi, par rapport aux enfants, évidemment, le documentaire “Petite fille”. Pour ça je pense que même ça se passe de commentaires tellement c’était incroyable à voir en fait. Et il y a beaucoup de gens qui ont critiqué sa mère, moi quand j’ai regardé cette maman, tout le monde a dit “Ouais, ‘est de la faute de la mère.” et tout, cette maman là, ça se voit qu’elle est complètement paumée et qu’elle essaie que son enfant soit heureux, c’est juste la faute aussi des gens derrière qui ont plus de recul que cette maman et qui ont pas stoppé le mécanisme et qui ont dit “On va proposer quand-même quelque chose de beaucoup plus correct à votre petit garçon parce qu’en fait, là ça va, c’est pas grave.”.

J’ai regardé les critères du DSM5 pour définir ce que c’est qu’un enfant transidentifié et c’est vraiment des critères à base de “Il n’aime pas ce jeu de garçon, il va préférer ce jeu de petite fille, il n’a que des amis de l’autre sexe, il s’habille avec les vêtements de l’autre sexe…”, enfin quel petit garçon n’a jamais essayé les jupes de sa maman ? Quel petit garçon n’a jamais joué avec le rouge à lèvres de sa maman ? Quel petit garçon ne s’en fout pas un peu des vêtements qu’il porte tant qu’il peut jouer dans la cour de récréation ? Vraiment, je me dis que c’est incroyable, ces critères-là ils sont hors sol, ils ont été reconnus par des adultes et quand j’ai lu ça, c’est trois événements se sont enchaînés en fait: le premier m’a amené à m’intéresser à la thématique des enfants et ça, je pense que c’est le truc qui m’a le fait le plus péter un câble. 

Rebelles du genre – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour notre démocratie ?

Julie – Pour les femmes, parce que je pense qu’en fait, ce qui se met en place, c’est la disparition de la catégorie “femme”, c’est à dire que tout ce qui nous appartient comme luttes en tant que femmes, par exemple tout à l’heure comme je l’ai cité pour les règles, pour la grossesse, les luttes médicales, tout ce qui est luttes anti problèmes médicaux pour les femmes, tout ce qui est vraiment itinérant à la thématique de base féministe est tout repris par le transactivisme, que ce soit pour les enfants, les règles… je pense que c’est celui que j’ai cité tout à l’heure, c’est le plus parlant et par exemple, pour les espaces séparés, pour la non-mixité. La non-mixité, de base, c’est quelque chose qui est essentiel pour les femmes parce que ça nous permet de nous exprimer en toute sécurité mais aussi de pouvoir aborder des points sans que les hommes nous coupent constamment le discours et la parole et là, on se retrouve avec des personnes qui se revendiquent femmes et qui ont été sociabilisées en tant qu’hommes et même des femmes qui se disent hommes et du coup, qui adoptent ces codes d’agresseur, qui reproduisent tous les codes avec dans ces milieux militants.

On a écarté le problème, on avait réussi un tout petit peu à gagner de l’espace, à sortir les hommes pour avoir nos propres espaces et là, en fait, on se rend juste compte qu’ils rentrent par la porte de service et ça, c’est tellement dangereux, on peut plus se réunir en réunion de non-mixité totale pour parler d’agressions sexuelles. Pour des groupes de soutien, on n’aurait théoriquement pas le droit de refuser l’arrivée d’un porteur de pénis dans notre salle au milieu alors que toutes ces femmes, potentiellement, ont été agressées quasiment à 100%, agressées par ce même pénis. Comment on en est arrivé à ce point-là ? C’est à dire que les femmes n’ont plus le droit à la… On pourrait faire une métaphore simple: c’est comme si t’étais chez toi, que tu fermais ta maison, que t’installais tes alarmes et tout, que tu allais prendre ta douche, que l’État mettait une loi qui fait que tout le monde a les clés de chez toi et que tout le monde pouvait aller t’observer sous ta douche (c’est ce qui arrive aux femmes) et que tout le monde prenait tes affaires, les touchait et les réorganisait exactement de la manière qui leur plaît.

En fait, les luttes antiporno et antiprostitution, de base, elles sont organisées par les femmes, on a tels angles d’attaque, on a fait notre planification, on a fait nos mouvements et tout, et là tu as des hommes qui arrivent et qui nous font “Non mais moi, je pense que c’est pas du tout ça.” et qui nous chamboulent et comme ces hommes-là, ils se revendiquent femmes et que la plupart des femmes ils ont réussi à nous imposer cette manière de penser, ils arrivent à nous imposer cette organisation dans nos luttes et en fait, si on n’a pas nos moyens de lutter et si on n’a pas nos moyens de s’exprimer, on n’arrive à rien faire et le pire, je pense, dans tout ça, c’est que bientôt, ça passera dans les lois.

La plupart des femmes, elles se taisent parce qu’elles ont peur, parce qu’elle veulent être gentilles, parce qu’elles adhèrent aussi parfois, il faut quand-même le dire, il y a beaucoup de femmes qui adhèrent, il n’y a quasiment pas d’opposition et pour tout ce qui se passe de non-mixité, pour tout ce qui est vestiaires, pour tout ce qui est définition par exemple d’une femme et tout.

Un jour, ça finira par passer, un jour on modifiera les lois et on aura des lois du pays qui sont basées sur l’identité de genre, on aura plus de loi pour les droits des femmes basés sur le sexe et ça, c’est un danger incroyable pour les femmes.

Et aussi un danger de la transidentité dont on parle moins, c’est qu’ on voit beaucoup de mecs en général hétéros, qu’on qualifierait de cis, qui sont d’accord avec des femmes critiques du genre mais ils sont pas d’accord avec des femmes critiques du genre parce qu’ils adhèrent à nos idées de déconstruction du genre, ils sont d’accord avec les critiques du genre entre guillemets parce qu’ils ont une vision conservatrice de la société. En fait, les trans activistes ont réussi à donner du sens à la volonté de conservation du genre par beaucoup de masculinistes. Je pense que le meilleur exemple de ça, c’est par rapport au fait que les transactivistes donnent du crédit aux idées des conservateurs masculinistes.

C’est le documentaire de Matt Walsh “What is a woman ?”, c’est un documentaire qui, théoriquement, quand tu le regardes, tu es d’accord quand tu es critique du genre, tu fais “Bon, il y a certains points qui sont très intéressants et que la plupart de la population serait d’accord.” sauf que derrière, c’est pas des idées critiques du genre qui sont soutenues, et déconstructions du genre, non, non, c’est des idées conservatrices qui sont “Une femme doit être comme ça, un homme doit être comme ça.” donc en fait, on se retrouve à ce débat-là: soit les transactivistes inventent leurs idées et derrière, ça paraît tellement loufoque pour une grande partie de la population qu’en fait, ils donnent du crédit à tout ce qui est renforcement du genre dans la vision masculiniste. Au final, personne j’ai l’impression, ou très peu de gens dans la population générale, ne font l’effort d’écouter les femmes qui parlent de déconstruction du genre et ça, je trouve que c’est incroyable parce qu’ils ouvrent le boulevard aux masculinistes.

Et aussi, le féminisme est en train de se prendre un énorme coup parce que maintenant, je pense que vous avez déjà entendu l’expression, pleins de personnes disen “Moi je ne suis pas féministe.” et avant c’était “T’es une féministe extrémiste.”, maintenant on dit “T’es une néoféministe aux cheveux bleus.”. Alors, on voit à quoi ils font référence, tu vois qu’ils font référence aux transactivises de Twitter, tu vois de qui ils parlent quand ils disent “Ouais, je suis un hélicoptère de combat, les féministes vous cassez les couilles.”, ils font pas la différence avec les transactives. Quand ces mecs-là et ces femmes-là disent ça, en fait ça décrédibilise le mouvement féministe en même temps.

Le transactivisme, par ses glissements idéologiques, tire le féminisme derrière lui. Le féminisme est en train de se vider de son sang, de tout en fait. On perd nos luttes et en plus, on perd notre crédibilité, le peu de crédibilité qu’on avait et en plus, par rapport au féminisme libéral, personne quasiment ne connaît l’appellation “féminisme radical” donc en fait, ça fait vraiment de nous un microcosmos qui est invisibilisé par toutes ces idées qui n’ont aucun sens des deux côtés.

Tout le monde est en train de donner sa propre version du féminisme, on n’a plus d’unité et de l’autre côté, t’as les masculinistes qui continuent évidemment leur acharnement contre le féminisme, c’est vraiment un truc de fou.

Et pour la société aussi je pense que c’est important que… ça c’est un peu bête à dire mais dans notre société, on a quand-même besoin d’avoir des normes communes et les transactivistes, leur idée principale, elle est très déconstructiviste, c’est à dire qu’il n’y a pas de norme nulle part, chacun pourrait faire ce qu’il veut, chacun se déterminer comme il veut et tout le monde devrait s’adapter à la perception individuelle de cette personne. En fait, une société ça ne fonctionne pas comme ça et si on ne reconnaît pas le droit ou le choix dans la société de s’articuler en fonction d’une perception collective, on n’arrive plus à communiquer, c’est très individualiste, c’est à dire qu’on n’arrive plus à se fédérer en collectif. Si on devait appliquer tout ce que les transativistes disent, j’ai l’impression que ça limiterait énormément les échanges entre le collectif. Je vais vous donner un exemple concret: si vous êtes un groupe de 10 personnes et que dedans, il y a… je ne sais pas, trois personnes non-binaires, on va prendre exactement l’exemple de la non-binarité, et que vous devez faire une règle commune qui prendra en compte, je ne sais pas, la séparation de vestiaires et que vous devez prendre en compte le fait que ces personnes-là soient non-binaires, vous n’arriverez jamais à prendre un accord parce qu’ils vont dire “Vous êtes un groupe de personnes, ces personnes-là, la norme de société voudrait qu’on ne sait pas en fait en fonction des sexes parce que c’est la règle logique.”, mais ces personnes non-binaires là vont devoir casser cette règle, en fait on va devoir s’adapter à leur perception individuelle et on n’arrivera jamais à déterminer quelle séparation on doit faire parce qu’il faut correspondre à chacun et une société, elle ne peut pas faire une règle en fonction de chaque personne, il faut qu’on arrive quand-même à s’aligner tous sur un même continuum et là, on ne peut pas le faire, en fait, on ne peut pas arriver avec le transactivisme à se dire “Ok, on part tous sur une base commune, c’est notre interprétation commune et on le fait.”. On ne peut pas segmenter à ce point.

Et enfin, pour les enfants, j’en ai déjà parlé un peu, les enfants pour moi, c’est des êtres qui sont en développement. Le développement des enfants va jusqu’à 25 ans je dirais, je pense qu’avant 25 ans, tu n’as pas fini ton développement, tu n’as pas d’expérience, tu n’as pas de maturation, qu’elle soit physique ou cérébrale donc tu es tout le temps en construction. On ne peut pas introduire une idée aussi déconstructionniste que la transidentité pour les enfants.

Quand on passe par exemple à l’adolescence, on découvre plein de choses, il nous manque plein d’éléments de compréhension qui sont en général censés être apportées par notre entourage, par exemple sur tout ce qui est passage à la puberté, on découvre notre puberté par nous-mêmes mais aussi par rapport aux rapports qu’on a aux autres. C’est un peu plus compliqué quand on est une femme parce qu’en fait, quand on passe la puberté, on se rend compte que toutes les normes sociétales nous sautent un peu dessus encore plus, on se fait vraiment étrangler mais globalement, c’est une construction qui est très fragile à avoir, qui est à la fois personnelle mais à la fois collective.

Là, la transidentité, ça veut dire que tu vas demander à des gens, à des enfants et à des adolescents de déconstruire quelque chose qu’ils n’ont même pas encore acquis; c’est à dire par exemple, quand tu fais faire une transition à une jeune femme par exemple de 16 ans pour qu’elle devienne un homme, tu vas lui demander de déconstruire son identité de femme alors que son identité de femme n’a même pas été encore construite et n’a même pas encore été stable. Elle ne sait pas encore tout à fait ce qu’est d’être une femme, elle est en découverte de son identité de femme et là, tu vas demander d’abandonner toute son éducation qu’elle a reçue pour l’instant en tant que femme, tu vas lui demander de se séparer de son développement pour sa puberté et de son corps alors que son corps n’est même pas encore formé, c’est-à-dire qu’il y a des jeunes femmes qui passent sur le billard en se faisant par exemple couper la poitrine ou en se faisant créer un pénis donc qui ne sont même pas encore à l’aise quand elles étaient femmes, qui n’ont même pas encore eu le temps d’être totalement à l’aise avec le développement de leur corps.

C’est quand-même incroyable de dire que l’on peut ressentir de la dysphorie de genre à partir de 11 ans donc par rapport à son corps, la dysphorie c’est quand-même un mal-être par rapport à son corps, alors qu’à 11 ans on n’a même pas encore une puberté qui nous permette d’appréhender vraiment ce que c’est notre être physique. C’est comme si on disait par exemple à un enfant de 8 ans, dire qu’il ressent de la dysphorie de genre alors qu’en fait ils n’ont même pas encore fait leur puberté, qu’ils n’ont même pas encore leur corps d’adulte, c’est complètement paradoxal, tu ne peux pas ressentir un mal-être entre ton corps et ton genre si ton corps n’a pas encore fini de se développer, tu ne le connais pas encore en fait et je me dis “Ca, c’est incroyable !” et surtout, quand on regarde la dysphorie de genre en général qui est un des symptômes principaux de la transidentité, elle apparaît surtout à l’adolescence parce qu’on a du mal à saisir le décalage qui se passe entre notre enfance et notre adolescence, c’est quand-même un énorme changement et la plupart des gens ont du mal avec ce changement. Ce mal-être là, en général, il part quand on est adulte parce qu’on a réussi à se construire une identité par rapport à notre corps, on est plus à l’aise avec ça, on s’est formé, on intègre aussi un peu plus la manière de réagir à la perception des autres vis-à-vis de nous et là en fait, ça voudrait dire que la transidentité intervient à ce moment fatidique où on se construit pour dégommer cette construction. C’est comme si vous commenciez une course, que vous deviez faire un 100 mètres et qu’avant même d’être arrivé aux 100 mètres, vous vous arrêtiez et vous disiez “Non, en fait, ça va pas le faire, je ne le sens pas.”. Vous n’avez même pas fait encore votre performance, vous ne savez pas si elle est bonne ou si elle est mauvaise, vous arrêtez au milieu: “De toute façon, la performance est mauvaise donc je ne courrai pas.” Ca n’a pas de sens. On se dirait “Non, continue et après on verra effectivement si ça te convient ou si ça ne te convient pas.”.

Là, la transidentité et la manière dont c’est présenté aux adolescents, on n’attend même pas de voir s’ils sont sûrs de leurs sentiments, on n’attend même pas de voir si effectivement ça ne va pas avec leur corps, on les jette directement.

Et en plus, maintenant, il y a la version un peu plus soft on va dire, où on peut se décrire dans notre genre mais on n’a pas besoin de faire de transition. Alors là c’est un méli mélo parce qu’en fait, ces adolescents, en général, ils souffrent parce qu’ils savent qu’ils sont perçus par leur sexe par les autres parce que c’est comme ça en général qu’on perçoit les individus et eux, ils sont en lutte permanente pour qu’on les valide dans leur genre qu’ils se disent alors qu’en plus, ils n’ont même pas de passing. Du coup, ils sont constamment en lutte avec les autres, constamment en conflit, pour faire valider une identité qui n’existe même pas. C’est hyper destructeur et tu ne peux pas être harmonieux avec toi-même si tu es constamment en lutte avec la manière dont tu te places vis-à-vis des autres et de toi-même. C’est très dangereux je trouve pour les enfants et pour les adolescents, en fait.

Rebelles du genre – Du coup, c’est peut-être aussi pour ça qu’il y en a beaucoup qui se disent non-binaires ?

Julie – Ouais, la non-binarité c’est un peu en dehors de ça en fait, moi je trouve qu’on est dans une époque où les adolescents… C’est peut-être un peu bizarre ce que je vais dire mais je dirais que chaque époque, pour l’adolescence, il y a des modes en fait et j’ai l’impression que la non-binarité, au-delà d’être liée à un mal-être physique, elle est aussi liée au fait qu’on a envie d’appartenir à une communauté.

Je pense qu’il y a beaucoup d’adolescents et d’enfants qui trouvent du support auprès de leurs camarades et un point d’entente dans le fait de se déclarer non-binaire parce que du coup, ils appartiennent quand-même à la communauté trans et en même temps, ils n’ont pas besoin de faire de changement donc c’est à dire qu’ils sont cajolés, qu’ils sont en échange avec les autres, qu’ils se sentent intégrés et en même temps, ils ne font pas de changement. Moi, je pense que c’est vraiment un but d’être intégré ou juste d’être un peu en rébellion.

Rebelles du genre – Donc vraiment, pour toi, c’est plus une mode ou une recherche de communauté, c’est comme être gothique, tu peux être non-binaire.

Julie – Ouais. Dans ma fac, je vois beaucoup de gens qui se déclarent non-binaires parce qu’ils disent… Enfin, c’est un peu bizarre à dire. Ils disent “J’ai le sentiment d’être spécial.” et tu fais “Mais… t’as le sentiment d’être spécial, pourquoi ?”, “Tu comprends, parce que je ne correspond pas à la société.” et du coup, la réponse qu’ils ont trouvé, c’est la non-binarité. Tout le monde ne correspond pas à la société parce que la société, c’est une moyenne qui est parfois très injuste et contre laquelle les féministes se battent en ce qui concerne le genre et donc toi, tu vas, à partir de ce mal-être là qu’on ressent tous, surtout toutes les femmes en fait, ils se décrètent une

identité personnelle parce que ça les… je ne sais pas, ils ont l’impression d’avoir trouvé leur solution, d’avoir trouvé leur clé. Tu n’es pas spécial en fait, tu es comme tout le monde mais tu te rassures en fait, pour moi.

Rebelles du genre – Donc c’est encore plus what the fuck que le reste (rires).

Julie – En fait, pour moi, la non-binarité, c’est vraiment… “Oh, she’s different !”, genre, vraiment, pour moi, c’est ça.

Rebelles du genre – Au moins, ils ne font de mal à personne, ceux-là.

Julie – Ben, en fait, je ne suis pas sûre parce que… pour moi, le fait de se déclarer non-binaire, c’est vraiment un doigt d’honneur à tous les autres, c’est à dire que tu gardes ton apparence physique, tu sais que tu es perçu comme une femme ou comme un homme; en plus, tu pousses les autres à aller contre leur perception, ce quie st quand-même violent au niveau cognitif. Des gens que je connais, qui sent “Non mais je suis non-binaire.” alors que par exemple je sais que c’est des mecs ou que je sais que c’est des filles, ça me demande un effort supplémentaire mental pour ne pas les blesser, pour ne pas déraper alors qu’en plus, ils SAVENT qu’ils sont perçus pas parce qu’ils ressemblent à un mec ou à une fille, parce qu’ils en sont. C’est violent pour les autres et en plus, c’est vraiment le fait de dire “Ecoute, toi tu corresponds à 100% aux stéréotypes, reste dans ton truc. Moi, je suis différent, moi j’ai choisi d’être différent comparé à toi.” alors qu’en fait, ils en sont au même stade que nous. Je trouve ça limite insultant, en fait.

Rebelles du genre – Ouais, je vois bien l’image, du coup, du doigt d’honneur: “Vous qui choisissez d’être complètement victimes de votre oppression, c’est sans nous.”.

Julie – Moi j’avais vu une affiche qui m’avait vraiment fait rire, c’est une femme voilée non-binaire. Une femme voilée non-binaire, genre (rires). Et par rapport à ça, j’ai une anecdote un peu personnelle, c’est… il y a quelqu’un que je connaissais du collège, que je connais du coup depuis 6 ans. C’est un mec, il a toujours été connu comme un mec, quand je me faisais harceler sexuellement au collège avec toutes mes copines et tout, il ne disait rien comme les autres mecs, il avait vraiment le comportement typique d’un mec et aujourd’hui, il se dit non-binaire féminine. Il n’a rien changé à son apparence. Mais quand je vous dis rien changé, c’est rien changé. Je lui ai dit “Tu as déjà éprouvé de la dysphorie de genre, quelque chose comme ça ?”, il m’a dit “Non, non, pas du tout.”, il poste des photos de lui torse nu à la plage parfaitement à l’aise dans son corps et tout mais par contre, je dois l’appeler “elle”. Et moi, je trouve ça hyper violent parce qu’il continue à tenir des positions hyper misogynes, évidemment il a eu une éducation d’homme et en même temps, il me dit “Non mais t’inquiète, j’ai le même vécu que toi.”. Mais t’as pas du tout le même vécu que moi, rien qu’au collège on a eu un vécu tout à fait différent, moi j’ai un vécu traumatique parce que j’avais le malheur d’être là, d’être une fille, toi tu étais tranquille, pépouse, et tu me dis qu’on a le même vécu ?! Et qu’en plus, je devrais t’appeler “elle” et en même temps t’es non binaire ?! Donc genre “elle”, “iel”, “ielle” ?? Je ne sais pas, c’est… (rires) ça n’a pas de sens.

Rebelles du genre – Ouais, c’est complètement insensé…

Julie – J’en ai parlé avec des amis qui sont aussi potes avec lui et ils m’ont dit “Tu es méchante et tout.”,  je leur ai fais “Mais j’en ai rien à foutre d’être méchante !” et deux mecs, avec moi et une amie à moi, et je me suis tournée vers mon ami fille et je lui ai dit “Toi tu te sens femme ?” Elle m’a dit “Non, moi, je ne me sens pas femme.”. J’ai regardé mes deux potes mecs “Vous vous sentez mecs ?” “Bah… Quand je regarde mon pénis.”. Voilà, genre, c’est votre réponse ! Il n’y a rien à ajouter par dessus ça !

Rebelles du genre – Qu’est-ce qui t’a décidé à témoigner et ce, de manière anonyme ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, est-ce que tu te sens en danger ou est-ce que tu te sens parfaitement tranquille pour pouvoir assumer ces positions et parler librement ?

Julie – Alors, j’ai décidé de témoigner en anonyme, je n’ai jamais subi de pression; en revanche, je suis en étude de psychologie. Ca, c’est une thématique importante pour moi parce qu’en ce moment, dans ma filière, tout le monde est pro-transidentité mais quasiment tout le monde. Sur la fac, on est… je ne sais pas, sur ma promo, on doit être 600, on doit être 10 à être critiques du genre. Vraiment, c’est rien du tout et plusieurs fois, sur les forums de ma fac, j’ai trouvé des messages du type “Si vous êtes transphobe, vous êtes signalé à l’administration.” donc être signalé à l’administration, ça peut potentiellement dire aboutir à un conseil disciplinaire. Évidemment, ça ne m’intéresse pas du tout de passer en conseil disciplinaire et à chaque fois qu’on aborde ce sujet dans la fac, ça nous concerne directement parce que évidemment, on est en formation de psychologue donc qu’est-ce qu’on va voir ? Par exemple, on va voir des personnes qui sont transidentifiées. C’est quand-même… la dysphorie, c’est quand-même c’est un trouble mental, du coup on les voit en cabinet, évidemment, et le truc, le grand mouvement en ce moment, c’est de dire “Si vous recevez un patient trans dans votre cabinet, vous ne remettez pas en question son ressenti, c’est-à-dire il vous dit qu’il est trans et qu’il veut transitionner, vous n’avez rien à dire là-dessus.” 

Alors, alors… Ça fait plusieurs fois, moi, que je dis que je ne suis pas d’accord avec ça et ça fait plusieurs fois qu’on me fait comprendre que je dois la fermer. Je dis à chaque fois “Oui, moi, je pense que ce n’est pas notre rôle, moi je pense qu’on doit quand-même questionner parce que la dysphorie, ce n’est pas forcément relié à la transidentité, ça peut être surtout relié par exemple aux troubles du comportement alimentaire, à des traumatismes sexuels…”, enfin plein de choses, en fait, et ça plusieurs fois qu’on me dit “Non mais en fait, t’es transphobe.”. Le sous-titre c’est “Sale merde” en fait, faut pas chercher et “Pourquoi tu es en psycho ?”.

Si je témoigne en anonyme aujourd’hui, c’est parce que j’ai peur que plus tard ça m’apporte vraiment des problèmes, même vis-à-vis de mes profs. Donc je peux être  rapportée à mon administration pour avoir tenu les propos que je tiens, parce que vraiment, j’ai des amis dans ma fac qui m’ont exprimé des propos critiques du genre… La moitié de la fac, vraiment la moitié de leurs amis, vraiment, sur des gros groupes d’amis, ne leur parlent plus ! Ça c’est un côté amical, ok. Mais je me dis, mais plus tard, si jamais des choses empirent, moi je pouvais vraiment avoir des difficultés, je pense, à accéder à certaines  formations, ou quelque chose comme ça, si j’ai des problèmes avec l’administration. Et ça, ça me fait vraiment très peur. Peut-être que je me fais des films, mais honnêtement…

RDG – C’est grave, en fait, ce que tu dis. Mais la question c’est, sur les forums de la fac, quand tu dis qu’on pourrait vous signaler, etc. Mais qui c’est qui tient ces propos ? C’est des profs, c’est des étudiants ?

Julie – Alors en fait, les messages du forum sont en anonyme. Mais en fait, ce que j’ai compris de ces messages qui étaient postés, c’étaient des responsables étudiants, des gens qui sont en communication avec l’administration, et des étudiants plus âgés. Et moi, ça me fait très peur, parce que je me dis, dans ma fac – c’est une fac qui est sciences et psychologie, qui est plus tournée vers un côté recherches, donc en fait, c’est censé être plus rationnel que les facs de psycho psychanalytique, sauf qu’on a quand-même des approches, parfois, qui sont assez psychanalyse – et je me dis, qu’en fait, j’aurais vraiment peur de tomber sur des profs qui me disent, en fait, tu n’es pas faite pour la psychologie, ça va te tomber dessus, quoi. Moi, j’aurais vraiment peur de ça. Alors qu’en plus, c’est vraiment le métier que je veux faire, j’en suis convaincue. Et surtout qu’en fait, je n’ai pas de haine. Moi, je sais, plus tard, quand je serai psychologue, et que j’aurai mon cabinet et que par exemple, je recevrai des jeunes qui veulent discuter de leur transidentité, entre guillemets, avec moi, et bien je sais que je ne serai jamais violente. Je sais que… je sais que je discuterai, que j’écouterai leur vécu, que je serai vraiment dans mon rôle de psy, quoi, que je n’ai vraiment pas de haine, et que je cherche juste à comprendre. 

Et je me dis, rien que le fait de chercher à comprendre, si ça c’est pénalisé… 

Dans ma fac, je me dis, mais je veux vraiment exercer ce métier. Parce que je pense que j’ai un rôle à jouer, et que la future génération de psychologues et psychiatres a vraiment un rôle important.

Et je me dis, je suis psychologue critique du genre… si ça se trouve, on est en voie de  disparition, les psychologues critiques du genre ! 

RDG – Le problème, c’est la loi qui est passée l’an dernier, la loi sur les thérapie de conversion, qui oblige les soignants, en fait, à avoir une approche transfirmative, faute de quoi ils peuvent perdre leur droit d’exercer.

Julie – Ça, on n’en a quasiment pas parlé en cours. Moi, ça m’a inquiétée. Je voulais poser la question, mais on n’avait pas le temps. Quand j’ai vu ça, je me suis dit, mais en fait, c’est n’importe quoi, parce que dans le DSM 5, en fait, la transidentité figure dans le DSM 5, la dysphorie de genre, ce n’est pas pour rien, en fait. Je me dis que c’est parce que c’est une pathologie.

Donc là, c’est-à-dire qu’on va recevoir des patients en cabinet sans pouvoir parler de leur pathologie ? C’est comme si je recevais une patiente anorexique, ça, d’ailleurs, ça avait été cité par le Fou Allié comme exemple. C’est comme si je reçois une patiente anorexique et que je devais confirmer son anorexie parce qu’elle est “transmaigre”. Ça n’aurait pas de sens.

RDG – Le projet, aujourd’hui, de l’organisation mondial pour la santé trans, le WPATH, c’est de sortir la dysphorie du DSM5. 

Julie – Je ne pense pas qu’à terme, ça se fera. Parce que c’est quand même reconnu comme une affection longue durée, donc en fait, les soins sont remboursés par la Sécurité sociale, pour certains, ou par les assurances.

Ils veulent le sortir, mais est-ce qu’ils vont vraiment complètement sortir d’une approche médicale? Parce que ça serait quand même très dommageable pour les personnes trans qui veulent pouvoir faire leur transition sans payer les frais, quoi. Parce qu’on sait qu’aujourd’hui certaines opérations sont remboursées, les épilations laser pour les poils sont remboursées… ça c’est risible, mais bon.

Moi, je veux pouvoir donner la meilleure approche à mes patients, évidemment. Si un patient, qui au bout d’années de thérapies, ou de mois, me dit : effectivement, je me sens toujours trans, et je pense que je suis trans, je n’irai jamais contre, évidemment. Mais je voudrais au moins avoir la possibilité de vraiment discuter en fait, de faire mon travail, tout simplement. Et je n’ai pas envie de me faire virer de la fac par des gens qui me signaleront, parce qu’ils ont une pensée ultra idéologique et dogmatique.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ? 

Julie – Alors là, je vais choisir de raconter une anecdote assez drôle au final, avec du recul. Drôle… c’est un rire jaune, on va dire.

Alors j’ai 16 ans, je me balade sur Instagram, et là je vois des potes radfems à moi qui me balancent un compte, celui de “I am Beverluxe”. Donc un homme transidentifié qui a un compte MYM ou Onlyfans, je ne sais plus. Et je vais voir sa story – et en fait les filles m’ont dit ouais va voir sa story, et tout – donc je vais voir sa story, et là, je le vois qui se masturbe en story. Mais vraiment. Enfin, je pense que vous voyez comment les hommes se masturbent, donc tu vois le… tu vois son bras bouger, tu vois ses gémissements, et tout. 

Et en fait, moi, ça m’a choquée.

Je me suis dit, mais ce n’est pas possible. Du coup je me suis dit : je vais écrire un message bienveillant. Je lui ai dit mais tu penses que ça, ça a vraiment sa place sur Insta ? Parce que là, on le voyait vraiment avoir des râles de plaisir, son visage se crisper, enfin bref, on voyait vraiment. En fait, c’était du soft porn avec un lien direct vers son MYM,  et je lui ai dit mais ça, ça n’a pas sa place sur Instagram. Ça, ce n’est pas possible, en fait. Ça, c’est la sexualité que tu montres. 

Et en fait, il m’a répondu littéralement : “Bouffe-moi le cul, petite conne de salope.”. J’ai vu le message, ce n’était pas “Bouffe-moi le cul”,  c’était “Bouffe-moi la rondelle.”. 

Mais ça,  c’est un comportement de mec ! Mais je me suis dit : il y a pas plus masculin que ça en fait. Jamais une femme n’aurait dit à une compère “Bouffe-moi la chatte”… ça n’a pas de sens. Du coup, je me suis fait bloquer, il m’a affichée dans sa story. J’avais 16 ans. Donc il m’a potentiellement exposée à du harcèlement et j’étais là… Je me suis dit “c’est pas croyable” quoi… Evidemment, je n’ai pas reçu de messages parce que je pense que les gens ont autre chose à faire de leur vie qu’insulter des petits comptes anonymes comme le mien – comme je suis pas un gros compte, je suis juste radfem… enfin voilà… Je pense ils ont juste vu ça dans leur story et se sont marrées entre personnes débiles, mais il m’a potentiellement exposée à du harcèlement alors que j’étais mineure. Il m’a clairement dit de faire des choses sexuelles alors que j’étais mineure… Il ne se renseigne même pas sur mon âge alors qu’en plus il se masturbe dans sa story, ce qui est interdit clairement par Instagram. Sur Instagram, ils ont une modération parfois très bancale… Mais je me suis dit « c’est pas possible”… Et récemment, il y avait un commentaire – c’était la journée sur “le coin des LGBT”, donc un autre compte militant – c’était la journée des travailleuses du sexe. Oui, vive la prostitution et tout… Et je suis allée dans les commentaires de la publication, j’ai écrit un message abolitionniste “on se bat contre le droit des hommes de violer des femmes, on se battra toujours contre ça ; le terme c’est pas travailleuse du sexe, c’est prostituées”… J’ai fait un long message et tout, hyper construit, j’ai fait “Respectez ces femmes, allez écouter les survivantes” et tout… J’étais hyper claire, concise… Et il m’a répondu, il m’a dit “Ouais, en fait, tu es juste putophobe”. J’avais changé de compte, donc il n’a pas reconnu mon compte. Il m’a dit “T’es putophobe, renseigne-toi, t’y connais rien, de toute façon ça se voit que tu es une conne, t’es une conne d’abolitionniste”… Donc c’est ce mec-là qui m’a littéralement insultée, qui s’est masturbé en story et qui vient me donner des leçons de féminisme sur comment on parle des survivantes et comment on écoute leur parole ! Hallucinant ! Ça m’a choquée… Et son message a été liké, je crois, plus d’une centaine de fois. Donc là, tu as une vague de soutiens pour un mec qui, en plus, avait affiché sa réponse ultra sexualisée dans sa story. Il le fait tout le temps, des trucs comme ça ! Comment les gens peuvent supporter ça ?! Ils ne voient pas ça ? C’est incroyable ! C’est les mêmes délires que Olivier Ciappa, là… C’est pareil. C’est pas possible… Du coup, cette anecdote me fait rire avec du recul, mais je me dis que les gens qui soutiennent le mouvement transactiviste et, du coup, qui soutiennent la prostitution via le mouvement transactiviste, ne connaissent rien, ça se voit. C’est zéro sur vingt.

Rebelle du genre – Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

Julie – Ce que je dirais, au final, c’est que l’on peut être critique du genre. Les critiques du genre sont beaucoup vues comme des femmes horribles, qui seraient méchantes et tout… Il ne faut pas avoir forcément peur de cette image. Ok, elle n’est pas agréable à supporter, parce que quand on parle avec des gens, ils me disent “Oui mais en fait, vous ne respectez pas les sentiments des gens, vous leur faites mal”… Mais je pense qu’on n’a pas forcément à respecter les sentiments des gens, surtout quand ils ont un impact sociétal aussi grand que celui de la transidentité. Surtout, je n’ai jamais vu une femme critique du genre insulter, menacer ou violenter une personne trans. En revanche, j’ai énormément vu l’inverse. Quand on parle de transidentité, à chaque fois, à chaque fois on met des formes. Franchement, on fait les choses bien et en face, on n’est jamais reçues de la même manière. Ce que je vois, c’est qu’on est toujours là, même dans ces podcasts… Même dans les podcasts de Rebelles du genre, j’ai plusieurs fois entendu des femmes qui ont affirmé le fait qu’elles ne souhaitaient pas être agressives ni méchantes. Et on n’a jamais l’inverse. Donc, osons rejeter cette étiquette de “méchante”. On replace la violence du bon côté. Pour les jeunes femmes qui écouteraient ces podcasts et se diraient “Ah mais si ça se trouve, je suis une personne horrible ! Je critique, je fais du mal aux gens, machin.”… Non, vous ne faites pas de mal aux gens. Vous vous posez des questions. En plus, vous les posez bien, parce que vous cherchez du contenu, avec des ressources. Vous écoutez la parole des femmes. Vous faites les choses bien. Vous pouvez rejeter cette étiquette de personne méchante, parce qu’en fait les critiques du genre font bien, font les choses bien, font les choses dans le respect et font les choses de manière éclairée et sourcée. On a du recul sur nous-mêmes. Donc, osez être critiques du genre et faites aux accusations de méchanceté, parce que ce n’est pas la vérité.

Rebelle du genre – S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe :

womensdeclaration.com

Rebelles du genre – Épisode 57 – Olga

Je m’appelle Olga. J’ai 26 ans. Je suis professeur de FLE (c’est “français langue étrangère”). Je suis bretonne. Je suis en rupture familiale depuis longtemps. Je suis lesbienne et j’ai un mode de vie assez nomade, avec mon travail : je dois souvent habiter dans des pays différents et, par conséquent, j’ai souvent des relations amoureuses à distance. C’est anecdotique mais ça fait quand même partie de ma vie. J’ai milité dans une association féministe qui a permis de me propulser dans un militantisme et je suis féministe radicale séparatiste. J’ai remis le mythe de la famille en question depuis quelques années, et de l’hétérosexualité imposée, de l’hétérocaptivité, etc. après de nombreuses années de soumission à ce système de violence lesbophobe etc. 

J’ai habité à Kiev pour mon travail et j’ai dû revenir à cause de la guerre. Aujourd’hui j’habite aux États-Unis. Donc, tous ces pays m’ont fait voir des choses différentes du féminisme, j’ai envie de dire… Enfin, ils m’ont fait avoir une perception différente du patriarcat. 

En terme de liberté d’expression, j’ai constaté que sur le sujet du transactivisme, l’Angleterre – où j’ai vécu – et les États-Unis – où je vis – sont très timorés à l’idée de questionner l’idéologie du genre, et que c’est assez difficile de s’exprimer sur ces sujets, voire impossible.

Moi, comme je suis une femme et qu’on est éduquées à l’empathie (comme vous l’avez sûrement entendu dans d’autres podcasts), je pense que j’ai été très sensible aux injustices et aux violences que subissent les personnes, mais aussi les animaux. Je suis vegan et j’ai été végétarienne pendant des années, et comme beaucoup de femmes, on a une sensibilité à la violence que les hommes n’ont pas par leur éducation. Donc, j’ai été très vite touchée par la violence que subissent les femmes. Ça a commencé comme tout le monde avec les enfants battus, les femmes battues… Enfin, “comme tout le monde” –  comme toutes les féministes, je pense. Et puis, peu à peu, je me suis rendu compte de choses plus “psychologiques” qui peuvent être un outil de violence. C’est bien plus tard que j’ai systématisé les choses, que je me suis rendu compte que tout était un système. 

Ce qui a été intéressant, c’est qu’au début, j’étais un petit peu comme un… pas un électron libre, mais… En gros, il y avait quelque chose qui me touchait, je trouvais ça injuste et je parlais du sujet. Ça allait, par exemple, être un documentaire sur la violence faite aux animaux ou alors la violence raciste, ou alors j’allais lire un truc sur le sujet des intersexes… Et là, je me rendais compte qu’il y avait ce problème que je connaissais pas, cette violence que je connaissais pas envers les intersexes etc. Donc, c’était un petit peu dans tous les sens, et j’étais très sensible. Pour donner un exemple du fait que j’étais féministe mais sans aucune conscience de mon féminisme (enfin, c’était tout simplement je me faisais la défenseuse de la veuve et de l’orphelin quand j’étais au lycée), j’ai fait mes TPE (un truc qu’il faut faire au lycée, une espèce de projet pour le lycée) sur les hommes battus. Et, à l’époque, je n’avais pas cette conscience de la violence systémique qu’il y avait envers les femmes. Du coup, je me disais : “Il y a des femmes qui se font taper, mais il y a aussi des hommes, et ça on en parle pas”. Du coup, j’ai fait mon TPE là-dessus. Donc, ça montre à quel point, pour moi, il y avait violence, il y avait défense, il fallait parler des violences etc. ça montre que je n’avais pas vraiment de conscience du système. Moi, j’allais un petit peu… pas dans l’anecdotique mais… je lisais un truc, je m’en imprégnais et j’en parlais. En plus, à l’époque (c’est toujours le cas, quoi que c’est moins le cas quand même), le terme féministe était extrêmement lourd à porter, et je pense qu’aujourd’hui il l’est moins… Mais surtout parce que le féminisme… Enfin, on se qualifie de féministe alors qu’on ne l’est pas forcément. Mais à l’époque, c’était subversif parce que, évidemment, c’était une menace pour le patriarcat, puisque c’est lutter pour l’égalité etc. 

Et donc, je ne me disais pas féministe et je pense que ce qui m’a propulsée dans le féminisme (enfin vraiment peut-être la première [chose]), c’est le fait d’être lesbienne et d’être sortie du placard. Parce que, quand on est lesbienne, on subit une double violente patriarcale et du coup, en fait, on ne peut pas… C’est comme si, avant, on avait constaté une violence à la télévision, et qu’on en parlait, mais qu’on n’avait jamais eu à aller prendre les armes et aller sur le champ de bataille parce qu’on n’est pas concernée… Et en fait, là, bien sûr que j’étais concernée par le sexisme, mais c’est comme si je pouvais être modérée parce que je n’étais pas propulsée dans la violence. Et là, d’un coup, je suis sortie du placard et c’est comme s’il fallait que je me batte. Pas le choix :  je ne pouvais plus me cacher, donc j’étais là, avec mon féministe comme un bouclier dans un champ de bataille. C’est ce que j’ai ressenti. C’est comme si le féminisme était arrivé à moi par le fait de sortir du placard. Je pense que c’est l’expérience de beaucoup de femmes lesbiennes d’ailleurs, qui sont féministes. 

C’est aussi par ce biais là, je pense, que j’ai commencé à me questionner sur le genre… Puisque, quand on est lesbienne, on se la pose forcément, vu que c’est vu comme divergent dans la société… On peut forcément poser la question de “Est-ce que je suis vraiment attirée par les femmes”, “Est-ce qu’il y en a d’autres” etc. Donc, on commence à s’intéresser à la documentation qu’il y a autour du sujet du lesbianisme. Et en fait, comme dans la communauté LGBT il y a des lesbiennes mais il y a aussi les trans, on tombe très vite sur des rapprochements entre lesbianisme et transactivisme… On commence à avoir une documentation parfois ou des choses sont entremêlées. D’ailleurs, beaucoup de mouvements activistes sont activistes de façon un petit peu panoramique, sur toute la communauté LGBT. Du coup, on est un petit peu, malgré soi, confrontée à cette question du genre. 

Ce qui est intéressant – et ce qui est injuste aujourd’hui – c’est que je me suis vraiment intéressée à la question du genre et à l’abolition du genre. J’ai lu Judith Butler. Je me suis vraiment documentée. Je suis quelqu’un qui est assez intellectuelle, donc j’ai vraiment poussé mes recherches de façon assez vaste. J’étais dans l’abolition du genre et j’étais de tout cœur avec les personnes qui étaient violentées par le patriarcat, que ce soit des personnes trans ou que ce soit des femmes. J’étais vraiment à fond avec eux, surtout qu’à l’époque le fait d’être trans – le transactivisme – n’était pas une idéologie dominante du tout. On savait qu’il y avait quelques exceptions, des personnes qui étaient en dysphorie de genre et qui souffraient parce qu’elles étaient violentées, parce qu’elles n’étaient pas considérées etc. Et donc moi, j’étais évidemment de tout cœur avec ces personnes-là, de la même façon que j’étais alliée à d’autres causes. Et c’est comme ça que j’ai commencé à m’interroger sur le genre… Et ça va avec les stéréotypes, les choses qu’on pense qu’elles nous définissent en tant que femme, et qui en fait ne sont que question de genre, etc. J’ai commencé à être sensible à ces questions-là et éduquées sur ces questions-là, mais je n’étais pas militante. Je ne pense pas que j’étais militante. Ce qui a commencé à me permettre de vraiment de remettre en question certaines idéologies, c’est que je suis sortie avec une fille – une Anglaise – qui, elle, était dans un milieu un peu queer… Enfin même pas vraiment… Mais avec un langage très policé sur la question du genre. Enfin bon, c’était surtout du langage et pas beaucoup de discours, ni d’argumentaire, ni de quoi que ce soit. C’était seulement une espèce de politiquement correct qui entourait cette bulle, autour d’elle, et elle était très investie -j’ai envie de dire – émotionnellement, en tout cas, sur les questions de genre, de non binarité, etc. Moi, je n’avais jamais vraiment entendu le terme de “non binaire” avant. Je savais qu’il y avait des trans, mais je savais pas trop que c’était un concept, là “non binarité”… Bon, à part chez Judith Butler, mais qui est quelque chose de très théorique et pas du tout systématiquement applicable, quoi. Donc, j’ai commencé à être parfois un petit peu en désaccord avec elle mais comme on pouvait pas vraiment en parler, parce que c’était très policé et tout ça, et que si je disais un truc pas très sensible ou pas très délicat, parce que je ne suis pas éduquée ou que je ne sais pas de quoi elle veut parler, je me faisais un petit peu envoyer sur les rosiers. Du coup, je faisais un peu attention à ce que je disais pour ne pas passer pour une personne… Donc, c’est là que la peur a commencé à exister en moi. Ensuite, ma sœur a commencé à évoluer dans un milieu queer qui m’a semblé tout de suite immédiatement sectaire, à l’inverse de mon ex… J’avais l’impression que c’était un peu plus une espèce de politiquement correct pour ne pas froisser, et là, avec ma sœur, j’ai eu l’impression que c’était un délire sectaire tout de suite. J’ai eu peur pour elle, en fait, et j’ai intégré une association qui m’a permis d’avoir des clés en termes de chiffres, d’études, etc. pour un petit peu avoir des armes pour argumenter. Et il y a un truc qui a été la goutte qui a fait déborder le vase, c’est que déjà je n’en pouvais plus du côté politiquement correct anglais là, le côté queer mais très impalpable, sans aucune explication : c’est juste il faut pas dire ça, etc. Enfin, une espèce de sensiblerie qui m’agaçait autour de ce sujet. Il y a vraiment une goutte qui a fait déborder le vase – bon, j’en avalais quand même des couleuvres avec ma sœur et tout, déjà – mais j’ai une amie militante lesbienne de l’association dans laquelle j’étais investie, qui s’est mise en couple avec une personne – enfin, une qui était dans ce délire queer – et je savais j’ai su tout de suite que ça allait arriver sur le tapis, qu’elle allait retourner sa veste, etc. Il faut savoir qu’elle est beaucoup beaucoup plus virulente sur le sujet que moi – sur le sujet trans. Moi, je n’étais pas du tout transphobe. Je n’ai jamais été transphobe et je n’ai jamais rien dit qui soit transphobe. Mais elle, elle disait des choses à l’époque – je me rappelle très bien -, elle était plus virulente que moi. Elle disait des choses comme “homme en jupe”, etc. Moi, je n’ai jamais utilisé ce langage là. Donc, c’est pour vous dire d’où elle partait. Et elle s’est mise en couple avec cette fille et j’ai su immédiatement qu’elle allait retourner sa veste sur son militantisme. Elle a cessé d’être activiste dans la l’association dans laquelle j’étais et elle me titillait sans cesse pour qu’on parle de ce sujet, alors qu’elle savait très bien ce que je pensais, parce qu’on avait parlé un milliard de fois ensemble. Et elle faisait comme si elle ne savait plus, comme si elle tombait là, enfin comme si elle avait jamais pensé ce qu’elle avait pensé avant… Moi, je faisais exprès de ne pas parler, parce que je savais bien que ça allait être un sujet de discorde. Un jour, elle est venue chez moi, elle m’a parlé de la mammectomie de sa compagne, et je lui ai dit “mais en tant que lesbienne, ça ne te dérange pas ?” Parce que je me souviens qu’elle m’avait dit que ça l’aurait dérangée, avant. Je disais “mais ça te dérange pas que ta compagne se fasse ça, qu’elle transitionne vers le masculin, puisque tu es lesbienne ?” Et elle m’a dit “moi, je pense que l’amour c’est au-delà du genre”, enfin plein de petits clichés, plein de petites phrases qui n’ont pas de sens sur le lesbianisme. Et moi, je commençais vraiment à être énervée, parce que j’avais l’impression qu’elle essayait d’enlever l’étiquette lesbienne, qu’elle essayait d’effacer cette identité. 

Et moi, ça me violentait ! Je me disais « bah attends mais ça existe, quoi ! Être lesbienne, ça existe ! Enfin merde ! C’est une vraie identité ! On ne peut pas juste dire “l’amour c’est au-delà de ça” ! C’est complètement violent et puis c’est, en plus, le discours réac habituel sur les lesbiennes ! C’est vraiment ça : “Oh, mais tu es sûre ? C’est peut-être juste une phase ! Tu sais, l’amour c’est pas de se mettre des étiquettes… Moi, j’ai entendu ça de mes grands-parents, donc pour moi c’est du même acabit… Même s’ ils essayent de se distinguer en se faisant passer pour progressistes. Elle m’a demandé si je pourrais… J’ai dit “Moi, je ne pourrais pas”. Elle m’a dit “Mais ça voudrait dire que tu quitterais ta copine si elle faisait ça ?” J’ai dit “Oui, moi je ne pourrais pas sortir avec une personne qui se dit homme… Non, pas possible. Elle me dit “OK, dans ce cas-là tu pourrais donc sortir avec une femme trans (donc, sous-entendu un homme transidentifié) et je dis non, parce qu’il y a plusieurs choses. Premièrement, c’est très rare qu’un homme trans ait transitionné jusqu’au bout, c’est-à-dire soit allé jusqu’à l’opération etc. Et, du coup, il en aura toujours des éléments de son corps qui seraient masculins, premièrement. Mais ça, c’est secondaire à la rigueur, parce que j’ai pas envie d’être qu’on essaie de changer mes propos en disant que je m’intéresse qu’au sexe, etc. Le plus important, c’est que, surtout, il a tout un passé. En général, les personnes qui transitionnent ou qui qui sortent du placard en tant que trans, c’est tardif. Ils ont eu toute une vie identifiée par la société comme étant un homme ou une femme et donc ça veut dire qu’elle aurait eu toute une vie, plusieurs décennies, où elle serait par la société perçue comme une un homme. Et, donc, ayant mené une vie d’homme, ayant certainement violé des femmes, ayant eu le rôle de l’oppresseur dans un système patriarcal. Et, donc, en plus, on aurait rien en commun de ce point de vue là… Enfin, on n’aurait rien à partager de ce point de vue là. Moi, ce qui m’intéresse dans le fait de sortir avec des femmes – ce qui m’intéresse au-delà du fait – du déterminisme d’être lesbienne, j’en sais rien… mais du fait que j’y peux rien – mais au-delà de ça, ce qui m’intéresse, c’est que j’ai des choses en commun avec la personne avec qui je sors. On a on a un vécu de femme en commun, de par ce qu’on a subi, mais aussi par notre biologie. Et ça, on aurait rien à partager exactement comme avec un homme hétéro, et moi, c’est pas possible en fait : je suis lesbienne. Et là, elle va rétorquer que j’étais fétichiste des parties génitales… Donc, classique… C’est le truc classique, c’est le coup ultime, et moi je suis un petit peu sortie de mes gonds. J’ai dit “bah écoute, c’est super lesbophobe ce tu dis.” Enfin ça, le fétichisme, le fait que c’est déviant comme sexualité : c’est exactement ce que disent les réacs, hein. Elle était lesbophobe avec moi, en fait. Comme elle ne voulait pas dialoguer et que je refusais de me mettre de son côté – elle voulait que j’adhère à son opinion, ça se voyait qu’elle voulait quelqu’un avec elle, de la même association, qui change d’avis comme elle… Alors que moi, non : j’étais attachée à mes valeurs. Donc non. 

Et elle m’a dit “C’est bon, il y a trop de négativité dans cette pièce ! Là, je sens que t’es rageuse, t’es hargneuse ! Féministe hargneuse ! J’ai pas besoin de négativité dans ma vie!”  Bref, le discours “bisounours”: il ne faudrait surtout pas se cogner au mur dont je parlais plus tôt. On dirait une espèce de bulle où il faudrait surtout ne pas trigger les autres. On ne peut même pas dialoguer. Donc, là, ça a été vraiment le coup fatal, parce qu’elle est partie en claquant la porte et elle a foutu notre amitié à la poubelle en cinq minutes, parce qu’elle refusait de dialoguer. Ce n’est même pas que je n’acceptais pas notre différence. C’est vraiment elle qui refusait de dialoguer, et pour moi ça a vraiment traduit d’un immense problème de liberté d’expression. C’est ce que j’avais ressenti avec mon ex, même si j’avais pas encore eu ce peak avec mon ex… Mais je commençait déjà à sentir qu’il y avait une espèce de pression au niveau de la liberté d’expression, une censure, et c’est ce que j’ai ressenti dans tous les milieux queer dans lesquels j’ai été. Et là, c’était le coup fatal. Donc, j’ai des amis qui m’ont dit qu’elle avait sacrifiée notre amitié sur l’autel du queer. J’ai bien aimé cette expression. Maintenant que j’habite aux États-Unis, je ressens exactement une pression à ne pas parler. C’est partout… Le sujet est partout mais, mais on ne peut pas en parler. En plus, le langage change constamment. Le langage est constamment en mouvement, de façon à ce qu’on puisse pas l’employer, pas l’utiliser, si bien qu’à chaque non connaissance d’un nouveau mot ou d’un nouveau concept, on se fait taper sur les doigts, comme étant quelqu’un de violent… Évidemment, c’est la hantise de toutes les femmes, qui sont elles-mêmes des opprimées, de reproduire une oppression. Donc, c’est là qu’on est des bonnes clientes de cette culpabilité. Pour moi c’est vraiment des éléments de langage, et non un vrai discours… C’est vraiment ça, le transactivisme.

Rebelles du genre – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants et pour la démocratie ?

Olga – Pour moi, l’idéologie transactiviste est basée sur l’idée que parce que le genre ne devrait pas exister, alors il n’existe pas. C’est une logique un petit peu infantile, selon laquelle parce que j’ai décidé que quelque chose n’existe pas, alors elle n’existe pas. C’est un raccourci super simpliste, qui n’est pas sans me rappeler les dérives qui peuvent exister, notamment par l’usage immodéré des réseaux sociaux… ça me fait penser à quand on entre sur un profil Instagram, par exemple, de body positivity, et qu’on remarque que la violence, les systèmes de pression qui existent, la ségrégation des femmes hors norme et toute cette expérience-là, sont complètement tues au profit d’une image plus lisse, plus réjouissante, coupée de toute réalité, qui nous fait penser que le monde s’est amélioré. 

Les réseaux transactivistes, soutenus par le dit “féminisme” (à mettre des grosses guillemets, parce que pour moi c’est pas ce ne sont pas des mouvements féministes, mais il se disent féministe, donc c’est ultra libéral et capitaliste) ont eux aussi la même manière de façonner un monde qui n’existe pas – fictif, donc – se concentrer sur des choses qui n’existent pas, qui sont fictives, qui n’existent que dans les discours sur les réseaux sociaux et pas dans la réalité. Donc, c’est exactement la même chose. Plutôt que de dire “il existe des violences liées au sexe”, on dit “personne n’a de sexe, le sexe n’existe pas, pourquoi pas parler de ça…” Donc, c’est nier la réalité.

En gros – je caricature un peu –, mais on prend une femme grosse ou une personne trans, on lui écrit sur le corps “Je suis libre”, on met le bon choix de hashtag, d’emoji etc. et on fait un peu oublier que la personne a des menottes aux mains. Pour moi, c’est exactement la même culture que la culture Trump, qui est un tweet qui remplace toute une pensée, tout un discours, qui remplace 300 pages d’investigation théorique. La punchline a plus de valeur que les faits. Donc, pour moi, c’est une idéologie qui nie le genre, soi-disant, tout en l’admettant, travaillant une image normée selon les codes, ne remettant rien en question de l’idéologie dominante, qui prône une soi-disant désobéissance tout en jouant selon les mêmes règles imposées, répondant aux mêmes injonctions normatives que le schéma binaire habituel. Donc, c’est une image de rébellion qui est complètement superficielle ; qui est, je pense, très adolescente. C’est un peu comme de poster une photo de soi-même sur un réseau social en écrivant “Fuck la société” ou “anti-système”, alors que le réseau social est lui-même complètement – enfin l’usage d’un réseau social – fait partie du système. Donc c’est absurde, selon moi. Ce qui me dérange également, c’est le manichéisme (et ça, c’est quelque chose que j’avais dit avant) de ce militantisme…

Notamment sur la vision qu’ont ces militants des féministes radicales, qui associent immédiatement le scepticisme du genre au mouvement conservateurs, voire à l’extrême droite… Comme si l’étroitesse de leur échiquier idéologique ne pouvait pas admettre qu’il y ait d’autres compositions possibles. C’est ou bien d’un côté les progressistes d’un côté et les fachos de l’autre, et dans les progressistes, il y a une espèce de package qui est obligatoire ; et c’est ça qui est progressiste et l’autre package qui est facho. Donc, le package, c’est – pour être féministe tout ça : LGBT donc transactiviste par extension (liberté individuelle oblige), prôner la légalisation de la prostitution parce que liberté oblige – c’est le même délire, quoi – et favorable au porno dit, entre grosses guillemets, “féministe” etc. Donc, en gros, on a ce package-là. Et si on désapprouve l’une de ses composantes, on est immédiatement relégué à l’autre package qui est celui des méchants conservateurs, racistes, –phobes… et toutes les personnes qui remettent en question package de la première catégorie, quoi. Donc, je trouve ça plutôt binaire pour une idéologie “non binaire” d’être obligée de mettre les gens dans des cases comme ça, de ne pas admettre qu’il y ait des désaccords. Moi, le nombre de fois où on m’a associée à Macron ou à des extrémismes religieux, en cinq minutes après qu’ils aient compris ma position sur le féminisme, alors que je suis issue d’un féminisme profondément anticlérical, c’est hallucinant ! Vraiment, c’est dingue… Parce que pour eux, c’est impossible d’envisager une idéologie qui est non conforme…  Je trouve ça assez violent. Et comme je disais, les punchlines finissent par avoir plus de poids que des chiffres, des études, des faits. Souvent, je vais parler à des transactivistes en disant juste cela : en disant ok, admettons, laissons de côté le choix et toute la réflexion sur le genre, et je vous dis quelque chose : la grande majorité des personnes qui transitionnent – c’est-à-dire qui font une transition hormonale ou/et chirurgicale –  sont des femmes, anciennement lesbiennes. Ça devrait poser question sur le fait que ça découle d’un système patriarcal,d’une violence patriarcale… Sinon, si c’était une question de dysphorie de genre, systématiquement, il y aurait autant d’hommes que de femmes qui transitionnent. Donc, il n’y a même pas besoin d’aller plus loin : je vois que c’est une dérive patriarcale. ça me fait penser c’est que – de la même manière que le porno et la prostitution –  quand on essaye de m’asséner des arguments de style “liberté de choix” et tout le tintouin, il faut quand même savoir que la grande majorité des personnes qui sont dans la prostitution sont des femmes, et l’écrasante majorité des clients sont des hommes. Quand on sait ça on voit bien que ce n’est pas une question de choix, que c’est une question déterminisme patriarcal… Parce qu’en plus on nous fait souvent croire que les hommes ont plus de libido que les femmes. Donc, si c’était une question d’aimer le sexe et tout, il y aurait autant d’hommes sur le trottoir. C’est quoi, cette histoire…? C’est pour ça qu’il y a des parallèles avec l’idéologie transactiviste, selon moi. 

En plus, les punchlines sont d’autant plus valorisées si elles sont portées par des personnes qui correspondent aux codes de la beauté traditionnelle sur les réseaux sociaux, mais seulement en dehors de leur identité non-binaire. (pas logique…) Donc, en gros, c’est des personnes qui ont une identité non binaire, mais qui par ailleurs sont complètement normatives, et ça ne fait pas questionner l’hyper-sexualisation liée au sexisme. 

Au-delà du côté manichéen et binaire, j’ai parfois l’impression d’être plongée dans l’histoire du roi nu. Vous connaissez peut-être l’histoire… C’est un roi auquel des escrocs font croire qu’ils savent tisser un vêtement avec un tissu invisible à l’œil des sots et des personnes qui manquent de goût. Lui, comme il ne  veut pas paraître sot, il accepte de se faire faire ce vêtement. Il commence à parader dans la ville. Toute la ville, comme ils ne veulent pas paraître des personnes de mauvais goût ou des sots, ils font croire qu’ils voient le vêtement. Il y a seulement un enfant qui ose dire “Bah… Il est tout nu, le roi !”. 

Pour moi, c’est exactement ça, le côté transactiviste… C’est-à-dire qu’on nous fait vraiment passer des vessies pour des lanternes, et personne n’ose l’admettre. Ce n’est pas pour ne pas paraître sot, mais c’est pour ne pas paraître “TERF”, cette nouvelle malédiction, c’est-à-dire progressiste, réac etc. 

Donc pour moi, ce qui est absurde là-dedans, c’est que les femmes qui ont subi énormément d’oppression, de violence, de culture du viol et qui sont sans cesse en train de se battre contre la violence patriarcale… pour elle, ça a été un outil de survie d’être capable de déterminer si les gens sont des hommes ou des femmes. C’est une hyper vigilance de genre qui est nécessaire pour les femmes. Typiquement, moi, je fais beaucoup de stop. Quand je monte dans une voiture, je regarde si c’est un homme, si c’est une femme… Si c’est un homme, est-ce qu’il y a des enfants avec lui… Cette hyper vigilance d’être capable de repérer si les gens sont des hommes ou des femmes, ça n’est pas parce que ça nous fait plaisir, c’est parce que c’est nécessaire à notre survie, et c’est comme ça qu’on réussit à être intacte en tant que femme. Si on ne fait pas attention à cela, eh bien souvent –  et c’est le cas de quasiment toutes les femmes – on se fait abuser. Il y a beaucoup de femmes qui vous diront qu’elles ont parfois voulu aller au-delà de ces stéréotypes, c’est-à-dire “ah bah non, c’est un homme, mais bon, vas-y, je vais lui donner une chance ,ça va être un bon ami, etc.”, et se sont retrouvées harcelées ou dans des rapports de séduction ou violées carrément! Par ces hommes. 

C’est l’expérience commune,  donc ça montre que cette hyper vigilance est nécessaire! et maintenant, on essaie de nous faire ravaler cette hyper vigilance la faire taire, la cacher, et de nous dire “non non non mais là c’est c’est une femme”. 

 Ça me fait penser comme si une personne qui s’était fait attaquer, défigurer par un chien, violent, qui avait eu un traumatisme lié à ce chien, et ensuite on l’obligeait à fréquenter des chiens, en lui disant “Non mais c’est des chats!”

Pour moi c’est la même chose.

On peut se demander aussi pourquoi dans les milieux militants du coup, on a peur? Pourquoi a-t- on peur ? Est-ce qu’il y a une bonne raison d’avoir peur ? Pourquoi on a peur de ce terme TERF etc. Surtout en France où il y a quand même une culture de la provocation, de la provoc, du soi-disant débat, etc.  

Donc on pourrait se dire que personne n’a peur de dire des choses… De mettre les pieds dans le plat! Bah moi je pense qu’il y a une vraie menace, un vrai système qui fait qu’on a peur en fait. Il y a des bonnes raisons, mais d’ailleurs on l’a vu avec les manifestations, ou les collages (les nouveaux collages, j’entends) avec écrit “une TERF une balle” ou “les TERFS au bûcher”Enfin bon, c’est ultra violent, quoi. 

Au-delà du fait que le transactivisme pour moi repose complètement sur un sophisme, qui est :” je refuse de me conformer au code imposé par la féminité alors je ne suis pas une femme” 

Il me semble qu’il a aussi également dépouillé complètement le féminisme d’une réflexion qui était précieuse pour déconstruire les rôles genrés, combattre les divisions genrées des rôles, et combattre les violences liées au patriarcat.

Pour moi, le transactivisme c’est une menace pour les femmes et pour le féminisme par ce fait-là.

D’ailleurs pour moi c’est un énorme backlash… Le fait que ce soit très populaire et très mainstream aujourd’hui, c’est complètement évident que c’est un backlash compte tenu du contexte dans lequel est apparu ce truc.

Parce qu’on a vécu un vrai tournant féministe au moment de Me Too, une sorte de réaction en chaîne complètement libératrice suite à un ras-le-bol des femmes, qui étaient pas toujours féministes d’ailleurs, mais qui dénonçaient. 

Moi je crois pas que cette vague féministe d’accès à la théorie de création en masse de contenu de réunion de communauté de femmes de libération de la parole ait découlée naturellement sur la question du genre et par extension sur le transactivisme, comme un glissement naturel,

 Je pense plutôt qu’ au contraire c’est le transactivisme de masse il est apparu en réaction à une ébauche de libération des femmes c’est ça que je pense c’est une réaction de la part de l’oppression.

 Souvenons-nous quand même que la popularité psychiatre rhétorique elle est apparue à un moment de rébellion où on avait le mariage pour tous, la dédiabolisation de la notion de misandrie dans les milieux militants un avènement des espaces non-mixtes des collages féministes avec Marguerite Stern une sortie de l’ombre de la réappropriation du terme “sorcière”; la vulgarisation du concept de lesbianisme politique, une sortie de du placard des patrimoines, et du coup le fait de refuser aussi de lire des textes écrits par des hommes parce qu’on veut favoriser les femmes etc… C’était complètement en voie d’être banalisé avant le transactivisme enfin l’avènement du transsexisme quoi. 

Toutes les pionnières qui ont été de ce mouvement ont été diabolisées… c’est les premières qui ont été diabolisées! comme par hasard au moment de ce tournant féministe:  Marguerite Sterne bien sûr, JK Rolling… et pour moi c’est pas par hasard que avant MeeToo etc on avait déjà le scandale Johnny Depp/Amber Heard qui était sur le feu  Amber Heard qui était victime de violence conjugales, et comme par hasard aujourd’hui on a un énorme backlash et une violence mais… déchaînée! Contre cette femme, qui pour moi n’apparaît pas à un moment anodin.  C’est pas anodin le timing là, je pense. 

Sur le sujet du lesbianisme qui me concerne personnellement, enfin ce qui m’apparaît comme un énorme backlash, un backlash masculiniste et lesbophobe par conséquent, c’est que l’ennemi numéro 1, du patriarcat c’est bien évidemment le féminisme mais aussi le lesbianisme car c’est l’ultime attaque contre le patriarcat de ne pas avoir besoin ou de refuser d’avoir un homme dans sa vie.

Car les lesbiennes, n’ont pas besoin d’hommes contrairement à ce qu’on veut nous faire croire à grand renfort de culture du viol etc. Le patriarcat le sait très très bien, qu’on a pas besoin d’homme, et donc le côté masculiniste de cette idéologie va pour moi de pair avec la lesbophobie. Qui est intrinsèque à ces mouvements en fait, parce qu’on vit dans une société où en gros une femme qui est mal à l’aise avec les rôles genrés qu’on lui impose, et qui s’intéresse à une activité soi disant masculine, des vêtements ou bien une orientation sexuelle qui ne devrait pas être la sienne, et bien elle se convainc d’être un homme et elle devient un homme hétéro! 

Donc c’est non seulement un négationnisme de la réalité genrée de la société, réalité biologique du corps des femmes… Parce que si on suit leur raisonnement, si on se déclare homme, on est un homme! Donc on peut pas être une lesbienne! 

Parce que la définition de lesbienne, c’est des femmes qui ont des relations amoureuses avec d’autres femmes!

En fait, il y a au-delà d’un négationnisme, il y a un effacement des lesbiennes, qui est grave! Une disparition des lesbiennes! 

Pour moi c’est ça. 

Donc sans déconner, toutes les grandes “mentors”, toutes les femmes lesbiennes qui étaient visibles au moment où je suis sortie du placard, enfin franchement il y en a une sur trois qui sont des trans aujourd’hui ou des personnes non-binaires! c’est hallucinant! 

Tous les clubs, tous les endroits qui étaient dédiés aux lesbiennes sont aujourd’hui des endroits trans, pour moi c’est pas du tout un hasard en fait: c’est les lesbiennes l’ennemi numéro 1 du patriarcat! les isoler, les diviser, les faire sortir avec des hommes, les faire sortir avec des personnes trans, c’est tout!

Typiquement moi j’adorais Océan, là, celui qui s’appelle Océan aujourd’hui, c’était Océane Rose-Marie avant: c’était une une femme qui était chroniqueuse à la radio. Moi, je l’ai écoutée souvent et elle était comédienne. Elle était très grande gueule et en plus elle était “lesbienne visible”. Elle a fait tout un spectacle qui s’appelle “la lesbienne invisible”. Moi, je m’identifiais beaucoup parce qu’à l’époque, on ne captait pas du tout que j’étais lesbienne.  Et pour moi, c’était très fort d’avoir une lesbienne qui ne soit pas dans les codes, qui soit quand même une femme, qui ne soit pas dans le stéréotype, qui ne “mimétise” pas l’homme mais qui soit visible, qui parle… 

Elle a fait tout plein d’activisme sur le lesbianisme… Et aujourd’hui, c’est un “homme” on ne peut plus macho, qui plus est à fond dans le délire queer. Ça me déprime franchement quand je vois ça. 

Quand j’entends une lesbienne, qui était pour moi un modèle, devenir trans, pour moi c’est déprimant. D’ailleurs, ma hantise, c’est que Adèle Haenel le devienne ! Eliott, qui était Hélène Page, qui était aussi lesbienne… enfin, avant ! Est maintenant un garçon… donc, bref! 

Pour moi, c’est une disparition des lesbiennes, vraiment. 

Donc, quand je découvre une nouvelle lesbienne qui est connue, ma hantise, c’est qu’elle revendique publiquement le fait d’être trans. Parce que je me dis, en fait les jeunes qui sortent du placard, vont se dire, si ça se trouve moi aussi je suis trans. Je suis peut-être un garçon, si je suis une fille pas normale, qui aime d’autres filles, c’est que je suis un garçon. Donc en plus je trouve qu’il contredisent eux-mêmes parce que j’entends des trans dire : “Mais tu ne pourrais pas sortir avec une femme trans, comme je vous l’ai dit plus tôt, donc un homme transidentifié?” Je dis non, je ne pourrais pas. Car non seulement cette personne a la biologie, mais aussi  l’expérience, et tout ce que j’ai dit plus tôt. Et alors, on me dit souvent : “Tu pourrais sortir avec un homme trans?” Et moi je dis non. Parce que je suis lesbienne. Donc ça voudrait dire que eux-mêmes contredisent leur propre discours en disant que le mec avec qui je sors, c’est une lesbienne. C’est pas un peu transphobe de dire ça? Vous dites que c’est un mec. Il dit que c’est un homme. Normalement, quand on dit qu’on est un homme, on est un homme! Donc on n’est pas une lesbienne! C’est complètement contradictoire et, en fait, c’est vraiment “faites ce que je dis, pas ce que je fais.” Donc moi je trouve qu’il y a énormément de contradictions au sein même de leur discours, en fait. Et souvent, j’entends des choses comme ça, genre on est une femme si on se déclare être une femme, on est un homme si on se déclare être un homme… et ensuite j’entends des choses contradictoires de style “mais non, on peut très bien être lesbienne et sortir avec un mec. Non, on peut très bien être dans un couple non-binaire, mais être hétéro… Enfin, du coup, je ne comprends plus rien. 

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner de façon anonyme? As-tu déjà subi des pressions, des menaces, un danger perçu ou réel dans ton entourage?

Olga – Moi, je me sens en danger. Évidemment, on ne m’a jamais menacée de mort, mais peut-être aussi parce que je ne l’ai jamais dit publiquement. Tout ce que je suis en train de dire, là. 

Je sens qu’il y a une pression dans les milieux féministes, enfin dans le féminisme, mais aussi dans la société en général, de ménager la chèvre et le chou constamment en fait. Et il y a des choses qui sont antinomiques, qui ne sont pas compatibles dans le transactivisme, avec le féminisme. Il y a des choses qui ne sont pas compatibles, et essayer d’être sans cesse dans l’intersectionnalité, pour moi, ça me pose un problème. Et si on a le malheur de dire ça, eh bien on est directement taxée de Terf. 

Être taxée de Terf, ce n’est pas juste un terme, non non. C’est vraiment un black listing des milieux activistes, parfois des manifestations. Il y a des femmes qui se sont vues agressées, verbalement ou physiquement. Il y a des femmes qui ont été ostracisées de leur milieu. Du coup, pour moi il y a un réel danger dans ce sens-là. Je ne l’ai pas perçu personnellement, cet extrême du danger, mais je sens que je pourrais perdre mon travail, si ça se savait au travail.

Parce que je sens qu’il y a une énorme pression, notamment aux États-Unis, pour être complaisant avec ce transactivisme, ce discours-là, ce discours transactiviste. On doit être complaisant, et si on a la moindre critique, on est blacklisté comme je vous disais. Et avec mon travail, je sens que c’est vraiment réel, d’ailleurs ma supérieure m’a clairement fait sentir qu’il fallait que je la ferme sur ce sujet. Pourtant je ne l’ai vraiment pas ouverte du tout, j’ai juste dit une petite nuance, et tout de suite on m’a dit “Ouh là, attention! Ici ce n’est pas possible.” Donc je sens que je pourrais perdre mon travail. Et surtout, ce qui m’inquiète le plus, ce serait de perdre des proches. Parce que j’ai ma soeur qui est dans un milieu queer, et je sais que si je lui disais ce que je pense vraiment, de but en blanc, comme ça, ce serait très difficile de la garder dans ma vie. Parce qu’elle est dans un milieu très sectaire, là. Comme je vous le disais et donc, c’est tout ou rien.

C’est comme ce que j’ai vécu avec mon ami, dont je vous parlais plus tôt,  j’ai l’impression qu’on peut très vite être isolée et perdre des proches, perdre des amis, et dans le pire des cas, perdre son travail.

Et je sais qu’on peut trouver d’autres communautés, mais ça n’empêche que je n’ai pas envie de vivre ça, en fait.

J’ai envie qu’on continue à écouter ce que je dis, en termes de féminisme. Et je sais que si je dis ce que je pense sur le transactivisme, on n’écoutera plus ce que je dis en termes de féminisme. On me qualifiera de conservatrice.

RDG –  As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Olga – J’ai commencé à être très sceptique du transactivisme, enfin vraiment rebelle quand ma sœur a commencé à être dans cette communauté, cette grande coloc, dans laquelle elle habite, où tout le monde est queer. Ils ne sont pas queer en arrivant, enfin ils n’étaient pas tous queer en arrivant, mais ils le sont devenus en y étant, ce qui est pour moi un signe d’un milieu sectaire, quand même : c’est que tout le monde se transforme en trans, comme par hasard, au bout de quelques mois dans ce milieu. Donc pour moi, vraiment un red flag. Et en fait j’ai commencé à sentir que cette communauté était hostile envers moi quand ils ont compris dans quelle association je militais… Donc j’ai vu qu’ils avaient quand même une volonté de me mettre de côté. Avec ma sœur, j’ai souvent essayé d’argumenter. Ils sont évidemment pro-prostitution, et compagnie. Enfin, c’est le délire total. Et j’ai essayé d’argumenter avec ma sœur parce que je pense sincèrement qu’elle est victime de milieu, qu’elle est brainwashée. C’est ce que je pense. Et j’essaie d’argumenter avec elle sur ce sujet. Et à chaque fois, elle comprend, elle entend ce que je dis et elle n’a pas d’argument à redire, comme si elle était convaincue. Et elle me rappelle une demi-heure après, et elle me dit tout un tas de trucs qu’elle me répète comme un perroquet, parce qu’elle en a parlé à sa coloc ou à son coloc, et ils lui ont dit quoi me répondre.

C’est là que j’ai commencé à être vraiment inquiète. Et ce qui m’a inquiétée, c’est que ma soeur était dans un choix d’abstinence amoureuse et sexuelle, parce qu’elle était hétéro – enfin, elle est bi, mais elle n’avait que des relations hétéro – et elle était malmenée par sa vie hétéro. Enfin, elle était toute cassée, quoi! Donc elle a décidé, au moment où MeToo est apparu, d’arrêter avec les mecs, parce qu’elle se sentait mal. 

Et en fait, peu à peu, elle a commencé, – dans leur coloc, soi-disant ils n’acceptaient pas d’hommes au début, maintenant c’est pas d’homme “cis”, donc il y a des hommes – et au début ils étaient pro non mixité, tous misandres… et au fur et à mesure ils sont en “mixité choisie”, ils ne sont plus misandres, le nouvel ennemi, c’est les “cis”, etc.

 Et en fait, je savais qu’elle ne voulait plus fréquenter d’homme, amoureusement parlant. Et il s’est passé un truc qui m’a vraiment choquée, c’est que, du coup, son coloc, qui est arrivé en tant que mec, “total”, et il est arrivé en tant qu’homme, et en fait, au bout de quelques mois, il a commencé à porter des boucles d’oreilles longues,  et à dire qu’il voulait qu’on l’appelle “iel”… Et en fait, dans cette coloc, ce qui était bien, c’est que c’était un safe place, où les femmes pouvaient se mettre toutes nues dans le jardin si elles le voulaient, tant qu’il n’y avait pas d’hommes, bien sûr, évidemment.  Quand il a commencé à y avoir des hommes, c’était la débandade. Mais sauf que… c’étaient des hommes qui se disaient non-binaires, donc…

Moi, j’ai vu ce mec qui se baladait dans le jardin à poil,  j’avais son paquet sous les yeux, et on me demandait de faire croire que ce n’était pas un homme. Donc déjà, c’est choquant, quand même, soi-disant dans des espaces où on peut être safe, et tout ça…

Il faut savoir que ce mec est couturier, et il fait des des corsets et des harnais. Des sous-vêtements de type sado-maso. Tout le monde dans ce milieu-là en porte, et dit “Ah c’est trop cool, j’ai mon corset, il est trop beau! J’ai mon harnais, il est trop beau!” Et tout ça, moi je dis, mais c’est de l’imagerie pornographique de violence quoi!

Ma sœur me dit “Mais non, on peut se réapproprier son corps… Et voilà. Donc je sentais que c’était sur la pente glissante, et en fait, un jour ce mec – que maintenant, il faut prétendre que c’est une femme, il n’a pas transitionné ni rien – il a invité ma soeur à faire une “sex party”, c’est à dire une partouze, une orgie quoi. Et il lui a dit “Mais ça va, tu vas voir, ça va te réconcilier avec le sexe… tu vas te réapproprier ton corps.” Enfin, au début elle a dit non. Mais il a insisté en disant “Moi je pensais que c’était parce que c’était un safe place, que tu avais besoin, je pensais… etc.”

Donc là, il lui a fait de la rhétorique.

Et comme elle est sensible à la domination masculine, comme je vous l’ai dit plus tôt, évidemment c’est un homme, donc elle ne veut pas le décevoir, parce que c’est un homme et qu’elle est aliénée aux hommes, et donc elle a dit oui. Elle y est allée et elle m’a dit « Ça va être chouette, ça va être que des potes, etc.” 

Avec qui elle a fait des trucs?

Avec lui.

En fait , ce mec il voulait mettre le grappin sur ma sœur, sous prétexte de féminisme, moi je trouve alors qu’elle avait décidé de plus relationner avec des hommes. 

Parce que maintenant, on doit dire que c’est une femme, voilà!

Ce mec, qui se dit bi, parce qu’il se disait bi au début, mais il ne sort qu’avec des femmes, il ne sort qu’avec des femmes! Donc moi, ça m’a franchement… ça m’a écœurée. J’étais mal. Oh là là, je n’étais pas bien. Donc là, ça m’a… ça a été vraiment un moment décisif où je l’ai dit. Je lui ai dit, à ma sœur : “Tu es  sûre que ce n’est pas un piège, tu es sûre?” Quand elle n’y était pas encore allée, je lui dis “Mais tu es sûre ce n’est pas un piège, qu’il ne veut pas te…  ce n’est pas une stratégie pour t’avoir dans son lit?”

Donc voilà, j’étais très choquée. Ce n’est pas la première fois que qu’il se passe un truc comme ça.

Pareil, elle est sortie avec une fille, après avoir décidé de faire du lesbianisme politique. Elle est sortie avec une fille, et finalement cette fille, en traînant dans ce milieu-là, maintenant, c’est un garçon! Donc en fait, elle n’a pas du tout réussi à sortir de l’hétéro-patriarcat. En fait, elle y est engluée.

Et on essaie de lui faire croire que c’est ça : ils vont à des cabarets ils font des photos nus, ils font… enfin c’est c’est tout ce qu’il y a de plus sordide. Seulement on prend le même système,  on change les étiquettes, on prend le même système, l’objectification  des femmes, on met “féministe” à la place, et c’est tout, quoi!

Donc en fait, elle n’est pas sortie de l’auberge, c’est ça qui est horrible. Et en plus, comme c’est un milieu sectaire, ce que je disais, ils ne voient personne, c’est une espèce de huis clos entre eux, il n’y a jamais d’interactions avec le monde extérieur. Tous les milieux où ils vont, c’est des gens qui sont dans le même délire, du coup pour moi, il y a vraiment, c’est difficile de s’en sortir. 

Voilà donc ça, c’était l’anecdote que j’avais à raconter

RDG –  As-tu quelque chose à ajouter?

Olga – J’’aimerais bien dire que c’est pour avoir plus d’anecdotes qui corroborent ce que je dis et mon expérience. J’ai l’impression que mon expérience est banale en fait. Quand j’écoute les podcasts de Rebelles du genre, c’est ce que j’ai vécu. J’ai l’impression d’entendre la même chose à chaque fois, d’entendre mon expérience, quoi. 

Donc en fait, quand la parole commence à se libérer, on se rend compte qu’on a toutes les mêmes expériences, qu’on a toutes les mêmes anecdotes et qu’on a toutes le même vécu.

Et du coup, je j’invite vraiment à écouter d’autres podcasts, enfin d’autres épisodes de ce podcast, de façon à avoir plus d’anecdotes, d’exemples qui corroborent ce que je dis. Parce que je dis des choses qui, parfois, sont théoriques. Mais en fait, il y a beaucoup de femmes qui ont vécu des choses qui le confirment.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole, et n’hésitez surtout pas à la partager le plus largement possible.

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe, www.womensdeclaration.com 

Rebelles du genre – Épisode 56 – Anna

Anna – Bonjour, je m’appelle Anna, j’ai 23 ans, je vis en Bretagne et je suis russe. Je vis en France depuis 7 ans. Je m’intéresse beaucoup au féminisme depuis que j’étais au collège, mais je m’intéresse également aux nouvelles technologies (comme la réalité virtuelle par exemple ou la réalité augmentée), à la sociologie (par exemple des mouvements qui semblent un peu autoritaires ou sectaires). Et je considère que le mouvement transactiviste est intéressant à étudier sur ces points là : des nouvelles technologies ou l’aspect sectaire.

Mon parcours de critique de genre est un peu en lien avec ma mère. Quand j’étais au collège, je passais beaucoup de temps sur Tumblr où j’ai goûté au féminisme libéral. Et quand je suis partie au lycée, j’ai migré en France. Pendant ce temps là, ma mère, qui habite en Russie, n’était pas féministe. Mais après avoir subi des violences misogynes, elle est devenue féministe radicale. 

Quand on discutait du féminisme, je n’étais pas toujours d’accord avec elle et je répétais tout ce que j’avais lu sur Tumblr : Libfems et transactivistes. Pendant ces années-là, donc il y a 7 ou 5 ans, Tumblr était vraiment le berceau de ces deux mouvements, bien que la réalité que j’ai vécue (en Russie surtout) et que ma mère a vécue ne s’appliquait pas vraiment aux idées que je pouvais lire en ligne. 

Quand j’ai fini le lycée et que j’étais en études supérieures, j’ai découvert, sur Reddit, un subreddit qui s’appelle “female dating strategy”. C’est un subreddit où il n’y a que des femmes. Les hommes sont éloignés de ce subreddit.

Ce qui était différent, c’est que c’était un subreddit critique du genre et sans être misogyne. Il parlait de la violence masculine et cela m’a ouvert les yeux. Notamment un thread sur des violences masculines, où il y avait des femmes de dizaines de pays différents qui parlaient de leurs expériences. Et c’est comme ça que je me suis rendu compte que c’était partout pareil.

En même temps, je passais mon temps sur un forum anonyme qui s’appelle “Lolcow”. C’est comme Fortune mais il est non mixte et critique du genre. Alors il y a une culture très particulière. Ça parle surtout des personnalités publiques ou influenceurs qui sont bizarres. La culture est assez hard. C’est pas très bienveillant. 

Mais un jour, je suis tombée sur un thread qui documentait des hommes transidentifiés. Je pense que c’est leur thread le plus populaire parce que les médias mainstream et les réseaux sociaux sont totalement sur ce type de contenu. Et quand j’ai vu cette face cachée du transactivisme, avec les autogynéphiles, le porno dans les toilettes, la pédocriminalité, ça m’a piqué, très très vite. Et j’ai fait le lien entre la violence des transactivistes et la violence masculine normale que j’ai vu sur Reddit.

Après, je me suis intéressée au contenu et aux idées purement radfems. J’ai commencé à lire des livres de théorie radfem. Alors les livres d’Andrea Dworkin, bien sûr, et le tout dernier livre que j’ai lu et qui m’a vraiment marqué, c’est le livre de Caitlin Roper qui s’appelle Sex Dolls, Robots and Woman Hating, qui est très récent et c’est vraiment bien écrit. 

Et maintenant je parle souvent du féminisme radical avec ma mère qui participe au mouvement antimilitariste et féministe en Russie et qui est très choquée d’apprendre la situation en France concernant la violence transactiviste. Parce que, quand on migre, et qu’on était dans une famille assez libérale de la classe moyenne, on a une image de l’Europe de l’Ouest très positive. C’est vraiment là où les droits des personnes homosexuelles ou des femmes sont respectés. C’est un peu le pays des bisounours. Quand on arrive et qu’on voit que non, pas du tout, que les féministes sont frappées et éloignées des manifs anti-avortements, on a un peu les rêves brisés. Ça rappelle un peu trop les violences anti-féministes dans le pays d’origine. En URSS, il y avait aussi des thérapies de conversion pour les personnes homosexuelles, notamment pour des lesbiennes, qui étaient envoyées en camp de travail, je crois que c’est au Kazakhstan. Et les médecins soviétiques, qui faisaient des recherches sur comment éradiquer l’homosexualité, les exposaient à la thérapie de conversion par des hormones et identifiaient les lesbiennes masculines comme des hommes.

NOTE : 1/ Sur les thérapies de conversion des homosexuels et en particulier des lesbiennes en URSS. Source : Functional female sexopathology, V. Zdravomyslov, 1985

Rebelles du genre – Donc ils faisaient transitionner les lesbiennes pour régler la question de l’homosexualité?

Anna – Oui. Dans leur livre, ces médecins Soviétiques avaient écrit en épilogue: “En espérant que, dans le futur, ce sera possible de commencer la thérapie de conversion par hormones le plus tôt possible pour éradiquer l’homosexuelité de ces personnes.”. Je crois que ce livre est en anglais.

Rebelles du genre – Ok… Je savais qu’il y avait de l’homophobie, par contre je ne savais pas que l’homophobie était réglé comme en Iran, par la transition. En Iran, c’est pareil, ils font de la chirurgie de réassignation sexuelle, comme ça ils n’ont plus d’homosexuels. 

Anna – Je ne sais pas si c’est vraiment pour se transformer en homme, ou juste pour que si on te donne telle hormone tu vas tu vas arrêter d’être attirée par les femmes. J’ai pas trop compris.

Rebelles du genre – De toute façon, ça ne marche pas comme ça. C’est un long sujet. Il faut juste foutre la paix aux lesbiennes. C’est juste ça : foutez la paix aux lesbiennes. Point. Elles sont très très bien là où elles sont : lâchez-les.

Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ?

Anna – Pour la société et la démocratie : le transactivisme s’inscrit parfaitement dans le modèle “BITE” qui est développé par Steven Hassan, qui est un expert sur les dérives sectaires. Steven Hassan, qui a écrit un livre qui s’appelle Combating Cult Mind Control. Ça parle de dérives sectaires qui peuvent être religieuses mais aussi politiques par exemple, et quels sont leurs signes. Le transactivisme, c’est une croyance. On peut croire à Jésus, ou au Père Noël, ou qu’au fond de nous il y a un homme qui vit. C’est une croyance avec des signes de dérive sectaire parce que ça contrôle ces adhérents. Par exemple, ça limite l’accès aux informations.

Note : 2/ Sur le modèle BITE : L’acronyme B.I.T.E. désigne le schéma de contrôle de l’esprit appliqué dans les sectes à structure pyramidale : le B c’est pour “Behaviour”, le contrôle du comportement, le I pour le contrôle de l’information, le T pour “Thoughts”, le contrôle des pensées, et le E pour celui des émotions.

Rebelles du genre –  Oui, par rapport à cette question, à ce point, par exemple on peut nous dire : “ Allez signaler ce compte mais surtout ne lisez pas ce qu’il y a dedans.”.

Anna – Oui. En fait, ça limite l’accès aux informations en disant qu’il ne faut pas aller regarder ou lire certaines personnes qui ne sont pas d’accord avec le dogme. Ça ressemble un peu aux sectes religieuses qui disent : “N’allez pas dire tels livres ou n’allez pas parler avec certaines personnes, ils sont influencés par Satan”. Bah là, ils sont influencés par les terfs, surtout n’allez pas parler aux personnes qui sont sorties de la secte (donc ici c’est les personnes détrans). Il faut toujours contrôler ce que les autres disent, donc si votre adepte dit quelque chose que vous ne pensez pas correct, il faut toujours faire la chasse aux sorcières, dénoncer.

On a aussi affaire à ce que l’auteur appelle les Thoughts Stopping Affirmations : ce sont des informations, des phrases, qui coupent complètement la réflexion. 

On le connaît tous, c’est “Trans women are women”qu’on dit à chaque fois qu’on nous demande de réfléchir un peu. 

Ce que je trouve intéressant dans les sectes, c’est qu’il y a aussi des phrases qu’on doit tout le temps répéter, ou même une pratique de chanter certaines choses. Ça m’a fait penser à la réunion de Nous Toutes (je sais pas si vous avez vu la vidéo) où il y a toute une salle de personnes, de femmes, qui chantent “La transphobie tue, la transphobie tue!”. 

Non, elle tue une personne en moyenne en France, si je ne me trompe pas. Et ça aussi : pourquoi donner à des personnes des statistiques erronées qui vont leur faire peur, qui vont les convaincre qu’elles sont isolées et persécutées? 

Ça aussi, c’est une technique de secte. 

Rebelles du genre – Alors, juste pour dire, quand même, les personnes trans qui sont tuées, il y en a quand même pas une par an et, en France, les deux dernières fois où ça s’est produit, c’était des personnes qui malheureusement étaient victimes de traite prostitutionnelle et qui étaient assassinées par leur proxénètes ou par les prostitueur, clients-violeurs. Ce n’est pas les trans. Enfin, je ne sais pas si on peut appeler ça de la transphobie. Moi je pense que c’est surtout de la violence masculine et ce ne sont certainement pas des féministes. 

Les féministes n’ont jamais tué qui que ce soit. Jamais. 

Peut-être qu’elles devraient s’y mettre et elles deviendraient crédibles à ce moment-là, peut-être, mais dans tous les cas, jusque là, les personnes trans qui ont été tuées ne l’ont jamais été par des féministes. 

Anna – Oui, c’est parce que j’ai lu un article de RadCaen. Dans la source qu’elle donnait, c’était une association qui veille sur les meurtres de personnes trans et effectivement, en France, c’était ça, en moyenne. Mais c’était tous genres et motivations de crime confondus. 

Mais je ne suis pas sûre qu’il y ait des études qui parlent vraiment de violence et de meurtres transphobes, qui touchent disproportionnellement des femmes trans comme on aime le raconter.

Cette croyance, pour moi, de transactivisme, n’est pas juste sur les marges de la société, mais elle est imposée au niveau légal dans certains pays, comme le crime de mégenrage, ou le crime de non-reconnaissance du genre de la personne. Cette croyance ne respecte pas la liberté de la parole (ça on l’a bien vu avec toutes les féministes qui sont harcelées, censurées). 

C’est une croyance qui est violente, sans presque jamais être punie. 

Et en dehors du cadre légal, les transactivistes censurent non seulement des personnes individuellement sur les réseaux sociaux, avec les chasses aux sorcières où ils signalent en masse le compte de quelqu’un, mais ils ont aussi le pouvoir de faire disparaître des sites entiers qui dénoncent et qui documentent leur comportement. 

C’était le cas de Kiwi farms. 

Kiwi farms, c’est un site qui est un peu comme Lolcow : c’est un forum anonyme où on documente, de manière pas très bienveillante, les comportements de personnes en dehors de la norme. 

Notamment il documente Chris Chan, un homme transidentifié qui a violé sa mère. 

Il documentait aussi Keffals. C’est une figure de transactivisme très intéressante. C’est un influenceur, on peut dire, un streamer twitch, un homme transidentifié, qui “groome” des enfants. Parce qu’avec son pote (qui est un peu aussi streamer et homme transidentifié, Bob Posting), ils avaient ouvert un serveur Discord avec des mineurs, des jeunes garçons, à qui ils exposaient leur kink de “catgirl”. Ça sort de la culture manga, c’est des filles avec des oreilles. Je ne sais pas pourquoi mais les transactivistes adorent ce type de personnage et le cosplay souvent de manière assez sexualisée. 

Donc sur ce Discord, Keffals révélait son kink aux enfants, et les encourageait à s’habiller de cette façon et à être sexuel. 

Pour moi, c’est du grooming. 

Et pourquoi il faisait ça, à part pour le plaisir sexuel? Il fait (ou faisait) la promotion d’un site “DIY  HRT” qui vend des hormones de transition aux mineurs sans être une entreprise pharmaceutique, qui est connue sans aucune licence. Et ça, ça ne passe pas dans les médias mainstream. Et ça passe à côté de toutes les lois, j’ai l’impression.

Je sais que c’est un sujet que, si tu ne passes pas 10 heures par jour sur Internet, peut-être tu n’es pas forcément au courant. Mais je ne trouve pas ça normal qu’un mouvement puisse, limite, avoir des dealers dans ses rangs et… personne ne fait rien!

Je trouve que c’est un mouvement purement capitaliste et autoritaire. 

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidé à témoigner sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions,  des menaces,  est-ce que tu perçois un danger ou est-ce que tu te sens en sécurité pour parler librement? 

Anna – J’ai décidé de témoigner sous ma réelle identité… 

J’ai subi des menaces de « doxxing » : j’ai dit à quelqu’un que les hommes transidentifiés sont des mâles et la personne m’a répondu “voilà : ton université, je vais les contacter”, etc… 

Mais mon entourage proche partage mes valeurs et mon entourage pro… le monde pro est… difficile à joindre. J’ai quand même pris des mesures pour protéger mon identité en ligne. 

Je suis d’avis que si vous ne voulez pas être une personnalité publique et vous êtes une femme, évitez de donner votre nom, votre ville, votre métier, sur les réseaux sociaux, ou de poster votre photo, parce que n’importe quelle personne “chasseuse de Terf” peut prendre votre photo Instagram, la passer  sur un site de reconnaissance faciale, et après, trouver tous les endroits en ligne vous apparaissez : donc ça peut être votre LinkedIn, ça peut être votre page Facebook, etc. 

Et j’ai décidé de témoigner avec mon vrai prénom, parce que je suis inspirée aussi par ma mère qui est assez courageuse à faire son activisme dans un pays autoritaire, sans se cacher. Elle était déjà censurée par son entreprise et par les réseaux sociaux mais elle continue et je pense que je dois faire pareil.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme? 

Anna – Alors j’ai deux anecdotes :  le premier c’est que un jour j’ai reposté sur Instagram un poste qui parlait de la violence sur les femmes, mais le compte s’appelait “a woman is not a feeling” et j’ai une amie très proche qui est venue dans mes DM en disant “mais c’est quoi ce compte de Terf que tu repartages?” 

Mais en parlant avec elle, j’ai compris qu’elle était d’accord avec le message lui-même. Et quelques semaines après, cette amie qui avait déjà conscience de la violence masculine a “peak” très vite en voyant la violence des transactivistes partagées sur un compte radfem. 

RDG – Donc en fait quand elle t’en a parlé elle était déjà en train d’ouvrir les yeux c’est ça?

 Anna – Oui. En fait, elle habite en Égypte et elle a bien conscience de la violence masculine qui l’entoure, je pense que c’est pour ça que c’était plus facile de voir la violence, qui ressemble à ce qu’elle vit.

RDG – Autrement dit, c’est pas parce qu’une femme dit que tu es une terf qu’elle n’est pas, elle-même, prête à en devenir une bientôt!

Anna – Oui  je pense, oui. 

RDG – Des fois c’est la dernière réaction, la dernière façon de se défendre.

Anna – Mais j’ai entendu ça de quand j’ai écouté le podcast de Marguerite Stern où elle parle avec des jeunes femmes Radfems, et là aussi il y avait un témoignage qui parlait des amies qui sont d’accord avec les messages de terfs, mais que qui chassent ces mêmes terfs en même temps.

Ma deuxième anecdote est un peu plus récente : quand j’étais à Nantes, j’ai vu un sticker de NousToutes qui parlait de la violence “de genre” envers les femmes et naturellement, ça m’a interpelée. Je n’étais pas du tout d’accord, donc je l’ai pris en photo et je l’ai posté sur mes réseaux sociaux en disant que “Non, les femmes, elles sont violentées, opprimées… que les violences que subissent les femmes sont fondées sur leur sexe, et pas leur genre.” 

Et j’ai donné plusieurs exemples : des fœtus femelles avortées parce que ce sont des femelles. 

Ou l’absence de l’accès à l’avortement. 

Ou les féminicides… 

J’en ai posté 12 exemples, je crois, à peu près. Et NousToutes a répondu à ma story en disant en gros que : “Non, on ne parle pas de violence de sexe, mais de genre, parce qu’ils sont concernés… parce que ça concerne aussi des personnes trans, mais ça se voit, vous n’êtes pas ouverte à la discussion.” 

Et à la fin, elles ont dit clairement :  

“Occupez-vous des violences de sexe, nous on va lutter contre les violences de genre.” 

Et pour moi c’était hallucinant qu’une association qui est censée protéger les femmes, elle s’en fiche clairement des violences de sexe, à part quand il faut ramasser l’argent dans leur cagnotte. Là, c’est bien une lutte antisexiste. Et ma mère était très choquée quand je lui ai raconté cette petite anecdote.

RDG – Évidemment. Mais bon, Nous Toutes ne cessera jamais de nous surprendre par la profondeur des abîmes dans lesquelles elle tombe sans s’arrêter. C’est effrayant, le vide. 

Le vide de la pensée, le vide de la pensée stratégique et le vide du féminisme surtout.

Anna Mais même ça je ne trouve… Enfin, j’ai du mal à vraiment comprendre, parce que même les personnes trans elles sont discriminées ou elles sont violentées à cause de leur sexe. Un homme trans ne peut pas accéder à l’avortement, c’est pas à cause de son genre, c’est à cause de son sexe. 

Ou quand les femmes, les hommes transidentifiés américains sont enrôlés dans l’armée alors qu’ils ne veulent pas, ça aussi c’est une discrimination à base de sexe, pas à base de leur genre.

Si vous avez vu que Dylan Mulvaney, un homme transidentifié assez populaire qui était invité à la Maison Blanche très récemment, c’est tout simplement un évènement marketing de la part de la Maison Blanche, parce qu’ils ont signé une loi qui enrôle tous les hommes transidentifiés dans l’armée dans le cas d’une guerre. 

Donc c’est bien une discrimination à base de sexe.

RDG – C’est à dire qu’en fait cette loi elle dit qu’en cas de guerre, les hommes, peu importe la façon dont ils s’identifient, sont enrôlés, c’est ça ? 

Anna – Oui, c’est ça.

RDG – D’accord, donc autrement dit, le genre c’est du bullshit.

Anna – Oui. En fait, on respecte le genre des hommes transidentifiés pour qu’ils puissent aller aux toilettes des femmes ou dans leurs prisons, mais quand il s’agit de l’armée tout de suite, ils ont une vision très lucide de du sexe et du genre. 

C’est très récent. Personnellement, je pense que c’est juste pour que quand les gens ils cherchent “transwoman – Biden”, je ne sais pas quoi, ils tombent sur le résultat de rencontre Biden – femme trans et pas…

RDG – Ils ont allumé un contre-feu quoi (rires). D’accord.

Anna – Oui. Comme il y avait vraiment très peu de temps entre ces deux news, je pense que c’était juste pour cacher…

RDG – Ils ont allumé un contre-feu, clairement. C’est assez amusant…

Est-ce que tu as quelque chose à ajouter ?

Anna – Oui. J’aimerais parler des espaces un peu uniques en ligne et des nouvelles technologies qui sont liées au transactivisme et qui posent un danger pour les enfants ou les personnes vulnérables et ce qui est très peu réglementé.

On peut parler déjà de tous les espaces en dehors des réseaux sociaux, donc, comme des forums anonymes comme Lolcow ou Kiwi Farms ou même Mumsnet qui sont des forums critiques de genre, qui documentent les dérives du mouvement transactiviste, qui sont menacés. Parce qu’il ne faut pas croire que si vous êtes censuré sur Twitter ou Instagram à cause de vues critiques du genre, vous pouvez échapper à ça et être… et parler librement sur les autres sites parce que les autres sites sont aussi sous l’oeil de transactivistes et qui peuvent les faire disparaître comme c’était le cas de Kiwi Farms.

J’aimerais parler aussi de la réalité virtuelle et de son lien avec le transactivisme. 

Les applications de réalité virtuelle comme VRChat sont des espaces en ligne que n’importe qui peut y accéder en portant un avatar qui peut… qui peut ressembler à n’importe qui ou n’importe quoi. Pour les personnes qui passent des heures et des heures par jour dans ces espaces, il aiment bien aussi avoir des avatars customisés qui sont souvent commandés ou achetés pour des centaines voire des milliers de dollars. La personne qui essaie de s’échapper du vrai monde et qui achète des avatars et du matériel assez coûteux s’investit beaucoup dans ces milieux et pour ça il faut vraiment avoir des motivations très profondes, c’est pour ça qu’ il y a autant de personnes transidentifiées de ce monde.

Alors je n’ai pas lu d’études précises mais j’ai juste vu un questionnaire d’un influenceur qui a demandé à son audience qui utilise la réalité virtuelle à leur identité et un peu moins de 20% de ces personnes des utilisateurs de la réalité virtuelle étaient des personnes transidentifiées, ce qui est énorme parce que si je ne me trompe pas, il y a entre 1 et 0,5% de population transidentifiée dans le monde. Et ça semble assez logique que ces personnes, qui sont mal dans leur peau, et qui sont un peu en guerre avec la réalité, elles puissent accéder à ces espaces-là.

Beaucoup de personnes qui utilisent la réalité virtuelle sont assez vulnérables et ça, ça attire énormément de prédateurs, notamment de pédocriminels. 

Dans la réalité virtuelle, par exemple sur VRChat,  il y a des pratiques un peu sexuelles, ça s’appelle “erotic role play” donc toi, habillé dans ton avatar, tu peux jouer un jeu de rôle sexuel avec d’autres personnes et très souvent ces personnes-là peuvent être des enfants, sont des enfants.

RDG – C’est-à-dire que… Tu es en train de me dire que dans certains mondes de réalité virtuelle, il y a des enfants qui jouent à des jeux sexuels avec des adultes. Mais quel genre de jeux sexuels ?

Anna – Alors, ça peut être l’imitation de l’acte sexuel, par exemple.

RDG – D’accord, ils simulent des rapports sexuels en ligne.

Anna – Oui. Et il n’y a pas… Ce n’est pas très réglementé donc personne n’est puni quand ça se passe

RDG – Et en plus, enfin dans les mondes de réalité virtuelle, il y a… Dis-moi si je me trompe mais il y a d’autres personnes autour en fait qui sont témoins de ce qui se passe.

Anna – Oui, c’est ça.

RDG – Donc en fait il y a par exemple un adulte qui va abuser d’un enfant… puisque là on ne peut pas parler de rapport sexuel quand on a un adulte et un enfant et il y en a d’autres autour qui regardent ?

Anna – Il y a des clubs sexuels dans VRChat où il n’y a pas vraiment de limite d’âge.

RDG – VRChat ça s’écrit comment ?

Anna – VRChat. Voilà, où il y a des… Dans ces espaces-là, ces clubs euh… je ne sais pas comment le dire… Libertins ? il y a des personnes qui imitent les actes sexuels, qui peuvent être parfois des viols, vu qu’il s’agit de la pédocriminalité. Et aussi il y a un processus de grooming vu que souvent, ces actes sexuels ou ces viols, ils sont… enfin on expose les personnes aux fétiches, notamment quand l’avatar, c’est pas une personne humaine mais un animal donc il y a des gens qui s’habillent en animaux et qui… 

RDG – Et qui et qui ont des rapports sexuels avec des enfants habillés en animaux ?

Anna – Ça peut être des enfants, ou ça peut être d’autres adultes.

RDG – D’accord et ça, c’est complètement… avec aucun contrôle de rien, quoi ?

Anna – Il y a très peu de contrôle de ça, que ça soit dans les applications elles-mêmes, dans les applications elles-mêmes il y a peu de contrôle mais au niveau légal si je ne me trompe pas, il n’y a rien qui réglemente ça en fait.

Ce qui est pire aussi, on a observé que certaines personnes qui sont… quand elles utilisent la réalité virtuelle, elles ont ce qu’on appelle “phantom touch” donc en fait, elles sentent quand quelqu’un les touche.

RDG – C’est quoi, c’est une sorte de tenue que tu portes en fait ?

Anna – Non, non. En fait, c’est comme les personnes qui n’ont pas une jambe ou une main, qui ressentent leur membre mais là ils ressentent…

RDG – D’accord. Ils sont tellement immergés dans la réalité virtuelle qu’en fait, ils ont l’impression de ressentir physiquement ce qui leur arrive dans leur… à leur alter ego en fait. C’est ça ?

Anna – C’est ça, oui. Voilà. Et une autre chose pour la réalité virtuelle, c’est intéressant de regarder quels avatars exactement portent les utilisateurs, alors on a déjà dit que certains ils peuvent porter des avatars qui ressemblent à des animaux ou à des furies ou à des, des humains avec des traits un peu animaliers mais en fait c’est presque un meme que les personnes, enfin les hommes transidentifiés en réalité virtuelle ils portent des avatars de filles manga très sexualisées avec des oreilles de chat, avec des uniformes un peu particuliers et je pense que c’est assez révélateur que les hommes transidentifiés qui vont en réalité virtuelle, ils portent pas pour alléger leur dysphorie de genre, ils portent pas des avatars de femmes normales mais ils portent vraiment des avatar hyper sexualisés, pas du tout conformes à la réalité. Et d’ailleurs, si vous lisez les témoignages de femmes transidentifiées qui utilisent des avatars dans la réalité virtuelle qui les représentent pas de la façon très fidèle, souvent elles disent qu’elles portent des avatars d’hommes pour échapper à la sexualisation et l’objectivisation.

RDG – Donc une femme, les jeunes femmes qui souffrent de dysphorie, elles elles vont être en homme pour échapper en fait à la violence sexuelle et les hommes vont eux se déguiser, enfin s’habiller ou je ne sais même pas comment on peut appeler ça, se transformer en jeunes femmes hyper sexualisées ou en animaux un peu chelou avec de la fourrure pour se livrer à des pratiques sexuelles sur les enfants qui sont présents et devant eux.

Anna – Oui. Mais d’ailleurs, pour les victimes de ces pratiques sexuelles, les enfants, c’est des enfants de tous les sexes et même si ça ne se passe pas dans la réalité virtuelle, après ça continue sur discord mais dans la réalité virtuelle c’est… ce n’est pas juste des mots dans le chat, c’est vraiment… une espèce de réincarnation et d’immersion, et d’immersion complète.

RDG – C’est cette fameuse sensation de vivre pour de vrai ce que ce qui est dans ce monde virtuel. Et alors du coup, tu as parlé de discord et sur discord il se passe quoi ?

Anna – Alors sur Discord. Discord c’est une application qui est utilisée souvent par… dans le monde du gaming ou de la tech mais aussi pour des gens qui aiment bien la réalité virtuelle. Il y a beaucoup d’anonymat. 

Souvent, les personnes qui utilisent discord, elles n’utilisent pas leur vraie identité et les serveurs discord, donc des espaces un peu privés on va dire, sont gérés par des personnes en particulier. Il y a moins de censure que par exemple sur votre compte Twitter qui est visible un peu à tout le monde.

Dans les Discords liés au gaming ou à la réalité virtuelle, il y a parfois des… des espaces, des chaînes qui sont concentrés plus sur la sexualité le role play érotique ou des choses comme ça et là il y a très peu d’espace qui limitent l’âge des enfants et qui refusent aux mineurs d’y accéder et ça finit par pas mal de mineurs qui accèdent à des espaces où ils sont malheureusement groomés ou ils sont des victimes de pédocriminels.

RDG – Et du coup, toi tu as déjà assisté à des choses comme ça, en ligne ?

Anna – Alors, moi personnellement, non mais je regarde ce qui se passe dans les autres chaînes de, enfin j’observe et je vois… Mais c’est presque… comment dire, c’est presque un mème, ces espaces-là, mais je veux dire c’est… c’est pas non plus très caché, personne ne sait ce qui se passe.

RDG – Ouais, d’accord, en fait tu veux dire que… Tu es en train d’expliquer que finalement, c’est quelque chose qui est plutôt culture pop quoi, un truc un peu marrant, que tout le monde sait.

Anna – Oui, en quelque sorte. Je veux dire quand vous allez sur Tumblr et vous avez des mineurs qui sont dans des milieux un peu gamers, transidentité, etc., ils parlent souvent de discord qui sont en lien avec… où ils ont des expériences un peu sexualisées.

RDG – Ben dis donc… 

Anna – Et ce qui est inquiétant, c’est que c’est très peu réglementé par la loi donc la réalité virtuelle, les espaces en ligne, les applications comme discord, la technologie elle avance trop vite pour les lois qui ne suivent pas du tout ce qui se passe et c’est un peu no man’s land.

Pour les parents ou les personnes qui sont inquiets pour des proches vulnérables, je conseille d’être surtout proches d’eux et qu’ils puissent vous faire confiance, essayer de leur parler de ce qu’ils font en ligne, essayer quand même d’avoir un minimum de contrôle parental si la personne est très jeune, essayer de lui dire que si il va là, il s’expose à des risques comme ça, enfin je pense que le plus important c’est de vous informer vous-même et après de prévenir votre enfant de ce qui peut lui arriver, d’être là pour lui, pour parler des choses qu’il peut trouver traumatisantes.

Je sais que moi, je passe beaucoup de temps en ligne, dès que j’étais très petite et mes parents ne savaient rien du tout de ce que je faisais, je sais que parfois juste ils me prenaient mon portable pour que je ne passe pas trop de temps en ligne mais en soit ils étaient… on ne parlait pas du tout de ce que je faisais, quand j’ai vu des trucs un peu traumatisants j’ai pas pu en parler avec mes parents, essayer d’éviter ça.

RDG – On est très proche à la fois de la pédocriminalité et de la pornographie. Et donc ce sont des expériences qui sont clairement traumatisantes pour des enfants aujourd’hui en fait, des enfants ou des préadolescents ou des adolescents d’ailleurs, des mineurs en général. Il y a quelque chose qui est de l’ordre du traumatisme de l’agression sexuelle, même si c’est virtuel comme tu dis, cette fameuse phantom touch, que oui effectivement j’y avais pas réfléchi mais c’est évident, quand tu passes beaucoup de temps en ligne, tu finis par… Ça finit par devenir ta maison quoi.

Anna – Oui. Et en fait les personnes en  général mais les enfants qui passent beaucoup de temps en ligne, c’est mon avis personnel mais… quand tu passes 10 heures par jour sur TikTok ou dans la réalité virtuelle, c’est parce que tu essaies de fuir quelque chose dans ta vie réelle, t’as pas peut-être d’aide psychologique pour ce que tu vis en dehors de ça, tu es en situation de mal-être et c’est pour ça que tu y vas.

RDG – C’est ça, oui mais du coup tu renforces le problème.

Anna – Oui. Et c’est ça qui est visé par les transactivistes, c’est les personnes qui sont vulnérables, peut-être qui ont une relation avec leur corps qui est un peu fragile. Une personne totalement heureuse et qui a une sexualité épanouie, qui est en paix avec soi-même, pourquoi elle irait se shooter à la testo ?

RDG – Oui, bien sûr. C’est vrai que les enfants et les préadolescents n’ont pas nécessairement de sexualité justement, à priori c’est le fait de leur en imposer une qui pose problème déjà, surtout avec des adultes d’ailleurs.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole, et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible.

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe :

www.womensdeclaration.com

Rebelles du genre – Épisode 55 – Lilou

Rebelles du genre – Bonjour, aujourd’hui on va faire une interview un peu particulière, puisque c’est Lilou qui va parler, Lilou qui est une amie à moi, et que je suis particulièrement heureuse d’interroger aujourd’hui, et de recevoir dans notre podcast.

Lilou –  Je m’appelle Lilou, j’ai 18 ans. Je suis une activiste féministe radicale et étudiante en sociologie en région parisienne, depuis septembre.

J’ai fait plusieurs années de danse orientale. La danse est une pratique qui me passionne, qui me transporte, et j’exprime ma colère aussi, en dansant, ma peine, ma douleur, mon indignation. Je vis la danse comme une expérience collective sorore, forte et fédératrice, mais aussi comme profondément intime et corporelle. Se mouvoir d’une telle façon, diriger ses gestes pour réaliser un mouvement ou en enchaîner plusieurs, de manière fluide ou fragmentée. Je me rends compte que mes années de pratique de la danse m’ont permis de mieux connaître mon corps, d’expérimenter la liberté de mouvement dont nous sommes si souvent privées, en tant que femmes, dans les sociétés patriarcales. Et, à mes yeux, des espaces et des temps entre femmes uniquement, par exemple consacrés spécifiquement aux danses ou bien à d’autres activités, pourraient être bénéfiques pour contribuer à la libération des femmes. 

Et j’en ai fait l’expérience quelquefois, et c’est merveilleuse.

Du coup, je dirais que ma conscience féministe, je la développe depuis que je suis petite, mais sans avoir pu, réellement, mettre des mots sur ce que je vivais, ce que j’observais des conditions et des droits des femmes de mon entourage social et familial.

Avec ma sœur et mes cousines, on était très proches durant notre enfance, grâce à nos mères, elles-mêmes sœurs. Nous avons pu tisser des liens sorores et solides. On a vécu des moments extrêmement forts, ce qui fait aussi que je suis aujourd’hui une femme qui pense que les femmes peuvent réussir à se reconnaître, à s’allier, à se rassembler et à s’organiser, malgré la division et la rivalité que les hommes nous imposent et nous font intérioriser. Aujourd’hui, je me dis qu’heureusement j’ai été éduquée par une mère qui a de nombreuses réflexions féministes et qui voulait nous permettre, à ma soeur et à moi, de nous faire notre propre vision du monde, détachée des stéréotypes et des étiquettes sociales qui collent à la peau des femmes. C’est sûrement aussi grâce à cela que je construis mon esprit critique, petit à petit, depuis mon enfance. 

Et je pense que cet éveil à la critique du genre et elle apprentissage de savoirs assez distanciés des normes sociales et du cadre académique (j’ai fait l’école à la maison pendant 5 ans) a pour conséquence, actuellement, que je m’interroge sur les faits sociaux, que je cherche à comprendre les “pourquoi” des phénomènes que j’observe et identifie les croyances, dogmes et arnaques masculinistes qui colonisent de plus en plus nos espaces de filles et de femmes.

Ce qui me semble aussi important de souligner, c’est que ma mère nous a toujours dit, à ma sœur et à moi, qu’elle nous accepte comme on est, que nous pouvons ne pas être conformes aux stéréotypes et aux modèles sexistes. 

Elle nous a appris à connaître notre corps, à l’écouter, à l’aimer, à en prendre soin, à dire quand on a mal.

Je me rends compte maintenant, qu’en tant que fille dans une société qui hait, objectifie et sexualise les corps des filles et des femmes, j’ai eu beaucoup de chance d’avoir été éduquée comme je l’ai été, et je remercie, du coup, ma mère.

J’ai commencé à militer lorsque j’ai rencontré les femmes de l’association Osez Le Féminisme ! en septembre 2020 lors d’une action poignante qui a résonné fort en moi, intitulée “Je te crois”. J’avais 16 ans.

Puis j’ai fait la connaissance des activistes de la collective l’Amazone Avignon, tellement badass, dont j’admirais les collages depuis quelque temps.

La découverte de ces formes d’engagements politiques pour les droits des femmes m’a énormément enrichie. 

Elle est allée de pair, ou plutôt de mère, avec la découverte de la sororité politique, d’expérience en expérience, de partage en partage, d’actionne en actionne entre femmes.

J’ai compris que les liens que peuvent nouer les femmes entre elles sont incroyablement puissants.

Et cela m’a fait du bien.

Et à partir de là, j’ai enfilé mes lunettes violettes de féministe en apprentissage, qui appréhende la monde avec curiosité et détermination.

Du coup, par la suite, ça m’a fait comprendre que ces formes d’engagement politique pour les droits des femmes me paraissaient vraiment nécessaires, et je comprends que toutes les femmes ne peuvent pas s’engager de cette manière-là. Mais moi, en tout cas, c’était c’était vraiment ce dont j’avais besoin à ce moment-là, ça me parlait, et du coup j’ai pu découvrir à ce moment là d’autres formes de sororité, plus politiques, à travers les actions, à travers les caféministes, les discussions qu’on a eues, les manifestations, aussi. Et en fait, ça m’a confortée dans l’idée que, malgré la domination patriarcale, les femmes peuvent quand même réussir à nouer des liens qui sont forts, qui peuvent inspirer d’autres femmes, et qui nous rendent puissantes et qui.. qui oui, qui nous permettent aussi de surmonter les difficultés qu’on a, chacune dans notre quotidien. Tout s’enrichit mutuellement.

Et c’est à partir de là, du coup, que j’ai pu aussi en apprendre de plus en plus en me renseignant par des podcasts, des articles, notamment sur Instagram, également. 

RDG – Peut-être aussi par la formation féministe que tu as pu avoir dans Osez le féminisme, avec notamment les feminist camps?

Lilou – Oui, le feminist camp d’octobre 2021 m’a aussi permis  de connaître des femmes de toute la France, ce que je n’avais jamais expérimenté jusqu’alors et de comprendre, en fait, qu’il y avait plusieurs dimensions d’oppression patriarcale, enfin dans plusieurs sphères de la vie des femmes, et donc qu’on pouvait spécifiquement réfléchir à certains sujets, comme l’écoféminisme ou comme la lutte antiraciste, avec le féminisme… comment elle s’imbriquent. Et de partager aussi d’autres moments qui font du bien, enfin qui… oua qui nous lient et qui nous donnent de l’espoir pour continuer. Surtout parce que on pourrait se dire qu’avec toutes les violences que les femmes peuvent subir dans plein de sphères différentes, bah on pourrait ne plus avoir d’espoir pour continuer à militer, ou  justement on va être découragées, et c’est totalement légitime… mais justement ces moments-là, je pense qu’ils sont très fédérateurs et ils nous permettent de continuer.

RDG – De garder l’espoir?

Lilou – Oui, de garder l’espoir,  de… de ne pas céder.

RDG – De résister.

Lilou –  Oui, j’ai participé aux réunions mensuelles dans un premier temps. J’avais du temps que je voulais passer à m’investir dans cette association-là, parce que je sentais que j’y étais bien, j’avais été super bien accueillie, et que j’étais en surtout en accord avec les valeurs,  parce que je trouve que les valeurs, c’est très important. Et, même si j’étais en questionnement, parce que je débutais,  au fur et à mesure j’ai commencé à faire partie du conseil d’administration, et ça m’a permis aussi de partager des idées que j’avais, de mettre en commun des projets que plusieurs femmes pouvaient avoir, pour les réaliser concrètement.

Et puis j’ai aussi intégré le conseil d’administration national et ça donne une plus grande part de responsabilité vis-à-vis des membres de l’antenne locale, pour essayer aussi de faire le relais. Et ça m’a permis, par la suite aussi, d’intégrer un groupe de travail spécialement centré sur l’abolition du système porno-prostitueur, ce qui était un enjeu que je ne connaissais pas du tout avant et qui m’a complètement révoltée. Je me suis dit “Comment c’est… comment c’est possible que, dans une société qui se dit démocratique, et même à l’échelle mondiale, dans plein d’autres pays qui se disent défenseurs des droits humains, qu’il y ait la moitié, enfin même plus de la moitié de la population, à savoir la peuplesse des femmes, qui soient vendues, marchandisées, achetées? Qu’il y ait également du proxénétisme?” 

Enfin, tout ça, ça m’a complètement sidérée, et je me suis dit : “Je ne peux pas rester impuissante face à ça, en fait. C’est juste impossible. Et le fait d’intégrer le groupe abolition, je me suis dit que c’était un bon moyen de mettre ma motivation en commun avec d’autres femmes, agir par des campagnes sur les réseaux sociaux de sensibilisation, des actions plus “coup de poing”, par exemple pour le 25 novembre, voilà. Du coup, j’ai cheminé petit à petit.

RDG – Je vais te poser une question complémentaire. En fait, il y a un point que tu n’as pas développé, mais qui, à mon avis, est important : c’est le fait que quand tu as été, finalement, à l’âge un peu crucial, à l’âge où les enfants rencontrent les premières violences, en fait, notamment pornographiques, toi, tu étais à l’abri, puisque tu n’étais pas à l’école. Est-ce que tu peux développer?

Lilou – Pendant les 5 années de primaire, mes parents, donc, ont décidé de nous donner l’instruction à domicile, avec ma sœur. Et je n’étais pas confrontée au discours, au comportement des autres enfants qui étaient à l’école. Et une grande partie de certainement exposés à des images pornographiques. Le fait qu’on soit à l’écart de ça, ça m’a aussi protégée.

RDG – Moi je ne peux pas m’empêcher de penser que, quand on sait qu’en CM2, un garçon sur deux a déjà vu un film pornographique, et aussi de très nombreuses filles… Ne pas fréquenter beaucoup d’enfants qui sont victimes de ces violences-là, ça permet aussi, pendant ces années où on construit son identité d’être protégée relativement. Et c’est peut-être ce qui fait que, du coup ça t’a gardé intacte cette capacité de rébellion que tu as, et qui, aujourd’hui, est à mon avis une des sources de ton militantisme? Le fait d’avoir brutalement découvert le monde à un moment où tu étais déjà capable de comprendre qu’une violence est une violence en fait. Parce que quand on est petit, on ne fait pas la différence entre les choses, et on ne comprend pas que c’est de la violence. Et on s’habitue. Et toi tu n’étais pas habituée.

Lilou – Oui, c’est ça. Je n’étais pas du tout… même ma mère, avec ma sœur, nous a toujours expliqué que la violence ne réglait aucun problème, et que ça ne servait à rien. Et pire que ça : que c’était complètement destructeur et contre-productif. Même, du coup, l’arrivée au collège, ça fait un peu un effet de claque, en fait, qu’on se prend dans la figure, parce que je sortais un peu du monde des bisounours, si on peut dire ça comme ça, et du coup c’est assez violent quand on se rend compte que, finalement, c’est comme si j’avais un peu vécu dans une bulle. Même si j’avais des amis qui étaient à l’école, et je les voyais, et on passait du temps ensemble. Mais j’avais quand même cette sorte de barrière, un peu protectrice, qui a fait que quand j’ai su qu’il y avait autant de violences qui étaient commises contre les enfants, et particulièrement contre les filles, et également contre les femmes… ben c’était juste inimaginable. Et je me suis dit : “bah en fait, je ne peux pas laisser passer ça, quoi! Enfin, je ne peux pas vivre ma vie comme si je connaissais pas.” Alors que j’en prenais conscience enfin, voilà.

RDG –  Je pense que ça a préservé ta capacité d’indignation, en fait! En ce qui concerne, donc, le genre, la notion du genre : à quel moment tu t’es dit que tu étais critique du genre? Est-ce qu’il y a eu un moment où tu as eu une révélation? Qu’est-ce qu’il s’est passé pour que tu te dises aujourd’hui que tu es critique du genre?

Lilou – Il n’y a pas eu un déclic. C’est plus une suite d’événements qui m’ont fait prendre conscience que le féminisme est forcément critique du genre. Je pense ça à l’heure actuelle, mais c’est quand même assez récent. Même si en fait, je me dis : “Pourquoi créer d’autres cases, d’autres catégories, pour enfermer les filles et les garçons, donc les enfants, dès le plus jeune âge, alors qu’on pourrait tout simplement laisser les enfants jouer à ce qu’ils veulent et laisser les enfants se comporter comme ils veulent?” 

Critique du genre, sans nommer ça comme ça, mais je l’ai aussi pensé assez jeune. Mais là, c’est vraiment grâce à l’engagement associatif, et au militantisme et aux actions : j’ai pu comprendre les enjeux, avec la montée du transactivisme. Qu’en fait il fallait réaffirmer le fait qu’on soit critiques du genre, que ça n’allait pas de soi. Et j’ai aussi appris, notamment par les réseaux sociaux, qu’il y avait d’autres courants féministes, qui ne se disaient pas du tout abolitionnistes des stéréotypes sexistes de genre, mais qui prônaient un discours ultra-libéral…

RDG – …Avec bien sûr tout ce qui est le BDSM, la pornographie!

Lilou – Voilà ! Le non-abolitionnisme qui m’a complètement consternée… Et oui, par rapport à l’usage, aussi, des mots… La première fois que je suis tombée sur l’expression “travail du sexe”, je…  ça m’a laissée assez perplexe, et je me suis dit : “Ok, il y a certaines personnes qui se revendiquent du féminisme qui utilisent ces termes-là”… Moi je voyais que dans OLF, on utilisait “abolitionniste” et j’avais vu les campagnes qui avaient été menées par rapport à ça, contre à l’industrie pornographique aussi, et je me suis dit : “Bah déjà, la loi, qu’est-ce qu’elle dit?” Et la loi de 2016 est clairement abolitionniste. Donc, déjà par rapport à ça, ça m’a un peu mis la puce à l’oreille, et je me suis dit : « Comment peut- on prôner le libre choix, alors que la majorité des personnes prostituées, en fait, c’est des femmes? La majorité des actes sexuels, c’est des viols. Et en fait, les femmes qui sont les plus victimes de cette industrie-là sont des femmes précaires, marginalisées, racisées, étrangères, qui migrent. Enfin, l’âge d’entrée, entre 13 et 14 ans à l’échelle mondiale…” Je me suis dit : “Comment on peut oser défendre une industrie, qui en plus est multimilliardaire, alors qu’en fait il s’agit d’humaines,  d’enfants et de femmes, quoi?” Ça m’a paru complètement lunaire.

Je voulais évoquer aussi la découverte de Typhaine D, merveilleuse artiste, comédienne qui a créé la féminine universelle, qui est un mode de langage qui a pour but de féminiser la langue. Pour moi, en fait, ça a joué aussi un rôle important dans mon cheminement féministe depuis deux ans, parce qu’on m’a appris au collège, comme toutes les autres, que le masculin l’emportait sur le féminin, et toutes les règles de grammaire mascouillinistes. En fait, de l’entendre dire de la bouche d’une femme, qui exprimait explicitement que le langage était masculiniste, pour telle telle telle raison… Et qu’en fait ce n’était pas du tout neutre, comme on avait pu nous le faire croire, que c’étaient les académiciens du 17e siècle qui avaient instauré ces règles de masculinisation du langage… C’est quelque chose que j’aurais aimé savoir plus tôt. Mais que, déjà, je suis très heureuse de connaître maintenant.

Parce qu’on peut se dire : “Oui, l’école c’est trop bien, on nous apprend à parler, on développe plein de compétences, on a des liens sociaux aussi qui se créent grâce à cette instance de socialisation. Mais il y a quand même ce problème de la langue, que je ne considérais pas du tout avant, et que maintenant je prends en compte, parce qu’en fait le langage, comme Typhaine le dit,  structure la pensée. Et on ne peut pas se projeter dans l’avenir si on n’a pas les mots qui nous permettent de voir notre avenir, de voir comment on voudrait être plus tard, d’envisager des professions qui pourraient nous intéresser, mais en fait on ne sait même pas qu’elles existent pour les femmes. Je pense par exemple “autrice”, des mots de notre matrimoine qui, justement, ont été ressortis du passé, et qui, justement, étaient utilisés avant cette Académie française, et qui, en fait, ont été complètement effacées. Et c’est ce qu’explique très bien Titiou Lecoq dans son essai : “Pourquoi l’histoire a-t-elle effacé les femmes?” Et en fait, ce n’est pas l’histoire qui a effacé les femmes, c’est les hommes! Et tout ce qu’ils ont institué et organisé. Oui, ça fait mal, aussi, de comprendre qu’on n’existe pas dans le langage et on est quand même censées construire nos vies et avancer, alors que tout, dans le langage, est créé pour les, pour les hommes, quoi!

RDG – Pourquoi penses-tu que l’idéologie du genre est une menace pour les droits des femmes, pour les enfants ou pour la société, ou pour la démocratie?

Lilou – Déjà en fait je me suis questionnée par rapport à ça, et en fait avant même d’avoir compris que l’idéologie transidentitaire était une menace certaine pour les droits des femmes, l’acronyme LGBTQ+ me posait déjà problème. Et en fait, je me disais : “C’est quand même vraiment bizarre et tordu de mettre sur le même plan, le combat contre l’homophobie et contre la transphobie, et pour les personnes trans, d’en faire en somme, en faire des luttes indissociables. Je me disais : “Mais pourquoi?” Parce que pour moi, de ce que j’avais compris en tout cas, c’était quand même deux choses complètement distinctes, entre ce qu’on prétendait être, comment on voulait qu’on se définisse, et l’orientation sexuelle. 

Donc du coup, je me disais : “Mais pourquoi mettre toutes ces lettres accolées, enfin, les mettre ensemble, quoi?” 

Et du coup, entre-temps, je me suis questionnée, j’ai lu des livres, des articles, des communiqués, des tribunes. J’ai écouté aussi des podcasts, notamment ceux de Marguerite Stern, qui donne la parole aux femmes, parce qu’en fait, parce que c’est elles que j’ai envie d’entendre, et que malgré le fait que j’ai quand même fait l’école à la maison, bah j’ai pas échappé aux cours d’histoire du collège et du lycée, relatant l’histoire des hommes, en effaçant les femmes. Et en fait, j’ai compris aussi, progressivement, ben les derniers mois, les dernières années, là, qu’en fait l’idéologie de genre, elle est profondément homophobe et donc lesbophobe. Parce que, pour ne donner qu’un exemple, il est courant de lire ou d’entendre que les lesbiennes peuvent avoir des pénis, que les lesbiennes doivent aimer les femmes qui ont des pénis… ça, ça m’a complètement retournée quand j’ai lu ces phrases-là, notamment sur les réseaux. Je me suis dit : “Mais il y a rien qui va! C’est complètement justement contre l’homosexualité! Parce que si tout le monde doit aimer tout le monde, dans ce cas-là, il n’y a même plus d’orientation sexuelle… c’est, c’est… ouais, c’est complètement dangereux à ce niveau-là!

Et par rapport aussi aux enfants, je me suis dit que je ne pouvais pas tolérer une idéologie totalitaire qui, en plus, se répand de plus en plus, et qui vise en majorité des jeunes, qui mutile plus spécifiquement des adolescentes et des jeunes femmes encore en développement, encore en croissance. Parce que j’ai aussi appris que le cerveau se développait jusqu’à 25 ans, donc je me dis : “Pourquoi des traitements hormonaux, des transitions, seraient autorisés sur la simple autodétermination des enfants avant 25 ans?” 

Et donc je me suis dit, en fait, permettre à des adolescentes de prendre des hormones pour effectuer une transition médicale ou pire les y inciter sous prétexte qu’elles seraient nées dans le mauvais corps… bah en fait, c’est complètement absurde pour moi.

Et en fait, la société patriarcale dans laquelle on vit, elle est problématique, ainsi que toutes les conséquences qui en découlent, en termes de violences machistes. Et donc si en fait on ne  prend pas en considération la structure sociale, on ne peut pas expliquer pourquoi les individus auraient tel goût, telle envie, tel choix, tel comportement. 

Il y a une dimension sociologique à analyser, qui est pour moi nécessaire. Et en fait je me rends compte qu’on est obligées de rappeler aujourd’hui, que noues sommes nos corps : il n’y a pas une essence, qui serait l’esprit, et le corps, quelque chose de simplement matériel et utile. On est un tout!

RDG – Je reconnais bien là quand ton goût pour la philosophie, je vois déjà le moment où je vais illustrer ce témoignage avec le fameux collage “noues sommes nos corps” que tu avais fait l’an dernier.

Lilou – En fait, je me dis, oui, qu’une fois qu’on a aussi compris certains aspects, on peut réfléchir aux mécanisme sociaux qui s’opèrent et au rôle des instances de socialisation dans la construction des normes de féminité, en se demandant pourquoi elles sont maintenant telles qu’elles sont. Et même historiquement, c’était pas les mêmes il y a 200 ans, il y a 300 ans, au Moyen-Âge… Et ça montre bien, en fait, qu’elles varient au cours du temps, et donc elles ne sont pas naturelles ou biologiques, comme pourraient le dire certains idéologues du genre.

Je voulais aussi évoquer que, dans tous les cas, charcuter des corps en bonne santé ou bloquer la puberté – qui est quand même naturelle – d’adolescentes ou d’adolescents, en faisant totalement abstraction, premièrement, de l’état de santé psychologique des enfants et également des normes sociales et des attentes qui pèsent sur elles et eux, ne fait d’aucune personne quelqu’une de progressiste ou de bienveillante ou bienveillant. Alors que les transidentitaires essaient de nous persuader du contraire.

RDG – Oui, parfois la bienveillance c’est savoir dire non, en fait.

Lilou – D’autant plus que la réalité, c’est que les conséquences des transitions médicales, sur le développement tant physique que psychologique des jeunes concernés, sont en fait, irréversibles. Et maintenant on sait que c’est prouvé que les conséquences sont irréversibles. Que des psychiatres, que des médecins se permettent de dire dans des articles, dans des livres, même à l’université pour des profs qui défendraient l’idéologie du genre, que ces personnes-là se permettent justement de prôner le contraire, et de faire croire à des enfants (c’est de la manipulation) que c’est réversible, qu’ils pourront reprendre leur puberté 5 ans après la prise d’hormones… en fait, c’est criminel, quoi!

RDG –  J’ai même lu récemment que beaucoup de filles qui subissent une mastectomie pensent, en fait, que quand elles reprendront des hormones féminines ou qu’elles arrêteront la testostérone, leurs seins vont repousser. Et évidemment, le jour où elles s’aperçoivent que, bah non, en fait, elles ont infligé à leur corps… enfin “on” a infligé à leur corps des dommages irréversibles. C’est dramatique.

Lilou – Surtout que les enfants sont en situation de vulnérabilité. Et donc en plus, en tant qu’adultes… Enfin, selon moi, les adultes ont aussi une responsabilité vis-à-vis des enfants, en général, dans le domaine de la santé, et savoir que, justement, des adultes les manipulent à des fins financières ou idéologiques… bah c’est complètement aberrant! 

RDG – Oui. C’est incroyable. 

Lilou – Je ne pensais pas être confrontée à ça un jour. Enfin…

RDG – Oui, c’est dur.

Lilou – Je voulais aussi ajouter que devoir sans cesse répéter que les femmes n’ont pas de pénis et que les lesbiennes n’aiment pas les pénis, en fait, c’est une forme de rabaissement intellectuel, comme le dit Marguerite Stern. Puisqu’en fait, toute personne sensée en a bien conscience, et c’est la biologie. Il n’y a pas besoin de faire des études de science poussées pour le savoir. Et en tant que féministe radicale, je sais que… bah en fait on est épuisées de devoir le rappeler à longueur de temps, alors qu’en fait, on a des droits à défendre, on a des stratégies et des formes de mobilisation et d’engagement à créer et à développer concrètement, à imaginer aussi. Et ça nous… en fait ça nous… c’est pas que ça nous empêche, mais ça nous prend de l’énergie et du temps : ce temps qu’on met, justement, dans la défense de notre biologie, alors que c’est censé aller de soi.

RDG – On pourrait presque penser que c’est une stratégie masculiniste!

Lilou – Voilà! Et en fait, on est obligées de se battre contre ça, parce que sinon ça prend une telle ampleur, ça colonise tellement d’enfants, notamment, et surtout de filles… qu’on ne  peut pas laisser passer ça. C’est aussi pour ça que ce podcast existe, et c’est pour qu’on parle et que ça se sache, et qu’il n’y ait pas de complaisance, en fait, par rapport à l’idéologie transidentitaire.

Par rapport à l’acronyme TERF aussi. Je voulais revenir là-dessus, parce que c’est, en fait, une nouvelle forme de dire féminazi, hystérique, folle et compagnie… sorcière, évidemment. Et c’est une insulte en fait, ça, il faut bien le dire, je pense, qui permet de justifier, de banaliser les violences contre les femmes, comme le harcèlement, la diffamation, le lynchage (dont notamment a été victime Dora Moutot pendant plusieurs années et en particulier sur les réseaux sociaux, mais ça va au-delà) et ce n’est pas parce qu’il y a une majorité de jeunes, et même de gens, en général, qui l’utilisent de plus en plus, on le voit partout sur les réseaux, utilisé, en fait à toutes les sauces. Dès qu’en fait, une femme ose critiquer la construction sociale et l’outil d’opression qu’est le genre : BAM! TERF! Transphobe! tada! direct! C’est-à-dire qu’il y a aussi une censure, et c’est là aussi où je voulais en venir : c’est que la censure, elle passe par le fait que les transactivistes assimilent toute critique ou tout questionnement, tout cheminement par rapport à la question du genre, comme de la haine, comme de la peur envers les trans, en utilisant, justement, cette expression “transphobe”, alors que, comme le dit Marguerite Stern également, on ne se bat pas contre des personnes, ce n’est pas du tout l’objectif des féministes radicales. C’est, en fait, c’est toute idéologie qui va à l’encontre des trois des femmes contre lesquelles on s’élève, et qu’on ne laissera pas passer, sous aucun prétexte. 

Et du coup, pour évoquer la démocratie aussi, en fait le principe même, c’est qu’il existe le droit de dialoguer, de débattre, d’échanger ses idées, de les confronter au sein de la société. Et donc, en fait cette idéologie, elle est contraire à ce principe-même de démocratie, et d’échanges entre les individus. Parce que si on est tout de suite taxée de Terf, de transphobe, on ne peut même pas exprimer ce qu’on a à exprimer. On ne peut même pas argumenter, défendre nos prises de position, expliciter, donner des exemples, parce qu’on est direct censurées. 

Du coup je voulais évoquer le rassemblement pour l’IVG qui a eu lieu le 28 septembre à Paris, mais également dans d’autres villes. Et comme je l’ai dit tout à l’heure, je suis arrivée à Paris en septembre. J’ai participé à cette manifestation avec les Amazones. Donc en fait, pour établir les faits, on s’est rendues place de la Bastille pour cette mobilisation, à l’occasion de la Journée internationale pour le droit l’avortement. On portait des pancartes relatant nos expériences de l’avortement, exprimant que nous refusons un retour en arrière avec les méthodes des ceintres, et autres, qui sont très dangereuses. Et au bout d’une demi-heure de marche, alors que nous étions en tête de cortège, des adolescentes et des adolescents nous ont repérées, épiées. Ils se sont précipités derrière nous en hurlant “Terf, hors de nos luttes” et “Assez de cette société qui ne respecte pas les trans, les gouines et les pédés. Alors, déjà on peut noter, première chose, c’est que pour les trans, ils disent “trans”, mais pour les lesbiennes et les gays, ce sont des insultes, et donc, en soi, une agression lesbophobe dès le début, contre laquelle nous n’avons rien fait. Ensuite, l’une d’elles a arraché par-derrière une des pancartes, qui disait “Avorter m’a sauvé la vie” qu’une des activistes de l’Amazon brandissait, et les autres se sont rués sur des activistes, dans lequel je faisais partie. Nous sommes aussitôt allées interpeller les organisatrices en leur demandant de faire venir la police. Elles sont restées passives, et nous sommes donc allées chercher la police par nous-mêmes. Par la suite, une organisatrice a dit à l’une d’entre nous, qu’à cause de nous, elles avaient, je cite : “les flics au cul”… Donc ce renversement classique de la culpabilité qui est une technique d’agresseur, on le connaît très bien, et c’est d’autant plus insupportable en manifestation qui se dit féministe, pour défendre un droit si durement acquis. Et donc cette même organisatrice a ensuite arraché le téléphone de l’une d’entre nous pour le donner à nos agresseuses et à nos agresseurs et lui a hurlé dessus, encourageant au passage les agresseurs à se ruer sur la victime. Nous avons ensuite changé de trottoir, et avons demandé au service d’ordre de nous protéger. Certaines organisatrices nous ont dit qu’elles savaient qu’on était toujours agressées… voilà. Mais sont restées passives, et finalement des hommes autoproclamés féministes nous ont poussées et culpabilisées, certains nous ont dit que nous n’avons rien à faire là…

RDG – En manif féministe!

Lilou – En manif féministe, tout va bien, voilà! Alors que nous sommes des femmes, directement concernées par le droit à l’IVG, et nous sommes évidemment totalement légitimes à manifester ce jour-là, c’est une évidence. Et en fait, le pire, c’est qu’on est convaincues qu’on est à notre place, qu’on a le droit d’être là, que ce qu’on fait, bah… c’est juste! Alors qu’on essaie de nous faire croire le contraire, en fait, en permanence. Y compris en manifestation! Et ça, c’est quelque chose de vraiment douloureux. Je sais que moi, j’étais sidérée, en fait, juste après le rassemblement, parce que c’est une dissonance cognitive. Tu te dis “Je sais que je suis là pour la bonne cause”. Tu en es complètement convaincue. Mais il y a quand même des gens qui s’infiltrent, qui colonisent nos espaces, qui se font passer, en plus, pour des féministes, et d’autres qui se font passer pour des femmes, qui se croient tout permis. La police, d’autant plus, est à côté. Ils sont là, ils sont dans la rue, ils ne font rien. Le service d’ordre, c’était également… pas ça. Et c’est…

RDG – En fait, c’est le fameux, comment dire… le fameux panneau de Noustoustes qui disait :  “Terfs, hors de nos luttes!” Littéralement, ils sont en train de faire ça, c’est-à-dire qu’ils sont en train d’exclure les femmes qu’ils jugent des Terfs, hors de nos luttes… C’est-à-dire qu’ils exproprient les féministes des luttes féministes. Et c’est vrai que… ça pique un peu.

Lilou – Oui. Et pour citer un autre rassemblement qui a eu lieu à Paris, et auquel j’ai aussi participé. On s’est rassemblées en soutien aux femmes iraniennes le 24 septembre, donc quelques jours avant la manifestation pour l’IVG. Et une femme iranienne, quelques minutes après que nous soyons arrivées, s’approche de nous et nous dit : “Vous savez, des non-binaires aussi sont tués en Iran!”  Alors là, on reste bouche bée. 

RDG – C’était une femme iranienne, tu es sûre?

Lilou – Il me semble, oui.

RDG –  D’accord.

Lilou – Pour moi cette phrase montre à quel point, en fait, cette femme était colonisée par l’idéologie transidentitaire, parce que tout est ramené aux trans, aux non-binaires, aux  genderfluid… et bla bla bla,  alors qu’en fait, on était mobilisés pour les femmes, parce que on est des femmes, et qu’on voulait soutenir nos soeurs en Iran. Et c’est quand même… c’est pareil, en fait, que la manifestation pour l’IVG : c’est nous déposséder de nos propres actions, mobilisations, alors qu’en plus, on reprenait le slogan “Jin, Jiyan, Azadi” des femmes iraniennes qui veut dire “femme, vie, liberté”. Et, en fait, on pensait bien faire, mais apparemment, ça n’a pas été reçu comme un soutien!

RDG – Là, il ne s’agit que d’une seule femme.

Lilou – Après, oui c’est sûr. Jusqu’à preuve du contraire, il y a quand même peu, voire pas du tout d’hommes qui sont obligés de porter le voile en Iran, donc le voile est bien un outil patriarcal, et pas un vêtement anodin. 

On peut également faire un parallèle entre les mobilisations féministes d’aujourd’hui et les luttes, par exemple, qu’ont menées les suffragettes en Angleterre dans les années 1920, par exemple, à propos du droit de vote. Imaginons que les femmes féministes à cette époque-là avaient crié haute et forte qu’elles “se sentaient hommes”, comme le disent les transactivistes aujourd’hui, aucune loi n’aurait permis aux femmes d’être éligibles et de voter. Et donc on en serait encore au suffrage – dit universel – uniquement masculin! 

Et donc enfin, pour moi ça montre à quel point le transactivisme est absurde et contraire à la défense des droits des femmes basés sur le sexe. Pour répondre à celles et ceux qui croient en une convergence des luttes.

RDG – La question du droit de vote, le droit à l’avortement, ou demain le droit de ne pas porter le voile, c’est bien basé sur le sur le sexe en fait! 

Lilou – Et du coup depuis septembre je suis à la à la fac et j’ai constaté que l’idéologie du genre est aussi très présente dans le milieu universitaire, autant du côté des profs, en fait certaines et certains utilisent le mot “genre” pour “sexe” et inversement, donc ça crée un flou, surtout pour la majorité, je pense, des étudiantes et des étudiants qui ne sont pas forcément sensibilisés sur ces questions-là. Bah en fait, ça noie… l’un est utilisé pour l’autre, on ne sait plus la frontière entre les deux. Enfin notamment, en plus je suis en sociologie, donc je me dis que c’est quand même particulièrement problématique. Même au niveau des statistiques :  comment on peut mesurer les inégalités sociales et économiques et les violences commises par les individus si on ne garde pas cette variable du sexe ? Parce que si on la remplace par la variable du genre, et qu’en plus certains individus disent changer de genre tous les jours, toutes les semaines, tous les ans… ça devient hors sol, on n’a plus de statistiques, et on ne peut pas faire des études qui soient scientifiquement correctes et rationnelles, quoi. 

Ça montre aussi que, du coup, le transactivisme est complètement irrationnel, en plus d’être misogyne, lesbophobe, et contraire…

RDG –  Et bien sûr derrière les études qu’on ne peut pas faire, il y a toutes les décisions publiques qu’on ne peut pas prendre, de protection. 

Lilou – Oui, toutes les mesures de protection qui découlent des statistiques établies, varient selon les résultats de ces statistiques, donc qui protéger quand on ne sait pas qui commet les violences et qui les subit? Oui, c’est problématique!

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions ou des menaces, ou est-ce que tu te sens en sécurité? Est-ce que tu peux parler librement?

Lilou – Je ne me sens pas en danger de prendre la parole sur ce sujet, que ce soit dans mon cercle familial ou amical. Mais néanmoins, je sais que toute femme qui critique ou s’oppose au transactivisme à l’heure actuelle, prend le risque de subir du harcèlement, de la diffamation, ou des menaces. Mais il y a quand même cette question qui me préoccupe toujours : “Allons-nous céder à cette violence?”

Personnellement, je témoigne sous ma réelle identité, parce que je ne veux ni me taire ni me cacher. 

Et également parce que j’ai décidé de dénoncer toute forme de misogynie, qu’elle vienne des masculinistes, de l’extrême-droite, ou de ceux qui se prétendent aujourd’hui progressistes, donc les idéologues du genre ultralibéraux. 

Et tout simplement parce que c’est insupportable de devoir vivre dans une société,  et même dans un monde où les femmes, en tant que classe sociale, sont assassinées, torturées, violées, vendues, harcelées, agressées, humiliées, insultées par la classe sociale des hommes. 

Et en sachant ce que je sais aujourd’hui, je n’ai plus envie d’être complice de toutes les atrocités que les femmes sont obligées d’endurer au cours de leur vie. Ce n’est même pas une question, en fait. Je ne peux pas faire autrement, quoi!

Je souhaite aussi témoigner au nom des femmes de ma famille qui sont décédées aujourd’hui et qui ont été silenciées et violentées par des hommes. Parce que je pense que ça joue aussi dans mon engagement aujourd’hui, et que, ouais, mon histoire aussi fait que j’en suis là aujourd’hui, et que je n’aie pas envie de perpétuer ce silence, en fait, qui leur a été imposé. 

Je comprends tout à fait qu’elles n’aient pas pu parler, que c’était trop dur. Du coup, je me sens aussi responsable de prendre la parole aujourd’hui.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Lilou – Oui, du coup j’ai une anecdote.

En octobre, je suis allée voir un des spectacles qui étaient proposés dans un des théâtres de ma fac, qui était une conférence spectaculaire intitulée “Histoire de graffeuses”, créée et animée par une enseignante d’histoire de l’art et comédienne qui se revendique féministe… et queer. 

Alors déjà ça m’a fait un peu hausser les sourcils. Je me suis dit “Je vais quand même y aller, et je vais voir comment elle présente les choses.” Elle a donc présenté plusieurs dizaines d’oeuvres de street art réalisées par des femmes au cours des époques de l’histoire. Bien sûr en les nommant,  ça paraît assez cohérent, en insérant des anecdotes de sa vie personnelle de temps en temps… jusqu’au moment où des collages, notamment “Stop féminicides” apparaissent sur la toile du vidéoprojecteur. Et donc, à ce moment-là, j’attends avec impatience qu’elle nomme Marguerite Stern, créatrice des collages contre les féminicides en février 2019 à Marseille, je la rappelle. 

Mais non. Au lieu de cela, elle enchaîne avec la présentation d’autres œuvres, laissant le doute s’installer chez les spectatrices et les spectateurs : qui a bien pu inventer cette technique des lettres noires peintes sur des feuilles blanches A4, elles-mêmes collées sur des murs de plusieurs villes de France? 

On n’en sait rien!

A la fin de la conférence, je me permets alors de m’approcher d’elle et de lui rappeler que, par souci d’honnêteté intellectuelle, bah elle se doit de nommer Marguerite Stern… à part si, bien sûr, elle n’en a pas la connaissance, mais bon, ça me paraissait assez évident.

Et que de plus, sans Marguerite Stern, les collectives de l’Amazone ne seraient pas nées partout en France, à Berlin, à Londres… et les féminicides n’auraient pas eu la visibilité autant médiatique, et l’impact en fait, sur l’opinion publique qu’ils ont aujourd’hui. 

Et pour moi, c’est une réalité objective, et donc non discutable en fait. Elle a créé les collages, voilà!

Pourtant, elle me répond qu’elle a choisi de nommer seulement les artistes qu’elle aime et qu’elle apprécie et justifie cela par la subjectivité de son travail.

Alors déjà, ça commence à me mettre en colère… et après elle me dit quelque chose comme “Marguerite, avec les positions qu’elle tient maintenant par rapport aux personnes trans, c’est trop violent, c’est transphobe.” N’argumentant en rien ce qu’elle avance, bien sûr. Et pour moi, cela prouve bien qu’elle sait déjà, premièrement, QUI est à l’origine des collages. Parce que quand je lui ai dit “Marguerite Stern”, j’ai vu qu’elle connaissait. Et en plus, elle sait les positions qu’elle tient aujourd’hui. Donc ça prouve bien qu’elle est au courant et en fait, en refusant de dire que c’est Marguerite Stern qui a inventé la technique des collèges comme mode d’activisme radical, aux valeurs bien précises et contre toutes les violences machistes, elle la dépossède de sa création, et participe en même temps à l’effacement des femmes et des féministes de l’histoire. 

Et pour moi, ça, c’est c’est complètement insupportable.

Et ces mots m’ont attristée et m’ont mise à la fois en colère, parce qu’oser invisibiliser la créatrice des collages, tout en se prétendant féministe… mais quel culot!

RDG – Dernière question : est-ce que tu as quelque chose à ajouter? 

Lilou – Oui j’aimerais rajouter que, malgré la cancel culture, le lynchage misogyne, notamment celui de Dora Moutot, comme je l’ai évoqué tout à l’heure, le harcèlement, la diffamation dont sont victimes de nombreuses féministes radicales en France et même dans d’autres pays, comme JK Rowling, malgré aussi la peur que nous avons, de parler de la réalité des violences que nous subissons chaque jour – parce qu’on est tout le temps culpabilisées – les mascus et les transidentitaires essaient de nous expliquer ce qu’est une femme, alors qu’on est des femmes…

… malgré tout ça, j’aimerais inviter toutes les femmes qui la peuvent à lutter contre notre oppression systémique par les hommes et les idéologues du genre, aujourd’hui, d’une manière ou d’une autre. Parce que nous sommes toutes légitimes et surtout, plus nous serons nombreuses à nous mobiliser, à prendre la parole, à initier des actions, à créer des espaces aussi en non-mixité pour les femmes, moins les anti-féministes pourront déverser leur haine sur nous, tant sur les réseaux que dans la vie réelle.

Car on sait bien qu’ils ne peuvent pas être sur tous les terrains, sur tous les tableaux. 

Donc c’est ça que je voulais rappeler.

Et je finirai par une citation d’Andrea Dworkin qui résonne très fort pour moi, qui est une féministe abolitionniste lesbienne brillante que j’aurais énormément aimé rencontrer. 

Elle dit, s’adressant aux femmes : “Souvenez-vous, résistez, ne cédez pas.” 

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe : 

http://www.womensdeclaration.com 

Rebelles du genre – Épisode 54 – Ana Minski

Ana – Je m’appelle Ana Minski, je vis en Occitanie et je participe donc à des recherches archéologiques, je suis archéologue en fait, spécialiste des outils de Néandertal. Je suis également autrice sur le site “Les ruminants”, j’écris de la poésie, de la fiction mais aussi des articles d’écologie sur la techno-critique, sur le féminisme également, et je suis écoféministe radicale et j’ai publié également cette année un essai : “Sagesses incivilisées : Sous les pavés, la sauvageresse” aux éditions M Éditeur, dans lequel je retrace depuis le néolithique les techniques pour identifier les techniques de domination et l’avènement du patriarcat.

Je crois que j’ai toujours été critique du genre. Tout d’abord, de manière plutôt intuitive parce que quand j’étais gamine, je jouais beaucoup plus aux jeux de garçons qu’aux jeux de fille et j’étais pas vraiment adaptée pour le rôle de celui de fille en fait donc très tôt je me suis révoltée contre l’assignation au genre féminin et j’ai lu des féministes, des théoriciennes féministes, j’ai pu comprendre les raisons de cette révolte, distinguer sexe et genre et c’est comme ça que je suis devenue petit à petit écoféministe radicale abolitionniste du genre, de la porno-prostitution et de la domestication en général via toutes les recherches que j’ai pu menées aussi en archéologie notamment. Après, en ce qui concerne mon intérêt pour l’idéologie du genre, ça a commencé en 2016, j’étais sur un chantier de fouilles archéologiques et il y avait une jeune femme qui était là et qui désirait transitionner. Elle s’était renommée avec un prénom d’homme, un prénom masculin, et s’habillait comme un homme. Mais elle ne souhaitait pas s’installer dans une chambre où il y avait des hommes, elle tenait à rester dans une chambre avec des femmes. J’ai passé beaucoup de temps à discuter avec elle, c’est comme ça que j’ai commencé à m’intéresser au transgenrisme donc j’ai commencé à m’informer ensuite quand je suis rentrée après la fouille, à échanger avec d’autres personnes et très vite j’ai senti que l’identité de genre était une idéologie qui posait de sérieux problèmes, aussi bien pour le droit des femmes que pour celui des enfants. J’ai alors participé à des traductions de féministes anglo-saxones critiques de l’identité de genre, notamment pour le collectif Tradfem, ce qui m’a permis de comprendre ce qui se passait déjà aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et ce qui pendait un peu au nez quoi.

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ?

Ana – Alors, cette idéologie est une menace pour les femmes. Déjà, parce qu’elle remplace le sexe par le genre, alors que le droit des femmes est fondé sur le sexe. 

Le genre, c’est ce qui nous opprime, donc ça paraît un peu problématique de remplacer le sexe par le genre. Le genre, ce sont les différences construites socialement et les stéréotypes associés à chaque sexe biologique, et c’est à partir des attributs visibles à la naissance qu’un nouveau-né sera assigné à un genre, masculin ou féminin, et socialisé en vue de correspondre à ce genre. Dans une société à domination masculine, le genre est donc ce qui permet aux hommes de s’approprier le corps des femmes, que ce soit pour la reproduction, pour la sexualité, pour la force de travail, et le masculin donc est le genre qui domine, le féminin celui qui se soumet. C’est donc un dualisme entre les sexes et comme je l’ai étudié, notamment en questionnant le Néolithique et l’apparition de nouvelles techniques qui apparaissent, c’est à ce moment-là que se met en place dès les premières domestications un dualisme entre hommes et femmes et notamment qu’apparaît une valorisation de la masculinité et de la virilité. Ce dualisme va se consolider avec l’apparition des cités-États. Donc s’identifier à un genre, c’est valider, accepter ce dualisme patriarcal qui est extrêmement violent pour les enfants et plus particulièrement pour les filles et les femmes. Le problème, ce n’est pas le sexe biologique mais bien la construction sociale des individus via le genre. Dans une société patriarcale, tout ce qui est efféminé est infériorisé et méprisé. C’est pour ça qu’en tant que féministe radicale, je suis pour l’abolition du genre et contre l’idéologie du genre.

Quand on voit des anarchistes défendre cette idéologie, dans les milieux militants c’est assez frappant, c’est d’une incohérence affligeante. Le genre, c’est ce qui a permis l’avènement des États, la réification des individus et l’avènement du capitalisme. Donc moi, je me demande vraiment comment on en est arrivé à vouloir s’identifier à ce qui est à l’origine même des oppressions ?

Après, au niveau des enfants, c’est également une menace (enfin c’est une menace pour beaucoup de choses). C’est une idéologie vraiment très problématique. Dans le cas précis, en 2016, c’était une femme qui voulait transitionner et il s’avère que ces dernières années on a constaté une explosion du nombre de jeunes filles qui désirent transitionner. Je sais plus si… Je crois que vous aviez reçu une mère du collectif Ypomoni, qui souhaite alerter contre la prise abusive des bloqueurs de puberté des interventions chirurgicales sur les mineurs, etc. Et donc l’explosion de la transition des filles, des jeunes filles, est liée à plusieurs facteurs : une hypersexualisation de la société, une violence masculine qui s’exprime librement sur les réseaux sociaux et une puberté plus précoce. A cause des perturbateurs endocriniens, aujourd’hui, de nombreuses jeunes filles ont une puberté qui commence dès l’âge de 10 ans. Ces jeunes filles doivent donc faire face à un corps qui change, au regard des garçons, des pères, des oncles, des frères, qui change également. Et comme nous sommes dans des sociétés hypersexualisées, des enfants, dès l’âge de 8 ans, peuvent voir de la pornographie, ce qui est très problématique, puisque la pornographie est un viol filmé, c’est d’une extrême violence. Et les filles qui sont confrontées à la pornographie imaginent le sexe tel qu’il est visible dans un film porno, ce qui est quand-même d’une extrême violence et ce qui crée bien évidemment une peur d’être une femme, ça semble assez évident. Certaines féministes parlent donc, plutôt que de dysphorie de genre, de dysphorie pubertaire.

En fait, dans les années 70, on parlait de dysphorie de genre, c’était pour des cas très rares et c’était essentiellement des hommes, enfin des garçons, et ça commençait très très tôt. Aujourd’hui, ceux qui veulent transitionner, les enfants qui veulent transitionner, sont essentiellement beaucoup d’adolescents. Et à l’adolescence, nous avons toutes été vulnérables psychologiquement, c’est tout à fait normal, ça fait partie de l’adolescence. Sauf qu’à partir de 2006, il y a une explosion des réseaux sociaux qui participent activement au prosélytisme trans et qui donne la sensation à ces jeunes filles qu’elles peuvent appartenir à un groupe, à un mouvement transgressif. Et c’est vrai qu’il est plus facile de s’identifier au genre masculin que de lutter contre les stéréotypes de genre ou contre la domination masculine. Surtout que dans nos sociétés, actuellement, les codes de genre sont transgressés depuis des décennies. Donc c’est pas vraiment si transgressif que ça de changer de genre en vrai, en vérité. Il suffit de voir les chanteurs des années 80, ils jouent tous avec le genre.

D’ailleurs, je voulais conseiller un documentaire, en quatre parties, de Vaishnavi Sundar : “Dysphorique : Fuir la féminité comme une maison en feu”, qui est disponible sur Youtube et qui décrit très bien comment la féminité est tellement difficile à vivre qu’on préfère la fuir plutôt que d’essayer de lutter contre le patriarcat. Il y a aussi un site que je voulais conseiller, c’est l’Observatoire de la petite sirène, qui veille au discours idéologique sur l’enfant et l’adolescent et sur les impacts des pratiques médicales, l’emprise des réseaux sociaux. 

Parce que ça c’est un grave problème aussi pour la société, la façon dont sont médicalisés ces enfants qui sont en détresse psychologique et plutôt que de leur apporter un soutien psychologique dont ils ont besoin, on leur propose une médicalisation qui est irréversible et à vie. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de détransitions, je crois que ça tourne autour de 20%, et ces personnes dénoncent le manque de suivi psychologique. Il y a l’affaire Keira Bell par exemple, qui est assez significative, qui a permis la fermeture de la clinique Tavistock.

C’est dangereux également d’un point de vue démocratique puisque, comme nous le voyons depuis plusieurs années, les femmes qui osent questionner l’identité de genre sont menacées, censurées, des comptes Twitter sont fermés sous prétexte de transphobie. Lorsqu’on rappelle qu’une femme est une femelle humaine adulte, qu’il est impossible de changer de sexe, qu’il est indispensable de maintenir des groupes non-mixtes entre femmes biologiques, on nous menace de mort, on nous dit que nous sommes responsables du suicide des enfants trans par exemple. Pourtant, il n’y a pas plus de suicide chez les enfants trans que chez les autres enfants et la transition ne diminue absolument pas le taux de suicide. C’est un discours culpabilisant qui a pour but de bloquer la réflexion et de censurer toute critique. La réalité, c’est que les agressions contre les trans, les homosexuels, sont le fait des hommes, de masculinistes et que ce sont des actes d’homophobie. Ce ne sont pas les femmes et encore moins les féministes radicales qui agressent et menacent de mort et de viol les homosexuels ou les trans. Donc il y a clairement un problème au niveau démocratique, au niveau de la liberté de parole, où on ne peut pas parler librement de cette question qui pourtant est dangereuse sur plusieurs niveaux.

Là je vais parler par exemple d’un point de vue écologique. Penser qu’on peut changer de sexe, c’est quand même dénier la réalité biologique du corps. Donc ce déni nous renvoie au refus des limites que nous impose la nature. On rejette notre condition de mammifères, qui est faite de chair et de sang. Nous sommes donc encore dans un désir de maîtrise de la nature, de la biologie, c’est un peu pour ça qu’on a des problèmes environnementaux aujourd’hui. C’est une domination masculine, hégémonique et toxique qui détruit l’environnement parce qu’elle veut le contrôle sur l’environnement en utilisant des méthodes qui ont été expérimentées sur les animaux d’élevage en plus, qu’on va transposer à des enfants donc cette  idéologie participe à maintenir la division entre corps et esprit, ce qui renvoie aussi à celle de nature et culture, donc à celle de féminin masculin qui est au fondement de tous les dualismes et qui permet à la domination masculine de se maintenir.

Aujourd’hui, on réifie des morceaux de corps, on a des banques de sperme, des banques d’ovules, des banques d’embryons, donc le transgenrisme, la chirurgie de réassignation, les expérimentations pour créer des utérus artificiels, le transhumanisme, tout cela est lié. D’ailleurs, des liens existent entre le transgenrisme et le transhumanisme : je donne l’exemple de Martin Rothblatt qui a écrit De transgenre à transhumains : Un manifeste sur la liberté de forme, qui est un entrepreneur et un avocat très prospère, fondateur de l’United Therapeutics. Il a été plusieurs fois le PDG le mieux rémunéré de l’industrie bio-pharmaceutique et il a participé activement à la banalisation du transsexualisme. Le transhumanisme souhaite créer une espèce supérieure, se libérer des limites de l’incarnation, il ne veut pas autre chose que la disparition de notre propre espèce et malheureusement tous ces enfants sont utilisés pour alimenter les biobanques, ils sont des cobayes, ils sont stérilisés. Je ne sais pas mais vous avez reçu Sophie Robert, je n’ai pas pu écouter le podcast mais j’imagine qu’elle doit en parler, peut-être, un peu, de cette stérilisation des enfants ?

RDG – Oui. Bien sûr. C’est un épisode remarquable que nous vous invitons à écouter et effectivement, on parle notamment de la castration des enfants.

Ana – Voilà. Moi je pense que quand on lutte contre le capitalisme, contre la réification et la marchandisation du vivant, on ne peut pas défendre l’identité de genre, c’est tout simplement suicidaire.

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces ? Est-ce que tu as déjà été mise en danger dans ton entourage personnel, professionnel ou est-ce que tu es parfaitement libre et en sécurité pour parler ?

Ana – Je parle avec mon identité parce que j’écris de toute façon des articles, depuis un petit moment, sur cette question là aussi, que j’ai participé à des traductions, etc. donc j’assume parfaitement mes positions. Après, oui j’ai reçu des menaces, bien évidemment, j’ai été accusée de Terf, de transphobe à plusieurs reprises.

Je ne suis plus invitée à des événements écoféministes à cause de ça donc là où je vis, c’est un petit bourg de 900 habitants, je voulais constituer un petit collectif féministe et artistique et à cause de cette position, j’ai été écartée donc je suis isolée.

Il m’arrive, lors de discussions amicales, de sentir aussi que je suis un peu… que je suis jugée, je fais un peu la rabat-joie, je suis même voire limite réac. D’ailleurs, j’ai certaines amies dont je n’ai plus de nouvelles bizarrement… Donc les échanges peuvent être assez stressants. Après, je ne me sens pas menacée, pour l’instant en tout cas. Je ne me sens pas menacée mais par contre, clairement, c’est un sujet qui est délicat pour échanger avec avec certaines personnes, même en fouilles cet été il y a eu des moments où c’était un peu tendu et où j’ai un peu hésité à mettre mon grain de sel, bon finalement je l’ai fait (rires) mais ce n’est pas très agréable quand on reste un mois avec des personnes, une collectivité d’une vingtaine de personnes, et qu’on est considéré comme terf, ce n’est pas super sympa.

RDG – Je crois qu’on a toutes vécu ça (rires). Ces accusations qui arrivent : “Tu veux tuer les trans !”

Ana – Oui, c’est ça.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée, concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Ana – On m’avait proposé de participer à un événement écoféministe il y a quelques années et puis après s’être renseigné sur ma personne, on m’a téléphoné pour me dire que c’était un peu problématique parce que ma position par rapport à l’idéologie du genre posait problème. On ne m’a pas retirée du festival mais on m’a demandé de faire profil bas et de ne surtout pas aborder ce sujet et ça, malgré le fait que les organisatrices étaient d’accord avec moi. Mais elles ne se sentaient pas, elles ne pouvaient pas se permettre de gérer un conflit, m’ont-elles dit, avec les transactivistes. D’autres femmes m’ont dit aussi préférer ne pas dire qu’elles étaient Radfems, qu’elles étaient féministes radicales, pour ne pas entrer en conflit avec leurs collègues et risquer de perdre leur poste, notamment dans le milieu artistique. Et là, dernièrement, pour mon livre où j’ai voulu le présenter dans différentes librairies, il y en a certaines qui l’ont refusé après s’être renseigné sur ma personne et parce que j’ai des articles sur mon site qui critiquent la question trans. Voilà, ça c’est les anecdotes sympathiques (rires) qu’on peut avoir quand on est féministe radicale aujourd’hui.

RDG – Concrètement, la position d’être critique ou abolitionniste du genre amène directement à l’appauvrissement et à la précarisation des femmes féministes, c’est vraiment terrible. Pour les hommes, il n’y a pas vraiment cet effet-là mais pour les femmes, c’est vraiment terrifiant. La marginalisation de leur parole et leur précarisation économique et sociale, comme tu l’as dit dans ton village de 900 habitants, quand-même c’est incroyable.

As-tu quelque chose à ajouter ?

Ana – Je voulais d’abord vous remercier pour tout votre travail, de permettre aux femmes et aux féministes radicales de partager leurs analyses, leurs expériences et leurs craintes, de m’avoir accordé aussi ce moment de parole libre parce que je pense qu’aujourd’hui… Enfin je pense… Non, c’est un fait : aujourd’hui, nous sommes silenciées, comme vous l’avez dit tout à l’heure, nous sommes silenciées, nous sommes agressées, nous sommes… Je pense qu’on est un peu toutes en état de choc par rapport à ce qui se passe avec le transactivisme et qu’il faut vraiment qu’on soit le plus solidaires possible, se soutenir les unes les autres et en parler le plus possible pour que les gens soient au courant parce que beaucoup de personnes ne sont pas au courant en fait, ne savent pas du tout en quoi ça consiste exactement ce qui se passe avec les enfants et donc c’est pour ça aussi que je pense que “Rebelles du genre” est un podcast hyper important et que je suis très contente d’y avoir participé.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible.

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe:  womensdeclaration.com

Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail.

Rebelles du genre – Épisode 53 – Ophélie

Ophélie – Bonjour, je m’appelle Ophélie. J’ai 26 ans. Je suis gérante d’un restaurant vegan dans le nord de la France, et je suis ici pour témoigner sur mon rapport au féminisme, comment je suis devenue critique du genre, et l’évolution de mon féminisme et de mes pensées. 

Alors moi, j’ai eu une enfance assez classique, je dirais, avec des stéréotypes, entre guillemets, “normaux”. Voilà. 

J’ai appris qu’être une petite fille, c’était un petit peu un ensemble de stéréotypes, et les garçons autour de moi… voilà : pareil. 

Mais sans non plus être trop dans le sexisme exagéré, on va dire. 

Je n’ai pas non plus, voilà, trop eu d’introduction au féminisme, et ce que c’était le féminisme, et justement, l’abolition du genre et tout ça… Ce ne sont pas des notions que mes parents, ou que mon entourage m’ont apprises. 

Je me souviens justement, que dans mon enfance, je n’avais jamais vraiment trop de problèmes avec mon corps, avec mes poils. Dès l’instant où je suis rentrée dans l’adolescence, et que mes copines, elles ont commencé à se raser, à s’épiler, et à se maquiller, moi je n’avais pas vraiment ce besoin et, justement je ne comprenais pas d’où venait ce besoin.

Et après voilà dans mon adolescence j’avais beaucoup d’idées reçues sur le féminisme, avec avec les Femen, la haine des hommes, des femmes très en colère, avec les cheveux colorés, les poils sous les bras… colorés aussi, et tout ça! Donc une idée assez pessimiste, et très stéréotypée de ce qu’était le féminisme. Avec une forme spécifique, mais sans en comprendre vraiment le fond. 

Et je dirais que c’est… Donc c’est à peu près il y a 6 ans, j’avais 20 ans, que je me suis vraiment, je me suis vraiment intéressée aux notions de féminisme, et de ce que c’était. Et ouais, vraiment à prendre à prendre conscience de ce que c’était vraiment que le féminisme. 

Grâce à quoi? Grâce aux réseaux sociaux surtout, donc notamment Twitter et YouTube.

Twitter : il y avait beaucoup de comptes d’activistes (à l’époque, voilà, c’était du féminisme assez “normal”, entre guillemets) qui m’ont appris  justement les notions de genre et les notions de violence sur les corps des femmes, etc. Donc ça m’a vraiment permis de prendre conscience de tout ça.

Et sur YouTube, j’ai commencé notamment avec Antastésia qui parlait beaucoup de féminisme, et de… “La Carologie”, également.

Donc j’ai appris vraiment beaucoup de choses, et en fait j’ai ouvert les yeux sur, à la fois les stéréotypes de genre qui étaient attribués à chaque sexe, et du coup ce qu’on nous demandait, en tant que femmes : les injonctions, les diktats, etc. 

Sur les hommes également, mais voilà, beaucoup plus sur les femmes, étant donné que c’est un petit peu le sujet.

Et à la fois les violences, les oppressions qui étaient faites sur nos corps, et ce qu’on subissait en tant que femmes dans le collectif.

Après, vraiment, j’ai fait le lien. Ça a été comme une révélation, j’ai vraiment fait le lien : je comprends que nos corps sont violentés, qu’ils sont sexualisés, nos corps de femmes… et que les stéréotypes qu’on nous imposent viennent rajouter une couche, justement, sur tout ça. Sur toutes les injonctions et la violence, et que voilà, l’idée c’était de nous posséder…

Mais voilà : j’ai fait le lien entre tout ça, et moi, mon but c’était justement de prendre conscience des stéréotypes de genre, de les déconstruire, et de pouvoir, vraiment, en avoir conscience, et d’abolir, en fait, toutes ces injonctions qui étaient faites sur nos corps et sur sur nos vies.

J’ai fait le lien aussi, du coup, entre patriarcat et capitalisme, justement, avec le fait que les stéréotypes nous imposaient des choses sur nos corps qui permettaient d’enrichir la société, avec notamment l’injonction au maquillage, aux vêtements, à la beauté, à l’épilation, etc. 

Donc vraiment, c’était comme un puzzle qui… chaque pièce s’imbriquait, petit à petit. Où je comprenais le lien entre tout, et vraiment, où j’ai ouvert les yeux, et où j’ai vraiment compris, en fait, c’est à partir de ce moment-là où j’ai compris ce que c’était qu’être une femme. 

Et où je me suis sentie vraiment femme, pour la première fois de ma vie, c’est en comprenant le lien qui m’unissait à toutes les autres femmes de ce monde, que ce soient des femmes de mon pays, ou d’autres pays.

Et qu’on avait des oppressions communes, et d’autres qui s’ajoutaient, aussi, en fonction de la culture qu’on avait, le pays dans lequel on est née, et également, voilà, tout le background social et éducatif.

Ensuite le féminisme est devenu beaucoup plus mainstream. Donc je dirais que c’est ça, il y a environ quoi? Trois ans. 

Donc à peu près 3 ans après mon entrée, vraiment, dans le féminisme. 

C’est devenu beaucoup plus mainstream avec, notamment, des comptes Instagram qui se sont vraiment développés : des comptes sexos, libération de la sexualité, libération des tabous, on a commencé à parler des règles, on a commencé à parler de “bodypositive”, la charge mentale sur les femmes… 

Beaucoup de comptes ont “poppé”, comme ça. 

Moi, j’avais déjà un pied dans le féminisme. 

Je n’ai pas découvert ce combat via Instagram et le développement de ces comptes-là, mais j’étais contente de voir que ça se démocratisait et, pour moi, c’était que du positif, parce que ça la parole s’étendait. Instagram est un réseau social qui est utilisé par, aujourd’hui, toutes les générations, dont les plus jeunes. Pour moi, ça part de la jeunesse pour pouvoir déconstruire le plus tôt possible toutes les injonctions et reconnaître les violences qui nous sont faites. 

Je n’avais pas encore eu vent des différents mouvements féministes. Je commençais à entendre parler du fait qu’il y avait plusieurs féminismes mais je ne comprenais pas cette idée là. Pour moi, le féminisme, c’était abolir le patriarcat, donc abolir les stéréotypes de genre, et arrêter les violences faites sur nos corps. 

Donc je ne comprenais pas trop cette notion. 

Et ensuite, j’ai voulu aller un petit peu plus profondément dans ces notions féministes qui étaient un peu trop en surface : c’est-à-dire “mon corps, mon choix”, où chaque femme fait ce qu’elle veut sans remettre en question, vraiement, pourquoi on faisait ces choix là, par exemple, de l’épilation. J’avais besoin d’aller plus dans le fond et de me dire : “Oui, mais pourquoi fait-on ces choses là?  Et si on se posait la question, est-ce qu’on le ferait vraiment?” 

J’ai essayé de creuser un peu plus et c’est là que j’ai découvert que les notions d’intersectionnalité, avec la convergence des luttes, la convergence entre sexisme et classe sociale, sexisme et “race”, la grossophobie… 

J’ai compris que le sexisme, à lui seul, englobait beaucoup de hiérarchies différentes, et la notion de privilège également est arrivée. 

Je me suis rendue compte de la notion de privilège, pas seulement de masculine sur le privilège féminin, mais également la notion de privilège à l’intérieur du féminisme. 

Ça m’a beaucoup parlé, liens entre écologie et féminisme, le racisme, également le validisme, l’homophobie, la lesbophobie, étant moi-même concernée étant donné que je suis une personne bi.

Ça a été une deuxième “révolution” pour moi. J’ai encore plus ouvert les yeux sur les luttes et les personnes oppressées par le système oppressant.

C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte encore plus du tronc commun qui unissait les femmes du monde. Le tronc commun, c’est nos corps, c’est le corps des femmes. Les violences qu’on subit sont sur nos corps. Mais il y a des oppressions supplémentaires qui s’ajoutent en fonction de notre classe sociale, de notre “race”, avec ce tronc commun : “Le sexisme, c’est nos corps qui sont utilisés, qui sont violentés, qui sont objectifiés, sexualisés, etc.”

Je suis consciente de ça depuis le début. Mon but, c’est d’abolir le genre depuis le début. Je dirais que je suis critique du genre depuis les prémices de mon féminisme. 

C’est un peu parti en cacahuètes après, quand, dans l’intersectionnalité, j’ai entendu parler de transactivisme et de convergence des luttes entre sexisme et femme cis/femmes trans, et la différence entre le cisgenre, le transgenre. 

Forcément, je m’y intéresse et j’écoute les concerné.es, parce qu’on nous dit d’écouter les concerné.es. 

J’ai vraiment intégré les discours qui stipulaient qu’être une femme cis, c’était être beaucoup plus privilégiée qu’une femme trans, parce que convergence des luttes,  intersectionnalité, une femme trans vit à la fois la transphobie et le sexisme. J’étais là : “Oui oui… Ça fait sens… Intersectionnalité, tout ça…”. 

En fait, leur discours commençait à invisibiliser totalement la violence qui était faite sur nos corps. 

Je me suis imprégnée de leur discours et je me suis un petit peu détachée du concret. Alors que pour moi, c’était la base depuis le début : la violence qui est faite sur nos corps. Et la notion de genre a commencé à prendre le pas sur la notion de sexe, de biologie. 

Donc moi-même, en tant que femme “cis” (aujourd’hui, je ne le dis plus. Je suis une femme. Point.), je me sentais privilégiée par rapport aux femmes trans, sans même poser les faits : c’est-à-dire que moi, mon corps, je l’ai depuis la naissance et les oppressions que je subis, je ne les ai pas choisies. Et dans tous les cas, je suis une femme. Je ne l’ai pas choisi. Quoi qu’il en soit, le réel rattrapera toujours l’abstrait. Mon corps sera ciblé, parce que j’ai un corps de femme. 

Et après, il y a eu tout le discours transactiviste qui a commencé à pointer du doigt les féministes radicales nommées “Terfs” : Dora Moutot, Marguerite Stern et Antastesia. 

En fait, ça a commencé avec Antastésia, parce que je la suivais depuis le début, j’étais vraiment très intéressée par ce qu’elle disait. Je trouvais toujours ça très concret et ça me parlait. Elle avait fait une vidéo où, justement, elle réfutait les accusations qui lui étaient faites sur le fait qu’elle était transphobe parce qu’elle avait osé dire qu’être une femme, c’était lié à la biologie et à pas grand chose d’autre, que les stéréotypes de genre ne définissaient pas ce que c’était qu’être une femme. 

Et je me suis renseignée des deux côtés: j’étais d’accord avec ce qu’elle disait dans ses vidéos et, sur Twitter, je voyais les gens qui disaient “Antastésia : transphobe, terf…”.

C’était assez virulent. C’était jamais vraiment constructif. 

Je voyais les gens dire : “ Il faut cancel Antastésia parce que c’est une terf”. 

Les gens répondaient : “Ah bon? Elle a dit quoi?”. 

La personne en face répondait : “ Je ne sais pas ce qu’elle a dit, mais j’ai entendu que c’était une terf, alors il faut la cancel.” 

Super. 

Vraiment, l’argumentaire, on repassera…

De moi-même, j’ai fait mes recherches et j’essayais toujours d’être dans la nuance et je comprenais pas pourquoi elle était si décriée, si insultée… 

Donc après Antastésia, il y a eu d’autres féministes radicales qui ont osé prendre la parole, notamment Marguerite Stern, Dora Moutot. Et en fait les idéologies et les discours transactivistes prenaient tellement le pas sur les réseaux sociaux (et peut-être sur les personnes que je suivais à l’époque parce que j’étais persuadée que c’était le discours à avoir et que c’était “le bon féminisme” à avoir) que je n’ai pas réellement cherché à aller voir ce que disait Dora et Marguerite dans le fond, parce qu’elles étaient tellement insultées et vraiment considérées comme des mauvaises personnes, des mauvaises féministes que dès l’instant où on osait même dire : “ Peut-être que je vais aller me renseigner sur ce qu’elles disent”, ou même le faire soi-même… Moi, je ne me sentais pas d’aller voir leur contenu parce que je me disais que ce n’était pas la bonne chose à faire et que j’allais être une mauvaise féministe.

Donc j’ai fait l’erreur de “cancel”, dans le sens où je ne les ai pas suivies, je ne voulais pas les suivre. 

C’est vraiment là que s’est installé le discours transactiviste qui prend le pas sur tout. Tout le monde commence un peu à partager en story les trucs transactivistes, LGBT, queer et compagnie dans leurs stories, sans même trop comprendre ce que ça voulait dire. Mais ça faisait bien de partager ces idées-là, parce que c’était les idées mainstream. 

Le discours transactiviste a pris un peu le monopole du féminisme mainstream qui, de base, expliquait juste les bases du féminisme. Et on a bien vu ce que ça a donné après, avec l’invisibilisation du mot “femme”, pour le remplacer avec les termes de “personne menstruée”, “personne à utérus”, etc.

Mais en fait, je me rendais compte que les discours transactivistes n’allaient pas avec mon idée de base du féminisme qui était d’abolir le genre et, surtout, de dénoncer les violences qui étaient faites contre nos corps. Donc j’ai commencé à nuancer mes pensées en allant me renseigner de l’autre côté, et en me rendant compte que j’étais plus d’accord avec les personnes qui étaient cancel de la place publique. 

À me dire : “ Ouh là là… Soit j’ai un problème… soit j’ai un problème!”

Je me disais que le problème, c’était moi. 

Je me suis dit : “ Il faut absolument que je me remette les idées en place, que je me renseigne et que j’écoute les concernés, parce que ce qu’ils disent c’est vrai et c’est moi qui ait un problème.”.

J’ai fait ce qu’ils ont dit, j’ai écouté les concernées. Il s’avère que ça a juste confirmé encore plus mon idée de base du féminisme et que je me suis, à ce moment là, beaucoup plus rapproché du féminisme radical, et beaucoup (beaucoup, beaucoup) plus éloignée de toutes les idées queer, transactivistes, libérales, et cela grâce au fait que j’ai écouté les personnes trans. 

Je ne veux pas compter le nombre d’heures que j’ai passées à regarder des vidéos (Youtube c’est génial, c’est une mine d’or, on peut y voir de tout). 

Et j’ai écouté les personnes trans nous parler de leur transition, de leur histoire, de comment elles ont fini par transitionner, pourquoi elles ont transitionné, qu’est-ce que c’est pour eux être une femme, être un homme…

J’ai passé des heures à écouter des dizaines, voire peut-être même des centaines de personnes (peut-être que j’abuse, mais en tout cas des grosses dizaines de personnes), pour me dire : “ C’est moi qui ai un problème. Si je les écoute, ça va me remettre dans le bon chemin.” 

Et en fait, au fur et à mesure des témoignages, je me suis rendu compte que le seul tronc commun que toutes ces personnes transidentifiées avaient, c’était que, pendant leur enfance, elles ne se sentaient pas en adéquation avec le genre qu’on leur a soi-disant “assigné à la naissance” (le genre avec lequel on les a tout simplement éduquées, à cause de leur sexe). 

Et que ça leur a créé une forte dysphorie, un fort mal-être (ce que je peux entièrement comprendre parce que les stéréotypes de genre tuent), et que leur transition a commencé par là. 

C’est le seul tronc commun parce qu’à part ça, il n’y a aucun point commun entre toutes ces personnes, étant donné qu’on se base sur un ressenti ultra personnel, qui passe au-dessus des faits réels, des faits matériels et des faits biologiques. 

Donc un ressenti personnel qui prime sur tout, et qui est surtout différent entre toutes les personnes.

Donc j’ai entendu des personnes transidentifiées parler d’être nées dans le mauvais corps. 

D’autres qui disaient que la biologie et le genre n’avaient absolument rien à voir et qu’il ne fallait surtout pas dire qu’on était né dans le mauvais corps. 

D’autres qui faisaient une transition médicale avec prise d’hormones, “réassignation sexuelle”, vaginoplastie et compagnie. 

D’autres qui refusaient ça parce qu’elles se sentaient bien, dans leur biologie à elles. 

Bon au final, à chaque fois, ça finissait toujours par une transition médicale. 

Ça, c’est un autre truc en commun. 

Au fur et à mesure d’écouter les personnes, ça finissait toujours par une transition médicale. 

Donc on revient au point de vouloir se retrouver “biologiquement” dans le genre opposé. 

Je me disais : “ Il y a trop de contradictions. Je ne comprends pas.”. Mais je me suis évertuée, je me suis dit : “C’est moi qui ne suis pas assez ouverte.”

Pendant tout ce temps-là, ce n’est pas que je mettais de côté la réalité des faits et de la violence, et des oppressions subies sur nos corps de femmes. Mais je me disais que ce n’était pas ce qui primait, que ce n’était pas ce qui me définissait en tant que femme. 

Moi-même, à ce moment là, je me suis perdue dans ma propre définition de femme. 

Dans tous les cas, j’ai fini par m’intéresser à ce que Marguerite Stein, Dora Moutot et les féministes radicales, en général, disaient. Et leur discours, je me suis retrouvée dedans. 

Ça a pris beaucoup de temps, jusqu’à ce que je lâche prise sur le fait que je fasse partie du “mauvais camp”, parce qu’à côté je voyais encore, sur Instagram et les réseaux sociaux, le féminisme mainstream ultralibéral, pro “TDS”, avec la prostitution, les “travailleurs du sexe qui choisissent”, et les paillettes… 

J’avais toutes ces contradictions, et je me suis beaucoup plus retrouvée dans le féminisme radical qui ne dit pas plus que les faits, c’est-à-dire : la violence sur le corps des femmes, les stéréotypes qui les appuient, mais en aucun cas, être une femme n’est de l’ordre du ressenti et d’arborer des stéréotypes qui feraient qu’on est des femmes.

On en arrive à aujourd’hui, où je n’ai plus peur de parler et j’ose prendre la parole pour justement affirmer mes idées, parce que ça a mis du temps avant que j’affirme mes idées et aujourd’hui c’est le cas.

Donc aujourd’hui je suis juste retournée aux prémices de mon féministe d’il y a 6 ou 7 ans, à savoir être critique du genre, à vouloir abolir le genre et supprimer les violences faites sur le corps des femmes à cause de notre biologie. 

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie? 

Ophélie – Cette idéologie, c’est une menace, selon moi, pour les femmes, avant tout, parce qu’on invisible totalement le fond du problème et pourquoi le féminisme existe, pourquoi le sexisme existe. 

Le tronc commun au sexisme, c’est des corps de femmes qui sont utilisés, qui sont violés, qui sont excisés… 

On nous invisibilise et la notion de genre prend le pas sur la notion biologique, alors que la violence, elle, est matérielle. 

Les stéréotypes de genre sont là pour appuyer cette violence matérielle, mais la violence est factuelle, elle est sur nos corps. 

On parle de ressenti aujourd’hui dans le transactivisme mais à aucun moment on ne rappelle que c’est le vagin qui est violé, ce sont nos corps qui sont objectifiés, qui sont infantilisés, les deux en même temps. Qui sont utilisés pour le marketing, ce sont nos vulves qui sont mutilées. Ce sont les femmes en Inde, ou dans d’autres pays du monde, qui ne naissent même pas parce qu’elles sont de sexe féminin et, avant même leur naissance, on interrompt la grossesse parce qu’elles vont être des femmes. 

On oublie aussi tout ce qui est plaisir sexuel, relation hétéro (la base dont on parle depuis le début). Le plaisir sexuel des femmes est oublié au profit de celui des hommes : c’est bien parce que c’est celui des femmes, du fait des corps que l’on a. 

Les personnes menstruées (comme ils disent), c’est nous qui subissons les violences gynécologiques, par exemple, les viols et autres violences gynécologiques. 

On ne parle pas de l’ordre du ressenti. On parle de faits, de faits matériels. 

Tout ce qui est contraception, qui est attribuée à la femme, parce que ce sont nos corps qui subissent ça. Ce sont nos corps et notre charge mentale, en même temps. L’endométriose, dont on n’a pas parlé depuis des années, aujourd’hui, on se réveille un peu. Mais pourquoi? Parce que c’est quelque chose qui concerne le corps des femmes. Et tout ça on l’oublie. 

Aujourd’hui, c’est vraiment la notion d’abstrait qui ne prend même pas le pas sur le concret, mais ça écrase le concret. Et l’abstrait devient une vérité universelle et le concret devient flou et devient remettable en question, alors que l’abstrait, hors de question de la remettre en question. 

Sinon, on est transphobe, “Au bûcher!” et compagnie… Ça me fait penser du coup au film de Arthus-Bertrand qu’il a réalisé (note : le film est sorti en 2019.) en 2017. Le film s’appelle “Woman”. Il a pris le témoignage de femmes de plus de 50 pays du monde, toutes avec des cultures différentes, des éducations différentes, des richesses, des couleurs de peau… Juste, le tronc commun est qu’elles sont (et nous sommes) toutes des femmes. Elle parlaient de leurs oppressions, de leur vie et des violences qu’elles subissaient, au niveau des mariages forcé, les agressions sexuelles, les viols, l’excision, le vitriolage (qui consiste à jeter de l’acide sur le visage des femmes pour se venger de choses qu’elles auraient faites), et après la maternité, la sexualité, les règles et tout…

Et en fait ce film m’a bouleversé. Quand je l’ai vu à l’époque, (bon je sais qu’aujourd’hui, Arthus Bertrand, il y en a beaucoup qui auraient à redire sur lui) le film est magnifique. Il m’a fait me sentir encore plus connectée aux femmes du monde de par le point commun qu’on a toutes, en dehors de tout l’aspect social, sociétal, culturel, le tronc commun qu’on a et qui nous revient en pleine figure dans tous les cas parce qu’on a pas le choix de l’avoir (et la société nous fait bien rappeler que notre corps leur appartient). 

Je ne peux pas m’empêcher de me dire, qu’aujourd’hui, c’est un film qui serait considéré transphobe parce qu’il parle des oppressions vraiment matérielles et que ces oppressions sont oubliées, invisibilisées. À aucun moment dans le film on ne parle de ressenti. Enfin, si. On a le témoignage des femmes avec leurs émotions, mais on parle vraiment des faits concrets qui, aujourd’hui, ne sont plus au premier plan des combats féministes, visiblement. 

Rebelles du genre – Ben fait c’est aussi simple que le fait de ne pas mettre au premier plan les témoignages des femmes trans! Donc voilà, tout simplement. Rien que pour cette raison, c’est un film qui doit aller au bûcher. Aujourd’hui, on a tout un tas, par exemple, de jeux féministes… je ne sais pas, là moi j’ai tout un tas de jeux féministes… enfin, prétendument féministes. En fait, pour qu’ils soient diffusés aujourd’hui, ils collent dedans des “femme trans” : des hommes. C’est-à-dire que là, j’en ai un qui s’appelle “L’oracle féministe”, bon ben il y a un ou deux mecs glissés dedans, voilà. Et puis, évidemment, pour faire bonne mesure, il y a aussi une ou deux prostituées. 

Et c’est partout pareil : dans tous les livres que tu lis, chaque fois que la femme qui écrit quelque chose elle ne veut pas être cancel, eh bien elle est contrainte de faire ça. Par exemple, je lis un livre de Rupi Kaur qui est une poétesse canadienne d’origine indienne. C’est magnifique, ça me tire des larmes quand je lis ce qu’elle écrit. Et paf, page 162, crac, il y a une phrase : “Les femmes trans sont des femmes.” Point. Ensuite, elle repart sur son… sur tout. 

Et en fait, moi, je le comprends comme une sorte de prise en otage de cette poétesse qui sait que, si elle ne veut pas avoir d’ennuis, elle est obligée de verser sa soulte. Voilà. Donc elle a fait une page qui dit : “ Les femmes trans sont des femmes.” 

Point. 

Quand je l’ai lu, j’avais envie de pleurer, je me suis dit : “ Encore une qui a été obligée de le dire.”

C’est comme quand tu es gamin, et tu en as un autre qui t’empêche de passer, il te dit “péage” et tu dois dire un mot de passe.

Et en fait aujourd’hui, le mot de passe pour être visible dans les médias c’est “Les femmes trans sont des femmes”. 

Voilà, c’est le mot de passe.

Ophélie – Visible dans les médias et visible de la bonne façon. Parce qu’aujourd’hui, des Stern, Moutot, elles sont visibles mais elles sont cancel.

RDG – Mais elles ne sont pas visibles. Parce que si tu regardes, ce sont des femmes de gauche et elles ne sont visibles dans aucun média de gauche. Aucun média de gauche. 

Il faut être clair : les médias qui, aujourd’hui, acceptent notre parole ne sont pas les médias de gauche. 

Donc en fait il y a une sorte d’OPA sur la gauche par des gens qui sont en fait des ultra libéraux et qui font taire les femmes. Voilà.  

Donc on ne peut pas dire que Dora ou Marguerite aient réellement la possibilité de s’exprimer quand leur seul choix c’est de parler… soit tu vas parler à  Valeurs Actuelles, soit tu vas parler à… je n’en sais rien, moi…

Bon, après, moi, tous les médias indépendamment de Valeurs Actuelles (il ne faut pas exagérer non plus) ont absolument le droit d’exister, ce n’est pas la question.

Mais si tu veux t’adresser à un public large, il n’y a aucune raison que les médias de gauche interdisent la prise de parole. 

Je veux aussi parler de la tribune qu’avait écrite Pauline Arrighi, il y a deux ans, qui disait : “Suffit-il de s’autoproclamer femme pour en être une?”

Et elle a été publiée dans Le Huffington Post deux heures. 

Et au bout de deux heures, Le Huff a retiré la tribune en s’excusant, et en disant que c’était contre leurs standards, que la transphobie ne faisait pas partie de leurs valeurs… C’était juste, pourtant, une question qui méritait d’être posée : est-ce qu’on est vraiment une femme quand on déclare qu’on est une femme? 

Et finalement il y a Marianne qui a quand même accepté de diffuser cette info.
Et je dirais que Marianne c’est à peu près le seul média aujourd’hui dans lequel les femmes critiques du genre peuvent encore s’exprimer. 

Ophélie – Et puis surtout que les féministes radicales soient associées à l’extrême droite systématiquement! Transphobie et extrême droite du coup, enfin systématiquement, donc je sais pas il y a pas de juste milieu, il y a pas de nuance, il y a pas de… c’est soit blanc soit noir et vraiment c’est… 

RDG – Alors qu’on est dans de l’ultra libéralisme en fait! Donc la gauche aujourd’hui, la valeur centrale de la gauche, c’est l’ultra libéralisme : la liberté du renard libre dans le poulailler libre. Autrement dit : on veut que les hommes puissent accéder librement aux toilettes, aux vestiaires et aux prisons des femmes! 

Mais qu’est-ce que c’est ça? C’est quelle liberté, celle qui permet d’opprimer les opprimées? 

Ophélie – Non mais en plus, ça fait le lien avec ce que je ce que je voulais dire juste après : j’ai parlé justement, de toutes les violences qui étaient faites sur nos corps, mais il faut pas oublier que c’est leur corps à eux qui nous violentent! Voilà! on parle de ressenti, et tout ça… mais c’est un corps violenté par un autre! 

C’est leurs pénis qui nous violent, c’est leurs mains, c’est “leur puissance masculine physique”, et leur supériorité physique qui prend le pas sur nous,  qui nous violente, qui prend le pouvoir. 

C’est, encore une fois, c’est leur pénis qui nous viole! 

Donc ça c’est oublié, ça c’est oublié…

C’est pas un ressenti homme envers un ressenti femme. 

Et ça je sais pas, en fait, je n’arrive toujours pas à comprendre comment, aujourd’hui, ça peut être la pensée universelle, qui floute totalement toutes les réalités matérielles, toutes les réalités concrètes, et que tout le monde soit ok avec ça, ou du moins pas tout le monde, mais que ce soit vraiment la pensée mainstream… 

Je n’arrive toujours pas à comprendre!

Ensuite, c’est un danger pour les enfants, évidemment. 

Je pense même que c’est un danger autant pour les enfants que pour les femmes en réalité. 

Parce que, selon moi, la déconstruction des stéréotypes de genre, elle doit se faire dès l’enfance, ça voilà depuis le début de mon féminisme j’en suis consciente, qu’on a beaucoup de facilités à intégrer des choses et beaucoup plus de difficultés à les déconstruire après en étant adulte, en ayant vraiment intégré des idées qui sont considérées normales, normées. 

Donc selon moi, ça passe par l’éducation, tant familiale, que scolaire, et aujourd’hui à l’école tant dans la cour d’école, on va intégrer l’idée que les femmes, enfin les filles, les petites filles, c’est pas celles qui ont des corps de petites filles et les petits garçons c’est pas ceux qui ont des corps de petits garçons…

Et à la fois on va encore plus insister sur les stéréotypes de genre qui aujourd’hui divisent les filles et les garçons et qui justement aboutissent à encore plus de violences et encore plus de sexisme des hommes sur les femmes! 

Et en fait, pour moi voilà : le but du féminisme et de l’abolition du patriarcat, c’est quand même l’abolition du genre, et aujourd’hui on est en train de le développer encore plus! 

Cette notion de genre est justement la différence entre une fille, sociétalement et un garçon, sociétalement. 

Parce qu’on entend aujourd’hui que la dysphorie du genre bah ça existe, oui ça existe, je pense que ça a toujours existé. Moi en tant que petite fille des fois je me disais que c’était peut-être pas normal que j’aime pas porter des robes parce que j’étais censée porter des robes et que du coup est-ce que ça fait de moi une vraie petite fille, féminine… etc. Ça ne veut pas dire que j’étais un garçon pour autant!

Heureusement! Mais aujourd’hui, voilà le discours il tend vraiment à “si tu as une dysphorie de genre, ce n’est pas à cause des stéréotypes qui sont ultra ancrés, c’est justement parce que ces stéréotypes sont en train de te dicter qui tu es”.

Je ne  sais pas. On en vient à nous dire que notre corps, il n’ a rien à voir avec notre genre social, mais en fait, tous les enfants qui ont des dysphories de genre, c’est justement des dysphories liées au corps… Et après, même les personnes transidentifiées qui prônent le discours du “biologie n’est pas égale à genre, et ça n’a rien à voir”, elles finissent toujours par faire des transitions médicales, prendre des hormones, être contentes de voir que leur passing il est bien dans la rue, qu’elles passent pour des femmes, pour des hommes… parce qu’en fait sans leur passing bah… la réalité biologique les rattrape, et ça reste leur corps. Et quels que soient les vêtements qu’elles mettent ou les coiffures qu’elles ont, si elles mettent du maquillage ou du vernis, voilà, nos corps restent nos corps et le passing pour moi, c’est vraiment de la surface.

Oui pour les enfants pour ces raisons-là, et moi si je fais le parallèle, du coup, avec l’enfance que j’ai eue et déjà les stéréotypes qui étaient pas mal ancrés.

On entendait souvent le terme de “garçon manqué” et puis on l’entend encore, on l’entend encore pas mal. Mais vraiment, il y avait ce terme de garçon manqué pour les filles pas assez féminines, justement.

Moi dans mon féminisme, je me suis toujours battue contre ce terme qui est complètement dégueulasse en disant “déjà on n’utilise pas le terme “fille manquée” mais garçon manqué, pourquoi? Parce que tu n’es pas assez féminine, que tu n’arbores pas tous les stéréotypes de genre féminin?” Aujourd’hui on ne dit plus “garçon manqué”, on dit “homme trans”, en fait! 

Parce que pour moi c’est la définition-même. Un garçon manqué aujourd’hui, c’est un homme trans, une femme qui va se transidentifier, parce que… si tu ne te sens pas en adéquation avec les stéréotypes féminins, bah ouais, il y a moyen qu’en fait, au fond de toi, tu sois un garçon. Et on dit que c’est au fond de toi, parce que ça vient du ressenti, du plus profond, et que les personnes “cis” ne peuvent pas comprendre ce que c’est, être trans. Mais d’un autre côté, toutes les personnes que j’ai écoutées parler de leur transition et de leur transidentité, et de leur rapport à la transidentité, c’était toujours lié à des faits de société. Enfin s’il n’y avait pas de genre, si la notion de genre n’existait pas, il n’y aurait pas de transition. Et ça, voilà, c’est c’est des discours qui sont tous plus contradictoires les uns que les autres dans le transactivisme… mais c’est leur ressenti, donc il faut qu’on ferme notre gueule et que… enfin nous, on n’a rien à dire en tant que personnes “cis”, et encore plus en tant que femmes cis, qui sont limite coupables des crimes,  de ces crimes sur les personnes transidentifiées, les “femmes trans”, donc les hommes transidentifiés.

RDG – Par définition, on est coupable de tout, de toute façon! Principe de base : les femmes, et en particulier les féministes, sont coupables de tout.

Ophélie – Pour la société, alors… C’est un danger pour la société, parce qu’en termes de définitions, de chiffres, de faits, de statistiques, plus rien n’est, plus rien n’est réel, en fait! On ne peut plus se baser sur ce sur quoi on se basait depuis des années. Donc les faits n’existent plus. Tout devient flou et plus rien n’est mesurable, de la même manière.

Donc ça c’est un grand danger.

Pour la démocratie, évidemment, parce que aujourd’hui penser, ne serait-ce qu’un petit peu différemment, ou remettre en question les idéologies mainstream (je dis Mainstream mais du coup c’est les idéologies libérales transactiviste, queer, et de façon plus générale pro “travail du sexe”, pro prostitution et pornographie, aussi) penser ne serait-ce qu’un petit peu autrement, c’est… c’est être vraiment dans le mauvais camp. Donc il n’y a pas de juste milieu. La parole elle est très fermée, alors que c’est censé justement… enfin c’est des personnes qui se disent justement très ouvertes, et dans l’inclusivité pour tout le monde, à base de pronoms et de termes, voilà, de non-binarité, etc.

Enfin, au nom de l’inclusivité, on est en train de fermer la bouche de beaucoup de personnes, et dont les femmes qui, justement, prennent enfin la parole et sont enfin écoutées depuis plusieurs années, même si voilà, c’est un combat très lent, très lent à aboutir. 

Il n’y a plus de place, en fait, pour la remise en question, pour la nuance. On pense en fait, se déconstruire sur des schémas de société, des injonctions, en allant justement dans ce féminisme, et dans cette idée de théorie du genre, de queer etc. Mais on s’enfonce, en fait, dans d’autres dogmes qui nous enferment. 

Et en fait c’est… ouais bah c’est, comme beaucoup d’autres femmes l’ont dit dans ce dans ce podcast, et j’avais peur de… j’avais peur d’utiliser ce terme, au début, parce que je trouvais ça un peu abusé, mais en fait non : c’est sectaire. Parce qu’en fait, on s’enferme et on est pris par les discours, on n’écoute pas les discours des autres. Parce que c’est considéré être le mauvais camp, donc on cancel, sans même… sans même regarder ce que les autres disent, parce que moi, c’est ce qui m’est arrivé au début, et je pense que c’est le cas pour beaucoup d’autres personnes. Et du coup, où est la nuance, où est la liberté de parole? 

Voilà. Enfin, je veux dire, traiter de transphobe quelqu’un qui va juste remettre un petit peu en question l’idée du genre et de la transidentité, et tout ça, c’est injuste et c’est dangereux. C’est dangereux, parce qu’il n’y a plus aucune place pour la liberté de parole.

RDG – Aujourd’hui qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces? Est-ce que tu perçois un danger, ou est-ce que tu te sais complètement en sécurité pour parler librement?

Ophélie – Alors, comme je le disais juste avant, moi, j’ai mis longtemps à affirmer mes idées déjà, à me sentir légitime, et à ne pas me sentir une mauvaise personne, de penser ce que je pensais, justement à cause de tout le féminisme libéral, qui prend le pas (“féminisme libéral” entre guillemets) qui prend le pas sur tout autre forme d’idées, notamment le féminisme radical. Donc j’ai longtemps eu peur de parler et de me faire… de me faire cancel, ou de d’être considérée comme une mauvaise féministe. Alors que bon, je sais très bien que, enfin ce qui fait mon féminisme, c’est la bienveillance et l’ouverture d’esprit, et le fait de pouvoir permettre à tout le monde d’être qui il veut être, tant les femmes que les hommes, d’ailleurs. Donc en abolissant les stéréotypes de genre.

Et aujourd’hui j’en ai marre, parce qu’en fait juste je reviens aux bases de “pourquoi je suis féministe” et je ne vois aucune violence dans ce que je pense, dans mes propos, et je trouve ça très injuste de la part des personnes transidentifiées de dire qu’on les tue, qu’on est des personnes abjectes, qu’on mérite le bûcher…

Et la forme de discrimination, de harcèlement en ligne là, qui est mis sur toute pensée qui pourrait remettre en question la leur. Elle installe un climat de terreur, de peur. D’où le fait aussi que je comprenne que ce soit dur d’en sortir, parce qu’on est dans une société où c’est bien vu de faire partie d’un groupe et, quand un groupe qui est supposé avoir la pensée universelle, la bonne pensée, on n’a pas trop envie d’en sortir, parce qu’on a envie d’être intégré à la bonne pensée. 

Mais, aujourd’hui, je suis convaincue de mes idées. Je n’estime pas être une mauvaise personne et je n’ai pas non plus de personnes dans mon entourage qui pourraient être directement blessées par ce que je dis, dans le sens où je ne connais pas de personnes transidentifiées. Ni mon entourage familial, ni amical n’est concerné par ça. Ce serait beaucoup plus remis en question si j’avais des chances de blesser plus directement quelqu’un que que j’aime profondément. 

Je ne dis pas que mes paroles ne blessent personne, dans le sens où j’avais peur de parler pendant longtemps parce que ce sont des paroles qui sont considérées transphobes par une grande partie de la population. 

Mais aujourd’hui, j’ose parler, je trouve ça très important de remettre les points sur les i, et de faire passer un message à toutes les femmes qui sont dans le dans le silence, qui n’osent plus rien dire parce que leur parole vont être transphobes, qui ne comprennent pas trop non plus vers quel chemin le féminisme va. Je voudrais être une parole, une voix en plus qui leur dit “Mais n’ayez pas peur et parlons tous ensemble”. Il faut revenir aux bases.

C’est aussi parce qu’aujourd’hui je refuse d’être mise dans le même panier que des personnes transphobes, parce que je suis certaine que ça existe, des personnes haineuses, comme les homophobes, les racistes… Il existe des personnes transphobes, mais remettre en question l’idéologie des transactivistes, des queers et du féminisme libéral, ce n’est pas être transphobe. Mais justement, la prise de parole, c’est vraiment de pouvoir affirmer ça. 

Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’aurait marqué concernant la transidentité ou le transactivisme?

Ophélie – J’en ai plein. Au fur et à mesure de mes écoutes de témoignages vidéos, podcasts, articles, réseaux sociaux des personnes concernées (donc des personnes transidentifiées), j’ai pu noter tellement, à la fois, de contradiction et, à la fois, de paroles absurdes, et même dangereuses, pour certaines.

Ça a commencé avec Olivia Ciappa, anciennement Olivier Ciappa, qui a beaucoup parlé de sa transition sur les réseaux sociaux et qui la médiatise beaucoup, notamment son épilation, pour être une vraie femme, sans aucun poil. (moi à l’heure actuelle, j’ai des poils sous les aisselles, je suis à deux doigts de transitionner!). 

Olivia dit qu’il faut souffrir pour être belle, il a souvent dit ça dans ses stories depuis sa transition. Ça, c’est vraiment un terme pareil que “garçon manqué” qui m’horrifie, qui m’horripile. Il faut souffrir pour être belle, c’est pour moi une phrase qui banalise toutes les injonctions sur le féminin, sur les femmes, qui banalise tout le patriarcat, et qu’une personne transidentifiée, se considérant comme femme, puisse se réapproprier cette phrase et la rendre normale, légitime, moi ça me ça me fait peur. 

Il y a eu d’autres trucs, je ne dirais pas marrantes, mais des choses absurdes. 

Par exemple, il y a Océan. (Je me fais du mal). J’ai regardé toute sa série de vidéos sur sa transition. Il y a plusieurs saisons. Il a fait ça un peu sous un documentaire. J’ai regardé pour voir ce que ça disait. 

Tous les moments avec sa mère ou il ne fait que la reprendre sur les termes qu’elle utilise, et le fait qu’elle le considère ou non comme son fils ou sa fille. 

Il n’y a pas de place pour l’incompréhension du fait que c’est très dur à comprendre, leur notion de transidentité, étant donné que chaque ressenti est différent. Une personne va te dire que son ressenti est comme ça, et l’autre comme ça. Et les gens en face ne savent plus trop quoi dire. Il y a cette sorte d’air hautain qui fait que si tu n’as pas compris et que tu dis un mot de travers, tu es considérée comme la pire des personnes.

Bref, dans son reportage, il était avec son groupe de copains, toutes des personnes transidentifiées (je crois que c’était tous des hommes transidentifiés) et ils se faisaient des sessions de testo, de piqûres de testo groupés. 

A un moment donné, il y en a un qui a dit : “Tu veux ma fin?” et vraiment j’ai regardé mon écran, je me suis “ Attends, il y a vraiment dit?”. Le “ Tu veux ma fin de testo?”, c’est le nouveau “Tu veux ma fin de clope, ou la fin du joint?”. 

On est quand même en train de parler d’une modification corporelle qui est, je crois, irrémédiable à partir de l’instant où on commence. Je me suis dit que ça devient la normalité, les prises de testo, en soirée, ça devient une normalité. C’est super dangereux. 

Ça me fait penser aussi à une vidéo d’une personne transidentifiée qui a fait une vidéo avec son petit frère, qui devait avoir 10 ou 11 ans. C’est Laura Badler sur Youtube. Elle posait des questions à son petit frère en disant “ C’est quoi, pour toi, une personne trans?”. On voyait que son petit frère était perdu, qu’il essayait de ressortir les paroles que son frère transidentifié lui a dit sur ce qu’est être une personne trans). Le petit frère était perdu. Je me suis dis qu’on est en train de niquer tous ses repères (ce que c’est d’être une femme ou un homme).

De façon plus personnelle, j’ai fait plusieurs manifs féministes pour les violences sexistes. J’en ai fait plusieurs et à chaque fois je faisais des pancartes. Aujourd’hui, mes pancartes seraient considérées transphobes, alors qu’à l’époque j’étais super fière de ce que j’avais fait. Il y en avait une, la première, où j’avais écrit “ tu connais le patriarcat ? C’est mortel !”. J’ai fait le haut de “mortel” en forme de vulve et en rouge pour démontrer la violence. 

Tout le monde l’avait adorée d’ailleurs. J’étais trop contente de mon “jeu de mots”, un peu dérision. Même pendant ma période où j’adhérais un peu aux idées des transactivistes), je me disais que ma pancarte était transphobe. C’est pas bien ce que j’ai fait, j’ai pas inclus les personnes trans.


Dernière anecdote, moins marrante. Il y avait une manifestation à Genève. 

Je l’avais vue passer par la Carologie sur les réseaux sociaux parce qu’elle y avait participé ( elle a vraiment plongé dans l’ultra libéralisme et le transactivisme). 

J’avais lu un article sur cette manif où il avait été déconseillé aux femmes “cisgenre” de manifester les seins nus parce que ça pourrait offenser les “femme trans”. C’est à ce moment-là, vraiment, que j’en ai eu marre d’avoir peur de parler. 

Je me dis “ Ça, ça passe, et ce que je pense ne passe pas”. Interdire aux “femmes cis” de manifester les seins nus alors que nos corps sont politiques, que nos seins sont politiques, que j’ai compris pourquoi les Femen faisaient des actions avec les seins nus et les mots écrits sur leur corps… Je me dis “On est en train de faire taire les femmes”. Encore une fois, on utilise leur corps et on leur dit quoi faire de leur corps. C’était vraiment considéré normal dans l’article.

La Carologie a partagé ça, en étant ok avec ça, alors qu’il y a encore quelques années elle manifestait les seins nus dans la rue parce elle-même elle est archi-consciente que nos corps sont politiques, que c’est un moyen de passer des messages. 

Pareil, un podcast d’un mec transidentifié qui disait que son passing devenait de plus en plus OK dans la rue et qu’ il était content de se faire harceler parce qu’il passait pour une meuf.

RDG – C’était pas Olivia qui disait qu’il était heureux d’être harcelé dans la rue?

Ophélie – Non mais ça ne m’étonne pas.

RDG – C’était qui? Je l’ai vu ça.

Ophélie – C’était un podcast d’un mec qui a parlé de sa transition sur plein d’épisodes, j’ai écouté et à un moment donné il parlait de son passing et de la rue. Il disait : “ Je suis contente de me faire harceler”.

RDG – Mon dieu… Contente d’être harcelé…

Ophélie – Je me disais putain, mais ta gueule, franchement… Surtout que s’il n’avait pas fait son passing, il ne se ferait pas harceler, ça on est obligées de le dire.  C’est leur passing qui fait qu’il se font harceler, parce qu’on les prend pour des femmes biologiques. 

RDG – Ils jouissent de notre oppression. Ils jouissent littéralement de leur oppression. C’est des autogynéphiles, ça les excite et ils jouissent de ça. C’est un truc de fou.

Ophélie – Voilà, des petites anecdotes comme ça… À la fois marrantes et pas marrantes. Dangereuses même.

RDG – As-tu quelque chose à ajouter? 

Ophélie – Oui, j’aimerais juste revenir sur l’histoire des passing et des contradictions qui sont au sein du transactivisme et des transactivistes eux-mêmes. On parle de ressenti et on nie totalement les faits concrets et biologiques. Il y a tellement de contradictions à la fois entre ce que eux disent de leur propre parole, c’est-à-dire de vouloir faire la différence entre biologie et genre social, mais de quand même aboutir à des transitions médicales qui transforment leur corps et qui les amènent à avoir des euphories de genre, etc. Enfin voilà, c’est… à chaque fois tout ce qu’ils disent dans leurs vidéos, dans leurs témoignages etc. Et à la fois il y a tellement de contradictions entre, justement, chacun son ressenti sur la transidentité, et ce qu’est être un homme ou une femme. 

Du coup, il n’y a vraiment plus aucun point commun si on met toutes les personnes transidentifiées autour d’une table, et qu’on leur dit : “Ok, parlez-nous de vos ressentis, de ce que vous subissez, de… voilà.” Bah tout sera différent. Donc en fait, quel est le point commun, quel est le tronc commun entre vous tous, si ce n’est juste le fait que vous avez un ressenti personnel. Et ces personnes-là vont nous dire à nous, les femmes, c’est quoi être une femme pour toi? Ils pensent avoir l’argument et la question, vraiment qui vont nous clouer le bec, en disant : “Mais et toi? Qu’est-ce qui fait de toi une femme, en fait?”

C’est simple : le tronc commun, c’est nos corps. Et quelle que soit la manière dont on s’habille, la façon dont on se coiffe, et tout ce qu’on arbore, et même ce qu’on voudra cacher ou pas, en fait, c’est nos corps qui seront ciblés. Et quoi qu’on en fasse, ce sera le cas. Donc ce n’est plus du tout une question, enfin c’est une question à laquelle je peux répondre aujourd’hui si jamais on me la pose, parce que, du coup, une autre de leurs questions c’est : “Mais qu’est-ce que ça vous fait à vous, personnellement, les femmes, quoi, les femmes “cis”, ça vous fait quoi personnellement?” 

Mais ils répondent souvent à notre place en disant : « Ça ne vous fait rien. Ça ne change rien à votre vie, donc, en gros, fermez-la et laissez-nous vivre, et laissez-nous exister. Parce que vous nous tuez.” 

Enfin, voilà. Bref. 

Et, moi j’ai envie de leur répondre : “Mais nous, personnellement, si!  Ça nous fait quelque chose. Parce que ça continue de nous invisibiliser, d’invisibiliser les violences qui nous sont faites.” 

Mais en fait, on pense collectif, justement. Et moi, je pense à toutes mes sœurs du monde entier, en fait, qui subissent la même chose que moi, à plus ou moins grande échelle. J’ai d’ailleurs la chance, dans ma vie, de n’avoir subi que des micro-agressions, et de ne jamais avoir subi plus, alors que je sais que c’est un peu monnaie courante et que j’ai de forts risques de connaître ça dans ma vie.

Et, eux c’est vraiment une… Ils sont étriqués, justement, dans leur ressenti personnel, sans penser à aucun tronc commun qui pourrait les unir. Parce qu’en fait, désolé : ils se disent unis, mais il n’y a rien qui les unit. Encore une fois, demain on les met à la même table, il y en a un qui va dire qu’il se sent femme, que c’est une femme, mais qu’il garde sa bite, son pénis de femme. L’autre qui va dire : “Non, moi je suis né dans le mauvais corps et j’ai besoin de faire une transition médicale.” L’autre qui va dire que la biologie ça n’a rien à voir avec le genre mais qui va quand même prendre de la testo ou des oestrogènes, et qui va… 

Enfin, tous leurs discours sont contradictoires, et il n’y a aucun tronc commun.

Donc je ne peux plus admettre qu’on me dise que je ne suis pas légitime de dire ce que c’est qu’être une femme en le vivant, en le vivant moi-même. 

Et je rebondis aussi sur le fait que les femmes entre guillemets “cisgenre” sont aujourd’hui considérées comme l’ennemie des transactivistes, des personnes trans, et l’ennemie du féminisme, du coup – parce que le féminisme est devenu transactiviste parce que, voilà… – j’entends à longueur de journée “Mais c’est les femmes cis, en fait, c’est vous qui perpétuez, dans tous les cas, les stéréotypes de genre depuis toujours. Donc arrêtez de nous dire de ne pas le faire, parce qu’en fait, c’est à cause de vous qu’on le fait!” Et donc moi, à ça je réponds aujourd’hui : “Mais donc on est en train d’oublier toute l’oppression justement, du système et patriarcal et capitaliste qui nous met une pression de ouf sur les épaules qui nous met des injonctions à base de publicités, à base de marketing, de radio, d’affiches sur les réseaux sociaux, partout! Pour nous dicter, justement, quoi faire de nos corps pour qu’on soit des vraies femmes, et que on soit justement acceptées dans la société!” Donc moi, depuis le début, justement, j’ai appris à déconstruire le fait que, même les femmes qui arborent les stéréotypes féminins ne sont pas fautives de ça, parce qu’elles en sont victimes. Moi j’ai appris ça depuis le début, j’en suis convaincue. Donc aujourd’hui j’ai arrêté de mettre la faute sur les femmes, et aujourd’hui on nous… on inverse, en fait, l’ennemie. Moi, dans mon féminisme, je me suis rendu compte que je m’étais trompée d’ennemi, quand j’ai réussi à déconstruire mon sexisme intériorisé. Je me suis dit ok, je me suis trompée d’ennemi. Je me suis rendu compte, mais en fait là, aujourd’hui, c’est nous les ennemies, c’est les femmes. Et ils nous ont choisies, en fait. Enfin, voilà : ils ont choisi leur ennemie et la boucle est sans fin, en fait. On revient à nous invisibiliser, à nous dire de nous taire, à nous dire qu’on n’est pas légitimes. Et voilà, en fait : on oublie, on en vient même à dire que le féminisme radical, il rapporte les femmes au corps, et que justement c’est ce que les féministes depuis la première vague essayent justement de ne plus faire. Et en fait, sous couvert de féminisme, voilà… suffragettes, Simone de Beauvoir et compagnie qui ont lutté, depuis le début, pour nos droits.

Mais en fait, ces femmes-là, elles n’ont jamais nié la réalité biologique, justement. Elles ont ouvert leurs bouches en disant : nous ne sommes pas que des corps pour procréer. Nous sommes beaucoup plus que ça. Nous avons les mêmes droits que les hommes. Mais à aucun moment elles n’ont nié la réalité biologique et la violence qui était faite envers nous. 

Donc en fait, là, on est en train de changer d’ailleurs le discours… on est en train de changer de discours, de changer les livres, de changer les manuels, voilà. 

Enfin… et ça me fait penser aussi, du coup, peut-être, je ne sais pas si c’est dans les anecdotes sur le transactivisme, mais j’avais vu que agressively trans  s’était offusqué du fait qu’on veuille remettre les clitoris dans les manuels scolaires, parce que ça oppresserait les femmes trans. Alors que c’est un combat depuis des années justement, d’arrêter d’invisibiliser le corps des femmes, et de enfin mettre ce clitoris là où il faut, c’est à dire le montrer, parce qu’il existe, et que depuis des années, on ne le montre pas. On dit qu’il n’existe pas et aujourd’hui, certains hommes transidentifiés disent : “Non, en fait il ne faut pas le mettre, parce ça nous oppresse, nous.” Donc même dans les manuels scolaires, on va on va finir par avoir des personnes à vulve, et personnes à pénis dans les manuels scolaires, en oubliant, en omettant totalement le terme de femme et d’hommes. 

Et tout le monde pourra se proclamer qui il veut,  donc…

RDG – Sauf si on se bat! Sauf si on se bat et si on gagne! On va quand même se battre avec la dernière énergie pour que ça n’arrive pas, vraiment!

Ophélie – Non mais voilà on se bat pour que le clitoris soit dans les manuels scolaires, et des hommes disent : “Non, il ne faut pas le mettre, parce que ça nous oppresse.” La boucle est bouclée. Il y a vraiment…

Donc voilà. Je voulais juste finir par ce que je viens de dire sur nous, les féministes, on s’est trompées d’ennemi pendant longtemps, et on a arrêté de mettre la faute sur les femmes, et aujourd’hui, c’est nous l’ennemi. Mais il est choisi, l’ennemi quoi. Ils ne se trompent pas d’ennemie. Ils l’ont choisie.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe.

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