Rebelles du genre – Épisode 54 – Ana Minski

Ana – Je m’appelle Ana Minski, je vis en Occitanie et je participe donc à des recherches archéologiques, je suis archéologue en fait, spécialiste des outils de Néandertal. Je suis également autrice sur le site “Les ruminants”, j’écris de la poésie, de la fiction mais aussi des articles d’écologie sur la techno-critique, sur le féminisme également, et je suis écoféministe radicale et j’ai publié également cette année un essai : “Sagesses incivilisées : Sous les pavés, la sauvageresse” aux éditions M Éditeur, dans lequel je retrace depuis le néolithique les techniques pour identifier les techniques de domination et l’avènement du patriarcat.

Je crois que j’ai toujours été critique du genre. Tout d’abord, de manière plutôt intuitive parce que quand j’étais gamine, je jouais beaucoup plus aux jeux de garçons qu’aux jeux de fille et j’étais pas vraiment adaptée pour le rôle de celui de fille en fait donc très tôt je me suis révoltée contre l’assignation au genre féminin et j’ai lu des féministes, des théoriciennes féministes, j’ai pu comprendre les raisons de cette révolte, distinguer sexe et genre et c’est comme ça que je suis devenue petit à petit écoféministe radicale abolitionniste du genre, de la porno-prostitution et de la domestication en général via toutes les recherches que j’ai pu menées aussi en archéologie notamment. Après, en ce qui concerne mon intérêt pour l’idéologie du genre, ça a commencé en 2016, j’étais sur un chantier de fouilles archéologiques et il y avait une jeune femme qui était là et qui désirait transitionner. Elle s’était renommée avec un prénom d’homme, un prénom masculin, et s’habillait comme un homme. Mais elle ne souhaitait pas s’installer dans une chambre où il y avait des hommes, elle tenait à rester dans une chambre avec des femmes. J’ai passé beaucoup de temps à discuter avec elle, c’est comme ça que j’ai commencé à m’intéresser au transgenrisme donc j’ai commencé à m’informer ensuite quand je suis rentrée après la fouille, à échanger avec d’autres personnes et très vite j’ai senti que l’identité de genre était une idéologie qui posait de sérieux problèmes, aussi bien pour le droit des femmes que pour celui des enfants. J’ai alors participé à des traductions de féministes anglo-saxones critiques de l’identité de genre, notamment pour le collectif Tradfem, ce qui m’a permis de comprendre ce qui se passait déjà aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et ce qui pendait un peu au nez quoi.

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ?

Ana – Alors, cette idéologie est une menace pour les femmes. Déjà, parce qu’elle remplace le sexe par le genre, alors que le droit des femmes est fondé sur le sexe. 

Le genre, c’est ce qui nous opprime, donc ça paraît un peu problématique de remplacer le sexe par le genre. Le genre, ce sont les différences construites socialement et les stéréotypes associés à chaque sexe biologique, et c’est à partir des attributs visibles à la naissance qu’un nouveau-né sera assigné à un genre, masculin ou féminin, et socialisé en vue de correspondre à ce genre. Dans une société à domination masculine, le genre est donc ce qui permet aux hommes de s’approprier le corps des femmes, que ce soit pour la reproduction, pour la sexualité, pour la force de travail, et le masculin donc est le genre qui domine, le féminin celui qui se soumet. C’est donc un dualisme entre les sexes et comme je l’ai étudié, notamment en questionnant le Néolithique et l’apparition de nouvelles techniques qui apparaissent, c’est à ce moment-là que se met en place dès les premières domestications un dualisme entre hommes et femmes et notamment qu’apparaît une valorisation de la masculinité et de la virilité. Ce dualisme va se consolider avec l’apparition des cités-États. Donc s’identifier à un genre, c’est valider, accepter ce dualisme patriarcal qui est extrêmement violent pour les enfants et plus particulièrement pour les filles et les femmes. Le problème, ce n’est pas le sexe biologique mais bien la construction sociale des individus via le genre. Dans une société patriarcale, tout ce qui est efféminé est infériorisé et méprisé. C’est pour ça qu’en tant que féministe radicale, je suis pour l’abolition du genre et contre l’idéologie du genre.

Quand on voit des anarchistes défendre cette idéologie, dans les milieux militants c’est assez frappant, c’est d’une incohérence affligeante. Le genre, c’est ce qui a permis l’avènement des États, la réification des individus et l’avènement du capitalisme. Donc moi, je me demande vraiment comment on en est arrivé à vouloir s’identifier à ce qui est à l’origine même des oppressions ?

Après, au niveau des enfants, c’est également une menace (enfin c’est une menace pour beaucoup de choses). C’est une idéologie vraiment très problématique. Dans le cas précis, en 2016, c’était une femme qui voulait transitionner et il s’avère que ces dernières années on a constaté une explosion du nombre de jeunes filles qui désirent transitionner. Je sais plus si… Je crois que vous aviez reçu une mère du collectif Ypomoni, qui souhaite alerter contre la prise abusive des bloqueurs de puberté des interventions chirurgicales sur les mineurs, etc. Et donc l’explosion de la transition des filles, des jeunes filles, est liée à plusieurs facteurs : une hypersexualisation de la société, une violence masculine qui s’exprime librement sur les réseaux sociaux et une puberté plus précoce. A cause des perturbateurs endocriniens, aujourd’hui, de nombreuses jeunes filles ont une puberté qui commence dès l’âge de 10 ans. Ces jeunes filles doivent donc faire face à un corps qui change, au regard des garçons, des pères, des oncles, des frères, qui change également. Et comme nous sommes dans des sociétés hypersexualisées, des enfants, dès l’âge de 8 ans, peuvent voir de la pornographie, ce qui est très problématique, puisque la pornographie est un viol filmé, c’est d’une extrême violence. Et les filles qui sont confrontées à la pornographie imaginent le sexe tel qu’il est visible dans un film porno, ce qui est quand-même d’une extrême violence et ce qui crée bien évidemment une peur d’être une femme, ça semble assez évident. Certaines féministes parlent donc, plutôt que de dysphorie de genre, de dysphorie pubertaire.

En fait, dans les années 70, on parlait de dysphorie de genre, c’était pour des cas très rares et c’était essentiellement des hommes, enfin des garçons, et ça commençait très très tôt. Aujourd’hui, ceux qui veulent transitionner, les enfants qui veulent transitionner, sont essentiellement beaucoup d’adolescents. Et à l’adolescence, nous avons toutes été vulnérables psychologiquement, c’est tout à fait normal, ça fait partie de l’adolescence. Sauf qu’à partir de 2006, il y a une explosion des réseaux sociaux qui participent activement au prosélytisme trans et qui donne la sensation à ces jeunes filles qu’elles peuvent appartenir à un groupe, à un mouvement transgressif. Et c’est vrai qu’il est plus facile de s’identifier au genre masculin que de lutter contre les stéréotypes de genre ou contre la domination masculine. Surtout que dans nos sociétés, actuellement, les codes de genre sont transgressés depuis des décennies. Donc c’est pas vraiment si transgressif que ça de changer de genre en vrai, en vérité. Il suffit de voir les chanteurs des années 80, ils jouent tous avec le genre.

D’ailleurs, je voulais conseiller un documentaire, en quatre parties, de Vaishnavi Sundar : “Dysphorique : Fuir la féminité comme une maison en feu”, qui est disponible sur Youtube et qui décrit très bien comment la féminité est tellement difficile à vivre qu’on préfère la fuir plutôt que d’essayer de lutter contre le patriarcat. Il y a aussi un site que je voulais conseiller, c’est l’Observatoire de la petite sirène, qui veille au discours idéologique sur l’enfant et l’adolescent et sur les impacts des pratiques médicales, l’emprise des réseaux sociaux. 

Parce que ça c’est un grave problème aussi pour la société, la façon dont sont médicalisés ces enfants qui sont en détresse psychologique et plutôt que de leur apporter un soutien psychologique dont ils ont besoin, on leur propose une médicalisation qui est irréversible et à vie. Aujourd’hui, il y a de plus en plus de détransitions, je crois que ça tourne autour de 20%, et ces personnes dénoncent le manque de suivi psychologique. Il y a l’affaire Keira Bell par exemple, qui est assez significative, qui a permis la fermeture de la clinique Tavistock.

C’est dangereux également d’un point de vue démocratique puisque, comme nous le voyons depuis plusieurs années, les femmes qui osent questionner l’identité de genre sont menacées, censurées, des comptes Twitter sont fermés sous prétexte de transphobie. Lorsqu’on rappelle qu’une femme est une femelle humaine adulte, qu’il est impossible de changer de sexe, qu’il est indispensable de maintenir des groupes non-mixtes entre femmes biologiques, on nous menace de mort, on nous dit que nous sommes responsables du suicide des enfants trans par exemple. Pourtant, il n’y a pas plus de suicide chez les enfants trans que chez les autres enfants et la transition ne diminue absolument pas le taux de suicide. C’est un discours culpabilisant qui a pour but de bloquer la réflexion et de censurer toute critique. La réalité, c’est que les agressions contre les trans, les homosexuels, sont le fait des hommes, de masculinistes et que ce sont des actes d’homophobie. Ce ne sont pas les femmes et encore moins les féministes radicales qui agressent et menacent de mort et de viol les homosexuels ou les trans. Donc il y a clairement un problème au niveau démocratique, au niveau de la liberté de parole, où on ne peut pas parler librement de cette question qui pourtant est dangereuse sur plusieurs niveaux.

Là je vais parler par exemple d’un point de vue écologique. Penser qu’on peut changer de sexe, c’est quand même dénier la réalité biologique du corps. Donc ce déni nous renvoie au refus des limites que nous impose la nature. On rejette notre condition de mammifères, qui est faite de chair et de sang. Nous sommes donc encore dans un désir de maîtrise de la nature, de la biologie, c’est un peu pour ça qu’on a des problèmes environnementaux aujourd’hui. C’est une domination masculine, hégémonique et toxique qui détruit l’environnement parce qu’elle veut le contrôle sur l’environnement en utilisant des méthodes qui ont été expérimentées sur les animaux d’élevage en plus, qu’on va transposer à des enfants donc cette  idéologie participe à maintenir la division entre corps et esprit, ce qui renvoie aussi à celle de nature et culture, donc à celle de féminin masculin qui est au fondement de tous les dualismes et qui permet à la domination masculine de se maintenir.

Aujourd’hui, on réifie des morceaux de corps, on a des banques de sperme, des banques d’ovules, des banques d’embryons, donc le transgenrisme, la chirurgie de réassignation, les expérimentations pour créer des utérus artificiels, le transhumanisme, tout cela est lié. D’ailleurs, des liens existent entre le transgenrisme et le transhumanisme : je donne l’exemple de Martin Rothblatt qui a écrit De transgenre à transhumains : Un manifeste sur la liberté de forme, qui est un entrepreneur et un avocat très prospère, fondateur de l’United Therapeutics. Il a été plusieurs fois le PDG le mieux rémunéré de l’industrie bio-pharmaceutique et il a participé activement à la banalisation du transsexualisme. Le transhumanisme souhaite créer une espèce supérieure, se libérer des limites de l’incarnation, il ne veut pas autre chose que la disparition de notre propre espèce et malheureusement tous ces enfants sont utilisés pour alimenter les biobanques, ils sont des cobayes, ils sont stérilisés. Je ne sais pas mais vous avez reçu Sophie Robert, je n’ai pas pu écouter le podcast mais j’imagine qu’elle doit en parler, peut-être, un peu, de cette stérilisation des enfants ?

RDG – Oui. Bien sûr. C’est un épisode remarquable que nous vous invitons à écouter et effectivement, on parle notamment de la castration des enfants.

Ana – Voilà. Moi je pense que quand on lutte contre le capitalisme, contre la réification et la marchandisation du vivant, on ne peut pas défendre l’identité de genre, c’est tout simplement suicidaire.

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces ? Est-ce que tu as déjà été mise en danger dans ton entourage personnel, professionnel ou est-ce que tu es parfaitement libre et en sécurité pour parler ?

Ana – Je parle avec mon identité parce que j’écris de toute façon des articles, depuis un petit moment, sur cette question là aussi, que j’ai participé à des traductions, etc. donc j’assume parfaitement mes positions. Après, oui j’ai reçu des menaces, bien évidemment, j’ai été accusée de Terf, de transphobe à plusieurs reprises.

Je ne suis plus invitée à des événements écoféministes à cause de ça donc là où je vis, c’est un petit bourg de 900 habitants, je voulais constituer un petit collectif féministe et artistique et à cause de cette position, j’ai été écartée donc je suis isolée.

Il m’arrive, lors de discussions amicales, de sentir aussi que je suis un peu… que je suis jugée, je fais un peu la rabat-joie, je suis même voire limite réac. D’ailleurs, j’ai certaines amies dont je n’ai plus de nouvelles bizarrement… Donc les échanges peuvent être assez stressants. Après, je ne me sens pas menacée, pour l’instant en tout cas. Je ne me sens pas menacée mais par contre, clairement, c’est un sujet qui est délicat pour échanger avec avec certaines personnes, même en fouilles cet été il y a eu des moments où c’était un peu tendu et où j’ai un peu hésité à mettre mon grain de sel, bon finalement je l’ai fait (rires) mais ce n’est pas très agréable quand on reste un mois avec des personnes, une collectivité d’une vingtaine de personnes, et qu’on est considéré comme terf, ce n’est pas super sympa.

RDG – Je crois qu’on a toutes vécu ça (rires). Ces accusations qui arrivent : “Tu veux tuer les trans !”

Ana – Oui, c’est ça.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée, concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Ana – On m’avait proposé de participer à un événement écoféministe il y a quelques années et puis après s’être renseigné sur ma personne, on m’a téléphoné pour me dire que c’était un peu problématique parce que ma position par rapport à l’idéologie du genre posait problème. On ne m’a pas retirée du festival mais on m’a demandé de faire profil bas et de ne surtout pas aborder ce sujet et ça, malgré le fait que les organisatrices étaient d’accord avec moi. Mais elles ne se sentaient pas, elles ne pouvaient pas se permettre de gérer un conflit, m’ont-elles dit, avec les transactivistes. D’autres femmes m’ont dit aussi préférer ne pas dire qu’elles étaient Radfems, qu’elles étaient féministes radicales, pour ne pas entrer en conflit avec leurs collègues et risquer de perdre leur poste, notamment dans le milieu artistique. Et là, dernièrement, pour mon livre où j’ai voulu le présenter dans différentes librairies, il y en a certaines qui l’ont refusé après s’être renseigné sur ma personne et parce que j’ai des articles sur mon site qui critiquent la question trans. Voilà, ça c’est les anecdotes sympathiques (rires) qu’on peut avoir quand on est féministe radicale aujourd’hui.

RDG – Concrètement, la position d’être critique ou abolitionniste du genre amène directement à l’appauvrissement et à la précarisation des femmes féministes, c’est vraiment terrible. Pour les hommes, il n’y a pas vraiment cet effet-là mais pour les femmes, c’est vraiment terrifiant. La marginalisation de leur parole et leur précarisation économique et sociale, comme tu l’as dit dans ton village de 900 habitants, quand-même c’est incroyable.

As-tu quelque chose à ajouter ?

Ana – Je voulais d’abord vous remercier pour tout votre travail, de permettre aux femmes et aux féministes radicales de partager leurs analyses, leurs expériences et leurs craintes, de m’avoir accordé aussi ce moment de parole libre parce que je pense qu’aujourd’hui… Enfin je pense… Non, c’est un fait : aujourd’hui, nous sommes silenciées, comme vous l’avez dit tout à l’heure, nous sommes silenciées, nous sommes agressées, nous sommes… Je pense qu’on est un peu toutes en état de choc par rapport à ce qui se passe avec le transactivisme et qu’il faut vraiment qu’on soit le plus solidaires possible, se soutenir les unes les autres et en parler le plus possible pour que les gens soient au courant parce que beaucoup de personnes ne sont pas au courant en fait, ne savent pas du tout en quoi ça consiste exactement ce qui se passe avec les enfants et donc c’est pour ça aussi que je pense que “Rebelles du genre” est un podcast hyper important et que je suis très contente d’y avoir participé.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible.

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe:  womensdeclaration.com

Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail.

Rebelles du genre – Épisode 53 – Ophélie

Ophélie – Bonjour, je m’appelle Ophélie. J’ai 26 ans. Je suis gérante d’un restaurant vegan dans le nord de la France, et je suis ici pour témoigner sur mon rapport au féminisme, comment je suis devenue critique du genre, et l’évolution de mon féminisme et de mes pensées. 

Alors moi, j’ai eu une enfance assez classique, je dirais, avec des stéréotypes, entre guillemets, “normaux”. Voilà. 

J’ai appris qu’être une petite fille, c’était un petit peu un ensemble de stéréotypes, et les garçons autour de moi… voilà : pareil. 

Mais sans non plus être trop dans le sexisme exagéré, on va dire. 

Je n’ai pas non plus, voilà, trop eu d’introduction au féminisme, et ce que c’était le féminisme, et justement, l’abolition du genre et tout ça… Ce ne sont pas des notions que mes parents, ou que mon entourage m’ont apprises. 

Je me souviens justement, que dans mon enfance, je n’avais jamais vraiment trop de problèmes avec mon corps, avec mes poils. Dès l’instant où je suis rentrée dans l’adolescence, et que mes copines, elles ont commencé à se raser, à s’épiler, et à se maquiller, moi je n’avais pas vraiment ce besoin et, justement je ne comprenais pas d’où venait ce besoin.

Et après voilà dans mon adolescence j’avais beaucoup d’idées reçues sur le féminisme, avec avec les Femen, la haine des hommes, des femmes très en colère, avec les cheveux colorés, les poils sous les bras… colorés aussi, et tout ça! Donc une idée assez pessimiste, et très stéréotypée de ce qu’était le féminisme. Avec une forme spécifique, mais sans en comprendre vraiment le fond. 

Et je dirais que c’est… Donc c’est à peu près il y a 6 ans, j’avais 20 ans, que je me suis vraiment, je me suis vraiment intéressée aux notions de féminisme, et de ce que c’était. Et ouais, vraiment à prendre à prendre conscience de ce que c’était vraiment que le féminisme. 

Grâce à quoi? Grâce aux réseaux sociaux surtout, donc notamment Twitter et YouTube.

Twitter : il y avait beaucoup de comptes d’activistes (à l’époque, voilà, c’était du féminisme assez “normal”, entre guillemets) qui m’ont appris  justement les notions de genre et les notions de violence sur les corps des femmes, etc. Donc ça m’a vraiment permis de prendre conscience de tout ça.

Et sur YouTube, j’ai commencé notamment avec Antastésia qui parlait beaucoup de féminisme, et de… “La Carologie”, également.

Donc j’ai appris vraiment beaucoup de choses, et en fait j’ai ouvert les yeux sur, à la fois les stéréotypes de genre qui étaient attribués à chaque sexe, et du coup ce qu’on nous demandait, en tant que femmes : les injonctions, les diktats, etc. 

Sur les hommes également, mais voilà, beaucoup plus sur les femmes, étant donné que c’est un petit peu le sujet.

Et à la fois les violences, les oppressions qui étaient faites sur nos corps, et ce qu’on subissait en tant que femmes dans le collectif.

Après, vraiment, j’ai fait le lien. Ça a été comme une révélation, j’ai vraiment fait le lien : je comprends que nos corps sont violentés, qu’ils sont sexualisés, nos corps de femmes… et que les stéréotypes qu’on nous imposent viennent rajouter une couche, justement, sur tout ça. Sur toutes les injonctions et la violence, et que voilà, l’idée c’était de nous posséder…

Mais voilà : j’ai fait le lien entre tout ça, et moi, mon but c’était justement de prendre conscience des stéréotypes de genre, de les déconstruire, et de pouvoir, vraiment, en avoir conscience, et d’abolir, en fait, toutes ces injonctions qui étaient faites sur nos corps et sur sur nos vies.

J’ai fait le lien aussi, du coup, entre patriarcat et capitalisme, justement, avec le fait que les stéréotypes nous imposaient des choses sur nos corps qui permettaient d’enrichir la société, avec notamment l’injonction au maquillage, aux vêtements, à la beauté, à l’épilation, etc. 

Donc vraiment, c’était comme un puzzle qui… chaque pièce s’imbriquait, petit à petit. Où je comprenais le lien entre tout, et vraiment, où j’ai ouvert les yeux, et où j’ai vraiment compris, en fait, c’est à partir de ce moment-là où j’ai compris ce que c’était qu’être une femme. 

Et où je me suis sentie vraiment femme, pour la première fois de ma vie, c’est en comprenant le lien qui m’unissait à toutes les autres femmes de ce monde, que ce soient des femmes de mon pays, ou d’autres pays.

Et qu’on avait des oppressions communes, et d’autres qui s’ajoutaient, aussi, en fonction de la culture qu’on avait, le pays dans lequel on est née, et également, voilà, tout le background social et éducatif.

Ensuite le féminisme est devenu beaucoup plus mainstream. Donc je dirais que c’est ça, il y a environ quoi? Trois ans. 

Donc à peu près 3 ans après mon entrée, vraiment, dans le féminisme. 

C’est devenu beaucoup plus mainstream avec, notamment, des comptes Instagram qui se sont vraiment développés : des comptes sexos, libération de la sexualité, libération des tabous, on a commencé à parler des règles, on a commencé à parler de “bodypositive”, la charge mentale sur les femmes… 

Beaucoup de comptes ont “poppé”, comme ça. 

Moi, j’avais déjà un pied dans le féminisme. 

Je n’ai pas découvert ce combat via Instagram et le développement de ces comptes-là, mais j’étais contente de voir que ça se démocratisait et, pour moi, c’était que du positif, parce que ça la parole s’étendait. Instagram est un réseau social qui est utilisé par, aujourd’hui, toutes les générations, dont les plus jeunes. Pour moi, ça part de la jeunesse pour pouvoir déconstruire le plus tôt possible toutes les injonctions et reconnaître les violences qui nous sont faites. 

Je n’avais pas encore eu vent des différents mouvements féministes. Je commençais à entendre parler du fait qu’il y avait plusieurs féminismes mais je ne comprenais pas cette idée là. Pour moi, le féminisme, c’était abolir le patriarcat, donc abolir les stéréotypes de genre, et arrêter les violences faites sur nos corps. 

Donc je ne comprenais pas trop cette notion. 

Et ensuite, j’ai voulu aller un petit peu plus profondément dans ces notions féministes qui étaient un peu trop en surface : c’est-à-dire “mon corps, mon choix”, où chaque femme fait ce qu’elle veut sans remettre en question, vraiement, pourquoi on faisait ces choix là, par exemple, de l’épilation. J’avais besoin d’aller plus dans le fond et de me dire : “Oui, mais pourquoi fait-on ces choses là?  Et si on se posait la question, est-ce qu’on le ferait vraiment?” 

J’ai essayé de creuser un peu plus et c’est là que j’ai découvert que les notions d’intersectionnalité, avec la convergence des luttes, la convergence entre sexisme et classe sociale, sexisme et “race”, la grossophobie… 

J’ai compris que le sexisme, à lui seul, englobait beaucoup de hiérarchies différentes, et la notion de privilège également est arrivée. 

Je me suis rendue compte de la notion de privilège, pas seulement de masculine sur le privilège féminin, mais également la notion de privilège à l’intérieur du féminisme. 

Ça m’a beaucoup parlé, liens entre écologie et féminisme, le racisme, également le validisme, l’homophobie, la lesbophobie, étant moi-même concernée étant donné que je suis une personne bi.

Ça a été une deuxième “révolution” pour moi. J’ai encore plus ouvert les yeux sur les luttes et les personnes oppressées par le système oppressant.

C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte encore plus du tronc commun qui unissait les femmes du monde. Le tronc commun, c’est nos corps, c’est le corps des femmes. Les violences qu’on subit sont sur nos corps. Mais il y a des oppressions supplémentaires qui s’ajoutent en fonction de notre classe sociale, de notre “race”, avec ce tronc commun : “Le sexisme, c’est nos corps qui sont utilisés, qui sont violentés, qui sont objectifiés, sexualisés, etc.”

Je suis consciente de ça depuis le début. Mon but, c’est d’abolir le genre depuis le début. Je dirais que je suis critique du genre depuis les prémices de mon féminisme. 

C’est un peu parti en cacahuètes après, quand, dans l’intersectionnalité, j’ai entendu parler de transactivisme et de convergence des luttes entre sexisme et femme cis/femmes trans, et la différence entre le cisgenre, le transgenre. 

Forcément, je m’y intéresse et j’écoute les concerné.es, parce qu’on nous dit d’écouter les concerné.es. 

J’ai vraiment intégré les discours qui stipulaient qu’être une femme cis, c’était être beaucoup plus privilégiée qu’une femme trans, parce que convergence des luttes,  intersectionnalité, une femme trans vit à la fois la transphobie et le sexisme. J’étais là : “Oui oui… Ça fait sens… Intersectionnalité, tout ça…”. 

En fait, leur discours commençait à invisibiliser totalement la violence qui était faite sur nos corps. 

Je me suis imprégnée de leur discours et je me suis un petit peu détachée du concret. Alors que pour moi, c’était la base depuis le début : la violence qui est faite sur nos corps. Et la notion de genre a commencé à prendre le pas sur la notion de sexe, de biologie. 

Donc moi-même, en tant que femme “cis” (aujourd’hui, je ne le dis plus. Je suis une femme. Point.), je me sentais privilégiée par rapport aux femmes trans, sans même poser les faits : c’est-à-dire que moi, mon corps, je l’ai depuis la naissance et les oppressions que je subis, je ne les ai pas choisies. Et dans tous les cas, je suis une femme. Je ne l’ai pas choisi. Quoi qu’il en soit, le réel rattrapera toujours l’abstrait. Mon corps sera ciblé, parce que j’ai un corps de femme. 

Et après, il y a eu tout le discours transactiviste qui a commencé à pointer du doigt les féministes radicales nommées “Terfs” : Dora Moutot, Marguerite Stern et Antastesia. 

En fait, ça a commencé avec Antastésia, parce que je la suivais depuis le début, j’étais vraiment très intéressée par ce qu’elle disait. Je trouvais toujours ça très concret et ça me parlait. Elle avait fait une vidéo où, justement, elle réfutait les accusations qui lui étaient faites sur le fait qu’elle était transphobe parce qu’elle avait osé dire qu’être une femme, c’était lié à la biologie et à pas grand chose d’autre, que les stéréotypes de genre ne définissaient pas ce que c’était qu’être une femme. 

Et je me suis renseignée des deux côtés: j’étais d’accord avec ce qu’elle disait dans ses vidéos et, sur Twitter, je voyais les gens qui disaient “Antastésia : transphobe, terf…”.

C’était assez virulent. C’était jamais vraiment constructif. 

Je voyais les gens dire : “ Il faut cancel Antastésia parce que c’est une terf”. 

Les gens répondaient : “Ah bon? Elle a dit quoi?”. 

La personne en face répondait : “ Je ne sais pas ce qu’elle a dit, mais j’ai entendu que c’était une terf, alors il faut la cancel.” 

Super. 

Vraiment, l’argumentaire, on repassera…

De moi-même, j’ai fait mes recherches et j’essayais toujours d’être dans la nuance et je comprenais pas pourquoi elle était si décriée, si insultée… 

Donc après Antastésia, il y a eu d’autres féministes radicales qui ont osé prendre la parole, notamment Marguerite Stern, Dora Moutot. Et en fait les idéologies et les discours transactivistes prenaient tellement le pas sur les réseaux sociaux (et peut-être sur les personnes que je suivais à l’époque parce que j’étais persuadée que c’était le discours à avoir et que c’était “le bon féminisme” à avoir) que je n’ai pas réellement cherché à aller voir ce que disait Dora et Marguerite dans le fond, parce qu’elles étaient tellement insultées et vraiment considérées comme des mauvaises personnes, des mauvaises féministes que dès l’instant où on osait même dire : “ Peut-être que je vais aller me renseigner sur ce qu’elles disent”, ou même le faire soi-même… Moi, je ne me sentais pas d’aller voir leur contenu parce que je me disais que ce n’était pas la bonne chose à faire et que j’allais être une mauvaise féministe.

Donc j’ai fait l’erreur de “cancel”, dans le sens où je ne les ai pas suivies, je ne voulais pas les suivre. 

C’est vraiment là que s’est installé le discours transactiviste qui prend le pas sur tout. Tout le monde commence un peu à partager en story les trucs transactivistes, LGBT, queer et compagnie dans leurs stories, sans même trop comprendre ce que ça voulait dire. Mais ça faisait bien de partager ces idées-là, parce que c’était les idées mainstream. 

Le discours transactiviste a pris un peu le monopole du féminisme mainstream qui, de base, expliquait juste les bases du féminisme. Et on a bien vu ce que ça a donné après, avec l’invisibilisation du mot “femme”, pour le remplacer avec les termes de “personne menstruée”, “personne à utérus”, etc.

Mais en fait, je me rendais compte que les discours transactivistes n’allaient pas avec mon idée de base du féminisme qui était d’abolir le genre et, surtout, de dénoncer les violences qui étaient faites contre nos corps. Donc j’ai commencé à nuancer mes pensées en allant me renseigner de l’autre côté, et en me rendant compte que j’étais plus d’accord avec les personnes qui étaient cancel de la place publique. 

À me dire : “ Ouh là là… Soit j’ai un problème… soit j’ai un problème!”

Je me disais que le problème, c’était moi. 

Je me suis dit : “ Il faut absolument que je me remette les idées en place, que je me renseigne et que j’écoute les concernés, parce que ce qu’ils disent c’est vrai et c’est moi qui ait un problème.”.

J’ai fait ce qu’ils ont dit, j’ai écouté les concernées. Il s’avère que ça a juste confirmé encore plus mon idée de base du féminisme et que je me suis, à ce moment là, beaucoup plus rapproché du féminisme radical, et beaucoup (beaucoup, beaucoup) plus éloignée de toutes les idées queer, transactivistes, libérales, et cela grâce au fait que j’ai écouté les personnes trans. 

Je ne veux pas compter le nombre d’heures que j’ai passées à regarder des vidéos (Youtube c’est génial, c’est une mine d’or, on peut y voir de tout). 

Et j’ai écouté les personnes trans nous parler de leur transition, de leur histoire, de comment elles ont fini par transitionner, pourquoi elles ont transitionné, qu’est-ce que c’est pour eux être une femme, être un homme…

J’ai passé des heures à écouter des dizaines, voire peut-être même des centaines de personnes (peut-être que j’abuse, mais en tout cas des grosses dizaines de personnes), pour me dire : “ C’est moi qui ai un problème. Si je les écoute, ça va me remettre dans le bon chemin.” 

Et en fait, au fur et à mesure des témoignages, je me suis rendu compte que le seul tronc commun que toutes ces personnes transidentifiées avaient, c’était que, pendant leur enfance, elles ne se sentaient pas en adéquation avec le genre qu’on leur a soi-disant “assigné à la naissance” (le genre avec lequel on les a tout simplement éduquées, à cause de leur sexe). 

Et que ça leur a créé une forte dysphorie, un fort mal-être (ce que je peux entièrement comprendre parce que les stéréotypes de genre tuent), et que leur transition a commencé par là. 

C’est le seul tronc commun parce qu’à part ça, il n’y a aucun point commun entre toutes ces personnes, étant donné qu’on se base sur un ressenti ultra personnel, qui passe au-dessus des faits réels, des faits matériels et des faits biologiques. 

Donc un ressenti personnel qui prime sur tout, et qui est surtout différent entre toutes les personnes.

Donc j’ai entendu des personnes transidentifiées parler d’être nées dans le mauvais corps. 

D’autres qui disaient que la biologie et le genre n’avaient absolument rien à voir et qu’il ne fallait surtout pas dire qu’on était né dans le mauvais corps. 

D’autres qui faisaient une transition médicale avec prise d’hormones, “réassignation sexuelle”, vaginoplastie et compagnie. 

D’autres qui refusaient ça parce qu’elles se sentaient bien, dans leur biologie à elles. 

Bon au final, à chaque fois, ça finissait toujours par une transition médicale. 

Ça, c’est un autre truc en commun. 

Au fur et à mesure d’écouter les personnes, ça finissait toujours par une transition médicale. 

Donc on revient au point de vouloir se retrouver “biologiquement” dans le genre opposé. 

Je me disais : “ Il y a trop de contradictions. Je ne comprends pas.”. Mais je me suis évertuée, je me suis dit : “C’est moi qui ne suis pas assez ouverte.”

Pendant tout ce temps-là, ce n’est pas que je mettais de côté la réalité des faits et de la violence, et des oppressions subies sur nos corps de femmes. Mais je me disais que ce n’était pas ce qui primait, que ce n’était pas ce qui me définissait en tant que femme. 

Moi-même, à ce moment là, je me suis perdue dans ma propre définition de femme. 

Dans tous les cas, j’ai fini par m’intéresser à ce que Marguerite Stein, Dora Moutot et les féministes radicales, en général, disaient. Et leur discours, je me suis retrouvée dedans. 

Ça a pris beaucoup de temps, jusqu’à ce que je lâche prise sur le fait que je fasse partie du “mauvais camp”, parce qu’à côté je voyais encore, sur Instagram et les réseaux sociaux, le féminisme mainstream ultralibéral, pro “TDS”, avec la prostitution, les “travailleurs du sexe qui choisissent”, et les paillettes… 

J’avais toutes ces contradictions, et je me suis beaucoup plus retrouvée dans le féminisme radical qui ne dit pas plus que les faits, c’est-à-dire : la violence sur le corps des femmes, les stéréotypes qui les appuient, mais en aucun cas, être une femme n’est de l’ordre du ressenti et d’arborer des stéréotypes qui feraient qu’on est des femmes.

On en arrive à aujourd’hui, où je n’ai plus peur de parler et j’ose prendre la parole pour justement affirmer mes idées, parce que ça a mis du temps avant que j’affirme mes idées et aujourd’hui c’est le cas.

Donc aujourd’hui je suis juste retournée aux prémices de mon féministe d’il y a 6 ou 7 ans, à savoir être critique du genre, à vouloir abolir le genre et supprimer les violences faites sur le corps des femmes à cause de notre biologie. 

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie? 

Ophélie – Cette idéologie, c’est une menace, selon moi, pour les femmes, avant tout, parce qu’on invisible totalement le fond du problème et pourquoi le féminisme existe, pourquoi le sexisme existe. 

Le tronc commun au sexisme, c’est des corps de femmes qui sont utilisés, qui sont violés, qui sont excisés… 

On nous invisibilise et la notion de genre prend le pas sur la notion biologique, alors que la violence, elle, est matérielle. 

Les stéréotypes de genre sont là pour appuyer cette violence matérielle, mais la violence est factuelle, elle est sur nos corps. 

On parle de ressenti aujourd’hui dans le transactivisme mais à aucun moment on ne rappelle que c’est le vagin qui est violé, ce sont nos corps qui sont objectifiés, qui sont infantilisés, les deux en même temps. Qui sont utilisés pour le marketing, ce sont nos vulves qui sont mutilées. Ce sont les femmes en Inde, ou dans d’autres pays du monde, qui ne naissent même pas parce qu’elles sont de sexe féminin et, avant même leur naissance, on interrompt la grossesse parce qu’elles vont être des femmes. 

On oublie aussi tout ce qui est plaisir sexuel, relation hétéro (la base dont on parle depuis le début). Le plaisir sexuel des femmes est oublié au profit de celui des hommes : c’est bien parce que c’est celui des femmes, du fait des corps que l’on a. 

Les personnes menstruées (comme ils disent), c’est nous qui subissons les violences gynécologiques, par exemple, les viols et autres violences gynécologiques. 

On ne parle pas de l’ordre du ressenti. On parle de faits, de faits matériels. 

Tout ce qui est contraception, qui est attribuée à la femme, parce que ce sont nos corps qui subissent ça. Ce sont nos corps et notre charge mentale, en même temps. L’endométriose, dont on n’a pas parlé depuis des années, aujourd’hui, on se réveille un peu. Mais pourquoi? Parce que c’est quelque chose qui concerne le corps des femmes. Et tout ça on l’oublie. 

Aujourd’hui, c’est vraiment la notion d’abstrait qui ne prend même pas le pas sur le concret, mais ça écrase le concret. Et l’abstrait devient une vérité universelle et le concret devient flou et devient remettable en question, alors que l’abstrait, hors de question de la remettre en question. 

Sinon, on est transphobe, “Au bûcher!” et compagnie… Ça me fait penser du coup au film de Arthus-Bertrand qu’il a réalisé (note : le film est sorti en 2019.) en 2017. Le film s’appelle “Woman”. Il a pris le témoignage de femmes de plus de 50 pays du monde, toutes avec des cultures différentes, des éducations différentes, des richesses, des couleurs de peau… Juste, le tronc commun est qu’elles sont (et nous sommes) toutes des femmes. Elle parlaient de leurs oppressions, de leur vie et des violences qu’elles subissaient, au niveau des mariages forcé, les agressions sexuelles, les viols, l’excision, le vitriolage (qui consiste à jeter de l’acide sur le visage des femmes pour se venger de choses qu’elles auraient faites), et après la maternité, la sexualité, les règles et tout…

Et en fait ce film m’a bouleversé. Quand je l’ai vu à l’époque, (bon je sais qu’aujourd’hui, Arthus Bertrand, il y en a beaucoup qui auraient à redire sur lui) le film est magnifique. Il m’a fait me sentir encore plus connectée aux femmes du monde de par le point commun qu’on a toutes, en dehors de tout l’aspect social, sociétal, culturel, le tronc commun qu’on a et qui nous revient en pleine figure dans tous les cas parce qu’on a pas le choix de l’avoir (et la société nous fait bien rappeler que notre corps leur appartient). 

Je ne peux pas m’empêcher de me dire, qu’aujourd’hui, c’est un film qui serait considéré transphobe parce qu’il parle des oppressions vraiment matérielles et que ces oppressions sont oubliées, invisibilisées. À aucun moment dans le film on ne parle de ressenti. Enfin, si. On a le témoignage des femmes avec leurs émotions, mais on parle vraiment des faits concrets qui, aujourd’hui, ne sont plus au premier plan des combats féministes, visiblement. 

Rebelles du genre – Ben fait c’est aussi simple que le fait de ne pas mettre au premier plan les témoignages des femmes trans! Donc voilà, tout simplement. Rien que pour cette raison, c’est un film qui doit aller au bûcher. Aujourd’hui, on a tout un tas, par exemple, de jeux féministes… je ne sais pas, là moi j’ai tout un tas de jeux féministes… enfin, prétendument féministes. En fait, pour qu’ils soient diffusés aujourd’hui, ils collent dedans des “femme trans” : des hommes. C’est-à-dire que là, j’en ai un qui s’appelle “L’oracle féministe”, bon ben il y a un ou deux mecs glissés dedans, voilà. Et puis, évidemment, pour faire bonne mesure, il y a aussi une ou deux prostituées. 

Et c’est partout pareil : dans tous les livres que tu lis, chaque fois que la femme qui écrit quelque chose elle ne veut pas être cancel, eh bien elle est contrainte de faire ça. Par exemple, je lis un livre de Rupi Kaur qui est une poétesse canadienne d’origine indienne. C’est magnifique, ça me tire des larmes quand je lis ce qu’elle écrit. Et paf, page 162, crac, il y a une phrase : “Les femmes trans sont des femmes.” Point. Ensuite, elle repart sur son… sur tout. 

Et en fait, moi, je le comprends comme une sorte de prise en otage de cette poétesse qui sait que, si elle ne veut pas avoir d’ennuis, elle est obligée de verser sa soulte. Voilà. Donc elle a fait une page qui dit : “ Les femmes trans sont des femmes.” 

Point. 

Quand je l’ai lu, j’avais envie de pleurer, je me suis dit : “ Encore une qui a été obligée de le dire.”

C’est comme quand tu es gamin, et tu en as un autre qui t’empêche de passer, il te dit “péage” et tu dois dire un mot de passe.

Et en fait aujourd’hui, le mot de passe pour être visible dans les médias c’est “Les femmes trans sont des femmes”. 

Voilà, c’est le mot de passe.

Ophélie – Visible dans les médias et visible de la bonne façon. Parce qu’aujourd’hui, des Stern, Moutot, elles sont visibles mais elles sont cancel.

RDG – Mais elles ne sont pas visibles. Parce que si tu regardes, ce sont des femmes de gauche et elles ne sont visibles dans aucun média de gauche. Aucun média de gauche. 

Il faut être clair : les médias qui, aujourd’hui, acceptent notre parole ne sont pas les médias de gauche. 

Donc en fait il y a une sorte d’OPA sur la gauche par des gens qui sont en fait des ultra libéraux et qui font taire les femmes. Voilà.  

Donc on ne peut pas dire que Dora ou Marguerite aient réellement la possibilité de s’exprimer quand leur seul choix c’est de parler… soit tu vas parler à  Valeurs Actuelles, soit tu vas parler à… je n’en sais rien, moi…

Bon, après, moi, tous les médias indépendamment de Valeurs Actuelles (il ne faut pas exagérer non plus) ont absolument le droit d’exister, ce n’est pas la question.

Mais si tu veux t’adresser à un public large, il n’y a aucune raison que les médias de gauche interdisent la prise de parole. 

Je veux aussi parler de la tribune qu’avait écrite Pauline Arrighi, il y a deux ans, qui disait : “Suffit-il de s’autoproclamer femme pour en être une?”

Et elle a été publiée dans Le Huffington Post deux heures. 

Et au bout de deux heures, Le Huff a retiré la tribune en s’excusant, et en disant que c’était contre leurs standards, que la transphobie ne faisait pas partie de leurs valeurs… C’était juste, pourtant, une question qui méritait d’être posée : est-ce qu’on est vraiment une femme quand on déclare qu’on est une femme? 

Et finalement il y a Marianne qui a quand même accepté de diffuser cette info.
Et je dirais que Marianne c’est à peu près le seul média aujourd’hui dans lequel les femmes critiques du genre peuvent encore s’exprimer. 

Ophélie – Et puis surtout que les féministes radicales soient associées à l’extrême droite systématiquement! Transphobie et extrême droite du coup, enfin systématiquement, donc je sais pas il y a pas de juste milieu, il y a pas de nuance, il y a pas de… c’est soit blanc soit noir et vraiment c’est… 

RDG – Alors qu’on est dans de l’ultra libéralisme en fait! Donc la gauche aujourd’hui, la valeur centrale de la gauche, c’est l’ultra libéralisme : la liberté du renard libre dans le poulailler libre. Autrement dit : on veut que les hommes puissent accéder librement aux toilettes, aux vestiaires et aux prisons des femmes! 

Mais qu’est-ce que c’est ça? C’est quelle liberté, celle qui permet d’opprimer les opprimées? 

Ophélie – Non mais en plus, ça fait le lien avec ce que je ce que je voulais dire juste après : j’ai parlé justement, de toutes les violences qui étaient faites sur nos corps, mais il faut pas oublier que c’est leur corps à eux qui nous violentent! Voilà! on parle de ressenti, et tout ça… mais c’est un corps violenté par un autre! 

C’est leurs pénis qui nous violent, c’est leurs mains, c’est “leur puissance masculine physique”, et leur supériorité physique qui prend le pas sur nous,  qui nous violente, qui prend le pouvoir. 

C’est, encore une fois, c’est leur pénis qui nous viole! 

Donc ça c’est oublié, ça c’est oublié…

C’est pas un ressenti homme envers un ressenti femme. 

Et ça je sais pas, en fait, je n’arrive toujours pas à comprendre comment, aujourd’hui, ça peut être la pensée universelle, qui floute totalement toutes les réalités matérielles, toutes les réalités concrètes, et que tout le monde soit ok avec ça, ou du moins pas tout le monde, mais que ce soit vraiment la pensée mainstream… 

Je n’arrive toujours pas à comprendre!

Ensuite, c’est un danger pour les enfants, évidemment. 

Je pense même que c’est un danger autant pour les enfants que pour les femmes en réalité. 

Parce que, selon moi, la déconstruction des stéréotypes de genre, elle doit se faire dès l’enfance, ça voilà depuis le début de mon féminisme j’en suis consciente, qu’on a beaucoup de facilités à intégrer des choses et beaucoup plus de difficultés à les déconstruire après en étant adulte, en ayant vraiment intégré des idées qui sont considérées normales, normées. 

Donc selon moi, ça passe par l’éducation, tant familiale, que scolaire, et aujourd’hui à l’école tant dans la cour d’école, on va intégrer l’idée que les femmes, enfin les filles, les petites filles, c’est pas celles qui ont des corps de petites filles et les petits garçons c’est pas ceux qui ont des corps de petits garçons…

Et à la fois on va encore plus insister sur les stéréotypes de genre qui aujourd’hui divisent les filles et les garçons et qui justement aboutissent à encore plus de violences et encore plus de sexisme des hommes sur les femmes! 

Et en fait, pour moi voilà : le but du féminisme et de l’abolition du patriarcat, c’est quand même l’abolition du genre, et aujourd’hui on est en train de le développer encore plus! 

Cette notion de genre est justement la différence entre une fille, sociétalement et un garçon, sociétalement. 

Parce qu’on entend aujourd’hui que la dysphorie du genre bah ça existe, oui ça existe, je pense que ça a toujours existé. Moi en tant que petite fille des fois je me disais que c’était peut-être pas normal que j’aime pas porter des robes parce que j’étais censée porter des robes et que du coup est-ce que ça fait de moi une vraie petite fille, féminine… etc. Ça ne veut pas dire que j’étais un garçon pour autant!

Heureusement! Mais aujourd’hui, voilà le discours il tend vraiment à “si tu as une dysphorie de genre, ce n’est pas à cause des stéréotypes qui sont ultra ancrés, c’est justement parce que ces stéréotypes sont en train de te dicter qui tu es”.

Je ne  sais pas. On en vient à nous dire que notre corps, il n’ a rien à voir avec notre genre social, mais en fait, tous les enfants qui ont des dysphories de genre, c’est justement des dysphories liées au corps… Et après, même les personnes transidentifiées qui prônent le discours du “biologie n’est pas égale à genre, et ça n’a rien à voir”, elles finissent toujours par faire des transitions médicales, prendre des hormones, être contentes de voir que leur passing il est bien dans la rue, qu’elles passent pour des femmes, pour des hommes… parce qu’en fait sans leur passing bah… la réalité biologique les rattrape, et ça reste leur corps. Et quels que soient les vêtements qu’elles mettent ou les coiffures qu’elles ont, si elles mettent du maquillage ou du vernis, voilà, nos corps restent nos corps et le passing pour moi, c’est vraiment de la surface.

Oui pour les enfants pour ces raisons-là, et moi si je fais le parallèle, du coup, avec l’enfance que j’ai eue et déjà les stéréotypes qui étaient pas mal ancrés.

On entendait souvent le terme de “garçon manqué” et puis on l’entend encore, on l’entend encore pas mal. Mais vraiment, il y avait ce terme de garçon manqué pour les filles pas assez féminines, justement.

Moi dans mon féminisme, je me suis toujours battue contre ce terme qui est complètement dégueulasse en disant “déjà on n’utilise pas le terme “fille manquée” mais garçon manqué, pourquoi? Parce que tu n’es pas assez féminine, que tu n’arbores pas tous les stéréotypes de genre féminin?” Aujourd’hui on ne dit plus “garçon manqué”, on dit “homme trans”, en fait! 

Parce que pour moi c’est la définition-même. Un garçon manqué aujourd’hui, c’est un homme trans, une femme qui va se transidentifier, parce que… si tu ne te sens pas en adéquation avec les stéréotypes féminins, bah ouais, il y a moyen qu’en fait, au fond de toi, tu sois un garçon. Et on dit que c’est au fond de toi, parce que ça vient du ressenti, du plus profond, et que les personnes “cis” ne peuvent pas comprendre ce que c’est, être trans. Mais d’un autre côté, toutes les personnes que j’ai écoutées parler de leur transition et de leur transidentité, et de leur rapport à la transidentité, c’était toujours lié à des faits de société. Enfin s’il n’y avait pas de genre, si la notion de genre n’existait pas, il n’y aurait pas de transition. Et ça, voilà, c’est c’est des discours qui sont tous plus contradictoires les uns que les autres dans le transactivisme… mais c’est leur ressenti, donc il faut qu’on ferme notre gueule et que… enfin nous, on n’a rien à dire en tant que personnes “cis”, et encore plus en tant que femmes cis, qui sont limite coupables des crimes,  de ces crimes sur les personnes transidentifiées, les “femmes trans”, donc les hommes transidentifiés.

RDG – Par définition, on est coupable de tout, de toute façon! Principe de base : les femmes, et en particulier les féministes, sont coupables de tout.

Ophélie – Pour la société, alors… C’est un danger pour la société, parce qu’en termes de définitions, de chiffres, de faits, de statistiques, plus rien n’est, plus rien n’est réel, en fait! On ne peut plus se baser sur ce sur quoi on se basait depuis des années. Donc les faits n’existent plus. Tout devient flou et plus rien n’est mesurable, de la même manière.

Donc ça c’est un grand danger.

Pour la démocratie, évidemment, parce que aujourd’hui penser, ne serait-ce qu’un petit peu différemment, ou remettre en question les idéologies mainstream (je dis Mainstream mais du coup c’est les idéologies libérales transactiviste, queer, et de façon plus générale pro “travail du sexe”, pro prostitution et pornographie, aussi) penser ne serait-ce qu’un petit peu autrement, c’est… c’est être vraiment dans le mauvais camp. Donc il n’y a pas de juste milieu. La parole elle est très fermée, alors que c’est censé justement… enfin c’est des personnes qui se disent justement très ouvertes, et dans l’inclusivité pour tout le monde, à base de pronoms et de termes, voilà, de non-binarité, etc.

Enfin, au nom de l’inclusivité, on est en train de fermer la bouche de beaucoup de personnes, et dont les femmes qui, justement, prennent enfin la parole et sont enfin écoutées depuis plusieurs années, même si voilà, c’est un combat très lent, très lent à aboutir. 

Il n’y a plus de place, en fait, pour la remise en question, pour la nuance. On pense en fait, se déconstruire sur des schémas de société, des injonctions, en allant justement dans ce féminisme, et dans cette idée de théorie du genre, de queer etc. Mais on s’enfonce, en fait, dans d’autres dogmes qui nous enferment. 

Et en fait c’est… ouais bah c’est, comme beaucoup d’autres femmes l’ont dit dans ce dans ce podcast, et j’avais peur de… j’avais peur d’utiliser ce terme, au début, parce que je trouvais ça un peu abusé, mais en fait non : c’est sectaire. Parce qu’en fait, on s’enferme et on est pris par les discours, on n’écoute pas les discours des autres. Parce que c’est considéré être le mauvais camp, donc on cancel, sans même… sans même regarder ce que les autres disent, parce que moi, c’est ce qui m’est arrivé au début, et je pense que c’est le cas pour beaucoup d’autres personnes. Et du coup, où est la nuance, où est la liberté de parole? 

Voilà. Enfin, je veux dire, traiter de transphobe quelqu’un qui va juste remettre un petit peu en question l’idée du genre et de la transidentité, et tout ça, c’est injuste et c’est dangereux. C’est dangereux, parce qu’il n’y a plus aucune place pour la liberté de parole.

RDG – Aujourd’hui qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces? Est-ce que tu perçois un danger, ou est-ce que tu te sais complètement en sécurité pour parler librement?

Ophélie – Alors, comme je le disais juste avant, moi, j’ai mis longtemps à affirmer mes idées déjà, à me sentir légitime, et à ne pas me sentir une mauvaise personne, de penser ce que je pensais, justement à cause de tout le féminisme libéral, qui prend le pas (“féminisme libéral” entre guillemets) qui prend le pas sur tout autre forme d’idées, notamment le féminisme radical. Donc j’ai longtemps eu peur de parler et de me faire… de me faire cancel, ou de d’être considérée comme une mauvaise féministe. Alors que bon, je sais très bien que, enfin ce qui fait mon féminisme, c’est la bienveillance et l’ouverture d’esprit, et le fait de pouvoir permettre à tout le monde d’être qui il veut être, tant les femmes que les hommes, d’ailleurs. Donc en abolissant les stéréotypes de genre.

Et aujourd’hui j’en ai marre, parce qu’en fait juste je reviens aux bases de “pourquoi je suis féministe” et je ne vois aucune violence dans ce que je pense, dans mes propos, et je trouve ça très injuste de la part des personnes transidentifiées de dire qu’on les tue, qu’on est des personnes abjectes, qu’on mérite le bûcher…

Et la forme de discrimination, de harcèlement en ligne là, qui est mis sur toute pensée qui pourrait remettre en question la leur. Elle installe un climat de terreur, de peur. D’où le fait aussi que je comprenne que ce soit dur d’en sortir, parce qu’on est dans une société où c’est bien vu de faire partie d’un groupe et, quand un groupe qui est supposé avoir la pensée universelle, la bonne pensée, on n’a pas trop envie d’en sortir, parce qu’on a envie d’être intégré à la bonne pensée. 

Mais, aujourd’hui, je suis convaincue de mes idées. Je n’estime pas être une mauvaise personne et je n’ai pas non plus de personnes dans mon entourage qui pourraient être directement blessées par ce que je dis, dans le sens où je ne connais pas de personnes transidentifiées. Ni mon entourage familial, ni amical n’est concerné par ça. Ce serait beaucoup plus remis en question si j’avais des chances de blesser plus directement quelqu’un que que j’aime profondément. 

Je ne dis pas que mes paroles ne blessent personne, dans le sens où j’avais peur de parler pendant longtemps parce que ce sont des paroles qui sont considérées transphobes par une grande partie de la population. 

Mais aujourd’hui, j’ose parler, je trouve ça très important de remettre les points sur les i, et de faire passer un message à toutes les femmes qui sont dans le dans le silence, qui n’osent plus rien dire parce que leur parole vont être transphobes, qui ne comprennent pas trop non plus vers quel chemin le féminisme va. Je voudrais être une parole, une voix en plus qui leur dit “Mais n’ayez pas peur et parlons tous ensemble”. Il faut revenir aux bases.

C’est aussi parce qu’aujourd’hui je refuse d’être mise dans le même panier que des personnes transphobes, parce que je suis certaine que ça existe, des personnes haineuses, comme les homophobes, les racistes… Il existe des personnes transphobes, mais remettre en question l’idéologie des transactivistes, des queers et du féminisme libéral, ce n’est pas être transphobe. Mais justement, la prise de parole, c’est vraiment de pouvoir affirmer ça. 

Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’aurait marqué concernant la transidentité ou le transactivisme?

Ophélie – J’en ai plein. Au fur et à mesure de mes écoutes de témoignages vidéos, podcasts, articles, réseaux sociaux des personnes concernées (donc des personnes transidentifiées), j’ai pu noter tellement, à la fois, de contradiction et, à la fois, de paroles absurdes, et même dangereuses, pour certaines.

Ça a commencé avec Olivia Ciappa, anciennement Olivier Ciappa, qui a beaucoup parlé de sa transition sur les réseaux sociaux et qui la médiatise beaucoup, notamment son épilation, pour être une vraie femme, sans aucun poil. (moi à l’heure actuelle, j’ai des poils sous les aisselles, je suis à deux doigts de transitionner!). 

Olivia dit qu’il faut souffrir pour être belle, il a souvent dit ça dans ses stories depuis sa transition. Ça, c’est vraiment un terme pareil que “garçon manqué” qui m’horrifie, qui m’horripile. Il faut souffrir pour être belle, c’est pour moi une phrase qui banalise toutes les injonctions sur le féminin, sur les femmes, qui banalise tout le patriarcat, et qu’une personne transidentifiée, se considérant comme femme, puisse se réapproprier cette phrase et la rendre normale, légitime, moi ça me ça me fait peur. 

Il y a eu d’autres trucs, je ne dirais pas marrantes, mais des choses absurdes. 

Par exemple, il y a Océan. (Je me fais du mal). J’ai regardé toute sa série de vidéos sur sa transition. Il y a plusieurs saisons. Il a fait ça un peu sous un documentaire. J’ai regardé pour voir ce que ça disait. 

Tous les moments avec sa mère ou il ne fait que la reprendre sur les termes qu’elle utilise, et le fait qu’elle le considère ou non comme son fils ou sa fille. 

Il n’y a pas de place pour l’incompréhension du fait que c’est très dur à comprendre, leur notion de transidentité, étant donné que chaque ressenti est différent. Une personne va te dire que son ressenti est comme ça, et l’autre comme ça. Et les gens en face ne savent plus trop quoi dire. Il y a cette sorte d’air hautain qui fait que si tu n’as pas compris et que tu dis un mot de travers, tu es considérée comme la pire des personnes.

Bref, dans son reportage, il était avec son groupe de copains, toutes des personnes transidentifiées (je crois que c’était tous des hommes transidentifiés) et ils se faisaient des sessions de testo, de piqûres de testo groupés. 

A un moment donné, il y en a un qui a dit : “Tu veux ma fin?” et vraiment j’ai regardé mon écran, je me suis “ Attends, il y a vraiment dit?”. Le “ Tu veux ma fin de testo?”, c’est le nouveau “Tu veux ma fin de clope, ou la fin du joint?”. 

On est quand même en train de parler d’une modification corporelle qui est, je crois, irrémédiable à partir de l’instant où on commence. Je me suis dit que ça devient la normalité, les prises de testo, en soirée, ça devient une normalité. C’est super dangereux. 

Ça me fait penser aussi à une vidéo d’une personne transidentifiée qui a fait une vidéo avec son petit frère, qui devait avoir 10 ou 11 ans. C’est Laura Badler sur Youtube. Elle posait des questions à son petit frère en disant “ C’est quoi, pour toi, une personne trans?”. On voyait que son petit frère était perdu, qu’il essayait de ressortir les paroles que son frère transidentifié lui a dit sur ce qu’est être une personne trans). Le petit frère était perdu. Je me suis dis qu’on est en train de niquer tous ses repères (ce que c’est d’être une femme ou un homme).

De façon plus personnelle, j’ai fait plusieurs manifs féministes pour les violences sexistes. J’en ai fait plusieurs et à chaque fois je faisais des pancartes. Aujourd’hui, mes pancartes seraient considérées transphobes, alors qu’à l’époque j’étais super fière de ce que j’avais fait. Il y en avait une, la première, où j’avais écrit “ tu connais le patriarcat ? C’est mortel !”. J’ai fait le haut de “mortel” en forme de vulve et en rouge pour démontrer la violence. 

Tout le monde l’avait adorée d’ailleurs. J’étais trop contente de mon “jeu de mots”, un peu dérision. Même pendant ma période où j’adhérais un peu aux idées des transactivistes), je me disais que ma pancarte était transphobe. C’est pas bien ce que j’ai fait, j’ai pas inclus les personnes trans.


Dernière anecdote, moins marrante. Il y avait une manifestation à Genève. 

Je l’avais vue passer par la Carologie sur les réseaux sociaux parce qu’elle y avait participé ( elle a vraiment plongé dans l’ultra libéralisme et le transactivisme). 

J’avais lu un article sur cette manif où il avait été déconseillé aux femmes “cisgenre” de manifester les seins nus parce que ça pourrait offenser les “femme trans”. C’est à ce moment-là, vraiment, que j’en ai eu marre d’avoir peur de parler. 

Je me dis “ Ça, ça passe, et ce que je pense ne passe pas”. Interdire aux “femmes cis” de manifester les seins nus alors que nos corps sont politiques, que nos seins sont politiques, que j’ai compris pourquoi les Femen faisaient des actions avec les seins nus et les mots écrits sur leur corps… Je me dis “On est en train de faire taire les femmes”. Encore une fois, on utilise leur corps et on leur dit quoi faire de leur corps. C’était vraiment considéré normal dans l’article.

La Carologie a partagé ça, en étant ok avec ça, alors qu’il y a encore quelques années elle manifestait les seins nus dans la rue parce elle-même elle est archi-consciente que nos corps sont politiques, que c’est un moyen de passer des messages. 

Pareil, un podcast d’un mec transidentifié qui disait que son passing devenait de plus en plus OK dans la rue et qu’ il était content de se faire harceler parce qu’il passait pour une meuf.

RDG – C’était pas Olivia qui disait qu’il était heureux d’être harcelé dans la rue?

Ophélie – Non mais ça ne m’étonne pas.

RDG – C’était qui? Je l’ai vu ça.

Ophélie – C’était un podcast d’un mec qui a parlé de sa transition sur plein d’épisodes, j’ai écouté et à un moment donné il parlait de son passing et de la rue. Il disait : “ Je suis contente de me faire harceler”.

RDG – Mon dieu… Contente d’être harcelé…

Ophélie – Je me disais putain, mais ta gueule, franchement… Surtout que s’il n’avait pas fait son passing, il ne se ferait pas harceler, ça on est obligées de le dire.  C’est leur passing qui fait qu’il se font harceler, parce qu’on les prend pour des femmes biologiques. 

RDG – Ils jouissent de notre oppression. Ils jouissent littéralement de leur oppression. C’est des autogynéphiles, ça les excite et ils jouissent de ça. C’est un truc de fou.

Ophélie – Voilà, des petites anecdotes comme ça… À la fois marrantes et pas marrantes. Dangereuses même.

RDG – As-tu quelque chose à ajouter? 

Ophélie – Oui, j’aimerais juste revenir sur l’histoire des passing et des contradictions qui sont au sein du transactivisme et des transactivistes eux-mêmes. On parle de ressenti et on nie totalement les faits concrets et biologiques. Il y a tellement de contradictions à la fois entre ce que eux disent de leur propre parole, c’est-à-dire de vouloir faire la différence entre biologie et genre social, mais de quand même aboutir à des transitions médicales qui transforment leur corps et qui les amènent à avoir des euphories de genre, etc. Enfin voilà, c’est… à chaque fois tout ce qu’ils disent dans leurs vidéos, dans leurs témoignages etc. Et à la fois il y a tellement de contradictions entre, justement, chacun son ressenti sur la transidentité, et ce qu’est être un homme ou une femme. 

Du coup, il n’y a vraiment plus aucun point commun si on met toutes les personnes transidentifiées autour d’une table, et qu’on leur dit : “Ok, parlez-nous de vos ressentis, de ce que vous subissez, de… voilà.” Bah tout sera différent. Donc en fait, quel est le point commun, quel est le tronc commun entre vous tous, si ce n’est juste le fait que vous avez un ressenti personnel. Et ces personnes-là vont nous dire à nous, les femmes, c’est quoi être une femme pour toi? Ils pensent avoir l’argument et la question, vraiment qui vont nous clouer le bec, en disant : “Mais et toi? Qu’est-ce qui fait de toi une femme, en fait?”

C’est simple : le tronc commun, c’est nos corps. Et quelle que soit la manière dont on s’habille, la façon dont on se coiffe, et tout ce qu’on arbore, et même ce qu’on voudra cacher ou pas, en fait, c’est nos corps qui seront ciblés. Et quoi qu’on en fasse, ce sera le cas. Donc ce n’est plus du tout une question, enfin c’est une question à laquelle je peux répondre aujourd’hui si jamais on me la pose, parce que, du coup, une autre de leurs questions c’est : “Mais qu’est-ce que ça vous fait à vous, personnellement, les femmes, quoi, les femmes “cis”, ça vous fait quoi personnellement?” 

Mais ils répondent souvent à notre place en disant : « Ça ne vous fait rien. Ça ne change rien à votre vie, donc, en gros, fermez-la et laissez-nous vivre, et laissez-nous exister. Parce que vous nous tuez.” 

Enfin, voilà. Bref. 

Et, moi j’ai envie de leur répondre : “Mais nous, personnellement, si!  Ça nous fait quelque chose. Parce que ça continue de nous invisibiliser, d’invisibiliser les violences qui nous sont faites.” 

Mais en fait, on pense collectif, justement. Et moi, je pense à toutes mes sœurs du monde entier, en fait, qui subissent la même chose que moi, à plus ou moins grande échelle. J’ai d’ailleurs la chance, dans ma vie, de n’avoir subi que des micro-agressions, et de ne jamais avoir subi plus, alors que je sais que c’est un peu monnaie courante et que j’ai de forts risques de connaître ça dans ma vie.

Et, eux c’est vraiment une… Ils sont étriqués, justement, dans leur ressenti personnel, sans penser à aucun tronc commun qui pourrait les unir. Parce qu’en fait, désolé : ils se disent unis, mais il n’y a rien qui les unit. Encore une fois, demain on les met à la même table, il y en a un qui va dire qu’il se sent femme, que c’est une femme, mais qu’il garde sa bite, son pénis de femme. L’autre qui va dire : “Non, moi je suis né dans le mauvais corps et j’ai besoin de faire une transition médicale.” L’autre qui va dire que la biologie ça n’a rien à voir avec le genre mais qui va quand même prendre de la testo ou des oestrogènes, et qui va… 

Enfin, tous leurs discours sont contradictoires, et il n’y a aucun tronc commun.

Donc je ne peux plus admettre qu’on me dise que je ne suis pas légitime de dire ce que c’est qu’être une femme en le vivant, en le vivant moi-même. 

Et je rebondis aussi sur le fait que les femmes entre guillemets “cisgenre” sont aujourd’hui considérées comme l’ennemie des transactivistes, des personnes trans, et l’ennemie du féminisme, du coup – parce que le féminisme est devenu transactiviste parce que, voilà… – j’entends à longueur de journée “Mais c’est les femmes cis, en fait, c’est vous qui perpétuez, dans tous les cas, les stéréotypes de genre depuis toujours. Donc arrêtez de nous dire de ne pas le faire, parce qu’en fait, c’est à cause de vous qu’on le fait!” Et donc moi, à ça je réponds aujourd’hui : “Mais donc on est en train d’oublier toute l’oppression justement, du système et patriarcal et capitaliste qui nous met une pression de ouf sur les épaules qui nous met des injonctions à base de publicités, à base de marketing, de radio, d’affiches sur les réseaux sociaux, partout! Pour nous dicter, justement, quoi faire de nos corps pour qu’on soit des vraies femmes, et que on soit justement acceptées dans la société!” Donc moi, depuis le début, justement, j’ai appris à déconstruire le fait que, même les femmes qui arborent les stéréotypes féminins ne sont pas fautives de ça, parce qu’elles en sont victimes. Moi j’ai appris ça depuis le début, j’en suis convaincue. Donc aujourd’hui j’ai arrêté de mettre la faute sur les femmes, et aujourd’hui on nous… on inverse, en fait, l’ennemie. Moi, dans mon féminisme, je me suis rendu compte que je m’étais trompée d’ennemi, quand j’ai réussi à déconstruire mon sexisme intériorisé. Je me suis dit ok, je me suis trompée d’ennemi. Je me suis rendu compte, mais en fait là, aujourd’hui, c’est nous les ennemies, c’est les femmes. Et ils nous ont choisies, en fait. Enfin, voilà : ils ont choisi leur ennemie et la boucle est sans fin, en fait. On revient à nous invisibiliser, à nous dire de nous taire, à nous dire qu’on n’est pas légitimes. Et voilà, en fait : on oublie, on en vient même à dire que le féminisme radical, il rapporte les femmes au corps, et que justement c’est ce que les féministes depuis la première vague essayent justement de ne plus faire. Et en fait, sous couvert de féminisme, voilà… suffragettes, Simone de Beauvoir et compagnie qui ont lutté, depuis le début, pour nos droits.

Mais en fait, ces femmes-là, elles n’ont jamais nié la réalité biologique, justement. Elles ont ouvert leurs bouches en disant : nous ne sommes pas que des corps pour procréer. Nous sommes beaucoup plus que ça. Nous avons les mêmes droits que les hommes. Mais à aucun moment elles n’ont nié la réalité biologique et la violence qui était faite envers nous. 

Donc en fait, là, on est en train de changer d’ailleurs le discours… on est en train de changer de discours, de changer les livres, de changer les manuels, voilà. 

Enfin… et ça me fait penser aussi, du coup, peut-être, je ne sais pas si c’est dans les anecdotes sur le transactivisme, mais j’avais vu que agressively trans  s’était offusqué du fait qu’on veuille remettre les clitoris dans les manuels scolaires, parce que ça oppresserait les femmes trans. Alors que c’est un combat depuis des années justement, d’arrêter d’invisibiliser le corps des femmes, et de enfin mettre ce clitoris là où il faut, c’est à dire le montrer, parce qu’il existe, et que depuis des années, on ne le montre pas. On dit qu’il n’existe pas et aujourd’hui, certains hommes transidentifiés disent : “Non, en fait il ne faut pas le mettre, parce ça nous oppresse, nous.” Donc même dans les manuels scolaires, on va on va finir par avoir des personnes à vulve, et personnes à pénis dans les manuels scolaires, en oubliant, en omettant totalement le terme de femme et d’hommes. 

Et tout le monde pourra se proclamer qui il veut,  donc…

RDG – Sauf si on se bat! Sauf si on se bat et si on gagne! On va quand même se battre avec la dernière énergie pour que ça n’arrive pas, vraiment!

Ophélie – Non mais voilà on se bat pour que le clitoris soit dans les manuels scolaires, et des hommes disent : “Non, il ne faut pas le mettre, parce que ça nous oppresse.” La boucle est bouclée. Il y a vraiment…

Donc voilà. Je voulais juste finir par ce que je viens de dire sur nous, les féministes, on s’est trompées d’ennemi pendant longtemps, et on a arrêté de mettre la faute sur les femmes, et aujourd’hui, c’est nous l’ennemi. Mais il est choisi, l’ennemi quoi. Ils ne se trompent pas d’ennemie. Ils l’ont choisie.

RDG – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe.

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Rebelles du genre – Épisode 52 – Andréa

Andréa – Je m’appelle Andréa, j’ai 19 ans. Je vis en région parisienne mais je suis née en Alsace à Colmar. Je suis étudiante en photographie et je témoigne aujourd’hui pour me faire entendre sur la question du transactivisme car, malheureusement, je trouve que les stories sur Instagram aujourd’hui ne sont plus suffisantes, et que ce n’est qu’une toute petite partie du militantisme pour faire avancer les choses. 

J’ai commencé à me revendiquer féministe vers mes treize ans, à peu près à la même période durant laquelle j’ai commencé à m’intéresser à l’écologie et à la cause animale. Mais en réalité, cette révolte contre les injustices dans le monde, et plus particulièrement celle liée aux femmes, a existé très tôt en moi, sans forcément mettre de mots dessus.

Par exemple, quand j’étais petite, je ne comprenais pas que le rose soit associé aux filles et le bleu aux garçons. Ça me paraissait complètement infondé, voire ridicule. 

Quand j’avais onze ans, j’étais un jour habillée en pantacourt (donc un pantalon qui arrive au niveau des genoux) et mon père a sorti un truc comme: “ Ah, il faudrait peut-être que tu commences à t’épiler les jambes.”. Je ne m’étais jamais souciée de mes poils auparavant et depuis ce jour, j’ai commencé à complexer dessus et à vouloir me mutiler en les retirant. 

Plus tard, quand j’avais quinze ans et demi, j’ai vite compris, en me renseignant régulièrement sur les sujets féministes, que non, les poils sur une femme ne sont pas sales et que c’est normal d’en avoir à la puberté. J’ai donc décidé d’espacer énormément mes épilations, ce qui faisait que, par période, on distinguait pas mal mes poils, ce qui s’est accompagné de critiques et de remarques. 

Autre exemple, quand j’avais à peu près seize ans, j’étais déjà beaucoup dans le militantisme, notamment sur Instagram. J’ai publié une photo de moi torse nu (et bien évidemment avec les tétons censurés pour éviter la suppression), en expliquant dans la légende de la photo qu’il n’y avait rien de vulgaire à ce qu’une femme soit torse nu, que c’est très injuste qu’on ne dise rien aux hommes, que le corps d’une femme n’est pas sexuel. 

Ma mère l’a très vite appris et elle m’a dit que c’était vraiment pas bien ce que j’avais fait, que c’était de l’exhibition. J’ai alors répondu que non : quand mon père ou mon frère se mettent torse nu en public, ça n’a pas l’air de poser problème à qui que ce soit. Et en général, quand un homme se met torse nu en public, on ne va rien dire, même si légalement c’est interdit. Mais dans les faits, ce n’est pas quelque chose qui est reproché aux hommes. Elle m’a rétorqué que ce n’était pas pareil et à partir de ce moment-là, je n’ai jamais autant été révoltée. Je me suis donc davantage renseignée sur le féminisme. Ça a été un déclic pour moi.

Un an plus tard, quand j’avais 17 ans, je fréquentais un garçon de mon âge qui se revendiquait ouvertement féministe. Les poils ou même les règles, ça ne le dégoûtait pas. Je me sentais en sécurité avec lui. Et pourtant, un jour, il m’a doigtée sans mon consentement alors que je lui avais dit non, explicitement, bien avant qu’il commence. 

Et à ce moment là, je me suis dit que si même avec un homme qui se revendique féministe je ne suis pas en sécurité, je ne suis en sécurité avec aucun homme. 

Toutes ces expériences et plein d’autres que je viens de raconter m’ont poussée à questionner ce système patriarcal et à être féministe.

A ce stade là, je ne connaissais pas encore les différentes branches du féminisme. 

Encore en 2020, comme la plupart des femmes de mon âge, je tenais des propos comme “Les femmes trans sont des femmes.”. J’ai été pro LGBT et soi-disant inclusivité parce que je pensais bien faire et que penser autrement que comme ça était problématique. Je pensais réellement que c’était une bonne chose. À tel point que la première fois que je discutais avec une féministe radicale sur Instagram, Pauline, une photographe, je l’ai unfollow car ce qu’elle me disait remettait totalement en question ce que j’avais entendu jusqu’à maintenant. 

À cette époque, je suivais aussi Dora Moutot, et même si je ne partageais pas son point de vue sur le genre, je continuais de la suivre car elle parlait de plein de sujets qui étaient intéressants. 

Mon peak trans s’est produit cette année en 2022, lorsque j’ai visionné une interview de Dora Moutot qui expliquait toute la problématique autour des propos qu’elle a tenus de A à Z. J’étais encore pro-trans, mais je me suis surprise à être d’accord avec absolument tout ce qu’elle a dit.

J’ai donc complètement changé d’avis sur la question du genre et de la transidentité.

Désormais, je suis d’avis que chacun devrait pouvoir exprimer sa personnalité sans associer ça à un genre, car le genre ne fait que rajouter des cases qui sont, selon moi, non seulement oppressantes, mais aussi divisantes. 

C’est oppressant car voir des hommes se mettre en talons, se maquiller, puis prétendre qu’ils sont des femmes, est insultant, car ça réduit le fait d’être une femme à des stéréotypes qui nous oppressent. Car, encore aujourd’hui, en tant que femme, lorsqu’on ne remplit pas tous les critères stéréotypés qui nous sont associés, nous pouvons nous prendre des remarques du style : “Tu te délaisses.”. 

Je trouve que c’est divisant et les cases de la communauté LGBT en général le sont. 

De plus, on ne peut pas “se sentir” quelque chose qu’on n’a jamais été. C’est matériellement et scientifiquement impossible. 

Pour les trans activistes, être femme ou homme ne sont que des concepts. Sauf que le sexe n’est pas un concept mais une réalité. 

Alors oui, je reste d’avis que les personnes trans existent et que leur malheur est bien là. Je ne leur souhaite en aucun cas de se faire harceler. Et bien sûr, ces personnes ont besoin d’aide. 

Malgré ça, le mouvement transactiviste est encore aujourd’hui gorgé de beaucoup de contradictions. Par exemple, on dit beaucoup qu’une personne transgenre est née dans le mauvais corps. Du moins, c’est ce que certaines personnes trans prétendent. Alors qu’en même temps, ils disent que ce sont deux choses distinctes. 

Il y a plein de petites contradictions comme ça dans ce mouvement en général. 

C’est toutes ces raisons qui m’ont amenées à être féministe radicale et non juste féministe “intersectionnelle”, comme certaines personnes peuvent le nommer, ou “libérales”. J’ai vraiment envie de me battre pour les droits des femmes jusqu’au bout. Et malheureusement, aujourd’hui, le genre est un obstacle aux droits des femmes.

Je pense que cette idéologie est une menace pour les femmes car elle les empêche d’avoir des espaces spécifiquement réservés à elles. Même dans certaines prisons, des violeurs qui se prétendent femmes se retrouvent dans les mêmes cellules que des femmes. À partir de ce moment-là, la sécurité des femmes, qui n’était déjà pas acquise, régresse. 

Si tout le monde peut se prétendre femme, alors les statistiques sur les femmes et les violences faites aux femmes sont totalement faussées.

Aussi, dans le sport, le transactivisme est un problème car des femmes se retrouvent en compétition avec des mâles qui se prétendent femmes. Donc l’issue des résultats n’est plus du tout juste. S’il y a des catégories basées sur le sexe, ce n’est pas pour rien. 

C’est une menace pour les lesbiennes, car refuser de coucher avec un homme transidentifié est vu comme transphobe, alors qu’on parle bien d’orientation sexuelle et pas d’orientation de genre. 

C’est une menace aussi pour les enfants, notamment les adolescents, car c’est toujours une période très difficile, l’adolescence, au niveau du rapport au corps, au niveau de l’acceptation de soi. N’importe quel adolescent qui est un peu perdu pourrait mettre ce mal-être sur le dos de la transidentité en voyant sur les réseaux sociaux que se sentir mal dans son corps, c’est probablement de la transidentité, alors qu’il y a plein d’autres raisons qui peuvent pousser les adolescents à se sentir mal avec leur corps. 

Dans le pire des cas, ça peut les inciter à prendre des hormones dans le dos des parents. Parce qu’aujourd’hui, avec internet et certaines associations trans, c’est hyper facile de se procurer des hormones sans autorisation parentale. Et c’est même normalisé qu’un enfant prenne des hormones, même avec l’autorisation parentale, alors qu’il y a un âge légal pour se faire tatouer, par exemple. C’est bien parce qu’il faut attendre une certaine maturité pour prendre une décision qui aura un impact définitif sur sa vie et sur son corps.

Je pense aussi que c’est un danger pour la société car on change les définitions des mots. Et de façon générale, si un mot peut englober tout et n’importe quoi, plus rien n’est clair, ça devient le flou total. 

Maintenant, quand on va voir un psy pour dysphorie de genre, c’est facile d’avoir accès à une transition hormonale et physique. C’est devenu la solution par défaut, alors que la dysphorie peut être due à plein d’autres choses. 

Et de façon générale, je trouve que prendre des hormones, c’est se déconnecter de sa vraie nature, et surtout c’est super dangereux. 

Donc n’il y a même pas seulement que les transitions hormonales qui me posent problème, mais la contraception hormonale également. Aujourd’hui, en tant que femme, quand on veut avoir une contraception, ça nécessite souvent de prendre des hormones et donc d’avoir énormément d’effets secondaires. 

Aujourd’hui, beaucoup de femmes ont de la peine à arrêter la pilule ou à revenir à un cycle “naturel” parce qu’il y a énormément d’effets secondaires et ça modifie énormément le corps. 

Je suis aussi pour une sorte de retour à la nature par rapport à tout ce que nous ingérons chaque jour dans notre corps et aussi dans le fonctionnement de la société en général.

Rebelles du genre – Qu’est ce qui t’a décidé à témoigner sous ta réelle identité ? Est-ce que tu as déjà subi des pressions ? Est-ce-que tu as déjà été menacée ou est-ce que tu aurais, éventuellement, rencontré des dangers par rapport à cette question là ? Ou est-ce que, finalement, tu témoignes de façon ouverte parce que tu sais que tu ne cours absolument aucun danger ? 

Andréa – Je ne pense pas que je cours “aucun danger” dans le sens où, en s’exposant sur les réseaux sociaux avec cette opinion ouvertement, on peut se prendre des menaces, on peut se faire harceler, recevoir des messages de personnes qui, tous les jours, vont nous dire : “C’est pas bien de penser comme ça car c’est transphobe”. 

Mais j’ai quand même décidé de témoigner sous ma réelle identité car je n’ai pas envie que ça soit un tabou, de simplement rétablir des vérités qui devraient simplement être du bon sens, selon moi. 

J’estime que je n’ai pas à avoir honte de mes propos. 

Oui, j’ai déjà subi des pressions à cause de ça. J’ai reçu un message me traitant de transphobe et de plein d’autres noms ignobles, juste parce que je suis critique du genre alors que je n’ai attisé la haine envers personne. Je ne suis pas pour que les personnes trans se fassent harceler. Encore une fois, ce n’est pas du tout mon but. Pour moi, tout le monde est victime de cette idéologie : les personnes qui ressentent la dysphorie comme les femmes, surtout. 

Mais voilà, j’ai affiché mes opinions critiques du genre et j’ai reçu ce message suite à un débat que j’ai eu avec une ancienne amie, qui n’a pas été d’accord avec moi, qui m’a bloquée, et qui a sûrement envoyé un de ses potes m’envoyer un message pour me faire peur, je pense. 

J’avais partagé je ne sais plus quel post concernant la transidentité. À partir de là, cette amie a pris connaissance de mes nouvelles opinions (parce que c’est très récent, ça ne fait que depuis cette année que je me considère comme féministe radicale et critique du genre.). Et de là, elle n’a même pas pris le temps d’écouter les vocaux que je lui avais envoyés pour lui expliquer mon point de vue. 

Directement, elle m’a traitée de transphobe et m’a dit qu’elle était super déçue. Elle m’a bloquée et je pense que c’est un de ses amis qui est venu me contacter par message parce qu’elle est beaucoup dans le milieu militant, dans les manifs pour le climat, dans tout ça… Et je pense qu’elle a un gros réseau de personnes, disons. 

Au delà de ça, j’ai perdu contact avec une dizaine de connaissances et amies car je suis devenue critique du genre. Ces personnes ont vu que j’étais abonnée à Marguerite Stern sur Instagram, que je re-partageais les posts, et que c’était soi-disant super violent. Alors que, selon moi, ce qui est super violent, c’est qu’on essaye d’effacer le mot femme et que les hommes puissent s’introduire partout où ils veulent juste en prétendant qu’ils sont des femmes. Sachant qu’on se sent déjà pas en sécurité dans la rue, si on peut plus se sentir en sécurité nulle part, ça m’inquiète, tout simplement.

J’ai aussi un jour publié une story sur Instagram en faisant une sorte de mise à jour des opinions qui avait changé en moi. Il y en avait par rapport au transactivisme, mais aussi par rapport à d’autres sujets sociétaux. Et suite à ça, j’ai perdu plus d’une centaine d’abonnés parce que dedans, bien évidemment, j’expliquais que pour moi, une femme est une femme et que, selon moi, il faut supprimer le genre car il oppresse absolument tout le monde, les hommes comme les femmes. C’est ça le pire, ça oppresse littéralement tout le monde. 

Et suite à ça, j’ai perdu plus d’une centaine d’abonnés, ce qui n’est en soi pas une grande perte, parce que si ces personnes se désabonnent à cause d’une différence d’opinion, c’est qu’elles ne valaient pas tant le coup que ça. 

Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marqué concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Andréa – Je n’ai pas forcément d’anecdote à part que j’ai été très choquée de recevoir des insultes de la part de quelqu’un par message. Ça s’est produit qu’une seule fois, mais je n’avais jamais vraiment conscientisé ce que ça faisait de se prendre des insultes à cause d’une certaine opinion, de se faire harceler. J’avais beaucoup vu que Dora Moutot et Marguerite Stern, par exemple, s’étaient faites harcelées, j’en avais conscience. Mais le fait que ça m’arrive à moi, ça m’a énormément choquée. 

C’est vrai que pendant les quelques jours qui ont suivi ça, j’étais extrêmement stressée. Je me suis dit : “Mais si ça se trouve, ce message va se suivre de plein d’autres messages, de plein d’autres personnes et ça peut prendre une énorme ampleur.”. 

Moi qui fait de la photo, j’ai besoin de visibilité, aujourd’hui, sur les réseaux sociaux pour promouvoir mon travail. Si énormément de personnes commencent à me “cancel” et essayent de réduire ma visibilité, ce n’est pas bon pour moi professionnellement. Plus tard, étant donné que je veux être à mon compte, la visibilité sur les réseaux sociaux, c’est absolument primordial.

Au-delà de ça, c’était juste très choquant de se faire insulter comme ça. Ni bonjour, ni rien du tout, mais je me prends juste des insultes.

Rebelles du genre – As-tu quelque chose à ajouter ?

Andréa – Oui, je pense que, pour conclure, il faut se libérer du genre et le supprimer à long terme. J’ai conscience que c’est quelque chose qui est super ancré dans la société et que ce n’est pas du jour au lendemain que ça va disparaître. Mais pour moi, il faut tout faire pour le supprimer petit à petit pour qu’il soit totalement éradiqué. On devrait pouvoir se sentir libre de porter ce qu’on veut, de faire le métier qu’on souhaite, peu importe notre sexe. Et ça serait vraiment libérateur pour les femmes et pour les hommes, pour tout le monde en fait, de supprimer le genre. Sauf pour l’industrie pharmaceutique, évidemment, qui a son compte à gagner là-dedans.

Rebelles du genre – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît, signez la Déclaration des droits des femmes basées sur le sexe

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Rebelles du genre – Épisode 51 – Éléonore

Eléonore – Je m’appelle Eléonore, j’ai 26 ans, je suis belge, je travaille dans l’administration et j’habite à Bruxelles. Je souffre depuis très longtemps maintenant d’un trouble bipolaire de type 1, donc ça veut dire qu’il y a des manies très très hautes et des dépressions très très basses. j’ai des délires et un trouble psychotique un peu annexe, dont on arrive pas tout à fait à déterminer la cause, du coup aujourd’hui je viens témoigner pour démontrer par ma propre expérience, que l’idéologie du genre et le transactivisme, ce n’est pas seulement un danger pour les femmes et pour les personnes LGB, mais c’est également pour les personnes souffrant de maladie mentale, et de troubles mentaux, ou qui sont tout simplement dans une confusion. 

Rebelles du genre – Bonjour et bienvenue sur le Podcast “Rebelles du genre”. Nous sommes des femmes, militantes, pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basées sur le sexe, et donc notre biologie. Le sexe et la raison de notre oppression par les hommes et le genre en est le moyen. Nous sommes les rebelles du genre. Nous observons, aujourd’hui, avec fureur, des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits.

Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent, en général, un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis, elles ouvrent les yeux, constatent sa violence et la refusent. Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre, et qui témoignent de leur parcours. Écoutons leur parole.

Eléonore – Moi, au départ j’avais pas vraiment de réticence vis à vis de l’idéologie du genre. J’y pensais même pas en fait pour moi c’était même pas une idéologie pour moi c’était simplement militer pour les droits et la sécurité des personnes trans, donc moi j’avais pas de problème. et j’ai toujours été sensibilisée par les personnes marginalisées et en souffrance puisque je viens moi-même d’ une famille où ma simple existence dérangeait. pas pour les mêmes raisons évidemment, et pas du tout à la même échelle, du coup je pouvais quand même plus facilement compatir. 

Donc je ne m’opposais pas à ce que je pensais être les revendications des transactivistes pour autant je ne militais pas avec eux puisque j’avais énormément de problèmes à tous les niveaux donc au niveau familial, psychiatrique, psychologique, et j’avais vraiment pas la force de militer pour quoi que ce soit.

Donc je vais devoir expliquer certaines choses qui n’ont absolument rien à voir…Enfin, absolument… Elles ont à voir avec le transactivisme mais… il n’y aura pas de mention de cette idéologie, juste pendant un petit temps. 

Je pense que c’est important de comprendre d’où je viens pour comprendre la critique que je vais en faire. 

Donc, comme je l’ai dit, je viens d’une famille où les relations étaient extrêmement difficiles, très très tendues, et elles étaient marquées par la violence aussi bien verbale, que psychologique et physique. 

Donc je ne vais pas m’étendre à ce sujet, mais enfin on va dire qu’il y avait des insultes, des accusations infondées, de la manipulation, des menaces, de la violence physique et puis aussi, comme ça on est sûr qu’il  il y a tout, une touche de folie, quoi. 

Il faut savoir, enfin ça je pense que tout le monde le sait parce que c’est la base de la psychologie, mais il faut savoir que la personnalité et l’identité de l’enfant elle ne peut se forger que si l’enfant se sent en sécurité chez ses parents. et si cette sécurité elle n’existe pas,  montrer qui on est, montrer ce qu’on veut c’est toujours dangereux soit pour l’intégrité physique, soit pour l’intégrité physique. et donc moi ayant vécu beaucoup de violences pendant des années j’ai été incapable de me construire. Parce que c’était dangereux et donc je ne savais absolument pas me forger une idée de qui j’étais, vers où je voulais aller dans la vie, quoi. j’étais vraiment complètement paumée!

Et à ça, s’ajoutait évidemment mon trouble bipolaire qui est survenu tôt. Et des problèmes  de dissociation et de psychose. J’ai eu, notamment, eu un premier épisode paranoïaque à sept ans. Et comme beaucoup de jeunes filles j’ai aussi souffert de troubles alimentaires,  donc d’un rapport avec mon corps qui était très très problématique, qui a été causé aussi par le fait que ma mère a été danseuse pendant très longtemps, donc pour elle les corps maigres c’était vraiment la base de la beauté, de la beauté féminine en tout cas, et en même temps elle me disait que j’étais pas aussi  féminine que ma soeur donc ben voilà, ça a joué beaucoup joué sur l’image que j’avais moi-même. 

Donc autant dire que à la fin de l’adolescence, après des années de problèmes, de tout ça en fait, ça n’allait plus du tout, j’ai fait ma première très grosse dépression à 17 ans, j’avais déjà eu des dépressions plus légères, entre guillemets, avant ça, puisque j’ai jamais vraiment été une gamine ni une adolescente très très heureuse… 

Mais la première très grosse dépression est survenue à 17 ans. 

Puis j’ai fait une manie à 19 ans, avec délire cette fois. Donc je me prenais pour l’élue de Dieu. 

Puis j’ai fait une autre dépression à 21 ans en fait avec le même délire, mais à ce moment là ça c’est un peu renversé, il fallait en fait que je me suicide pour rejoindre Dieu parce que “il me rappelait à lui”, entre guillemets.

Et puis entre ces gros épisodes, il y avait énormément de dissociations.  

Alors pour celles et ceux qui ne savent pas ce qu’est la dissociation, il s’agit en fait d’un trouble qui est typiquement associé à un stress post traumatique, mais pas que, c’est aussi quelque chose qui est lié à la schizophrénie, par exemple.  

Et il y a deux types de dissociation : il y a la déréalisation, qui est un sentiment d’étrangeté vis-à-vis du monde extérieur, et puis il y a la dépersonnalisation, qui est un sentiment d’étrangeté par rapport à soi-même. C’est à dire qu’on va regarder nos bras, nos mains, on va regarder nos jambes, notre corps tout entier, et on va se dire : “il me semble étrange, c’est comme si ce corps ne m’appartient pas, comme si j’habitais un corps qui n’était pas le mien…” 

Même chose pour le visage : moi, je regardais mon visage dans la glace par exemple, et je ne me reconnaissais pas du tout ; enfin,  je ne me reconnaissais pas : on est conscient du fait que ce visage est le nôtre, mais en même temps on ne le reconnaît pas, et en même temps on a l’impression, vraiment, que comme si c’était quelqu’un d’autre qui parlait, quoi. 

Et ça c’est vraiment un point important et j’ai vraiment envie de le souligner, parce que ça va revenir après. Et donc, en gros la première vraie confrontation avec le transactivisme, ça a été pendant ma première dépression : je souffrais justement d’une énorme confusion mentale, qui est typiquement associée à la dissociation et à la dépersonnalisation, du coup, aussi.  

Et donc j’avais aussi à ce moment-là un sentiment intense de dépersonnalisation, juste pour expliquer un peu la scène, j’étais couchée dans le canapé du salon j’étais très très inquiète, très très perturbée, et il se trouve qu’à ce moment là, à la télé il y avait un reportage sur la transidentité. Et c’est vraiment quand un interlocuteur trans a commencé à parler de son expérience que ça a commencé

Il ou elle, je ne sais plus, parlait de sa transition comme de quelque chose de génial qui l’avait complètement guéri, et il prétendait, en gros, que désormais il avait pu regarder en arrière, que le passé était enterré dans un sens, et que c’était plus important. Qu’il était enfin la personne qu’il avait toujours souhaité être, et qu’en gros, la personne qu’il était par le passé, en fait, ce n’était qu’un leurre dans un sens. Et c’est un discours que, je pense, on retrouve beaucoup : cette idée que, tant qu’on n’a pas fait ça transition, on n’est jamais vraiment soi-même, voire on n’est pas du tout soi-même. Et c’est un discours que je trouve assez dangereux, justement pour les personnes qui sont confuses et qui sont perdues à un moment dans leur vie quoi.

Moi par exemple, j’étais à ce moment-là au fond du trou! Vraiment. 

Avec des années de violence et de détresse derrière le dos, je n’avais vraiment qu’une seule envie, c’était d’échapper à ma situation, quoi. 

Et quand on est vraiment en pleine confusion mentale, quand on est en détresse et qu’on n’en peut plus, ce genre de discours, qui ne présente aucune nuance, peut faire penser que la transition, c’est une solution idéale, quoi, parce qu’on change de nom, on change de corps, on change de visage, on change de voix, et on enterre littéralement son passé. 

Et enfin le “deadname”, au fond, c’est ça : il ne faut absolument pas prononcer le “deadname”, de peur de déterrer tout le passé qui va avec.

Et déjà là, pour moi, il y a un énorme problème. 

Parce que, quand bien même j’aurais aimé avoir un passé différent, ça c’est clair, quand j’y pense ça me rend triste, vraiment.  

Le renier et l’enterrer, c’est prétendre que plus de 20 ans de mon existence n’a jamais eu lieu, quoi! 

Aujourd’hui, je sais que ce n’est absolument pas sain, et que ce n’est pas quelque chose à faire, qu’il faut accepter ce qui s’est passé et faire avec, mais à l’époque, bah c’était la solution idéale, parce que je ne voulais plus ressentir ou vivre toutes les choses que je vivais ou ressentais à ce moment-là.

Après, je sais que ce n’est sans doute pas le cas de toutes les personnes trans, mais enfin quand même une très très grosse partie de cette population, il me semble…

J’étais donc devant la télé, j’avais un sentiment intense de confusion, dans une phase de dépersonnalisation, et à ce moment-là, pour combler le tout, il y a un délire qui a commencé : j’étais convaincue que je voulais changer de sexe, forcément! 

Et je tiens à préciser : parce que le délire c’est quand même un phénomène assez rare, donc tout le monde ne comprend pas exactement ce que c’est. 

En gros, il y a une certitude dans le délire, qui n’a rien à voir avec la certitude saine et basée sur la réalité ou les certitudes qu’on a… ça n’a même rien à voir avec une épiphanie par exemple.

Ça survient tout à coup, ça prend tout le corps en otage, et ça reste pendant des jours, des semaines, des mois! On ne pense qu’à ça! 

Ou en tout cas c’est toujours quelque part dans sa tête. Parce qu’on est quand même souvent encore capable de… peut-être pas nécessairement de travailler, mais de “fonctionner” normalement.

 Mais…par exemple parler avec les autres, s’intéresser à ce qu’ils disent etc… C’est très difficile parce qu’on n’a qu’une idée en tête quoi.  Un délire c’est ça : ça n’admet aucune contradiction, aucune nuance et le délire refuse totalement la raison, aussi. Bizarrement, quelque chose qu’on retrouve aussi dans le transactivisme. 

Et je vais aussi préciser qu’en plus l’idée de vouloir devenir un homme ne m’avait vraiment jamais effleuré l’esprit. Je me suis toujours sentie un peu mal dans mon corps parce que j’ai traversé une période d’anorexie, comme j’ai dit. Je n’ai jamais pu accepter mon corps, même encore à l’heure actuelle, à l’époque même si j’étais maigre, enfin j’étais arrivé à 40 kilos et mon objectif c’était d’arriver à 35, donc même à cette époque je me sentais grosse et maintenant que j’ai vraiment grossi à cause des médicaments, parce que c’est malheureusement en effet secondaire très commun, et bien c’est pire encore et c’est très dur ! Parce que peu importe le corps qu’on a, ce n’est jamais suffisant pour une femme. Donc voilà jusqu’à ce moment là ça ne m’avait jamais effleuré l’esprit mais tout à coup, c’était devenu essentiel, il fallait que je change de sexe. 

Du coup la dépersonnalisation qui était à ce moment-là couplée avec un délire, avec en plus le manque de repère évidemment, parce que voilà je n’avais jamais réussi à me construire, et le fait qu’on m’avait toujours dit que j’étais (par exemple ça c’est un truc que j’ai entendu toute ma vie,  que j’étais)  moins féminine que ma sœur et que du coup, elle avait le droit de porter des robes et moi pas nécessairement, en gros cela a pris de telles proportions que mon corps de femme à ce moment-là me semblait être étranger et pas normal.

Et si on ne connaît pas mon historique médical, si on ne connaît pas mes problèmes psychiatriques et psychologiques, toute la violence que j’ai pu vivre, on aurait aisément pu conclure que je souffrais de dysphorie, très facilement. 

Alors que ce n’était pas du tout ça. Et c’est assez bizarre parce que finalement j’avais donc ce délire où j’avais cette certitude qu’il fallait que je change de corps et que je transitionne, et puis dans le même temps, l’idée de couper des parties de mon corps, enfin ça me terrifiait, c’est extrêmement violent en fait de penser à ça !  En réalité avec le temps je me suis rendu compte que ce n’est que l’échappatoire qui m’intéressait. 

Donc je ne savais pas quoi faire, je me rendais compte, (quand même j’ai eu un petit peu de lucidité), je me rendais compte que c’était quand même pas normal, que je n’avais jamais pensé ça, que malgré le fait que j’étais mal dans mon corps de femme, j’aimais bien être une femme, quand même. Il y a une certaine sororité et des expériences qui nous lient etc…

Même si bon, se sentir femme, tout ça… donc oui il y a cette sororité qui m’a toujours beaucoup touchée, le fait d’avoir des expériences communes, même si on ne se sent pas nécessairement femme, voilà mais donc je ne vois pas de problème à penser que j’étais une femme, me dire que j’étais une femme. C’était un fait et voilà.

Donc je me suis rendu compte qu’il y avait un petit peu quelque chose d’étrange et j’ai refusé de parler de tout ça, parce que quand on entend le discours des transactivistes, si on se sent homme ou si on a l’impression qu’il faut qu’on devienne un homme et ben c’est forcément vrai. 

Alors que pas nécessairement. Parfois on est confus, parfois on ne sait pas où on va, parfois on ne sait pas qui on est. Et donc moi, j’avais tellement peur qu’on me dise qu’il fallait que je m’accepte et que je commence ma transition, que je n’en ai pas parlé. Donc je ne suis pas allée voir un psy ni un psychiatre, je n’ai pas osé en parler autour de moi.

Sauf à ma mère, bizarrement, je ne sais pas pourquoi. J’en ai parlé à ma mère, à ce moment-là, et elle a eu quand même la jugeote de me dire : “Eléonore, si je devais te ressortir toutes les absurdités que tu m’as déjà dites, il y aura une liste sans fin!” 

Bon alors, ce n’était pas hyper gentil, parce que voilà, ça faisait référence à énormément de choses sur lesquelles on n’était pas d’accord, mais pour le coup elle a dit quelque chose de vrai, et elle a un peu arrêté ça, elle m’a même un peu sauvée, dans un sens. 

Ca, c’est vraiment quelque chose, quand même, qui m’énerve de la part des transactivistes, surtout de l’influence qu’ils ont sur l’idée qu’on s’en fait des personnes trans et de la transidentité etc… 

C’est qu’ on accepte sans nuance, que si on se sent trans, si on se sent du sexe opposé, on est forcément trans ou du sexe opposé. 

Comme si ces personnes savaient mieux que les autres ce qu’ils vivent intimement et ce qu’il faut qu’ils fassent. Avec leur corps, avec leur vie, avec tout ce qu’ils sont, et ça, je trouve ça vraiment… Enfin, ça me met vraiment très, très en colère, parce que justement, les personnes qui, du coup, vivent ce genre de situation et dans une confusion totale, si elles en parlent, elles seront, soit redirigées vers une clinique du genre, mais en tout cas vers un médecin qui peut leur faire commencer une transition, soit elles n’oseront pas en parler parce que, comme moi, elles auront peur qu’on les incite à transitionner. Donc, d’une manière ou d’une autre, en refusant d’explorer toutes les pistes qui auraient pu amener quelqu’un à vouloir transitionner, on condamne les personnes comme moi à gérer ce problème toutes seules, alors que c’est vraiment extrêmement difficile à vivre.

Du coup, le délire est parti.

Puis quelques années plus tard, quand je suis partie de chez moi et que je devais tout à coup faire face au monde toute seule et comprendre le monde toute seule et enfin voilà, c’était vraiment très difficile, je suis retombée dans une dépression très très lourde. Le délire est revenu, et là j’ai quand même osé en parler à ma thérapeute qui était beaucoup plus nuancée sur plein de sujets en réalité, et donc je me suis dit que j’allais pouvoir quand même en parler. Et heureusement, elle a tout de suite compris que ce n’était pas le vrai problème. Elle m’a dit : « Attends avant de tirer des conclusions hâtives, pour l’instant ça ne va pas très bien, tu dis ceci beaucoup donc on va attendre de voir ce que donne la suite et si à ce moment-là tu te sens toujours homme, on pourra peut-être en reparler”.

Mais effectivement, elle avait totalement raison. Donc quand j’ai commencé à prendre des médicaments pour la bipolarité, parce que le diagnostic n’avait toujours pas été posé en réalité à ce moment-là, donc quand j’ai commencé à prendre des médicaments et à “guérir”, entre guillemets, de tout ce que j’avais vécu,  l’idée et l’angoisse sont partis. C’est vraiment à cause de cette expérience-là que j’ai commencé à douter du transactivisme, en tout cas de certains discours qui sortaient du transactivisme. Mais je restais quand même encore, pendant un certain temps, très en retrait, parce que c’est un sujet sensible, aussi bien pour moi que pour les personnes trans que je n’avais pas envie de blesser, et je ne voulais pas non plus qu’on me traite de transphobe, parce que évidemment ça, on en a toutes fait l’expérience.  

Et avec le temps, j’ai entendu de plus en plus de personnes en parler, de plus en plus de femmes en parler, dont Antastésia, dont j’ai entendu le témoignage ic,i qui était vraiment super, et elle m’a beaucoup aidée, elle, justement à mettre des mots sur ce que je ne comprenais pas ou ce qui me dérangeait dans ce mouvement. Et je me suis rendu compte qu’il y avait beaucoup de problèmes avec ce mouvement et qui dépassaient vraiment l’expérience que j’en avait faite. 

Et c’est à ce moment-là que j’ai commencé à me dire que j’étais comme ces femmes : “critique du genre”.

Rebelles du Genre – Merci. C’est j’imagine douloureux de raconter ça. Ça fait plaisir parce qu’on voit que tu vas bien donc tu dois avoir un traitement qui te convient, parce que tu m’as dit que tu travaillais etc… Donc tu dois avoir une vie de bonne qualité. Venant d’où tu viens…

Eléonore – Oui mais pendant longtemps j’ai eu peur de ne jamais être capable de travailler car j’étais tellement crevée à la fin de la journée. Et à la fin du mois, j’étais cassée, tant que je faisais des petits boulots d’étudiants qui duraient un mois, ça allait, mais à partir du moment où j’ai commencé à travailler vraiment, ça a été dur pendant longtemps.

Rebelles du Genre – Alors je te pose la question suivante : Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie ?

Eléonore – Alors moi, j’aimerais souligner deux problèmes. 

J’aimerais vraiment commencer, en fait, par souligner qu’il y a une menace, vraiment, aussi bien pour la médecine que pour la société et ses lois. Et donc par là, la défense des personnes les plus vulnérables. 

J’ai remarqué, déjà, pendant mes années d’études à l’université que, aussi bien les profs de socio, que mes profs de philo insistaient sur le fait que “la normalité” (entre gros guillemets), c’est un pur construit et qu’on veut enfermer les gens dans des cases avec cette notion. 

C’est vrai, dans un sens. Mais dans un autre sens, la normalité c’est essentiel, en fait. Parce que comment est-ce qu’on peut faire des lois, comment est-ce qu’on peut traiter les maladies et guérir les gens, si on estime qu’il n’y a pas de normalité ? C’est complètement absurde ! Et c’est quelque chose qui est très présent, je trouve, chez les transactivistes, qui veulent notamment faire passer la transidentité comme un défi des normes sociétales et comme quelque chose qui n’est ni normal ni anormal, puisque la normalité, ça n’existe presque plus, en fait. Dans ce sens-là, ils refusent de penser qu’il puisse s’agir d’un trouble.

 Ce n’est pas un hasard, je pense, qu’ils colonisent les études sur le genre, puisque c’est une notion qui a été élaborée d’abord par la sociologie et la philosophie et que l’idée de normalité est reprise justement dans la notion de genre. Donc moi, mon idée c’est qu’effectivement les normes sont socialement ou intellectuellement construites, et par conséquent elles doivent toujours, dans un sens, pouvoir être remises en question. 

Par contre, refuser catégoriquement la normalité, c’est vraiment insensé, c’est dangereux. Si on sait qu’un corps est malade, c’est parce que l’on sait à quoi ressemble un corps sain, un corps normal. 

Si on a des lois pénales, c’est parce qu’on a défini ce qu’est un comportement anormal en société : un pédophile qui agit sur son attirance envers les enfants, c’est un comportement anormal qu’il faut absolument pénaliser, il faut arrêter ce type. Et donc refuser de penser la normalité, ça peut mener à vraiment de grosses grosses dérives je pense, même si ce n’est  peut-être pas leur intention première, j’espère.

 Le problème est qu’effectivement, la normalité est vraiment très difficile à délimiter : il y a toute une sorte de “grey area” comme on dit en anglais, où les comportements sont vraiment très très ambigus à ce niveau : est-ce que c’est normal, est-ce que c’est anormal ? On ne sait pas trop. 

Est-ce que c’est juste une forme d’excentricité? On ne sait pas. 

Et donc, où poser la limite ? 

Finalement, pour les transactivistes, on ne sait pas où poser la limite, donc il y a pas de limite. Alors, moi je pense que c’est important de réfléchir à toute cette zone un peu ambigüe, voir ce qui est normal, pas normal dans cette zone-là, ou si même il y a à mettre une limite dans cette zone-là. 

C’est important de réfléchir à ces zones ambiguës, mais c’est aussi important d’admettre que certains comportements et certaines idées sont pour leur part indubitablement anormales. 

Quand je pense, par exemple, qu’il y a des… que les personnes dans la voiture qui est garée en face de chez moi, ces personnes m’espionnent alors qu’il n’y a rien qui puisse le démontrer, l’idée est anormale. 

Quand j’ai la certitude, par exemple, d’être enceinte, alors qu’on avait mis un préservatif, que je continue à avoir mes règles, que mes tests de grossesse sont négatifs, cette idée n’est pas normale. 

A ce moment-là , on n’est plus dans l’ambiguïté, on sait sans aucun doute qu’il y a quelque chose qui ne va pas, qu’il y a un trouble. Et donc, si on ne défend pas cette notion de normalité, ou en tout cas un minimum, quand même, de bon sens à ce niveau-là, comment est-ce qu’on peut soigner les personnes comme moi, si on estime que tout est normal ou si justement plus précisément rien n’a à être normal?

Je me rappelle aussi que j’avais une prof, je ne suis plus exactement certaine, à un moment je crois que j’avais fondu en larmes devant elle parce que, enfin voilà, ça n’allait pas du tout. Et donc je lui ai dit que j’étais bipolaire. Et je me rappelle qu’elle avait presque refusé le diagnostic, elle a presque refusé le fait que je puisse avoir un trouble psychique, que c’était vraiment une façon pour la société de me contrôler et j’étais là : “Mais non en fait ! J’ai vraiment un trouble ! J’ai besoin d’être soignée, quoi ! Tout simplement.” 

Et c’est vraiment quelque chose qui a pénétré et qui influence énormément les sciences humaines et sociales. C’est assez incroyable.

Et alors, bon, j’ai parlé de dérives, là tout de suite il y en a une dont j’ai vraiment envie de parler parce que je trouve qu’elle illustre quand même très bien cette absurdité, en fait. Que c’est… 

J’ai envie de parler de “Tiamat” qui est un homme qui est transidentifié femme et Dragon voilà, et cette personne a subi des transformations corporelles mais vraiment absolument hallucinantes et dangereuses. Alors elle s’est coupée les oreilles, elle s’est fait un nez qui ressemble à celui d’un serpent et sans vouloir être méchante, c’est juste le nez de Voldemort.

Rebelles du Genre –  Tu parles d’un homme qui s’identifie femme ?

Eléonore – Oui c’est ça. 

Rebelles du Genre – Non mais du coup tu peux dire “il”. (rires)  Entre nous on peut se dire la vérité, quand même ! (rires)

Eléonore – Ok. Donc il s’est coupé les oreilles, c’est en fait un nez qui ressemble à celui d’un serpent, et qui ressemble essentiellement à celui de Voldemort. Il s’est fait enlever une grosse partie de sa dentition, donc il ne sait plus du tout manger normalement, et c’est un cas absolument extrême ça, on est bien d’accord. Mais quand on voit les commentaires sous les vidéos de cet homme, c’est extrêmement éclairant en fait. Je vais en prendre deux au hasard, je les ai traduits, mais il faut vraiment garder à l’esprit qu’il y a une montagne de commentaires de ce type. 

Donc je commence : “Nous avons tous droit au bonheur tant que ce que cela ne fait pas de mal aux autres, c’est beau de voir quelqu’un vivre comme il l’entend, ce monde a une manière de nous façonner que nous ne pouvons anticiper pour le meilleur comme pour le pire. Je souhaite tout le meilleur pour Tiamat et les personnes comme elle”. 

Un autre commentaire : “Le jour où elle nous quittera, quand l’univers l’emportera, j’espère qu’elle deviendra un dragon de chair et d’os.”

Le troisième commentaire, c’est le dernier : “Une partie de moi dit cette personne est folle, une autre elle me dit cette personne est courageuse et géniale pour oser prendre un contrôle absolu sur qui elle est. Qui suis-je, ou qui est la société pour juger les autres en fonction des normes sociétales actuelles ? Nous sommes tous des êtres égaux et cette personne a le droit et le courage de faire ce qui la rend heureuse. Je respecte ça.”

Alors si ce n’est pas la prééminence de l’autodétermination qui est l’élément clé du discours transactivisme, franchement je ne sais pas ce que c’est. Et Tiamat se dit d’ailleurs bel et bien trans, donc c’est qu’”elle” a quand même été fortement influencée par cette idéologie, ou en tout cas qu’elle y a puisé la justification pour les transformations qu’elle a subies. Et juste petite parenthèse pour moi, c’est vraiment un manque de déontologie… mais criminelle, de la part du corps médical. Parce que qui est-ce qui oserait faire ce genre, après c’est aux États-Unis donc forcément la déontologie tout ça, tout ça, c’est plutôt capitalisme quoi.

Rebelles du Genre –  Non mais en fait dans tous les pays c’est la même chose, je veux dire la question de l’éthique et la déontologie…

Eléonore – Mais pour moi du coup, cette personne elle est en souffrance, elle parle même des traumatismes qu’elle a subis, donc enfin, déjà là, on sait qu’il y a quelque chose qui ne va pas, et deuxièmement elle a même tenu ce discours qui était : “Etre humain, ça ne m’a jamais fait du bien”. Donc enfin le problème il est là en fait, il n’est pas dans le fait qu’ il n’a pas vraiment envie de devenir un dragon, c’est juste qu’il a trop souffert, tout simplement. 

Moi vraiment ces commentaires m’ont sidérée ! 

A quel moment est-ce qu’on a décidé que quelque chose comme ça était normal ? Et je rebondis aussi rapidement sur un des commentaires qui est quand même un argument classique du transactivisme, c’est “si ça fait pas de mal aux autres, quel est le problème ?” Mais est-ce qu’on a complètement oublié que les personnes peuvent se faire du mal à elles-mêmes et parfois même sans s’en rendre compte ? C’est absurde…

Et donc enfin voilà pour terminer un petit peu là-dessus, le refus de la normalité, ça se traduit par le refus de considérer qu’on puisse être malade et souffrir d’un trouble. Et je me rappelle d’ailleurs que j’avais discuté avec une transactiviste en message privé, au départ c’était à propos des espaces non mixtes pour les femmes parce que j’avais dit un peu ce que je pensais sur Instagram, et elle est venue m’invectiver en privé (zéro surprise à ce niveau-là parce qu’on a toutes l’habitude), mais la discussion bascule à un moment sur un fait : je dis, en gros, qu’il faut soigner, quand même, les personnes trans, quelle que soit la manière dont on les soigne, finalement. Et cette personne me rétorque : “ Tu dis que les personnes trans sont malades…”. Sous-entendu, c’est insultant. Et c’est un argument que je retrouve vraiment partout. Dire que les personnes trans souffrent d’un trouble, c’est insultant et c’est surtout contribuer à les marginaliser. 

Mais il est où le véritable problème? Est-ce que c’est dans le fait que moi je dise qu’elles ont un trouble? Ou est-ce que c’est dans le fait que les personnes qui souffrent de problèmes mentaux sont systématiquement marginalisées? 

Moi, ce que je vois, c’est un problème de psychophobie. Et la psychophobie, le transactivisme s’en rend complètement coupable, en réalité, parce que ce sont des personnes qui ont un trouble mais qui refusent d’admettre qu’elles ont un trouble et qui, par conséquent, disent que c’est insultant, que c’est marginalisant, et qui disent: “Il ne faut surtout pas dire que les personnes ont un trouble”.

Et moi, je me dis: “Pourquoi est-ce que vous vous battez pas contre ça plutôt que de contribuer à marginaliser les personnes comme moi?” 

Ils ont un tel poids dans le débat politique actuel qu’ils pourraient, franchement, facilement, changer un minimum la donne pour les personnes qui ont des troubles psy. Évidemment, ils ne le font pas. Tout comme ils ne défendent pas les droits des femmes et le féminisme parce que leur idéologie, tout simplement, ne leur permet pas. Ça, c’est tout ce que j’avais à dire sur ce point là.

Le deuxième point que je voulais aborder, c’est l’influence qu’exerce le transactivisme sur les sciences, qu’elles soient sur les sciences “dures” ou les sciences humaines. 

Je pense qu’on est tous d’accord pour dire qu’à partir du moment où une idéologie influence la recherche scientifique, la science est en danger. Et si la science est en danger, la vérité est en danger. Surtout que toutes les personnes qui osent s’opposer à cette injonction idéologique sont censurées (“canceled”) alors même que leurs arguments sont tout à fait scientifiques, entendables, fondés dans la réalité. Il y a des biologistes qui disent que le sexe est binaire (jusque là, pas de problème). Mais selon les transactivistes, ces biologistes ne comprennent rien à la biologie. 

C’est gros quand même! Je veux dire, venant de personnes qui n’ont pas fait d’études de biologie, c’est culotté, je trouve.

J’ai eu une conversation, d’ailleurs, avec quelqu’un sur Twitter : c’était un homme et il me disait que les gens qui “prétendent” (je le mets entre guillemets parce que c’est complètement absurde de dire ça) que le sexe est binaire ne sont pas informés, qu’ils n’y comprennent rien. Mais il faut savoir que, plus haut, il m’avait admis qu’il ne connaissait pas grand-chose à la biologie. Donc ce type vient dire : “Je ne sais pas trop, au niveau biologique, ce qui se passe, mais les gens qui disent que le sexe est binaire ne comprennent rien à la biologie.” 

Vraiment, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. 

Et ce qui m’a le plus mise hors de moi, c’est qu’il m’a sorti : “Au fond, au niveau biologique, il n’y a pas tant de différence entre les hommes et les femmes. Ils sont beaucoup plus similaires que différents.” J’ai rien dit là-dessus, mais je me suis dit : “Il y a vraiment qu’un homme pour sortir une telle énormité”. 

La raison de notre oppression millénaire, c’est les différences biologiques entre les hommes et les femmes. C’est la faiblesse physique. C’est le fait d’avoir ses règles d’avoir un utérus et donc pouvoir enfanter. C’est de là qu’ont décollé les normes genrées. C’est la base. Et nous, notre différence biologique, on la sent bien quand il y a un homme qui nous harcèle dans la rue. On la sent. Je sais pas, mais l’oppression qu’on subit, c’est pas parce qu’on se sent femme. C’est parce qu’on est une femme. Parce qu’on est une femme au sens biologique du terme. À ce stade-ci, je ne sais même plus dans quelle langue il faut le dire.

Un jour, j’ai lu un livre de (je ne sais plus comment elle s’appelle mais son nom de famille c’est…) Lachenal, “10 questions sur le genre” ou un truc comme ça. J’avais lu là-dedans que la biologie (et en particulier le sexe) était une construction sociale. Le jour où j’ai lu ça, je suis tombée des nues. 

Alors oui, pour parler de biologie, il y a un langage. On relie les observations entre elles par des mots qui font des catégories ou des concepts. Ça, c’est clair. Et il est vrai que la langage structure la pensée, et que le langage peut parfois mener à des oppressions. C’est la base de la philosophie et de la sociologie du langage. Il y a toute une littérature à ce sujet et on sait très bien que les hommes ont inventé ou modifié le langage pour mieux nous opprimer. On le sait. 

Mais ça veut pas dire qu’on ne peut pas faire des observations objectives et chercher la vérité en usant du langage. Si la biologie n’était qu’une construction sociale, elle ne serait qu’un ensemble de normes sociétales et arbitraires (ça, c’est important) qu’on pourrait changer à tout va sans que le corps humain et l’ensemble de la biologie ne deviennent incompréhensibles. Et ce n’est pas vrai. 

La biologie, les catégories qu’on a créées pour la biologie, sont essentielles pour pouvoir comprendre comment fonctionne le corps humain et comment on peut soigner le corps humain. Je trouve d’ailleurs assez drôle qu’il n’y a que la biologie qui soit une construction sociale et pas la physique, pas la chimie, pas les mathématiques. Ça, bizarrement, on n’y touche pas et je me demande bien pourquoi.

Rebelles du Genre –  Aujourd’hui, tu témoignes anonymement. Est-ce que tu peux dire pourquoi tu as choisi de témoigner et pourquoi tu le fais de façon anonyme?

Eléonore – Oui, je témoigne parce qu’il faut en parler tout simplement.

Je pense que c’est la raison principale. Et il me semble aussi que mon expérience, en particulier, est plutôt éclairante sur les dangers du transactivisme pour les personnes en souffrance ou en détresse psychologique. Tout simplement parce que c’est important de le souligner. 

Quant à l’anonymité, je l’ai choisie parce que je travaille pour une administration. Tout fonctionnaire se doit de défendre les minorités (ce qui est tout à fait normal), mais je pense que les politiques ont un peu oublié ce qu’est une minorité, ce que c’est qu’une personne vulnérable, et ce qu’il y a à défendre. 

J’ai un peu peur que, si je témoigne à visage découvert, je risque de perdre mon poste, et je ne peux vraiment pas me le permettre. Même si c’est beaucoup plus difficile de virer quelqu’un dans le public que dans le privé, mais bon, on reste prudente quand même.

Rebelles du Genre –  Est-ce que tu as une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Eléonore –  Oui. Là, ça n’a plus rien à voir avec la psychophobie pour le coup, mais c’est la menace que ça représente pour les personnes LGB.

J’ai un membre de ma famille qui est gay et il a vraiment été complètement endoctriné par l’idéologie trans. Je me rappelle que j’en avais discuté avec lui, j’avais avancé mes arguments qui étaient, quand même, plutôt solides, mais il ne parvenait pas à les entendre sans me voir comme une grosse transphobe. (Après, bon, c’est son droit. Mais le fait que ça puisse potentiellement briser des familles, c’est quand même vraiment catastrophique, je trouve.)

À un moment, on parle : je lui dis que c’est une menace pour les personnes LGB, et lui, effectivement, il est intéressé, il me demande pourquoi. Je lui ai dit qu’on était en train de complètement transformer le concept de sexualité en genrité (parce que c’est un mot que j’ai entendu, que j’ai vu passer: une “genrité” à la place de “sexualité”) et qu’on était en train d’enlever l’importance du sexe dans l’attirance sexuelle. Je lui disais, qu’en gros, les parties génitales, elles sont bel et bien importantes. Quand on couche avec quelqu’un, les parties génitales sont là. Il faut faire avec. Il faut arrêter de le nier. Nier ça, c’est homophobe et ça relève de la culture du viol et de la thérapie de conversion. 

Il m’a sorti : “ Et, pour toi, les femmes ne sont que des vagins sur pattes?” 

Alors là, j’ai pensé (je l’ai pas dit mais j’ai pensé) quand même, que venant de la part de personnes qui disent “personne à utérus” et “personne à vagin”, c’est quand même vachement gros. Bref, je ne l’ai pas dit. 

Je lui ai demandé : “Alors écoute, si un jour tu tombes amoureux d’un homme trans, (j’en doute mais bon, acceptons l’hypothèse) et que cet homme trans a un vagin, ça ne te dérangerait pas d’être intime avec lui?” Alors j’ai vu le choc et le dégoût sur son visage. C’était évident que juste l’idée même le dégoûtait. Mais il a persisté à me dire “Et bien, je me focaliserai sur ses attributs masculins, pas sur son vagin”. 

Je suis désolée, mais si on doit fermer les yeux sur quelque chose qui nous met mal à l’aise dans notre sexualité, on se force à avoir des relations sexuelles avec quelqu’un qu’on ne désire pas. C’est évident. Et on renie sa sexualité. Et ça relève de l’agression sexuelle, mais ça je l’ai déjà dit. Vraiment, le fait de ne rien pouvoir faire à ce niveau, pour moi c’est vraiment désespérant et c’est révoltant. Je ne peux pas aider ce membre de ma famille. 

Rebelles du Genre –  Est-ce que tu as quelque chose à ajouter?

Eléonore – Oui. La seule chose que j’ai à ajouter, c’est que vraiment j’en ai ras-le-bol de leur manie à nous déposséder du féminisme et plus largement de la gauche. Ça me met vraiment hors de moi. Je me dis : “Mais pour qui est-ce qui se prennent?”. Toute personne qui n’accepte pas le discours consensuel de la gauche, à l’heure actuelle, à beaucoup de niveaux, pose question. Si on critique un petit peu la gauche (même si on est de gauche), on est quand même taxé d’extrême droite. Alors qu’on (c’est dingue) vote à gauche, pour des politiques de gauche, on défend les minorités, mais on est d’extrême droite. N’importe quoi!

Je suis désolée, mais à quel moment a-t-on décidé que la gauche était un monolithe? Et à quel moment a-t-on décidé que la gauche n’admettait aucune nuance et aucune critique? C’est absolument totalitariste. Et honnêtement, si vous vous revendiquez de gauche mais que vous n’acceptez pas qu’on puisse la critiquer, c’est vous qui êtes loin d’être de gauche. 

Parce qu’historiquement, la gauche a toujours défendu le droit de critiquer et de questionner. Il n’y a vraiment qu’à l’heure actuelle qu’elle n’admet plus la critique. Pour moi, en tout cas dans l’idée que je me fais de la gauche, c’est plutôt vous qui n’êtes pas de gauche. Et vous êtes vraiment un mauvais citoyen aussi, au passage. 

Alors, je veux juste rajouter que j’avais vu une vidéo (je crois que c’est lui mais je suis pas sûre) d’un type qui joue un personnage qui s’appelle Jonathan Pie  et qui fait justement une critique assez virulente de l’idéologie woke (pour le coup il appelle ça comme ça). 

Il dit (c’est une chose qui est extrêmement frappante, et qui, moi, me choque beaucoup et qui est vraie) que c’est que l’argument de la liberté d’expression maintenant, c’est un argument de la droite. Et ça, c’est quand même vraiment très très inquiétant…

Rebelles du Genre –  Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basées sur le sexe : womensdeclaration.com 

Rejoignez-nous, n’ayez plus peur. Ensemble, nous ferons changer les choses. Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous et à bientôt pour un nouveau témoignage de Rebelles du Genre.

Rebelles du genre – Épisode 50 – Kathleen Stock

Kathleen – Alors je m’appelle Kathleen Stock.

J’ai presque 50 ans. Je suis femme, je suis mère, je suis lesbienne, et j’habite en Angleterre.

Et jusqu’à l’année dernière, je travaillais comme prof de philo dans une université en Angleterre, et j’ai dû arrêter tout ça, à cause de mes convictions sur (le) genre et (le) transactivisme… et tout cela.

Rebelles du genre – Bonjour, et bienvenue sur le podcast “Rebelles du genre”. Nous sommes des femmes, militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basés sur le sexe, et donc notre biologie. Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes, et le genre en est le moyen. Nous sommes les Rebelles du genre. Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste, et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis elles ouvrent les yeux, constatent sa violence, et la refusent. Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre, et qui témoignent de leur parcours. Ecoutons leur parole. 

Kathleen – La première chose que je veux dire, c’est : “qu’est-ce que c’est le genre?”

En anglais, c’est gender. 

Il faut remarquer immédiatement que “gender” ou “genre” a plusieurs sens.  

Ça veut dire des choses différentes, plusieurs choses différentes. Alors si vous voulez dire la masculinité, la féminité, c’est-à-dire les idées culturelles sur les femmes et les hommes… oui, je suis critique des façons, du genre, dans ce sens-là.

Manifestement les femmes ont beaucoup de possibilités, pour être masculines et également les hommes peuvent être féminins, et ça, ça va! Moi je suis plutôt masculin(e), c’est mon idée identité, si vous voulez dire ça.

mais ce mot – genre – , ça veut aussi dire quelque chose de complètement différent, maintenant, c’est-à-dire une identité psychologique. 

Alors le mot, en Anglais, c’est “gender identity”. 

De ces jours, le transactivisme insiste (sur le fait) que tout le monde possède un genre dans ce sens-là, et moi je ne suis pas d’accord avec ça : je pense que oui, parfois, une personne possède un genre -gender identity- dans ce sens-là, mais ce n’est pas universel, et aussi je suis contre les tentatives de changer les lois d’une façon qui supprime les faits autour du sexe, de la biologie, et puis aussi, en même temps, enlèvent le genre -gender identity- d’une façon qui désavantage les femmes.

Alors peut-être que vous connaissez, mais en Angleterre, au Royaume-Uni il y a beaucoup de support (soutien), pour changer les lois. 

Par exemple, un homme qui se sent “comme une femme” peut entrer dans les changing rooms, les vestaires, ou l’équipe de sport, ou la prison… alors là où il y a des espaces pour les femmes, il y a des gens qui disent : “ces espaces-là doivent être ouverts pour les hommes qui se sentent comme des femmes”. Et il n’y a aucun besoin d’avoir des interventions chirurgicales, ou même de s’habiller différemment. Il ne faut pas s’habiller “comme une femme”. C’est juste un sentiment intérieur, qui est supposé assez, suffisant, pour vous donner le droit d’entrer dans ces espaces-là.

RDG – Autrement dit, n’importe quel homme, sur la base de son ressenti, et donc de sa déclaration, peut entrer dans n’importe quel espace réservé aux femmes.

Kathleen – Exactement. C’est l’ambition. L’ambition des gens, soi-disant “progressifs” en Angleterre, et ailleurs dans le monde aussi. Maintenant aux États-Unis, au Canada, en France peut-être.

RDG – Oui, bien sûr.

Kathleen – Alors ça, je suis contre. 

RDG – Nous aussi, on est tout à fait contre.

Kathleen – Parce que, évidemment, c’est les femmes qui vont souffrir, si des hommes, n’importe quels hommes, peuvent entrer dans les vestiaires, par exemple, en disant qu’ils sont des femmes… Ils ne sont pas des femmes! Ils sont des hommes. Mais j’ai toujours su que les hommes ne peuvent pas devenir des femmes. Et aussi le contraire : j’ai toujours su les faits, sur (la) biologie.

Mais il y avait un moment, dans les années 90 peut-être. Quand je pensais “oui, je vais faire semblant, que cet homme, par exemple, qui s’habille comme une femme, qui, peut-être, a eu des interventions chirurgicales, je vais faire semblant que c’est une femme.” Et je ne voyais pas de problème avec ça, parce que c’était un petit nombre de gens, et aussi il n’y avait pas cette demande qu’il s’agit d’identité : c’était une transition chirurgicale, ou quelque chose comme ça.

Alors quand je m’étais rendu rendu compte que la nouvelle idée, c’était que exactement, il n’y avait aucun besoin d’intervention chirurgicale, ou aucun besoin de même s’habiller différemment, mais c’était juste une idée de “inside you” : quelque chose d’intime dans votre esprit, peut-être. 

Ca, j’ai vu des problèmes immédiatement. 

RDG – Alors du coup, je vais creuser un peu : est-ce que ça a impacté la façon dont tu as enseigné, ou les choses que tu avais à dire à tes étudiants?

Kathleen – J’ai enseigné le féminisme, la philosophie et les idées philosophiques en féminisme. Et j’ai remarqué, bien sûr, que cet environnement devenait de plus en plus intimidant. 

Il y avait la censure, l’autocensure.

Et les étudiants, la plupart trouvaient ça très difficile de parler de l’importance de la  biologie, ou… quoi que ce soit!

Parce que dans l’Université anglaise, ces dernières années, ça devient un tabou de dire que les “transwoman”… alors le mantra c’était ‘transwomen are women”, “les femmes trans sont femmes”, et c’est devenu obligatoire de dire : “transwomen are women” : on ne peut pas questionner ça. Et si on questionne, on est un TERF… on est transphobe.

Et les étudiants ne veulent pas perdre leur réputation, alors ils se taisent, et c’est très difficile de parler de tout ça. Et c’est dommage pour le féminisme, manifestement : on doit discuter des effets sociaux de la biologie pour les femmes!

RDG – Bien sûr, c’est une nécessité! Et donc tu as parlé d’autocensure. Donc tu as commencé, à un moment, à te rendre compte que tu ne disais pas complètement ce que tu ressentais? Ou est-ce que tu as lutté contre ça?

Kathleen – Oui, oui… Après que j’aie remarqué qu’il y avait un problème, je me taisais pendant… deux ans peut-être. Et puis je me suis décidée : il faut écrire quelque chose, il faut faire une intervention. Parce que je suis prof de philo, précisément. 

Et puis sinon moi, qui?

C’est mon métier de discuter des choses comme ça, et c’est une question philosophique : qu’est-ce que c’est une femme? Qu’est-ce que c’est un homme? Qu’est-ce que c’est le biologique? Ou qu’est-ce que c’est le genre, qu’est-ce que c’est l’identité de genre?

C’est tout cela : c’est des questions philosophiques!

Alors je voulais les adresser, et puis j’ai eu des problèmes… après!

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie?

Kathleen – Alors, je crois que les femmes ont des besoins, des intérêts, qui arrivent à cause de leur sexe. 

Alors je crois que les femmes doivent cohabiter sur une même planète que les hommes.

Et les hommes sont plus grands, en moyenne.

Ils sont plus forts, en moyenne.

Ils sont plus agressifs, en moyenne.

Et la plupart des hommes ont un intérêt sexuel envers les femmes.

Et ça, ça a des conséquences. Tout cela.

Alors, par exemple, les femmes ont besoin d’espaces, des vestiaires, ou dans les endroits où elles dorment, où elles se déshabillent, il faut leur donner des espaces pour faire cela sans les hommes. Ça les protège!

Également, dans le sport : les femmes doivent avoir leurs propres équipes, et leur propre “contests” (compétitions) parce que physiquement, elles n’ont pas les mêmes caractéristiques que les hommes. 

Également pour les données sociologiques, économiques et tout cela, on a besoin de connaître qui sont les femmes, qui sont les hommes.

Parce que les femmes à cause d’être mère ou d’être enceinte peut-être, ont des trajectoires différentes économiques par exemple, parce qu’ elles sont souvent des mères. Tout cela ça vient du fait du sexe biologique, ce sont les effets sociaux du sexe et le transactivisme veut dire qu’ il faut oublier tout cela. Maintenant c’est votre identité qui est la chose la plus importante et par exemple si un homme a le sentiment d’être femme, il peut jouer dans une équipe sportive féminine ou il peut entrer dans le vestiaire ou si un homme est condamné à la prison, il sera dans une prison de femmes. Alors c’est manifeste, je pense que tout cela est dangereux ou injuste pour les femmes, je pense que c’est pas compliqué à voir, mais les idées transactivistes, je sais pas, ont gagné le pouvoir et maintenant des gens deviennent aveugles à tout cela.

RDG – Oui c’est étonnant en fait, c’est justement on dirait que subitement les gens ne croient plus leurs yeux.

Kathleen – Exactement ! 

RDG – Et si on était misogyne, on dirait une “mini-hystérie collective” (rires) Evidemment on ne dirait pas ça.

Kathleen – C’est internet qui aide avec ça.

RDG – Ah d’accord. Tu penses que c’est lié  au développement des réseaux ? 

Kathleen – Tout à fait parce que internet a maintenant la capacité de  développer ses idées stupides très vite et puis ça devient utile pour des gens d’être vu en les “supporting”, en les soutenant.

RDG – Là c’est plutôt à la professeuse de philosophie que je m’adresse : est-ce que tu penses que les gens ont renoncé à leur intelligence par rapport à cette idéologie ou est-ce que c’est la peur qui les amène à ne pas croire ce que leurs yeux leur montrent ?

Kathleen – Les deux je pense, en même temps. Je pense qu’il y a relativement peu de voix mais des voix sont fortes et très critiques, ils ont un peu l’esprit de chasser des sorcières. Alors dans toutes les sociétés il y a des gens qui sont narcissiques, qui n’ont pas beaucoup de connaissances de soi, mais qui font beaucoup de bruit et chassent les sorcières. Peut-être sont- ils stupides ou ils ont d’autres motivations, peut-être misogyne aussi, mais à cause de ce groupe là les autres ont peur. Alors les autres ne disent rien parce qu’avec l’Internet et les réseaux sociaux, c’est très facile de dénoncer quelqu’un, très facile, trop facile et on peut perdre beaucoup si on vous dénonce pour avoir des pensées tabous ou “unacceptable”.

Rebelles du Genre – Donc l’effet d’Internet est double, c’est-à-dire il permet de diffuser, de propager ses idées et en même temps de mettre sous pression, traquer les éventuels opposants.

Kathleen – Parce que c’est comme dans un amphithéâtre, tout le monde voit et vous avez connaissance de ça quand vous écrivez quelque chose.

Rebelles du Genre – Oui sauf que là quand on écrit, c’est pas devant 200 ou 400 étudiants mais bien devant des millions de personnes que ça se passe et donc la pression est d’autant plus forte.

Kathleen – je pense que c’est Jean-Paul Sartre qui a dit “ l’enfer c’est les autres” (rires). J’ai dit que c’est un problème pour la sécurité des femmes et leur vie privée. Pour les enfants c’est aussi dangereux parce que les enfants sont très “confused”, les enfants ne comprennent pas l’effet autour de la biologie maintenant parce que leur enseignant disent que “si tu te sens comme une petite fille, tu es une petite fille” par exemple, c’est très tentant pour les enfants et les adolescents qui ont des sentiments homosexuels ou qui sont autistes, de se considérer dans le mauvais corps. Et ce n’est pas possible d’être dans le mauvais corps. Moi je suis lesbienne, je pense que les filles lesbiennes devraient être libres de s’exprimer sans peur d’ être dans le mauvais corps, même les filles masculines, même les filles qui aiment les filles, tout cela c’est normal. 

Mais maintenant on a ce message disant qu’elles doivent se médicamenter ou se changer ou elles ne sont pas des vraies filles.

Rebelles du Genre – En fait, ce dont tu parlais par rapport aux enfants, c’est un peu l’idée de la pensée magique, c’est à dire que c’est la pensée qui maintenant domine le corps : “je pense que je suis ça, donc je le suis” Alors que logiquement quand on grandit, bah normalement on sort de la pensée magique.

Kathleen – C’est un peu comme Descartes avec “l’âme et le corps” qui sont des choses différentes et maintenant votre âme est un genre et ça c’est le vrai vous et votre corps c’est quelque chose de différent et ça peut être mauvais. Et c’est ridicule ça, le dualisme de Descartes ça n’a pas de sens.

Rebelles du genre – Oui : nous sommes nos corps.

Kathleen – Oui : nous sommes nos corps, oui exactement ! Le transactivisme est très militant et comme je l’ai décrit, c’est difficile à dire que les femmes trans ne sont pas des femmes, c’est très difficile à dire cela maintenant. Alors il y a des efforts énormes pour silencer les critiques du transactivisme. En France aussi ! Alors on dit vous êtes fascistes, vous êtes transphobes, vous êtes comme un antisémite, il dit n’importe quoi pour vous silencer.

Rebelles du genre – D’extrême-droite…

Kathleen –  Extrême-droite, exactement !

Rebelles du genre – Religieux…

Kathleen – Chrétien, extrême, toutes les insultes pour simplement vous faire taire. Et ça c’est un problème pour la démocratie évidemment et particulièrement pour les femmes qui ont le droit de parler de leur propres intérêts sans peur d’être insultées ou dénoncées ou perdre leur emploi.

Rebelles du genre – Merci de témoigner aujourd’hui. Est-ce que tu pourrais développer sur ce qui t’a poussé à parler et les difficultés que tu as rencontré quand tu t’es exprimée sur ces questions-là ? Et notamment l’impact que ça a pu avoir sur ta vie personnelle et sur ta vie professionnelle ?

Kathleen – j’ai voulu parler parce que j’étais prof de philo et je pensais que ces problèmes étaient très importants et c’était aux gens de parler de tout cela et j’ai remarqué que dans les universités il y avait le silence sur les problèmes avec le transactivisme. Il y avait des profs qui étaient très pour,  très enthousiastes pour tout cela : “Transwomen are Women”, “Self ID”, cette idée que si vous vous sentez ou vous identifiez comme une femme, alors vous êtes une femme. Et moi j’ai vu des problèmes, j’ai voulu parler des problèmes, j’ai commencé : j’ai écrit des blogs et puis j’ai parlé en public et j’ai fait des interviews et puis il y a eu des problèmes pour moi. Simplement un groupe relativement petit mais fort a protesté contre moi, puis des collègues ont protesté contre moi, aussi il y avait des lettres ouvertes contre moi. “Basically” au fond il y avait plusieures tentatives “to remove me” de me faire quitter mon emploi et c’était dans le cours de 2018 que ça a commencé. Finalement l’année dernière un groupe d’ étudiants ont décidé de faire des manifestations contre moi sur mon campus et c’était affreux : ils avaient des flambeaux, des masques, ils s’habillaient comme des antifas, il se désignait antifascistes.

Rebelles du Genre – En France aussi ils prétendent être antifas…

Kathleen – Et moi ils prétendaient que j’étais fasciste et eux ils étaient des antifascistes, ils s’habillaient comme des antifascistes avec des flambeaux, avec le graffiti, avec un manifesto contre moi et c’est devenu sérieux pour moi et très difficile à continuer à enseigner dans cet environnement avec des hommes masqués contre moi pour mes convictions. Alors finalement j’ai quitté, j’ai quitté l’université du Sussex après 18 ans de service parce que j’étais complètement isolée, c’était très vite difficile de trouver des gens qui voulaient me soutenir en public, alors j’étais très isolée et ça c’est très difficile quand il y a des hommes masqués qui veulent vous agresser.

Rebelles du Genre – Vraiment je sais pas quoi te dire, je trouve ça, je savais l’histoire mais l’entendre dire de ta voix ça, moi ça me.. Je trouve ça bouleversant et tellement choquant et moi je suis enseignante aussi et dire que tes collègues ne t’ont pas soutenue c’est insupportable en fait.

Kathleen – Bon quelques-uns m’ont envoyé des e-mails privés mais ce que je voulais à ce moment-là, c’était des gens à côté de moi. Et ça n’arrivait pas. Il faut aussi dire que Sussex,  c’est une université basée à Brighton et c’est le centre LGBTQ etc… C’est le centre “gay” alors c’était très difficile dans cet environnement- là de discuter de tout cela calmement.

Rebelles du Genre – Pourtant le terme LGBT commence par le “L” mais vraiment, on se rend compte à quel point les lesbiennes sont particulièrement violentées par le transactivisme.

Kathleen – Exactement ! Justement mes collègues, la plupart sont des hétérosexuels et mes critiques étaient hétérosexuelles (rires). C’est bizarre mais quelques-uns se désignaient “Queer” mais elles étaient des hétéros, c’est comme ça. J’étais là un mois je pense, mais j’étais malade et c’était vraiment difficile quand j’ai démissionné. Mais ces activistes se sont réjouies d’avoir réussi à me pousser “out”. Maintenant j’écris et je fais d’ autres choses. Je n’ai pas envie d’ être dans une université en ce moment parce que c’est trop difficile de discuter de tout cela et maintenant je suis d’un coup célèbre un peu, je ne pense pas que je trouverai un emploi en effet.

Rebelles du Genre – Oui j’ai lu sur ton blog récemment que tu étais à la gare et qu’il y a un transactiviste qui t’a reconnue c’est ça, donc tu es devenue un peu le personnage maléfique “Voldemort”, tu es “Lady Voldemort” (rires).

Kathleen – Oui exactement ! J’étais à la gare avec mes fils et j’ai vu cet homme s’habiller dans une robe,  il me faisait un doigt d’honneur et il avait l’air très en colère, il avait l’air fâché. Et c’était bizarre parce que je l’ai jamais vu de ma vie mais il me connaît comme un problème pour lui à cause de mes mots. Et mes mots sont très calmes et raisonnables et j’ai écrit un livre avec tous ces arguments et ses propositions, je suis intellectuelle, mais lui était très fâché contre moi. 

Rebelle du genre – Tu es devenue une sorte d’ épouvantard pour rester dans l’univers tu vois ce que c’est l’épouvantard ? C’est dans l’univers Harry Potter tu sais c’est les trucs…

Kathleen – Oh ! Des “dementors”.

Rebelle du genre – Ou c’est ça en anglais, tu es devenue l’épouvantard,  tu fais peur aux fripouilles ! Donc aujourd’hui, est-ce que tu te sens en sécurité aujourd’hui ? 

Kathleen – Des fois non, des fois oui, la plupart de temps oui.  Mais non, quand j’ai vu cet homme là non !

Rebelle du genre – Surtout que tu étais avec tes enfants donc j’imagine que ça augmente le stress.

Kathleen – Exactement, j’ai un visage connu maintenant, c’est bizarre parce que j’ai presque 50 ans et maintenant je suis un peu célèbre, c’est bizarre, mais c’est vrai que les gens me reconnaissent dans la rue.

Rebelle du genre – Est-ce que tu vas parler quand même du fait que J.K Rowling t’a soutenue ? Tu vas le dire à un moment ou pas ? (rires)

Kathleen – je suis très reconnaissante envers J.K pour m’avoir soutenue et je pense qu’elle est une femme superbe et vraiment courageuse aussi, elle a fait beaucoup pour les femmes juste par discuter en public c’est une chose compliquée, alors je l’aime.

Rebelle du genre – En fait nous aussi on l’aime tellement pour son courage et pour son humour (rires) C’est tellement drôle parce que des fois elle les plie en quatre, elle les repasse et elle les jette ! C’est tellement drôle ! 

Voilà mais c’est vrai qu’elle a pris position publiquement pour toi à un moment donné.

Kathleen – Exactement et pour tout le monde qui ne peuvent pas parler. 

Rebelles du Genre – c’est tellement important d’avoir des modèles de femmes qui parlent, qui ne sont pas en danger, enfin si elle est en danger bien sûr comme toutes les femmes, mais qui ne risque pas sa carrière pour s’exprimer. Qu’elle fasse ça c’est vraiment… Et puis elle est tellement connue et tellement géniale !

As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Kathleen :  Ok ça va être peut-être difficile à décrire mais il y avait un événement il y a deux ans, trois ans je pense, c’était un “public meeting”, une réunion publique à Brighton organisée par “A Woman’s Place” c’est une organisation féministe, et il y avait beaucoup de transactivistes, là, sur le pas de la porte, juste en dehors du bâtiment. Ils criaient, ils jetaient de l’eau, il m’ont tapé sur la tête quand j’ai essayé d’entrer, je ne pouvais pas trouver l’entrée. Il y avait tout ce bruit, ces cris, ces gens. J’avais l’impression d’être vraiment détestée et puis on est entrées, on a essayé d’écouter les paroles des femmes, à cet événement. 

Et les transactivistes ont entouré le bâtiment, et avec leurs bottes, ils ont tapé sur les vitres avec leurs pieds. Alors on a essayé, les femmes ont essayé de parler de leurs intérêts propres, de leurs besoins, et tous ces transactivistes ont essayé de rendre ça impossible pour tout le monde. 

C’était vraiment effrayant, cet événement-là, pour moi. Et ça m’a montré le caractère du transactivisme : c’est autoritaire, c’est misogyne, et ça n’a pas de place dans une société démocratique. Parce que les femmes voulaient discuter de leurs intérêts, c’est tout!

Et de leurs différences avec les hommes c’est tout. 

C’était vraiment impressionnant !

Rebelles du Genre – C’est vraiment grave qu’on en soit là quand même…

Kathleen – Ouais et ça m’a marquée. J’étais vraiment différente après ça.

Rebelles du Genre – Et ça c’était quand tu enseignais encore ?

Kathleen – Oui oui ! Ça c’était, je pense en 2019, c’était 2019 je pense. 

Rebelles du Genre – Est-ce que tu as d’autres anecdotes ? Tu as dit “j’en ai plein” !

Kathleen – Il y avait plusieurs fois où j’étais invitée à parler, dans une université par exemple, et puis ils ont essayé de trouver un transactiviste pour discuter avec moi pour “balance”, pour équilibrer le débat et ça c’est quelque chose que personne ne fait dans les autres sujets mais ils ont essayé de trouver un transactiviste pour débattre. Personne n’a accepté, c’était impossible de trouver un interlocuteur.

Et c’est une tactique aussi, parce que moi je ne peux pas, je n’ai le droit de parler sans  un opposant. C’est juste une autre tactique.

Rebelles du Genre – En fait s’ils étaient pas disponibles, c’est qu’ils étaient en train d’essayer de trouver une définition non circulaire du mot Femme. (rires) 

Ils cherchent encore ! 

Kathleen – Exactement ! (rires)

Rebelles du Genre – Donc alors, la dernière question c’est : “As-tu quelque chose à ajouter ?” Si tu préfères le faire en anglais il n’ y a pas de problème, on le traduira. Ce qui serait vraiment intéressant, ce serait que tu puisses vraiment parler de cœur à cœur avec les femmes qui t’écoutent.

Kathleen – Je vais essayer en français mais peut-être que ça ne va pas marcher. 

Je voulais dire qu’en France, il faut trouver les autres femmes, qui ont les mêmes préoccupations que vous, et travailler ensemble. En France, vous êtes au début, je pense, de ce voyage. En Angleterre, on est un peu plus “avancés”, le public a plus conscience de ces problèmes mais en France je pense que non. Je pense que personne ne comprend les problèmes : c’est trop facile de dire que “c’est juste des fascistes” ou “contre les droits”… 

Alors il faut parler si vous en avez le pouvoir, il faut parler. 

Mais il faut aussi s’unir avec les autres pour se soutenir. 

Et aussi dans les autres pays je pense, parce que c’est un problème européen.

Il va falloir vraiment résister à tout cela, ensemble avec les autres femmes.

Pas des féministes particulièrement, il ne faut pas être féministe pour avoir des problèmes avec tout cela. 

Moi je suis féministe.

You don’t have to be signed up to feminist principles to worry about men that say they are women, getting into women’s refugees or hostels, or sports teams. 

So… this is a problem that affects every woman, and girl, potentially, in France. 

And I think that message is important too : it’s a basic problem for women. 

Vous n’avez pas à être féministes pour vous inquiéter au sujet d’hommes se disant femmes, et pénétrant dans les refuges, hôtels, ou équipes sportives pour femmes. 

C’est un problème qui va potentiellement affecter toutes les femmes et les filles en France et je pense que ce message est important également : c’est un problème tout à fait fondamental pour les femmes.

Rebelles du Genre – Merci d’avoir écouté notre parole et n’hésitez surtout pas à partager le plus largement possible. S’il vous plaît signez la Déclaration des Droits des Femmes basées sur le sexe

http://www.womensdeclaration.com

Rebelles du genre – Épisode 49 – Chantal

Chantal – Je m’appelle Chantal, je me décris comme lesbienne, féministe. J’ai un peu plus de 50 ans. Je suis parisienne et j’ai toujours évolué dans le milieu LGBT, puisque j’ai participé en 94 à la création de ce qui s’appelait à l’époque le centre gay et lesbien, près de Bastille, et j’ai eu deux enfants en coparentalité avec un homme gay.

Dès l’ouverture du centre gay et lesbien, près de Bastille, en 94, on a senti le besoin d’un moment d’accueil non mixte réservé aux femmes, évidemment aux femmes nées femmes, avec une expérience de femme, une éducation de femme, parce que la plupart des moments d’activité étaient souvent accueillis par les homosexuels hommes, par les gays, et on a senti le besoin d’un moment d’expression sèche pour les femmes, réservé aux femmes, et donc non-mixte. Ça s’est appelé le vendredi des femmes. Et j’y ai toujours plus ou moins participé. J’ai rencontré celle qui est devenue la marraine de mes enfants, en 94, au deuxième vendredi des femmes, que j’ai animé ensuite. Ensuite, je suis revenue participer, entre 2006 et 2012. À l’époque, Christine Le Doaré, d’ailleurs, était la présidente du centre, et j’invite toutes les auditrices à lire son livre, qui s’appelle “Fractures : comment le mouvement LGBT a perdu son L”. 

À partir de 2012, j’ai suivi une formation sur la démocratie participative et l’animation des débats. Et donc, je me suis lancée dans l’animation de rencontres, d’échanges, au sein du vendredi des femmes. Alors, par exemple, je vous donne quelques thèmes des débats que j’ai pu animer : “Des gouines rouges à la PMA pour toutes : la place des lesbiennes dans la société”, un autre sur le désir lesbien “Qu’est-ce qu’une femme désire quand elle désire une autre femme ?”, un autre où nous avions invité Odile Fillod, sur “Le clitoris, cet inconnu” (Odile Fillod étant celle qui a fait la première échographie du clitoris), et un autre débat, qui a eu beaucoup de succès, qui s’appelait “Femmes, comment pécho ?”

Là, il y avait beaucoup de participantes. Et j’y ai vécu de grands moments de sororité, d’écoute, de bienveillance, d’échanges et aussi, de ce qu’on appelle en anglais “empowerment”, c’est-à-dire où on se sentait plus fortes ensemble. 

En 2018, mon amie et moi nous avons suivi une formation à la transidentité, imposée par le Centre LGBT à tous ses bénévoles, une formation qui était menée par Sam (ex Marie-Hélène) Bourcier, pour ceux qui la connaissent. Et nous étions donc les seules femmes présentes. Et parmi les discours qu’elle nous a tenu, elle a dit, en substance, ceci : “Un homme attiré par les femmes, mais se sentant lui-même une femme, pourrait se retrouver en couple lesbien.” Et là, mon amie et moi nous avons protesté, en disant qu’on ne pouvait pas utiliser le mot de “Lesbien” pour cet homme hétéro, et qu’il n’aurait, évidemment, pas du tout ni le même vécu, ni la même expérience de la lesbianitude, du gouinistan, que les femmes qui, elles-mêmes, avaient ce coming out à faire, cette révélation, et cette appropriation de leurs désirs, et cette affirmation d’un désir sans hommes (qui reste quand même toujours dans une société patriarcale, masculine, profondément misogyne, où les lesbiennes sont souvent plutôt vues comme des agréments pour les films pornos). Ça reste des moments très difficiles et, bien sûr, un homme ex-cis-hétéro n’aurait pas du tout eu ce même parcours et ces même épreuves. 

Ce à quoi Sam/Marie-Hélène Bourcier a répondu : “Oh, vous les lesbiennes, de toute façon, vous êtes contre tout. Notre parole n’avait absolument aucune importance.” Ça, ça a été la première étape où je me suis rendu compte qu’il y allait y avoir un problème avec la transidentité. Et effectivement, lors d’un débat sur la santé des lesbiennes, il y a deux hommes avec du fond de teint, une jupe, des talons hauts, (toutes les caricatures du genre féminin que justement beaucoup de lesbiennes refusent) qui sont venus pour participer à cette réunion.

Et très vite ils ont monopolisé la parole parce qu’il en est ainsi et tout le monde l’a vu dans des réunions que ce soit professionnel ou familiales les hommes se sentent toujours autorisés et légitimes à parler, alors que les femmes il faut beaucoup plus souvent les solliciter, leur demander leur avis, elles vont plus spontanément écouter.

Et donc ces deux hommes ont complètement ruiné mon débat sur la santé des lesbiennes, puisqu’ils se sont mis à parler, à interrompre tout le monde, à parler entre eux… Et pour finir, le débat a évolué sur le cancer de la prostate ! Un grave problème de lesbiennes ! On le sait bien !

Quand j’en ai parlé à la salariée du centre, elle a dit que c’était moi qui avais mal géré le débat, donc me faisant reporter, bien sûr, sur moi, la faute.

Bon ensuite est arrivé le covid, la fermeture du centre, et c’est vrai qu’à la reprise il y a eu deux événements d’abord j’ai trouvé que les opinions étaient beaucoup plus en opposition : que ce soit des anti-vaccins, des pro-vaccins…

Enfin bon et que du coup les débats étaient très difficiles à mener.

J’ai arrêté d’animer des débats parce que l’ambiance était telle qu’il n’y avait plus moyen de discuter ensemble et ensuite parce que l’entrisme des trans était de plus en plus fort, et que si un homme se désignant comme femme voulais participer et si moi en tant qu’animatrice je lui répondais que c’était non-mixte et qu’il n’avait pas à venir, du coup le débat entre les participantes porterait uniquement sur sa présence ou non, et ça risquait bien sûr de faire des disputes et en plus j’étais desavouée par le Centre LGBT lui-même.

Nous avons été convoquées par (je dis nous puisque c’était les animatrices du vendredi des femmes) on a été convoquées par les membres du bureau, pour (beaucoup de guillemets) “résoudre notre problème avec la transidentité” et donc il nous avait été imposé de suivre une formation à la transidentité ; j’ai dit que moi je l’avais déjà suivi et que ça m’apportait rien et les filles ont refusé en demandant à ce qu’une formation à la prévention du sexisme et à la misogynie soit aussi introduite dans la formation du bénévole, au centre, puisque on trouvait que si le vendredi des femmes avait été créé donc quand même il y a 28 ans c’est bien qu’il y avait nécessité d’un espace non-mixte ou la parole safe pouvait se dire et que du coup il était important de former là aussi les bénévoles du centre pour que au moins ils aient conscience des présupposés qu’ils ont pour l’accueil des femmes. ! 

Voilà. 

C’est mon parcours ! 

Les deux derniers événements bien sûr c’est la manifestation du 8 mars 2022 où énormément de pancartes sur la transidentité, énormément d’affiches étaient contre ce qu’ils appellent des TERFS, des féministes excluant les trans. 

J’ai trouvé ça très violent : comme si la première chose qu’il fallait faire le 8 mars c’était exclure des féministes, surtout que l’on sortait d’une période de confinement où on sait que les violences domestiques avaient considérablement augmenté.

La situation s’est reproduit à la Marche des fiertés puisque le slogan était clairement une revendication trans, et oubliait toutes les revendications lesbiennes, féministes, et même gay.

RDG – Est-ce que tu peux nous dire le slogan s’il te plaît ? Le mot d’ordre ? 

Chantal – “mon corps, mon choix, ta gueule” ce qui est quand même violent et puis surtout encore énormément de pancartes “terf out” etc.

Je trouve que ces couillus avec des fonds de teint sont… Moi j’ai tendance à parler de “couillus” pour parler des hommes de sexe biologique parce qu’après tout dans l’utilisation “celle-là, elle en a” ou “il en a” on voit très bien de quoi il est question, et je trouve que ça ramène au corps biologique et aussi à l’éducation qui va derrière donc…

Je trouve que le fait que, ces couillus avec du fond de teint s’attaquent au féminisme, c’est une preuve de lâcheté. 

Parce que je ne les vois pas du tout faire les mêmes manifestations dans les milieux masculinistes ou Zemmouriens et ça rentre dans la domination masculine.

Voilà, ce sont ces différents éléments qui ont fait que j’ai signé une tribune luttant contre l’invisibilisation des lesbiennes dans le mouvement LGBT et qu’à l’issue de cette signature j’ai été exclue du Centre LGBT et désignée comme transphobe. 

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société ou pour la démocratie ?

Chantal – Eh bien déjà ça invisibilise complètement les combats des femmes. En tant que femme biologique, on grandit dans un corps de jeune fille. Il y a cette obligation d’inclure à chaque fois les femmes avec pénis donc, les hommes avec des fonds de teint : ça renforce la binarité ! 

Par exemple on voit les hommes qui se disent femmes dans les médias quand ils réussissent par exemple à aller dans des compétitions sportives, ou quand ils se font élire à des postes de responsabilité ; par exemple : la loi sur le conseil municipal, qui veut que les listes soient paritaires, (un homme/une femme) va-t-on voir “des femmes avec pénis”, des hommes se disant en femme, prendre les places des femmes biologiques des femmes “nées femmes” (vraiment femme) au sein des conseils municipaux ??

On pourrait parfaitement avoir des conseils municipaux plein “d’êtres humains à pénis” certains se revendiquant hommes, certains se revendiquant femmes, mais ils ont au fond la même éducation, le même mode de pensée, la même culture, et donc ça silencie, ça bâillonne, ça empêche d’utiliser les bons mots…

Moi je repense à la phrase de Camus “mal nommer un objet n’apporte que du malheur dans le monde” ben là on nomme mal des êtres humains !

Il y avait le rapport sur l’inceste qui dit que c’est encore 90% des filles qui souffrent d’inceste. Bien sûr qu’il y a des personnes qui sont incestuées de tous les genres et qu’il y a des personnes qui sont violées de tous les genres, (même si ce sont majoritairement des femmes qui sont violées) par contre les violeurs sont systématiquement des hommes ! Et on aurait plus le droit de le dire ! Donc ça supprime les lieux safe pour les femmes qui a été quand même déjà très difficile à obtenir ;

Ça supprime les critères de parité, au sein des conseils municipaux, au sein des députés, au sein des conseils d’administration des entreprises… Ça renforce la binarité parce que pourquoi un homme qui voudrait se maquiller serait forcément une femme ? Au contraire, il faut lutter… (enfin lutter…) pour que les hommes se débrouillent ! Et que s’ils ont envie de se maquiller, qu’ils prennent le droit de le faire ! Sans emmerder le voisin, et notamment les femmes ! 

Ça peut empêcher certains progrès : par exemple moi je suis favorable à ce qu’on installe des distributeurs gratuits de protection périodique dans les collèges et les lycées, …bon, les revendications trans font qu’ils veulent également que ce soit installés dans les toilettes pour homme : bien sûr pour les garçons avec leurs règles ! (des filles, bien sûr). Il va sans dire que ça multiplie le coût, ça multiplie les risques de dégradation, et donc au final ça ne se fait pas ! Alors que ce serait très utile pour les filles d’aujourd’hui.

Et enfin on a l’impression… Enfin pour moi, je le vis comme une appropriation identitaire, c’est-à-dire que tous les combats des féministes qui a eu avant nous c’est couillus avec leur fond de teint, leur maquillage et leurs hauts talons ils viennent nous dire “bah Vous vous êtes pas des vraies femmes c’est nous les vrais femmes !” et donc ils renforcent les stéréotypes de genre, je dis. Mais qu’est-ce que ça veut dire “je me sens femme” ?? Ça veut dire qui correspond à des stéréotypes de genre du type “il est doux” “il aime jouer à la poupée” ?? Dans ce cas-là, bats-toi pour être un homme qui a le droit de faire ce qu’il veut !!

Et d’ailleurs, dans les temps anciens, jusqu’à assez récemment, il y avait une loi qui interdisait aux femmes de mettre un pantalon ! C’était dans la loi, c’était dans la législation ! Il n’y a jamais eu aucune loi qui interdisait aux hommes de mettre une jupe ! Ni de se maquiller ! C’est juste qu’ils n’osent pas, ils ont pas les couilles pour le faire, ils sont trop lâches, voilà.

Et donc ils préfèrent s’en prendre aux femmes, c’est tellement plus facile !

Donc on se retrouve avec des bars où il y a marqué “bar de filles” et où quand on arrive, il y a une majorité d’êtres humains à pénis, de tous les genres ; on se retrouve dans des réunions avec des hommes qui se prennent pour des femmes, qui monopolisent la parole !

Cette auto identification fait que ça peut arriver à n’importe quel moment dans la vie, c’est-à-dire qu’on a une personne par exemple notre “homme cis” là, qui a vécu toute sa vie en tant “qu’homme cis” voir hétéro, disons “homme normal” si vous préférez, j’aime pas non plus le terme “CIS, donc un hétéro et qui d’un seul coup va se revendiquer une identité non seulement de femme, et même de lesbienne, et du coup s’imaginer aussi légitime que quelqu’un qui a effectivement vécu au quotidien toutes les pressions du monde hétérosexuel, patriarcal, dominant. 

Moi j’ai vu une personne qui avait été directeur de maison de retraite donc il avait certainement une belle vie, un bon salaire, il avait certainement fait travailler les femmes dans des conditions précaires, et puis qui a 65 ans dit ah bah maintenant je suis une femme, je prends de l’œstrogène je me fais pousser des seins et voilà.

Et enfin je connais au moins deux personnes qui m’ont rapporté avoir eu des propositions très désagréables et limite du harcèlement de la part de pseudos femmes trans expliquant que puisqu’elle se sentait femme, la copine qui était lesbienne devait sortir avec elle ! Non !

Et du coup le problème est toujours reporté vers les femmes : c’est “si tu ne sors pas avec moi c’est que toi tu as un problème avec le pénis”.

Non. 

Je ne sors pas avec toi parce que moi je préfère les femmes et toi tu n’es pas une femme. Voilà. Il y a au moins deux personnes qui m’ont rapporté avoir eu, comme ça, du mal à sortir du harcèlement d’une trans qui voulait à tout prix coucher avec une lesbienne. 

Je voudrais revenir aussi sur la notion de ce qu’ils appellent le “plafond de coton”. Ce serait le Graal à atteindre : réussir à coucher avec une lesbienne, briser le plafond de coton. Pour moi, ça rappelle beaucoup le viol correctif qui se faisait notamment en Afrique du Sud contre les lesbiennes, et donc c’est absolument scandaleux. C’est comme les pancartes “Terfs au bûcher”. Si ça ne vous rappelle pas la chasse aux sorcières… 

C’est terrible. J’ai l’impression d’une immense régression et d’une immense violence. 

RDG – On pourrait même appeler ça de la thérapie de conversion, finalement : forcer une femme lesbienne à coucher avec un homme.

Chantal – Oui, tout à fait. Ça y ressemble beaucoup. Et puis, faire porter sur elle le problème : “C’est toi qui as un problème avec le pénis”. Ce qui est d’ailleurs amusant, mais on pourrait relever toutes les incohérences de cette idéologie trans. C’est, par exemple, au planning familial, lorsqu’on va vous dire : “Ah, mais le phallus ce n’est rien, c’est juste un organe, ça n’a au fond aucune importance.”

RDG – C’est pas un problème d’avoir un problème avec le pénis. On a un témoignage (celui de Marie, que tu pourrais écouter) qui va exactement dans ce sens-là. Elle est lesbienne, elle était bénévole au planning et elle a été harcelée aussi par le planning familial, par des membres du planning familial de là où elle était. On lui a dit : “Tu as un problème avec le pénis”. 

Chantal – Bien sûr. C’est absolument scandaleux. Ils le minimisent en disant : “Bon, c’est juste un organe, ne vous arrêtez pas à ça, c’est pas grave”. Il faut quand même reconnaître qu’il y a des femmes qui sont nées dans une famille royale et il parce qu’elles n’avaient pas de phallus, elles n’ont pas pu devenir reine, puisqu’on était dans la loi phallique. Qu’il y a des enfants qui sont avortés en Inde ou en Chine, ou peut-être même en France, parce qu’ils n’ont pas de phallus. Qu’il y a quand même énormément de pays où des enfants sans phallus sont violés, vendus, n’ont pas le droit à l’école. Donc considérer que ce n’est rien, c’est tout simplement nier des siècles de domination masculine, phallocratique, c’est absolument scandaleux. 

De la même manière, je trouve que la phrase de Simone de Beauvoir “On ne naît pas femme, on le devient”, se comprend comme un oignon, avec différentes couches. On commence à devenir une petite fille à trois ans, à quatre ans, à six ans, à 12 ans, et à la puberté c’est encore une autre sensation etc. 

Ce n’est absolument pas : “Je me réveille un bon jour, je décide de mettre une robe et ça y est je suis une femme.”

Et ça, il ne le comprennent pas. 

Pour moi, le transactivisme c’est du masculinisme de la pire des manières puisque c’est de l’appropriation identitaire. En plus, c’est souvent des gens qui par ailleurs ont une pensée intersectionnelle ou woke. On va les voir rouspéter quand un auteur Blanc ou un traducteur blanc traduit une poétesse noire, ou parler d’appropriation culturelle. Mais là, pour moi ; il s’agit d’une appropriation identitaire, c’est-à-dire des individus qui n’ont rien à voir, usurpent une identité. Alors que, c’est d’ailleurs dit dans la présentation et Podcasts rebelle de genre, à la base moi j’étais plutôt favorable à la transidentité dans la mesure où c’était trans de genre, c’est-à-dire la possibilité pour chacun d’être comme il veut et de faire ce qu’il veut : les filles au foot et les garçons à la danse classique, même avec des tutus. Ça créait un espèce de troisième sexe, un troisième genre. 

Mais considérer qu’un homme qui ne se sent pas complètement masculin est une femme, c’est une appropriation identitaire et c’est un crachat à la gueule de ma mère, de ma grand-mère, de mon arrière-grand-mère, et de toutes les femmes qui ont supporté la domination masculine, qui n’avaient pas le droit de vote, qui n’avaient pas le droit de faire des études, et qui devaient dire “Amen” à leur couillu de mari et qui devaient supporter le viol conjugal. C’est un crachat à la gueule de toutes les petites filles qui se font mettre la main aux fesses à 12 ans dans le métro. C’est un crachat à la gueule de toutes les filles stagiaires qui ont eu un chef de service qui leur a peloté les seins. C’est ça, quand un homme se déclare femme par son bon vouloir. 

C’est-à-dire : en fait tu n’existes pas et je prends ton identité. Mais bon, si je prends ton genre, je ne prends pas forcément ni ta retraite, ni ton harcèlement, il ne faut pas exagérer non plus. 

J’ai vu des articles sur des hommes se déclarant femme qui étaient soit élus maires, soit venaient d’une famille très religieuse (rabbin de New York qui avait quitté sa communauté pour devenir une femme trans) et les compétitions sportives où les hommes qui se déclarent femmes battent assez facilement les vrais femmes physiologiques. Par contre, quand est-ce qu’on parle des hommes trans (donc des femmes se disant hommes) ? 

Quand ? Quand elles sont enceintes. Ah bah la grossesse ! Et donc du coup on voit les hommes même s’ils portent des jupes et du maquillage, du fond de teint, des talons hauts, qui sont dans la politique, qui sont dans la religion ou qui sont dans le sport et on voit des femmes (même si elles se disent hommes) qui sont reconnues pourquoi ?

Pour leur grossesse. Ah mon dieu il est enceinte c’est merveilleux ! Je trouve que c’est très binaire alors que la transidentité pourrait au contraire nous libérer de ces stéréotypes de genre. Il la renforce : le transactivisme est un masculinisme qui renforce les identités de genre et qui remet les femmes dans “pute” ou “maman”, sans alternative. J’ai rencontré à deux reprises des femmes donc une en vrai, enfin en présentiel, en “real-life” dans un bar parisien de la rue Saint-Martin, un bar qui s’appelle “La Mutinerie” avec qui j’ai échangé, donc moi je la percevais comme une jeune “Butch”, habillée tout en noir, cheveux courts, un peu déprimée, un peu solitaire, un peu rebelle, attirée par les femmes et qui s’interrogeaient en fait sur la prise d’hormones, sur la mastectomie… Donc moi évidemment je l’ai surtout écoutée et ce que j’ai entendu de son témoignage, c’était plutôt qu’elle ne supportait pas d’abord l’image de femmes que lui renvoyait les réseaux sociaux, c’est à dire les femmes maquillées, les Kim Kardashian comme exemple et qu’il y avait énormément de messages pro-trans lui disant : “Ben la solution si tu ne te sens pas bien, si tu déprimes, si tu n’es pas bien dans ton corps de femme qui aime les femmes, c’est de devenir un mec et ça résoudra tous tes problèmes.” Là, elle résistait. Puis j’ai eu un deuxième témoignage un peu similaire : là c’était une jeune fille qui prenait contact par mail sur le groupe du vendredi des femmes, c’était pendant le confinement, elle expliquait qu’elle avait des problèmes relationnels avec sa famille et se demandait si une transition pourrait l’aider. Et on a pas mal échangé et elle avait complètement un parcours de “Butch” et effectivement c’est son homosexualité que sa famille supportait pas. Et disait qu’à la rigueur sa mère lui avait dit “Ouais il aurait peut-être mieux valu que tu sois un garçon” et que quelque part devenir un mec ça résolvait l’homophobie de sa mère. Bon c’est vrai que dans mes activités au sein du Centre j’étais plutôt confrontée aux hommes qui se faisaient passer pour des femmes mais j’ai ces deux exemples de femmes qui hésitaient à rentrer dans le monde masculin, mais honnêtement c’était pas par désir de venir un beau mec ou parce qu’elles se sentait profondément des valeurs d’hommes, encore je sais pas trop ce que ça veut dire. Je vous dis moi je les percevais comme des petites Butch, j’adore les petites Butch moi, j’ai toujours aimé les petites Butch. Et du coup, j’avais vraiment l’impression que ça leur semblait la seule issue possible en fait, c’est vraiment un peu le “Il n’y a pas d’alternative, c’est ça où je vais souffrir toute ma vie”. Je vais conseiller encore un autre livre, c’est “Stone Butch Blues” sur l’expérience d’une petite Butch des années 50 aux États-Unis, qui elle fait effectivement une mastectomie, qui essaye de devenir un homme et qui se rend compte qu’elle n’est pas du tout acceptée dans le milieu des hommes. D’ailleurs vous pourrez remarquer que les hommes ont beaucoup moins de problèmes avec l’intégration des femmes qui se disent hommes, tout simplement parce que les femmes qui se disent hommes ferment leur gueule, comme une bonne femme qu’elles sont, et donc ne revendiquent pas d’aller dans des groupes exclusivement masculins, je ne suis pas sûre qu’on leur ferait bon accueil.

RDG – Qu’est-ce qui t’a décidé à témoigner sous ton identité ? As-tu déjà subi des pressions, des menaces ?

Chantal – Maintenant je me sens relativement sécurité, mais je viens de vivre une période assez violente, donc ça fait effectivement au moins un an que les pressions sur deux groupes, d’ailleurs au sein du centre c’est à dire “le Vendredi des Femmes” qui étaient réservées aux femmes, des femmes lesbiennes et bi et le groupe des femmes plus âgées « Senoritas » et le Centre fait pression pour qu’on accepte les hommes qui se disent femmes, qui est bien sûr la porte ouverte à tous les voyeurismes, à la fin de la sororité et à la confiance dans la discussion. Et donc ça fait à peu près un an que je militais dans un lieu auquel j’étais à très attachée puisque j’ai milité depuis près de 28 ans et là j’ai signé donc une tribune dénonçant ainsi ironiquement l’invisibilisation des lesbiennes au sein des centres LGBT, cette tribune et ma signature sont montées jusqu’au bureau du Centre. Donc le bureau a envoyé à tous les contacts un communiqué me désignant nommément, donc “Chantal Millet a signé un courrier transphobe et nous nous désolidarisons et Chantal Millet n’est plus bénévole au Centre” 

RDG – Est-ce que tu peux s’il te plaît nous dire quand c’était cette tribune et quand ça s’est passé cette histoire de courrier du pôle LGBT ?

Chantal – Le 22 août 2022 là, donc ça fait à peu près un mois. J’ai évidemment protesté, disant qu’il y avait quand même d’abord un anonymat au Centre, que je ne vois pas pourquoi on diffuse comme ça mon nom avec l’épithète “transphobe”. J’ai ensuite justement revendiqué le fait qu’il fallait un espace safe pour que la parole des femmes puissent aussi être entendues et qu’on ne pouvait pas exclure les gens comme ça puisque après tout, je n’ai attaqué, agressé, violé personne, je n’ai harcelé personne et qu’il y a quelques clauses et des procédures pour exclure les gens d’un centre et que ces procédures n’avaient évidemment pas été respectées. Donc j’ai reçu un courrier de réponse du secrétaire général du Centre qui dit que je ne suis pas du tout exclue, bien sûr je suis adhérente à jour de mes cotisations donc on ne peut pas m’exclure, que par contre je ne peux plus animer d’atelier, je ne peux plus être bénévole et qui me demande un entretien avec les membres du bureau afin, alors je cite ouvrez les guillemets, “de connaître pleinement mes positions”. J’ai dit que je voulais bien parler avec le bureau mais que la dernière fois, la présidente du centre était partie en claquant la porte en me traitant “d’essentialiste” parce qu’elle n’était pas très ouvert au dialogue, c’est le moins qu’on puisse dire, et que donc je refusais de venir me présenter seule à un procès de Moscou digne des meilleures heures du maccarthysme aux États-Unis. J’ai demandé à y aller accompagnée et ils ont refusé. c’est bien sûr tombé dans les limbes, on n’en a plus reparlé, évidemment que je ne me présenterai pas. Mais où avez-vous vu un centre, donc financé sur fonds publics, exigeant comme ça un espèce de procès de Moscou pour connaître pleinement mes positions et pourquoi pas mes positions politiques, mes convictions religieuses et allons-y gaiement ! Donc nous en sommes là, je n’ai pas reçu un énorme soutien des autres bénévoles, donc c’est peut-être l’une des choses les plus difficiles. Moi je ne suis pas sur les réseaux sociaux donc je n’ai pas suivi tout ce qui se passait sur Twitter, Facebook, ce n’est pas ma problématique mais des amis qui les suivaient, j’ai eu trois personnes qui m’ont appelée pour me dire qu’ils avaient mis des messages de soutien ma faveur, ce qui m’a fait plaisir, une amie que je connais bien puis deux personnes qui m’avaient croisée. Sinon j’ai eu à l’inverse une personne qui souhaite être candidate au CA du centre qui a écrit pour dire que ses opinions n’étaient pas les mêmes que les miennes et qu’elle désavouait mes prises de position. Donc c’est pour ça que maintenant j’ai décidé de témoigner parce que je trouve qu’il y a vraiment une dérive pro-transactiviste, d’ailleurs c’est pas étonnant le président de l’association Out Trans est membre du bureau, c’est donc bien sûr lui qui fait pression pour que je sois virée et les autres membres du bureau sont des petits jeunes voilà et donc le Centre devient un lieu trans et gay grosso modo… Donc c’est pour ça que maintenant je souhaite témoigner parce que j’ai une quand même une longue expérience de ce centre et que j’en vois toutes les dérives par rapport à l’ouverture qu’il avait pu y avoir. D’ailleurs une autre anecdote qui m’a vraiment poussée à signer cette tribune de Marie-Jo Bonnet, c’était le 8 juillet dernier, c’était donc un vendredi, je devais participer à une English conversation au sein du “Vendredi des Femmes” donc je me suis rendue au Centre et le centre parisien recevait une délégation des centres LGBT de province. De mémoire il devait y avoir Clermont-Ferrant, Nantes, Strasbourg, Bordeaux, peut-être Toulouse et je me suis dit “chic on va rencontrer des lesbiennes de province” et bien non, il n’y avait que des couilles : des couilles gay, des couilles de trans, mais pas une seule fille. Il n’y avait qu’une seule femme qui était venue dans les délégations donc j’ai essayé de lui parler mais elle était salariée hétéro du centre de Bordeaux, donc là on était vraiment dans l’invisibilisation des lesbiennes au sein du mouvement LGBTQIA++ et ça me semble très important de le dénoncer, de le signaler au moment où la Première Ministre a annoncé l’ouverture de 10 nouveaux centres LGBT en France, ce qui veut dire des financements, sachant que ces centres ne défendent plus les personnes homosexuelles, mais uniquement les personnes trans et la transidentité. 

Ca veut dire également beaucoup de financement qui arriveront soit vers les gays, soit vers les trans et parmi les trans, je vous ai parlé de la différence de visibilité entre les hommes qui se disent femmes et qu’on entend beaucoup et les femmes qui se disent hommes qui sont également invisibilisées. C’est donc pour ça que je souhaite témoigner aujourd’hui parce qu’il me semble que la situation est grave, parce que ayant vécu un coming out et ayant animé donc beaucoup de thèmes de discussions avec beaucoup de femmes de différents âges, de différents milieux, de différentes religions, de différentes cultures, de différentes races ou même des femmes migrantes je peux dire que le coming in, c’est à dire l’acceptation de son homosexualité, l’acceptation du fait qu’on ne va pas rentrer dans les cases de cette société hétéro normée patriarcale et misogyne, est déjà une acceptation de soi qui est un pas franchir qui est assez difficile à faire. Et quand on a 15, 16, 18 ans, qu’on s’éveille à la puberté et que le seul discours qu’on entend c’est “ah bah si tu te sens pas bien en tant que femme, bah, t’as cas de venir un homme, fait donc une mastectomie, fait des bloqueurs de puberté, faites-toi pousser la barbe et tu te sentiras mieux dans ta peau”. Mais c’est faux ! C’est faux les filles, vous ne serez pas mieux en tant qu’homme au contraire.

RDG – Comment tu vois les choses, comment tu vois ton militantisme dans les années à venir et en particulier pour les lesbiennes ?

Chantal – Et bien je crois qu’on va faire comme on a fait pendant de très nombreuses années, on va retourner dans des caves. C’est-à-dire qu’on va se voir par petits groupes entre nous, entre copines. On aura beaucoup moins de visibilité, d’associations, ce sera beaucoup plus difficile pour une jeune fille de trouver des lieux safe où s’exprimer. Moi je vais commencer à militer plutôt avec des lesbiennes féministes en vrai groupe non mixte. J’ai envie de m’engager plus auprès de groupes comme les Amazones ou Résistance Lesbienne et j’ai presque envie là, au point où j’en suis, d’aller à la castagne, c’est-à-dire me dire “je vais me mettre en danger physiquement”, parce que c’est le seul moyen sinon la rue est à eux. Mais le mouvement lesbien va bien sûr, les filles vont continuer à être lesbiennes et militer. 

RDG – Oui mais ça c’est des choses qu’on ne peut pas changer et les filles, les lesbiennes seront des lesbiennes, simplement la question c’est qui va se battre pour elle ?

Chantal – Ah bah personne ! Il n’y a qu’elles qui vont se battre pour elles, jamais personne ne s’est battu pour elles. Quand les gays ont eu le Sida, je veux dire j’y étais, on s’est beaucoup battue pour les aider, pour que leur voix soit entendue et comme tous les financements allaient à la santé, à la lutte contre le Sida, on essayait de dire au lesbiennes “mais vous êtes sûres que vous, vous n’avez pas des cas de séropo ?”. Et ben non je suis désolée, mais les lesbiennes n’étaient pas touchées par le Sida donc tous les financements sont allés au gays. Bon ça c’est un autre problème, mais personne ne luttera pour les lesbiennes, personne n’a jamais lutté pour les lesbiennes. Les hommes qui se disent femmes ne luttent pas pour l’avortement donc ce sera encore à elles de s’auto-organiser. Moi je pense pas mal m’appuyer sur les féministes aussi, même les féministes hétéro parce qu’on a quand même ma génération, notre génération des cinquantenaires : moi j’ai vécu la lutte pour le PACS en 99, les manifs pour le mariage. Si on arrive à empêcher une grande régression qui remettrait en cause les droits au mariage pour tous, les droits l’avortement, les droits à la PMA pour toutes. On a quand même des acquis juridiques contre l’homophobie et pour le respect de nos couples, pour le droit à aimer qui on veut, qui est quand même une grande liberté pour les générations futures, qui fait que les mouvements féministes hétéro peuvent aussi se joindre, enfin on peut peut-être plus s’entendre avec les revendications féministes, qu’elles soient hétéro ou homosexuelles, puisque le tabou homosexuel est quand même un peu levé par rapport à ce que ça pouvait être dans les années 70. Et c’est vrai aussi parmi les jeunes générations, enfin bon moi j’ai une fille de 22 ans qui m’a super soutenue dans cette histoire là, elle était là “Mais c’est qui ces connards qui veulent empêcher ma mère de voir ses copines ? Ils ne peuvent pas aller voir des filles ailleurs ? Vous avez bien le droit de rester entre vous !” Et aussi pour dire que tout n’est pas perdu dans la jeune génération, elle m’a fait part d’une anecdote : donc c’est ma fille qui était en boîte de nuit avec des copines et une de ses copines a été pelotée, approchée sur la piste de danse par un mec qui est un gros lourdingue avec les mains baladeuses et elle a été sidérée, ne sachant pas comment réagir et dès que la danse s’est arrêtée (stratégie d’évitement), elle a quitté la piste de danse. Et elle est venue donc voir ma fille et une autre copine qui lui ont tout de suite dit “Oh ma pauvre ! Mais c’est pas possible !” etc… Et elles étaient avec deux garçons et les garçons disent “Ah mais pourquoi tu as rien dit ? Tu aurais dû le gifler et après t’aurais dû nous appeler”. 

Et ma fille m’a dit, les garçons, spontanément, ont posé la question : “Mais pourquoi tu n’as rien fait ?” Et elle m’a dit, mais même poser la question, c’est une violence. Parce que ça reporte la faute sur la femme.

RDG – Exactement !

Chantal – Même si c’est des mecs plutôt ouverts, qui… C’est ça qui est terrible c’est des mecs qui vont se définir féministe, mais qui, du coup vont être violents. Alors que les filles, spontanément, ont tout de suite compris, qu’elle, elle ne pouvait pas juste foutre une gifle à l’emmerdeur, ou s’en aller. Parce qu’elles avaient déjà vécu des situations de harcèlement.

Et donc les filles ont ce vécu, très profondément. Parce qu’on le subit depuis très jeune. Et donc, ma fille a parfaitement compris qu’on pouvait avoir envie de se sentir entre femmes, parce qu’un homme n’aurait pas du tout ces réflexes-là, et que, même poser la question du : “Mais pourquoi tu n’as rien fait ?”, c’est une violence. C’est ce que toute jeune fille qui se rend au commissariat, et qui explique qu’elle a été violée, et quand on lui dit : “bah ne vous êtes pas débattue”, le flic en face il dit : “bah alors vous devez être un peu consentante…” 

Et bien non ! C’est ce qu’on appelle la sidération. Et c’est là où je suis optimiste, je reviens à la question précédente : c’est parce que chez la jeune génération il y a quand même une prise de conscience très forte de tous ces systèmes de domination masculine. Par exemple le terme “mansplaining” – le mec qui t’interrompt pour t’expliquer quelque chose que tu connais déjà – on l’a toutes vécu, mais on n’avait pas de terme pour le désigner. Idem pour le terme “male gaze” : ce regard de l’homme qui va se permettre de juger la grosseur de tes seins, comment tu t’habilles, comment tu fais… alors que toi, tu ne te permets pas de porter un jugement sur comment est-ce qu’il est mal fagoté ou quelle sale tête de con il peut avoir, quoi ! Ou si tu te le fais, tu ne vas pas lui dire.

Mais lui, il se permet : “Ah, tu es jolie aujourd’hui !” 

Et les filles, maintenant, elles ont des mots pour le dire, et elles sont sensibles aux choses. 

Et elles comprennent peut-être beaucoup plus l’importance de la sororité, du coup. 

C’est ce qui me rend optimiste sur les luttes futures, parce que j’ai quand même peur qu’on assiste à une grosse régression. Mais maintenant, les filles ont quand même les mots et des connaissances pour pouvoir le formaliser, pour pouvoir le conscientiser.

Il y a aussi pas mal de livres féministes sur “comment l’histoire a invisibilisé les femmes”, sur les femmes qui font des recherches, qui se font voler leurs recherches par des hommes, et tout ce type de syndrome d’une société patriarcale… et il y a pas besoin d’aller à un Afghanistan pour le vivre, qui sont maintenant plus en plus détaillés, connus, et surtout nommés : on a les mots pour nommer les choses, et ça me paraît être un facteur plutôt positif pour le futur.

RDG – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Chantal – Je voudrais parler, par exemple, de cette dernière réunion où deux hommes avec jupes et maquillage sont venus participer à la réunion, et qu’à la fin de la discussion, ils ont absolument voulu prendre la parole, nous inviter rapidement à aller boire un verre avec eux. Ils se sont permis des commentaires – c’était un atelier English conversation – sur : “Ah ben toi tu as vraiment un accent, un très bel accent, mais très compliqué à comprendre, etc… alors que tout le monde, justement, essayait d’éviter de faire des remarques trop personnelles. On entendait plus qu’eux, quoi.

Un besoin de s’exprimer et d’élever la voix, et de… Cette invasion de l’espace qu’ont systématiquement les hommes, quoi.

C’était la dernière fois que j’avais participé, c’était donc le 8 juillet. Et j’avoue que ça m’avait laissée sur une très, très mauvaise impression, voilà.

J’ai quand même un autre témoignage : je suis allée à une soirée, qui s’appelle “les soirées de Mademoiselle Audrey”, réservée, donc, aux femmes, dans un petit bar. 

Et qui je vois ? Alors, pour le coup, c’est pas un trans, c’est un vraiment un travelo, qui s’est changé en arrivant pour mettre sa petite robe. Et je discutais avec une amie, il est venu s’interposer auprès de nous, et il nous a dit : “Ah qu’est-ce que j’aime bien être comme ça, avec ma robe, avec des filles… Je me sens vraiment comme une petite fille !”

Et moi, je venais de passer mon après-midi avec ma fille de 22 ans et ses copines, et je me suis dit que cet homme-là ne ressemblait pas du tout aux petites filles, aux jeunes femmes que je venais de quitter, et je lui ai dit : “Bah moi je te perçois comme un vieux mec !”

Parce que c’est ma perception, et je le voyais comme ça !

Eh bien la copine avec qui je discutais était un peu outrée, elle a trouvé que ce que je lui avais dit était très violent.

Lui a fait la tête, mais il a essayé de me reparler dans la soirée.

Et ce que je veux dire, c’est que moi j’ai trouvé très violente sa présence à cette soirée non-mixte, d’autant plus qu’avant de repartir dans le métro, il avait enlevé sa petite robe, et il ressemblait complètement à un mec hétéro. Il s’était remis en tenue safe pour prendre le métro…

Donc, bah non. 

Non, on a le droit de dire qu’on a envie d’être entre nous. 

Les lieux en non-mixité ont toujours été des revendications féministes, que ce soit pour parler sexe – j’ai aussi un bouquin sur les premiers lieux où les femmes des années 70 américaines parlaient sexe, et certaines découvraient leur clitoris, découvraient leur corps, c’est assez terrible. 

Dans le film “la belle saison” il y a un mouvement où les filles se réunissent aux Beaux-Arts pour discuter entre elles, et on voit tous ces gauchos de mecs en train de vouloir rentrer parce que c’est la grande question “mais qu’est-ce qu’elles peuvent bien se raconter sans nous ?” 

Je pense que les femmes sont divisées parce qu’elles appartiennent à un foyer, sous la tutelle d’un père, sous la tutelle d’un mari, et elles sont chacune isolées dans leur foyer, donc solidaires de leur foyer, de leur homme : les femmes bourgeoises, solidaires des hommes bourgeois. Les femmes ouvrières, solidaires des hommes ouvriers.

Et je pense que le mouvement trans, comme le mouvement masculiniste, n’a qu’un seul but : c’est diviser les femmes entre elles. Pour encore plus les isoler et les bâillonner…

RDG – As-tu quelque chose à ajouter ?

Chantal – Oui alors j’ai préparé ma “chute”. 

Je voudrais lire la page 92 du dernier livre d’Alison Bechdel, “Les secrets de la force surhumaine”, donc là, elle parle dans ses 20 ans, la première fois où elle est allée dans un festival de musique non mixte, avec uniquement des femmes.

Donc je vous le lis, c’est très court : “J’en suis restée baba. Pas à un homme en vue. On n’a pas eu idée de ce que pèse le fait d’être constamment dévisagée, sifflée, moquée, pelotée, sans parler de menaces plus extrêmes mais tout aussi présentes, tant qu’on n’a pas fait l’expérience dans leur brusque cessation. Dans ce vide saisissant, j’ai vécu un changement de perception vertigineux. Je voyais ce que signifiait être un sujet et non un objet. Je voyais aussi que le corps, si désavoué par le patriarcat, n’était pas quelque chose de séparé, d’autre.

Ici, l’autre, la nature elle-même, était replacée au centre.”

Voilà. C’est juste une petite page de “Le secret de la force surhumaine” d’Alison Bechdel, mais qui pour moi montre cette force de la sororité, et de ces moments safe où, entre femmes, on peut vraiment faire beaucoup de choses.

RDG – S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe.

http://www.womensdeclaration.com 

Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail. 

Rebelles du genre – Épisode 48 – Chloé

Chloé – Je suis Chloé je suis une femme autiste asperger de 22 ans, J’habite pas loin de Bordeaux et je fais des études en lettres, actuellement.  Je témoigne pour avertir du danger que toute cette idée actuelle, de remettre en cause ce qu’est réellement la femme, et ce transactivisme qu’on vit aujourd’hui, à quel point ça peut être dangereux pour un adolescent en développement, ou même une jeune adulte en développement. Et à quel point, quand on est perdu, c’est facile de mordre à l’hameçon de ce transactivisme, entre guillemets de “se faire avoir” et de, potentiellement, détruire entièrement son avenir, et sa possibilité d’avoir un enfant, sa possibilité d’être épanouie dans une vie, de sentir bien avec soi-même, parce qu’on a fait une erreur. Et donc oui, je témoigne aujourd’hui pour avertir. 

Je ne me considérais pas comme critique du genre à l’époque de ce qui m’est arrivé au lycée, qui a fait qu’aujourd’hui je suis critique du genre. Ce qui a fait qu’aujourd’hui, je le suis, c’est vraiment que je n’ai jamais pu rentrer dans une case, en fait. Du côté des garçons, j’étais une fille, donc je ne pouvais pas… Du côté des filles, j’étais trop masculine. J’étais un peu “garçon manqué” donc je ne pouvais pas non plus, je n’étais pas acceptée pleinement. Mes amis garçons, ben voilà il y avait toujours le : “Oui mais tu es une fille, donc on est plus intéressés par toi parce que… Surtout à l’adolescence, au lycée, le côté sexuel, un peu, de la chose, et de vouloir une relation. Et du côté des filles, j’étais trop “garçon manqué”, je ne rentrais pas dans les cases, je remettais en cause le : “Oui mais pourquoi si je suis une fille, je devrais faire ci ou je devrais faire ça?” Et donc ça ne me plaisait pas. Et après, ce qui a fait que je suis devenue critique du genre aussi, c’est l’éducation que j’ai eue de la part de ma mère, qui a toujours été très féministe, et je ne la remercierai jamais assez à ce niveau-là, parce que ça m’a… Elle m’a toujours appris que si j’aimais quelque chose, c’est pas parce que quelqu’un me disait “Non c’est pas bien que tu aimes ça”, qu’il fallait que je l’abandonne.  

Dès petite, j’aimais tout ce qui était rock n’ roll, un peu gothique, tout ça… et mon père n’aimait pas du tout, mais ma mère m’encourageait dans ce truc, même si tout le monde me disait : “Mais oh tu es ridicule, tu es une gothique, et tout.” Mais je ne rentrais pas dans les cases à cause de ça, mais j’en étais très contente parce que au moins je m’assumais, même si c’est ce qui a créé pas mal de harcèlement chez moi, le fait de ne pas rentrer dans les cases. Et une fois arrivée au lycée, prendre un peu plus en maturité, je me considérais vraiment comme féministe, sauf que à cause de mon harcèlement, je me suis énormément renfermée sur moi-même. Je me réfugiais énormément dans les jeux vidéo, les réseaux sociaux. Ma vie sociale, elle se [limitait] vraiment à mon ordinateur et mon téléphone. Et une fois que je suis arrivée, vraiment, au lycée, j’ai rencontré un groupe d’amies qui était un peu comme moi, c’était des filles qui aimaient les jeux vidéos. Donc bah tout de suite, ça a collé, et en fait, avec leur recul, je pense que c’est une des plus grosses erreurs que j’ai pu faire plus jeune, parce que c’est comme ça que j’ai rencontré la fameuse fille qui prétendait se sentir homme. C’est comme ça que je l’ai connue et que tout a dégringolé, en fait. J’ai rencontré ce groupe de filles, qui étaient toutes très “garçons manqués” : jeux vidéo, réseaux sociaux, comme moi. Donc, tout de suite, je me suis dit : “Ouais, trop bien! J’ai trouvé des filles comme moi!” 

Dès le début, il y avait des signes avant-coureurs de ce qui allait se passer, mais je ne les voyais pas parce que j’étais aveuglée par ce manque d’interactions sociales que j’avais. J’étais aveuglée par ça, de me dire : “Mais en fait, ça y est! J’ai trouvé mon groupe!”

Mais dès le début, elles remettaient en cause…  “Oui mais tu vois bien que tu t’habilles comme un garçon, donc c’est qu’au fond tu n’es pas vraiment une fille.” C’étaient des petites remarques par-ci, par là : “Tu es vraiment masculine, je pense que, au fond, tues non-binaire, et pas une fille réellement… Tu es sûre de ne pas vouloir essayer les cheveux courts?” (parce que j’avais les cheveux longs à l’époque et je les aimais beaucoup).

Cette fille, en fait, avec qui j’étais, et ce groupe d’amies, m’incitaient énormément à enlever tout ce côté féminin qui me restait, au point où ça a fonctionné, à un moment j’étais à la limite de la transition, je me disais : “Ouais j’ai envie qu’on m’appelle par un nom masculin.” 

Je me suis coupé les cheveux, tout ça. Bon ça a été vers la fin, mais dès le début en fait, c’était toujours la remise en question de ma personne, de qui j’étais, de comment je m’assumais. Si jamais je leur disais : “Non, je ne suis pas d’accord avec vous, j’ai envie de porter une jupe, j’ai envie de porter ce que je veux, j’ai envie de de garder mes cheveux longs, que je ne me sens pas enfermée dans une cage juste parce que je prends, une jupe ou parce que je me sens fille”, j’avais le droit à la soupe à la grimace pendant au moins une semaine. C’est-à-dire que le seul groupe d’amies que j’avais me rejetait entièrement. Donc c’était très dur, et puis au fond je me disais “Mais est-ce que j’ai vraiment envie d’abandonner ce groupe?” En tant qu’adolescente qui se construit, quand ta seule vie sociale et ta seule vie tout court, en fait se résume au lycée, perdre le seul groupe que tu as au lycée, c’est terrible! Et je pense qu’on a toutes ressenti ça au lycée, d’avoir un groupe et de se faire rejeter par son propre groupe, c’est absolument horrible. 

Et donc j’ai préféré me plier un petit peu, parce que la pression psychologique qu’elles mettaient vraiment sur : “Il faut que j’accepte leur idée”… et si j’accepte pas leur idée, je suis une ennemie… c’était vraiment tout ou rien. Et en fait, ça ne se limitait pas seulement au lycée. Déjà, au lycée, elles avaient des badges sur leurs sacs avec le drapeau, elles coloriaient des drapeaux partout, elles avaient “PRIDE”, et tout… Elles voulaient montrer, quoi. Et puis au fur et à mesure, en me rapprochant de ce groupe, j’ai commencé à avoir des sentiments pour cette fille. J’ai commencé à réellement avoir des sentiments pour elle, parce que c’était comme ma meilleure amie… sauf qu’il y avait quelque chose derrière. Donc au début, je me considérais comme lesbienne, mais au final ce n’était pas réellement ça, et honnêtement, aujourd’hui, je reconnais que c’était mon premier amour. Mais j’étais incroyablement manipulée par ce groupe et par cette fille. Et donc on a commencé à sortir ensemble avec cette fille et c’est à partir de là que c’était parti. De  jour en jour, ça continuait, mais de plus en plus fort. 

Par exemple, elles me lâchaient des : “Si tu sors avec cette fille, et que tu t’habilles comme un garçon, c’est qu’au fond tu es un homme, mais tu ne veux pas l’assumer!” Et intérieurement, je me disais : “Mais non, en fait, je n’ai pas envie.” 

Mais quand je voyais la personne que j’aimais me dire : “Moi, avec mon expérience, je pense vraiment que c’est tes parents qui t’empêchent d’être qui tu es réellement…” Donc en fait, en plus d’avoir un impact sur ma vie au lycée, sur mon être en tant que telle, elles commençaient à avoir de l’influence sur la relation que j’avais avec mes parents.

RDG – Est-ce que tu en as parlé avec tes parents à ce moment-là? Est-ce que c’est quelque chose que vous avez abordé?

Chloé – Alors justement, en fait, j’étais tellement manipulée par cette fille qu’elle a réussi à me monter la tête contre mes propres parents. C’est à dire qu’à cette époque elle détestait tellement ma mère – surtout ma mère, elle l’aimait vraiment pas, parce que ma mère lui montrait par A+B que son idée d’être un garçon, en fait, c’était juste un problème psychologique, elle était vraiment en colère que ma mère puisse lui dire ça – elle en avait tellement après ma mère, que c’était toujours : “ma mère c’est la méchante”. Sauf que, vu que j’étais amoureuse, j’étais folle amoureuse de cette fille, je me persuadais que c’était une réalité, que ma mère était l’ennemie. 

Au point où je me suis coupée complètement de ma mère. Il y a vraiment eu une rupture dans ma relation avec ma mère, à cause de cette fille, où elle me disait : “Ta mère t’empêche d’être qui tu es réellement. Ta famille, elle ne veut pas t’aider, elle te, elle t’emprisonne, en fait. Ta famille, elle … Ta mère veut que tu rentres dans ces cases et pas que tu sois libre, en fait!” Alors que ma mère, au contraire, elle m’a toujours poussée à accepter la personne que je suis, et à accepter pleinement, à m’assumer, en fait. Elle a  toujours été derrière moi, en fait. Jamais une seule fois, ça n’a été péjoratif. Mais cette fille avait un pouvoir de manipulation sur moi, au point où vraiment ça m’a tournée contre ma mère. Au point où je n’avais plus personne. Je m’étais isolée. Cette fille m’avait isolée, et je l’avais fait de moi-même, tellement j’étais manipulée. Je m’étais isolée de tout le monde. Les dernières personnes que j’avais, c’était ce groupe d’amies, et cette fille, qui était donc ma petite amie à l’époque. Et en plus, avec l’âge rebelle, au lycée ça n’aidait pas, quoi. Ça n’aidait vraiment pas, et je me faisais influencer dans ma recherche de qui j’étais, et c’est absolument incroyable. Elle remettait réellement en cause toutes les actions de mes parents, elle me persuadait que ma famille était nocive, toxique, que c’était des vrais bourreaux.

Elle réussissait, c’était ça, le pire. Elle réussissait.

Je ne parlais presque plus à ma mère, à ma famille.

J’avais la boule au ventre en rentrant chez moi, parce que pour moi, mes parents étaient mes ennemis. 

J’en arrivais où je pouvais vraiment faire une crise panique en rentrant chez moi juste parce que je me disais : “Je vais voir ma mère!”

Alors que, honnêtement, si je n’avais pas connu cette fille, jamais ça ne serait arrivé. Jamais.

Avant d’avoir connu cette fille, jamais je ne m’étais posé la question de : “Ouais, est-ce que je suis réellement une femme ou pas?” Parce que pour moi, c’était absurde. 

Elle a quand même réussi à forger dans mon esprit une vision complètement erronée de ma famille. Son but, c’était aussi, je pense, je l’assume, mais … vraiment ce qu’elle renvoyait, c’était que son but, c’était de m’éloigner de mes amis, et elle avait réussi. 

Et je me suis retrouvée seule avec plus aucune personne de confiance, à part elle et mes amies qui s’identifiaient transexuelles pour la plupart, ou non binaires, ou “non, je suis… je suis un garçon, etc.” Enfin, tout ce genre de choses. 

Et elles m’avaient complètement relookée aussi. J’ai eu les cheveux courts, à la garçonne. Je ne m’habillais plus qu’avec des jeans, des baskets et des pulls oversized, parce que sinon on voyait trop mes formes, et j’allais me sentir mal qu’on voit mes formes. C’était du noir ou du bleu, et surtout pas quelque chose qu’elles jugeaient “féminin”… Sinon c’était se forcer à [être] une personne qu’on n’est pas.

En fait, c’était limite devenu une secte, au point où on parlait, on mangeait, on respirait, on transpirait LGBT.

Vraiment, il n’y avait que de ça : et du transactivisme aussi. 

A l’époque, je ne vais pas dire que j’étais une transactiviste, parce que je ne le partageais pas sur les réseaux, ou quoi que ce soit, mais vraiment, j’étais persuadée que le transactivisme était une bonne chose.

Alors que, avec le recul, pas du tout!

Et en fait, pas très longtemps après qu’elle ait réussi à m’isoler de tout le monde, ma petite amie m’a annoncé que, en fait, elle était transexuelle, et qu’elle allait faire la transition pour devenir un homme. Qu’elle voulait qu’on la genre au masculin. Qu’on l’appelle par son nouveau prénom. Et moi, je trouvais ça merveilleux : “mais c’est incroyable, c’est dingue. Tu t’assumes, je suis tellement heureuse pour toi!”

Je la soutenais, et pour moi, mon premier amour devenait la personne qu’elle souhaitait être… c’était que du bonheur!

Sauf qu’en fait, ce n’était pas du tout la réalité, c’était vraiment une façade, et vraiment à partir de ce moment-là, c’est devenu de pire en pire. 

Au point où on avait des cours d’arts plastiques ensemble, et tous ses projets, c’était sur la dépression, et à quel point être dépressif c’était poétique. Etre triste et se mutiler, c’était poétique. Que la transexualité, c’était de la libération, etc.

Donc je passerai le sujet de la mutilation parce que vraiment, elle avait une obsession avec ça, vraiment. 

Elle me faisait du chantage avec ça.

RDG – Tu dis que tu veux le passer, mais c’est quand même un point important, on le gardera si tu veux, ou pas. Mais qu’est-ce que tu entends par cette obsession de la mutilation? 

Chloé – Elle se scarifiait.

RDG – Elle te demandait de le faire aussi ?

Chloé – Alors une fois. En fait, à chaque fois qu’on se prenait la tête, elle me faisait du chantage à la mutilation. Elle me faisait du chantage en disant : “Ouais, non mais tu penses ça de moi, et tout… je vais me mutiler.” 

Et puis après, elle m’envoyait des photos de tout ça, au point où moi je me disais : “Mais ça devient normal.” Et j’ai commencé à le faire. J’ai commencé à le faire. Parce que, à chaque fois que je faisais vraiment une crise due à mon autisme, à chaque fois que je faisais des crises d’overwhelm, quand j’étais vraiment trop stimulée, au point où mon cerveau n’arrivait plus à fonctionner, la seule solution, ça en venait à être de la scarification, parce que c’était la seule qu’on m’avait appris, étant donné qu’à l’époque, ma mère ne s’y connaissait pas beaucoup en autisme, qu’elle n’avait pas été diagnostiquée, moi non plus. Je n’ai reçu mon diagnostic que très tard, et la seule [solution] qu’on me donnait quand tu te sens vraiment pas bien, c’était de te mutiler. Donc je l’ai fait.

Et elle me disait : “Ouais mais c’est trop beau, tu le fais aussi! Tu te rends compte de la beauté du truc, et tout…”

Et ouais sans donner à du chantage à la mutilation, que c’était une bonne chose…

Avec le recul, aujourd’hui, je me dis : “Mais comment j’ai pu me faire berner comme ça, vraiment? Comment j’ai pu? Mais entre les sentiments que j’avais,  et l’âge bête, le fait de trouver enfin un groupe social qui m’accepte, je me disais : “c’est magnifique. et c’est parfois… On vit dans le meilleur des mondes” … Sauf qu’en fait, pas du tout.

 Et donc, oui, par rapport à la mutilation : ça en venait à faire du chantage à la mutilation. 

RDG – Donc scarifications, ce genre de choses-là?

Chloé – Oui, de réelles scarifications. J’en ai des cicatrices aujourd’hui sur les bras. Je me suis fait tatouer pour couvrir un bras, mais j’ai l’autre qui n’est pas encore tatoué, et j’ai encore énormément de cicatrices.

Pareil pour les cuisses : j’ai des cuisses où j’ai encore des cicatrices, et je sais que ça va me suivre toute ma vie.

Et aujourd’hui, à chaque fois que je regarde ces cicatrices, autant je me dis : “J’ai réussi à passer ce cap, et je suis fière de moi.” Mais en même temps ça me renvoie à cette époque, et ça me rappelle cette personne.

Et il y a vraiment des fois où, quand je ne vais pas être bien, de base, et que je vois ça, et que ça me rappelle cette personne, ça va jusqu’à récemment, parce que j’en ai travaillé avec mon thérapeute, jusqu’à récemment, je pouvais vraiment faire des crises juste parce que je n’allais pas bien, et de voir mes cicatrices… Ca m’a réellement laissé un traumatisme, cette expérience. 

Encore aujourd’hui, je peux en faire des cauchemars. 

J’en ai refait un il n’y a pas très longtemps, par rapport à ça, où je rêvais que la personne envers qui j’ai des sentiments actuellement me faisait le même coup que cette personne. Et je me suis réveillée en pleurs, vraiment… Enfin, je n’étais pas bien du tout, quoi. 

Et je sais que ça risque de me suivre encore très très longtemps. 

Mais oui, donc pour revenir à cette histoire, pas très longtemps après cette histoire de transition, elle m’a quittée du jour au lendemain. 

Mais quand je dis “du jour au lendemain”, c’est réellement du jour au lendemain : la veille, on était au téléphone (parce qu’on s’endormait avec le téléphone, on s’appelait, on trouvait ça absolument très romantique, etc…) Alors bon voilà c’est des trucs d’adolescents, mais bon, la veille au téléphone, elle me disait qu’elle m’aimait plus que tout au monde, qu’elle voulait passer sa vie avec moi, etc… Et le lendemain, réellement 24 heures plus tard, elle me largue sans m’expliquer, sans aucune explication. Et après lui avoir envoyé des messages en la suppliant de m’expliquer et des heures de discussion, elle a craqué et elle m’a déversé toute sa haine : me reprochant que j’avais jamais été là pour elle, que je ne l’avais jamais soutenue dans sa transition, que j’étais une mauvaise personne, qu’elle me détestait, qu’elle ne pensait pas pouvoir rester en couple avec une fille, maintenant sa transition commencée. 

Alors qu’avant, on était en couple, il n’y avait aucun problème. 

Et encore moins avec moi… et que je ferais mieux réellement (elle m’a balancé mot pour mot) que je ferais mieux de me jeter sous un train. 

Alors que je n’avais plus personne. 

Psychologiquement, ce que ça fait une adolescente qui n’a personne autour d’elle, de se dire que la seule personne qui m’aimait réellement et que j’aime, me dit que ma vie ne vaut rien, c’est évidemment… ça a donné, ça a donné lieu à des trucs horribles. Elle m’a balancé réellement toutes les peurs que j’avais :  j’avais peur d’être une mauvaise personne, j’avais peur de mal dire les choses, que les gens aimaient traîner avec moi par pitié etc… Toutes ces choses là que je lui avais dit uniquement à elle parce que j’avais confiance en elle, vraiment pour moi c’était ma personne de confiance et elle me les a toutes balancées en me… en me disant que ce que je pensais était vrai : que je valais rien. Que, voilà… Et qu’elle me détestait. Et qu’au lieu de l’embêter avec mes questionnements et mes problèmes, j’étais un poids pour elle, et tout notre groupe d’amies. Et que notre groupe d’amies me détestait, et que je ferais réellement mieux de me jeter sous un train. 

Je me suis retrouvée seule en fait, plus personne autour de moi. 

Ma mère, on avait une relation qui était brisée, en fait, à l’époque, à cause de cette personne et mes amis donc les seules personnes qui me restaient, elles m’avaient toutes bloquée de partout, elles me parlaient plus, elles m’ignoraient, mon premier amour me détestait… Ouais en effet, après ce qui s’est passé j’en suis venu à faire une tentative de suicide.  J’avais plus aucune identité, tout ce que j’avais on me l’avait enlevé et on me l’avait recraché au visage en disant que je valais rien. Mon identité en tant que femme qu’on m’avait enlevée, je l’avais plus. Mon identité en tant que personne, en tant qu’amie, en tant que fille, je ne l’avais plus. 

Ma relation avec ma mère je l’avais plus, je n’avais plus rien. 

Donc oui j’ai fait une tentative de suicide qui, heureusement, n’a pas réussie et ça n’a été vraiment qu’avec du recul et énormément d’aide de ma mère, que je me suis rendu compte que cette rupture c’était le mieux pour moi et à quel point j’avais été manipulée par ce groupe. 

Après avoir passé cette période, plus une seule fois je me suis posé de question sur mon genre, ou ma sexualité, ou mon identité, et je me sens, clairement, plus à l’aise dans mon corps aujourd’hui qu’ à l’époque, avec tout ce qui se passait. 

RDG : C’est… En tant que mère, ça me met dans une telle colère.

Chloé : Le texte que j’avais envoyé à ma mère pour qu’elle le transfère à une amie journaliste à “Elle”… Dans le texte je mets beaucoup de détails pour que le témoignage soit complet pour cette personne. 

Elle l’a lu et elle m’a dit “Mais je suis désolée de ne pas l’avoir vu, de ne pas avoir été là pour toi à ce moment-là, quand c’est arrivé”. 

Et je lui ai dit : “Mais ce n’est pas de ta faute, c’est moi qui te bloquais, qui ne te laissais pas m’aider, qui t’empêchais, en fait, de par cette manipulation complète de ce groupe. 

Je l’ai empêchée. 

Elle était désolée, elle n’était vraiment pas bien, ma mère, quand elle a lu entièrement le texte.

Elle m’a dit : “Mais que tu aies pu vivre ça, je suis réellement désolée.” 

Et je lui ai dit : “Mais tu n’as pas à t’excuser”. 

Clairement, tout ce qui s’est passé, ce n’est pas de sa faute, et au contraire, dans tout ce qui s’est passé, s’il y a bien une personne grâce à qui j’ai réussi à tenir, et à garder un minimum d’identité, c’est grâce à ma mère, et à l’éducation qu’elle m’a donnée. Parce que si elle ne m’avait pas éduquée dans le sens de “tu es une femme, accepte pleinement ce truc-là, et aime toi comme tu es”, si elle ne m’avait pas éduquée comme ça, ça se serait passé horriblement pire ! 

Vraiment ça aurait été une horreur, si elle ne m’avait pas éduquée comme ça.

Donc je ne la remercierai jamais assez de m’avoir donné cette éducation, et de m’avoir accompagnée toute ma vie dans ma féminité, pour m’assumer en tant que telle. 

RDG : Mais merci de dire tout ça! Parce que je crois que c’est vraiment très précieux, et que dans les personnes qui nous écoutent, il y a des mères, il y a des parents, il y a aussi des frères et soeurs, il y a aussi des amis qui sont désespérés, en fait, parce qu’ils voient disparaître une personne, ils doivent porter le deuil de la personne qu’ils aiment, alors qu’en fait elle est vivante, mais que, ils peuvent juste espérer qu’elle va revenir. Et ton témoignage dans ce sens-là… 

Vraiment, je te dis merci parce que je crois que tu peux donner de l’espoir en fait à beaucoup de personnes, vraiment.

Chloé : c’est gentil. 

RDG : Non non, je pense réellement que c’est très important de garder l’espoir et de se dire que c’est pas mort, en fait, et que la relation, on arrive à la garder. On peut la restaurer, on peut la restaurer.

Chloé : Bien sûr ! Mais le pire dans tout ça c’est que ma mère n’a jamais abandonné en fait, elle a gardé cet espoir qu’un jour, ça se brise. Et c’est ce qui s’est passé.

Mais ça a mis du temps avant qu’avec ma mère, on reprenne une relation. 

Là, on n’a repris une relation saine, et une réelle relation mère-fille que très récemment. Ça a mis plus de 3 ans pour que moi, psychologiquement, j’arrive à m’en remettre. Et j’arrive à ré-accepter qu’en fait ma mère n’était pas un ennemi. 

Moi, ça m’a fait une image de ma mère qui est absolument horrible, mais heureusement, je me suis réveillée. Parce que ma mère n’a pas lâché prise. Et elle est revenue vers moi plus tard, en me disant : “Mais est-ce que tu souhaites qu’on se voit?” 

Et heureusement! Parce que, vraiment heureusement, qu’elle n’a jamais lâché prise, parce que c’est elle qui m’a… qui m’a soutenue.

De loin, avec le recul, je m’en rends compte. 

Mais à l’époque, je ne voulais pas le voir. 

Mais au fond, je savais que ma mère serait toujours là.

Et c’est ce qui s’est passé, elle a toujours été là. 

Et aujourd’hui, on a une relation qui est pour moi une délivrance, un peu. Réellement, pour moi, d’avoir cette relation aujourd’hui avec ma mère, c’est une délivrance. Parce que je peux m’assumer pleinement, elle est toujours avec moi, même si je dis quelque chose de mal elle va me le dire, elle va me dire : “Donc oui, je pense que ton avis, il n’est pas dingue.” 

Et quand on a un désaccord, on en parle, on en discute et on communique. 

Et vraiment c’est ce qui a manqué à ce moment-là : c’était de la communication. 

C’est réellement ce qui a fait que tout ça s’est passé de cette manière, et on l’a appris avec ma mère. Et aujourd’hui, dès qu’il y a un problème, on communique. 

Et ça s’arrange tout de suite, dès qu’on communique, parce qu’en plus de notre autisme à chacune, dès qu’il y a un désaccord, c’est très souvent parce qu’on n’arrive pas à se comprendre l’une et l’autre, parce qu’on va interpréter différemment, et on va renvoyer différemment. Et aujourd’hui, quand il y a un problème, moi je lui dis  “Moi, je ressens les choses comme ça et ce que j’essaie de te faire comprendre c’est ça.” Et ma mère va me dire : “Moi je les comprends comme ça, et ce que je veux te faire comprendre c’est ça.” Et à partir de là, c’est bon. Et oui, je pense vraiment que la relation mère-fille, père-fille, père-fils, mère-fils, toutes les relations proches en tout cas, la communication c’est extrêmement important parce que c’est ce qui a manqué à ce moment-là.

RDG :  Clairement, c’était ce qui t’a sauvé et c’est aussi pour ça je pense, qu’elle s’est autant acharnée pour détruire cette relation, en fait. 

Chloé : Ah bien sûr ! Bien sûr ! Parce que ma mère réellement, à cette époque là, elle m’a expliqué le pourquoi du comment, cette idée de transidentité, c’était nocif, c’était mauvais, et elle y arrivait au début, elle arrivait à me faire comprendre. 

Sauf qu’en fait, cette fille avait une emprise telle sur moi que je me disais “mais non en fait, ma mère a complètement faux et c’est une ennemie, elle veut m’enfermer et tout” et elle s’est acharnée, cette fille, pour détruire cette communication qu’on avait. Et elle a réussi. Et c’est à partir du moment où il n’y avait plus aucune communication entre ma mère et moi réelle, sans qu’on se prenne la tête ou sans que j’interprète dans le sens de tuer la méchante, jusqu’à ça psychologiquement, je tenais encore. Mais c’est à partir du moment où cette fille a coupé toute communication entre ma mère et moi que ça a dégringolé.

RDG – A quel moment tu dis finalement ben oui tout ça c’est en fait… c’est du vent?

Chloé – Alors le moment où je me suis dit que… tout ce transactivisme, et tout, c’était vraiment nocif, ce n’est que très récemment. Parce que j’en parlais énormément avec ma mère, et depuis ce qui s’est passé au lycée, je me disais “mais ce n’est pas normal.” Mais je ne m’y étais jamais réellement attardée et donc, je me suis vraiment posé la question d’être, entre guillemets, une  “rebelle de genre” quand j’ai repris contact avec ma mère, et qu’on a parlé, énormément, de cette période. Parce que c’est la période où ça a brisé quelque chose entre ma mère et moi. On en a énormément parlé, et elle m’a envoyé des articles à lire, et… mais sans me forcer, comme quoi… ok : l’homosexualité, là il n’ y a pas de souci, mais le problème c’est de remettre en cause ce qu’est une femme ou ce qui peut être un homme, et à quel point c’est problématiques au niveau des droits de la femme, et au niveau de tous les combats que nos ancêtres ont fait pour qu’aujourd’hui on puisse être des femmes pleinement, en fait! Et à quel point ça rend invisible notre combat en tant que féministe, et en tant que femme tout court. 

Donc j’ai commencé réellement être rebelle du genre il n’y a vraiment pas très longtemps… Enfin, être “critique du genre”. 

Et ce qui m’a amenée réellement à l’être, c’est tout ce qui s’est passé au lycée, et parce que je veux pouvoir comprendre réellement comment ça a pu arriver, et pouvoir prévenir, pouvoir arrêter ce… idéalement évidemment, pouvoir arrêter ce transactivisme qui se fait de partout. Parce que c’est dangereux, c’est réellement dangereux pour un adolescent qui est en pleine construction ou pour un enfant qui est en train de se construire, de s’accepter soi-même. C’est dangereux.

En prenant mon exemple, si tu as très peu de contacts sociaux avec l’extérieur, si tu t’enfermes dans les jeux vidéos, Internet, etc.,  tu es une victime facile, en fait, de ce mouvement. Et que derrière toute cette façade de “espace safe pour toute personne”… ben non ça ne l’est pas. C’est réellement un piège, en fait, parce que dès que tu te fais avoir, il faut te battre. C’est la croix et la bannière pour t’en sortir, pour réussir à t’en défaire complètement. Et psychologiquement, ça a un impact en fait. Ça a réellement un impact. Ça te laisse des traumatismes qui peuvent durer à vie, que ce soit psychologiques ou physiques.  Ca te laisse un réel traumatisme. La vérité c’est… soit tu es de leur côté, soit tu es un ennemi. Il y a pas d’entre-deux.

RDG – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la société et pour la démocratie?

Chloé – C’est une réelle menace, ne serait-ce que pour les femmes, parce que ça rend invisible notre combat, complètement! Ils sont en train d’effacer ce qu’est une femme. On est en train de faire de la femme un sentiment. De faire de la femme des clichés complets. Pour eux, tu peux t’identifier comme femme à partir du moment où tu “agis comme une femme”… Sauf que être une femme, ce n’est pas ça! 

Etre une femme, c’est avoir un vagin, avoir certains chromosomes.

Etre une femme, n’est pas un sentiment.

C’est une vérité scientifique, d’être une femme.

Pour moi, c’est une réelle menace, parce que c’est en train d’effacer le féminisme et c’est en train de diaboliser, en fait, le féminisme. Parce que quand on dit : “Non. Etre une femme, ce n’est pas un sentiment.” On nous traite de TERF, on nous insulte, on nous menace! De plus en plus, on menace les féministes qui osent dire que : “Non.” On les menace de mort.

On les menace de violences sexuelles, aussi.

Donc clairement, ouais c’est vraiment parce qu’on est en train de rendre invisible le combat de la femme, et la femme tout court.

Ensuite cette idéologie, c’est une menace pour les enfants, également. Parce que les enfants c’est les plus faibles, c’est les proies les plus faciles. Parce que on les noie sous toutes ces nouvelles informations de : “Oui, en fait, si tu veux mettre une jupe, c’est que tu es une femme, c’est que tu n’es pas un garçon. Et que, à contrario, si tu veux mettre un pantalon et que tu n’aimes pas les jupes, c’est que tu n’es pas une femme, c’est que tu es un garçon.” 

Ce que ça fait un enfant, psychologiquement, de se dire : “En fait, si j’ai un pénis ou si j’ai un vagin, ça ne change rien.” 

C’est terrible pour le développement d’un enfant.

D’autant plus sur Netflix, surtout ce qui se passe au niveau des séries… 

Netflix, qui est accessible pour les enfants si les parents ne font pas très attention, s’ils ne mettent pas le contrôle parental : ils ont accès à toutes les séries possibles sur Netflix, dont les séries qui se veulent “sex progressive” qui sont dangereuses. Ces séries, réellement, elles sont dangereuses! Il y a quand même des séries qui veulent enlever le tabou de la puberté pour les enfants, pour que ça soit plus simple pour eux, d’assumer la sexualité, dès très jeune… 

Dans cette série, on met des enfants de 12-13 ans, on les met comme exemple, et on leur fait vivre des situations “à sortir par les yeux” , il n’y a pas un seul personnage dans cette série qui, à un moment, ne remet pas en question sa sexualité ou son genre! Ce n’est que de ça!

Dans cette série, à un moment on te montre un garçon qui a transitionné pour devenir entre guillemets “une femme”, donc une fille car il a 13 ans, je le rappelle. Et donc on le voit arriver dans un camp de vacances, alors qu’il a encore un pénis, dans le dortoir des filles. Il va dormir dans le dortoir des filles parce qu’il s’identifie comme femme. Et il arrive là-bas, et les filles qui sont “féminines” réellement, qui mettent du maquillage, qui s’habillent avec des jupes, qui assument leur “féminité”, etc., qui sont des clichés, clairement… qui sont des clichés de ce qu’est une fille à l’époque du collège, qui vont voir, donc, ce garçon dit “transexuel”, et qui vont l’habiller et qui vont lui dire : “Oui mais comment tu présentes cette fille? Est-ce que tu lui mets du maquillage? Est-ce que tu l’habilles en Prada? Est-ce que tu l’habilles avec du Gucci, etc.?” Ils s’en servent comme d’une poupée.

Donc déjà, ça diabolise un petit peu, je trouve, ce qu’est une fille. 

Pour elles, quelqu’un de trans, c’est un jouet. 

On porte ces filles-là en méchantes, de prendre ce garçon trans, de l’habiller, de lui mettre du maquillage, et tout, parce qu’il est trans, et parce qu’elles veulent entre guillemets “l’aider à être plus une fille”…

RDG –  Oui évidemment du maquillage… paf, paf…  fille!

Chloé –  Bah oui c’est ça, pour l’aider à être plus une fille : il faut lui mettre du maquillage, lui mettre une robe, le mettre sur un podium, sur un défilé… tout ça! Et à contrario, il y a la fille, donc le personnage principal, à côté, qui va le voir, qui s’excuse en disant que : “Oui c’est… c’est vraiment (comme ils disent dans la série) c’est des “bitches”, donc c’est des connasses littéralement, que c’est des connasses de dire ça et que oui si elle se sent mal, enfin si ce garçon se sent mal il peut venir la voir…. 

Les seules filles qui entre guillemets “assument” leur féminité, on en fait les méchantes et en plus de ça, on cultive la caricature de : être une fille c’est mettre du maquillage et s’habiller avec de la haute couture! Je trouve ça quand même assez incroyable… de mettre ça dans une série pour enfants en plein développement! 

RDG – Et de façon plus générale je pense que tu avais développé un peu une réflexion sur justement les séries Netflix, de façon globale tout à l’heure tu m’en parlais?

Chloé –  Ah oui oui! Toutes ces séries Netflix accessibles aux enfants qui se veulent “sex progressive” où dedans il y a pas un seul personnage pleinement hétéro. Où, à chaque fois le personnage hétéro va remettre en question sa sexualité ou son genre et que de remettre ça en question ça va “le libérer”! Ça me sort par les yeux. 

En quoi être une personne hétéro et assumer son genre pleinement est un problème?

RDG – C’est général sur Netflix? Il y a beaucoup de séries comme ça?

Chloé – Ah bah il y en a de plus en plus je vois de moins en moins de séries ou on parle pas de LGBT, de transexualité, ou le mot “cisgenre” n’est pas prononcé, il y en a de moins en moins, des séries comme ça. 

RDG – Donc en fait on a une normalisation du discours transactiviste par les séries, complètement. 

Chloé – Ah mais ça, complètement! C’est son train de devenir une normalité, en fait!

Sur Netflix, ils sont limite en train de dire que le fait d’être hétéro, ou pour eux, d’être “cis”, c’est une mauvaise chose. Et qu’en fait, être transgenre, ou être non-binaire, ou être homosexuel, et de remettre sans cesse son genre ou sa sexualité en question, c’est une bonne chose, c’est un bon développement pour une personne.

RDG – Et notamment pour les enfants. Enfin, ça fleure bon la pédocriminalité, tout ça! Je veux dire…

Chloé – Ah oui complètement!

RDG – Je veux dire… Normaliser la sexualité chez des enfants, enfin pour moi ceux qui font ça régulièrement, c’est quand même les pédocriminels, non?

Chloé – Ah mais complètement! Surtout que comme dans la série dont je parlais tout à l’heure… Le fait d’enlever ce tabou sur la puberté, de montrer des pénis à tout va, et des vagins tout va dans la série… Et montrer ça ensuite à des enfants… Bon, c’est un peu moyen quoi ça. Ouais ça fleure la pédocriminalité, ouais.

RDG – D’accord. Alors qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité, puisque c’est le cas aujourd’hui? Est-ce que tu as déjà subi des pressions, des menaces? Est-ce que tu sens qu’il pourrait y avoir un danger dans ton entourage ou pour toi-même, par rapport à cette question? Ou est-ce que tu te sens en sécurité pour parler librement?

Chloé – Alors clairement, je n’ai pas peur de témoigner sous ma réelle identité, ça ne me pose aucun problème. Et ce qui m’a décidée à témoigner sous ma réelle identité, c’est déjà pour montrer qu’il ne faut pas se laisser faire. Haha. Que, même si on reçoit des pressions, il ne faut pas en démordre. Parce que c’est comme ça que ce dogme va gagner un petit peu. Et c’est en nous faisant peur et en nous faisant reculer, et au contraire il faut pas reculer face à ça parce que sinon ça va les laisser gagner, et ça va les laisser s’étendre de plus en plus et devenir de plus en plus dangereux. 

Et donc, non j’ai pas peur de témoigner sous ma réalité, alors que oui, j’ai reçu des pressions ou des leçons de morale de la part de transactivistes, ou “d’alliés (entre guillemets) LGBTQje-ne-sais-quoi+”. Et pourtant, ça n’a pas changé mon point de vue une seule fois. Pas une seule fois, je ne laisserai mon point de vue être changé par ce genre de personne. Et ça m’a réellement montré à quel point tout ce lobby, cette idéologie est immature. 

Parce qu’à chaque débat, il n’y a jamais un seul argument, un réel fait, un réel argument. C’est toujours du chantage affectif, du chantage au suicide. Du : “Oui mais regarde-toi, tu es la méchante, et tout!” 

Mais je m’en fiche! Clairement, c’est ton idée, d’accord. Mais ce n’est pas parce que c’est ton idée que je dois l’accepter et me dire que c’est la bonne idée. 

Et ça n’est pas parce que TU penses que c’est la bonne idée que ça l’est, clairement. 

Je pense réellement que ça ne devrait pas atteindre autant de personnes, au vu des idées qu’ils propagent. Clairement, les idées de que tous les transactivistes propagent, le fait que ça atteigne autant de jeunes personnes, c’est pas bon! 

Et il faut continuer à se battre pour empêcher ça. 

Parce que ça va devenir de pire en pire. 

Peut-être que là, actuellement, je suis un cas parmi tant d’autres. 

Mais au vu de ce qui m’est arrivé, je n’ai pas envie que ça devienne une normalité. 

Et malheureusement, c’est ce qui est en train de devenir. 

Parce qu’aujourd’hui, on est en train de voir de plus en plus de femmes qui sont en train de détransitionner, parce qu’elles ont vécu ce genre de choses, et qu’elles ne se sont pas arrêtées juste avant. 

Parce que moi, clairement, je me suis arrêtée juste avant. 

Juste avant d’entamer réellement cette envie de transition. Je me suis arrêtée juste avant. Et je n’ai pas envie qu’il y ait de plus en plus de femmes qui souffrent de ça, et que malheureusement, ce soit trop tard, leur identité de femmes, elle leur soit enlevée, physiquement, je veux dire. 

RDG – Oui leur corps en fait : que leur corps soit altéré, qu’elles soient mutilées définitivement.

Chloé – C’est ça : que leur corps ait été mutilé. Je n’ai pas envie que ça devienne une normalité. Parce que… c’est horrible. C’est horrible. 

Pour moi qui, à l’époque… je me disais : “Non, je ne veux pas d’enfants.” 

Alors qu’aujourd’hui, j’aimerais avoir un enfant plus tard, une fois que, voilà, j’aurai la situation, etc. Je veux avoir un enfant. 

Mais à l’époque, au vu de l’immaturité que j’avais, je n’en voulais pas, d’enfant. Si j’avais fait cette transition pleinement, aujourd’hui j’en souffrirais, parce que je ne pourrais jamais avoir d’enfant.

RDG – Et ton ex copine, là… Du coup, elle a fait une transition complète? 

Chloé – Elle a fait une transition complète, de ce que je sais. Parce que j’ai coupé tout contact avec ces personnes.

RDG – Donc elle s’est fait stéril… elle s’est faite castrer.

Chloé – Aux dernières nouvelles, elle était sous bloqueur hormonaux, elle prenait de la testostérone, et elle s’est fait retirer ses seins. 

De me dire que cette personne m’influençait à me dire que, oui c’était possible que je puisse le faire également. 

Et que, pour moi, ça s’en était devenu une possibilité à un moment de me dire que, dans une autre temporalité, je l’aurais fait… ça me détruit.

Parce que je me dis… mais si ma mère n’avait pas été aussi présente, dans quelle situation je serais aujourd’hui?

Si ma mère avait laissé tomber, dans quelle situation je serais aujourd’hui? 

Et c’est pour ça que je ne remercierai jamais assez ma mère de ne pas avoir lâché prise, et de toujours avoir été là pour moi. 

RDG – Merveilleux. En tant que mère je… je connais le désespoir de certaines mères vraiment, autour de moi et ce matin encore j’ai parlé avec une amie très chère et c’est sa petite fille qui a 19 ans qui a transitionné. Donc elle a déjà pris la testostérone, elle a… sa voix a mué, et donc là, il est question de … la suite, en fait : la mastectomie, etc. Et cette femme qui traverse ça… c’est terrifiant.

Chloé – Pour moi qui veux un enfant, je n’ai pas envie que mon enfant grandisse dans une société où il y a cette idée-là que c’est normal de se mutiler le corps, en tant que femme, pour devenir un homme. Et qu’être une femme, en fait, c’est un sentiment.

Mais ça me détruirait, en tant que mère, de voir mon enfant tomber dans ce piège.

RDG –  As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Chloé – Une fois, en fait, je m’étais habillée avec une robe et des collants et comme je m’habille aujourd’hui parce qu’à l’époque je commençais déjà à avoir mon style en fait! Et elle me l’a enlevé complètement. Que j’étais venue en robe avec des talons et j’avais ma robe, collants, talons, sac à main et tout… Et que ça n’avait pas plu à mon groupe d’amies qui se disaient transactivistes, ça leur a permis de faire beaucoup de remarques sur mon hétérosexualité, ma féminité. Je leur ai dit : “Mais j’aime m’habiller comme ça, laissez-moi m’habiller comme ça enfin!” Et elles n’étaient pas d’accord, et je leur ai tenu tête… Et vraiment, elles m’ont fait la tête pendant un bon moment… Elles m’ont vraiment ignorée parce qu’elles me disaient : “Non, tu es non-binaire, tu n’es pas une fille, tu n’es pas une fille, tu n’es pas une fille!” 

Alors que moi je leur disais : “Mais bien sûr que si! Enfin moi, je m’identifie comme une fille. Je ne m’identifie pas comme comme ce que vous me dites!” Elles osaient dire que je n’étais pas de leur vie, et que je voulais m’habiller comme je le souhaitais… elles m’ont fait la tête pendant presque une semaine. Elles m’ont ignorée et rejetée, juste parce que je leur avais tenu tête, jusqu’au moment où il a fallu que j’aille m’excuser de moi-même. Et c’est à partir de là qu’elles ont accepté de me pardonner, et de passer l’éponge. 

Et de même, au tout début de ma relation amoureuse avec cette fille, pour moi c’était… voilà c’était compliqué, parce que je me disais “Oui bon voilà je suis amoureuse d’une fille, voilà…” ça me surprenait un petit peu… Elles remettaient ce truc-là en question en disant que : “Oui, tu te rends compte, si tu t’acceptais pleinement, tu ne réagirais pas comme ça, etc…” 

Alors que j’étais en train de me développer et qu’elles appuyaient sur tous les questionnements que je pouvais avoir en tant que personne qui se développe, en fait.

Par rapport aux marques, en fait, vraiment aujourd’hui cette idéologie elle impacte même les marques au point où en juin donc, pendant le “Pride Month” donc le mois de la Pride, toutes les marques mettent leur logo en drapeau LGBT et se veulent “alliées”. 

Sauf qu’en fait, c’est évidemment juste pour se faire bien voir des parties LGBT des transactivistes etc. Et le fait que même des marques prennent ce genre de parti ça me semble quand même assez absurde. De vouloir se justifier comme allié pour vendre… Parce que comme ce qu’on voit sur Twitter si tu n’es pas un allié tu te fais “ficher” il y a quand même des threads sur Twitter de personnes qui disent “Voici les marques et les personnes qui sont contre le transactivisme et les LGBT, ou qui ne soutiennent pas…” Parce que même ne pas soutenir, c’est être un ennemi, bien sûr! 

Et c’est des threads absolument absurdes! Statuant qu’il faut boycotter cette marque parce qu’elle n’est pas dans le “Pride Month”, elle ne fait pas partie donc en fait ce lobby-là prend même en otage les marques de vêtements! 

Même les marques de vêtements qui sont censées être un minimum neutres, sont forcées de prendre un parti, autrement elles se font boycotter.

Je trouve ça quand même absurde. 

RDG – Dernière question : est-ce que tu as quelque chose à ajouter?

Chloé – Ce que j’aurais à ajouter à la fin, c’est ce que j’ai essayé de faire passer également durant ce témoignage c’est que face à une personne qui se fait piéger un peu par ce lobby, en tant que personne aimante, tout ce qu’on peut faire malheureusement quand notre enfant, notre ami, notre petit enfant, notre compagnon ne va pas nous laisser avoir de la place ou avoir un avis, faut pas laisser tomber! 

Parce que comme je l’ai déjà dit aujourd’hui si réellement, j’arrive à m’accepter pleinement, c’est c’est un bon 80, 90% grâce à ma mère! 

Et heureusement qu’elle n’a jamais abandonné, qu’elle n’a jamais baissé les bras, qu’elle n’a jamais accepté mon avis un peu absurde que j’avais à cette époque, parce que je me faisais manipuler et ce que je peux dire c’est qu’il ne faut pas laisser tomber, il ne faut pas abandonner la personne qu’on aime, même si ça fait mal de voir mourir, en fait, psychologiquement, la personne qu’on connaissait avant.

Il faut continuer à se battre pour pas que ce genre de choses s’applique à d’autres personnes réellement, surtout pas! 

Que le suicide, la tentative de suicide devienne la dernière réponse et la libération d’une emprise, il ne faut surtout pas que ça devienne une normalité. 

Parce que malheureusement c’est ce qui était la solution et la réponse pour beaucoup de personnes qui sont fait avoir par cette idéologie.

Et (je voudrais dire) à toutes les personnes qui voient les personnes qu’elles aiment se faire avoir par ce lobby de ne pas laisser tomber, de continuer à se battre, et de continuer à montrer qu’on est là, qu’on les aime tout en leur disant que il ne faut pas qu’ils s’abandonnent juste pour rentrer dans des cases, ou pour se faire bien voir par ses amis, que c’est pas parce que tu as un avis différent de ton ami que tu es un ennemi. 

S’il vous plaît, signez la Déclaration des Droits des Femmes basés sur le sexe : womensdeclaration.com 

Rebelles du genre – Épisode 46 – Lily

Ce témoignage a été rédigé par Lily et lu par une rebelle du genre

Lily – J’ai choisi de m’appeler Lily le temps de cette interview. J’ai 23 ans, je suis expatriée au soleil, bisexuelle, professeure de français et juive (je vais revenir sur ce point un peu plus tard). 

Je dirais que mon rapport au féminisme est informatif : je me renseigne beaucoup par la lecture (livres, médias engagés et comptes Instagram militants de divers horizons) et les podcasts, et je suis peu dans l’action, faute d’engagement concret possible. 

Il n’empêche que j’ai toujours plaisir à partager mes convictions et à lancer le débat avec les membres de mon entourage et, à mon humble avis, j’ai réussi à déconstruire pas mal d’idées reçues auprès des personnes que je fréquente. Chacune apporte sa pierre à l’édifice à sa façon !

Rebelles du Genre – Bonjour et bienvenue sur le podcast Rebelles du Genre. Nous sommes des femmes, militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basés sur le sexe, et donc notre biologie. Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes, et le genre en est le moyen. Nous sommes les rebelles du genre. Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste, et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis elles ouvrent les yeux, constatent sa violence, et la refusent. Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre et qui témoignent de leur parcours. Écoutons leur parole. 

Lily – Je vais essayer de vous résumer mon rapport au genre de ma tendre enfance jusqu’à aujourd’hui. 

Quand j’avais entre 3 et 7 ans environ, je n’aimais pas les jeux dits « de fille », et cela a plus posé problème à mes instits qu’à mon entourage, pour qui ça n’avait pas d’importance tant que j’étais heureuse et bien avec mes amis, qui étaient exclusivement des garçons d’ailleurs. Je jouais aux voitures, aux billes, mon père et ma tante m’ont tout de suite appris à supporter leur club de foot fétiche et à 6 ans, je savais ce qu’était le « hors-jeu ». J’allais même souvent au stade avec mon père, ma tante et mon grand-père. Pas mal, pour moie qui n’étais qu’une fille, hein ? Et à  côté de ça, ma maîtresse de moyenne section ne voulait pas que les garçons utilisent du rose et les filles du noir pour les coloriages. 

A l’école primaire, je suis rentrée dans les standards qu’on attendait d’une petite fille mais sans qu’on ne m’y ait vraiment forcée, du moins pas explicitement : donc les robes, les Winx, les Totally Spies, Hello Kitty, etc…  Et ça ne m’a pas posé de problème, du moins pas que je m’en souvienne. Au passage, je me rappelle mon meilleur copain de l’époque, dont les autres garçons se moquaient parce qu’il ne jouait qu’avec des filles et que, comme elles, il aimait les princesses, les contes de fées. Ça m’énervait beaucoup qu’il soit pointé du doigt, mais lui, ça ne lui faisait ni chaud ni froid, et tant mieux ! 

En somme, comme bien d’autres enfants, j’ai été et l’actrice et la témoin des normes de genres, basées sur le sexe, qui modèlent les enfants.

Mon adolescence s’est passée sans que la question des LGBT+ ne soit au cœur de mes préoccupations. Toutefois, dans les trois établissements catholiques que j’ai successivement fréquentés, il y avait une rhétorique homophobe et misogyne bien ancrée, mais venant presque toujours du corps enseignant, pas vraiment répandue au sein des élèves. 

Au lycée, j’ai commencé à prendre conscience des enjeux des débats sur l’homosexualité et sur la condition de la femme quand j’ai découvert mon attirance pour les filles et que la loi Taubira était d’actualité. Des réflexions sont nées, mais mon cheval de bataille concernait plutôt ce qui touche au sexisme. N’ayant personnellement pas fait de mauvaise expérience sur le moment (même si des années plus tard, avec du recul, je me suis rendu compte que j’avais été harcelée, agressée, silenciée à plusieurs reprises), je ne me suis pas plus que ça interrogée. 

Quand j’avais 18 ans, j’étais en prépa littéraire. Je vais vous épargner les détails car ce n’est pas vraiment le sujet, mais les nombreux ouvrages de Nietzsche et du marquis de Sade comme philosophes ont totalement révolutionné le rapport que j’avais à mon propre corps et à mon environnement, déclenchant ainsi une libération de mœurs, sans laquelle je ne serais certainement pas la même personne qu’aujourd’hui. L’année de mes 18 ans est l’une des plus belles de ma vie ! Merci à mes philosophes préférés ! 

Entre mes 19 et 22 ans, j’ai découvert de nombreux comptes Instagram féministes, parmi lesquels @tasjoui, @irenevrose, @mecreantes, @jmenbatsleclito, ou encore @feminist. Progressivement, la question du transactivisme s’est invitée chez certains. J’insiste sur ce « progressivement », car c’est certainement ce qui a fait que je n’aie pas vraiment vu comment la question trans était venue grignoter de l’espace à la question féministe. Avec le recul, c’est bien la preuve que l’un a volé la place de l’autre ! 

Alors, je me suis abonnée à de plus en plus de comptes transactivistes à grosse audience comme @transnoir, @endolorix, @agressively_trans, @no.dick.pick, j’ai lu sans cesse des posts pour comprendre et saisir tout le nuancier de la transidentité. 

Jamais, ô grand jamais je n’ai remis en question tout ce que je découvrais pour deux raisons principales : j’étais comme fascinée (au sens positif du terme) par ces variétés d’identités, et les personnes trans sont en souffrance, il faut donc se plier à leurs revendications. Concernant le premier point, en tant que prof de français passionnée par les évolutions de la langue, j’ai trouvé incroyable qu’autant de mots émergent, que le langage puisse se démultiplier pour répondre à des exigences nouvelles pour des visibilités nouvelles.

Aussi, je ne voyais pas de problème à ce que chacun.e s’auto-identifie comme bon lui semble. L’inclusivité, le maître-mot : c’est plutôt pas mal, sur la forme ! Et force est de reconnaître que les comptes militants sont généralement très bien tenus : pédagogiques, interactifs, précis, équilibrés entre expérience personnelle et conclusions générales. Bref, sans être moie-même ultra investie concrètement, je trouvais ça intéressant et moderne. 

On disait de détester Dora Moutot, Marguerite Stern, J. K. Rowling, les assos l’Amazone et Osez le féminisme !, les « TERFs », les « SWERFs », alors je les ai détestées sans jamais chercher à comprendre le sens de leurs positions. Ben ouais, faut pas perdre son temps à écouter ces tarées qu’on n’hésitait pas à associer à l’extrême-droite d’ailleurs.

J’avais suivi de près la polémique sur le fameux coup de gueule des « TERFs » quant à la mention de l’identité de genre dans la loi contre les thérapies de conversion, et sans légitimer le harcèlement vécu par Dora Moutot, je m’en amusais un peu, elle l’avait bien mérité. 

Je répétais « Trans women are women », « Sex work is work » et d’autres litanies. Au passage, si les adeptes du féminisme libéral faisaient preuve d’un minimum de bonne foi, iels admettraient que personne n’inclut plus les prostituées que les prétendues « SWERFs », et que ces dernières sont même les seules et uniques à soutenir celles qui ont vécu l’enfer. SWERFs, vous dites ? 

Aujourd’hui, j’ai 23 ans, et il y a trois mois environ, Marguerite Stern, dont je regardais de temps en temps le compte Instagram, s’est mise à produire des podcasts avec de jeunes féministes. Par curiosité, j’en ai écouté quelques-uns… Et tout s’est recomposé dans ma tête. Ces femmes donnaient des réponses à des questions que je n’osais pas me poser de peur d’être moie-même une « sale TERF ». Je ne saurais pas expliquer à quel point ça a totalement changé ma vision du féminisme, vampirisée par le transactivisme, et du transactivisme lui-même. J’ai bingé les podcasts de Rebelle du genre, tous ceux de Marguerite Stern (ses cinq séries alors sorties), des interviews de Dora Moutot et de Joana de « Bois mes règles ». J’ai relu des contenus que j’avais approuvés comme un mouton, et je me suis demandé comment j’avais pu gober tout ça, tellement c’était… lunaire. 

J’ai alors lu les commentaires de certaines publications. Je précise que je ne les avais pas lus avant car le post se suffisait à lui-même. En voici qui sont assez mythiques : 

– « Arrêtez d’utiliser le mot « femme », c’est transphobe et excluant (…) Hitler et les nazis utilisaient aussi le mot « femme ». Le terme à utiliser est « personne à vulve » ou « personne qui menstrue ». Le mot « femme » est à bannir, merci ! » L’analyse de Lily : j’ai tout à parier qu’Hitler utilisait aussi les mots « arrêter », « exclure », « bannir » et « merci ». 

– « Ça fait quoi d’être une TERF ??? D’utiliser le mot « meuf » comme si tout était normal ? (…) Remets-toi en question et commence à déconstruire un peu ton privilège juif ». L’analyse de Lily : bon, déjà, c’est vrai que c’est pas normal de dire « meuf », il vaut mieux dire « femme », parole de prof de français. Ensuite, les juifs et les juives sont tellement privilégié.e.s qu’Hitler était jaloux d’elles et eux et qu’il les a condamné.e.s aux pires horreurs. Mais l’antisémitisme qui s’invite dans les luttes intersectionnelles, c’est une autre histoire, et je ne m’étendrai pas dessus car ce n’est pas le sujet. 

– « Jésus n’était sûrement ni « homme » ni « femme » : son expression de genre était très féminine (cheveux longs, lèvres pulpeuses), même s’il était une personne avec pénis. Jésus était un.e Palestien.ne queer et transgenre ». L’analyse de Lily : on me dit  dans l’oreillette qu’à cette époque, les hommes portaient les cheveux longs et que le fils de Dieu était bien un fils. On repassera pour les cours d’histoire, aussi.

– « La préférence génitale est bien transphobe. Refuser de sortir avec une personne parce qu’il s’agit d’une femme avec pénis ou d’un homme avec vulve est d’une violence extrême. Le problème, c’est qu’on nous apprend dès la naissance que le système hétéro est normal alors qu’il est discriminant pour bon nombre d’adelphes. Quand une femme trans tombe amoureuse d’une homme cis, celui-ci ne sortira jamais avec elle juste parce qu’il croit ne pas aimer les pénis… Il est là, le problème ». L’analyse de Lily : oui, c’est vrai que le système est hétéronormé et cela génère de l’homophobie. Mais on ne peut pas obliger les personnes hétérosexuelles à avoir des relations homosexuelles, enfin ça tombe sous le sens ! Mention spéciale pour le Freud de comptoir qui explique aux gens qu’ils connaissent mal leurs propres goûts. A ce propos aussi, je rappelle que, selon le transactivisime, vouloir coucher avec des personnes trans, c’est du fétichisme, mais ne pas vouloir coucher avec elles, c’est de la transphobie. De même, quand un compte féministe tenu par une femme parle des questions trans, c’est du vol de parole par les non-concernées. Si ledit compte n’en parle pas, il n’est pas assez inclusif donc transphobe. 

A méditer. 

Dans la série des incohérences, il y a aussi l’impossibilité de définir une « femme » et un « homme ». Par exemple, Lexie, femme transgenre tenant le compte @agressively_trans, dit elle-même ne pas savoir définir une femme, mais savoir qu’elle en est une. Elle dit aussi que son identité de genre « femme » n’a rien à voir avec sa « féminité », soit ses vêtements, son maquillage, en gros que ses robes ne sont pas liées au fait qu’elles se sente femme. Mais de qui se moque-t-on ! Séparer identité et expression de genre… c’est sexiste au mieux, au pire de mauvaise foi. Mais je pencherais vers la mauvaise foi, l’une des marques de fabrique du transactivisme. 

J’ai commencé à m’indigner des interdictions de l’ouvrir à coup de « Tu n’es pas concernée donc tu ne peux pas t’exprimer ». Comment ça, je ne suis pas concernée ? Je ne suis peut-être pas une femme trans, mais je suis quand même une femme, si des fois ! Désolée de te le dire, Lexie, mais oui, je suis plus une femme que toi, qui te prétends femme sans même savoir ce que c’est. Quand tu connaîtras un dixième de ma douleur chaque mois, un centième de l’angoisse que j’ai ressentie à chaque fois que j’ai cru être enceinte, un millième de la peur que je connais sy-sté-ma-ti-que-ment quand je prends les transports, un millionième de ma colère quand l’amendement garantissant le droit à l’avortement a été aboli dans le pays le plus influent du monde,  tu pourras dire que tu es autant une femme que moi. Porter des robes et du maquillage, tu as le droit de le faire, mais ça ne change rien à ma biologie comme à la tienne. Tu ne sais pas ce que c’est qu’une femme, alors laisse-moi te le dire, puisque j’en suis une. Je ne tolèrerai jamais qu’une femme trans, donc une personne qui a une bite et qui a été sociabilisée comme homme, explique aux femmes ce qu’est le féminisme, et surtout ce qu’est une femme. 

Petit message aux femmes trans : tous les désagréments (c’est un euphémisme) liés à notre sexe biologique n’ont absolument rien d’enviable. C’est vrai que pour beaucoup de femmes, donner la vie est quelque chose de merveilleux, mais là encore, neuf mois de possibles complications variées et plus ou moins intenses, c’est le prix à payer pour cet avantage… si c’en est un !

Lexie me répondra que mes propos sont d’une « violence extrême ». En effet, c’est l’expression à la mode pour écarter toute possibilité de discussion. Mais je crois que vous, les transactivistes, n’avez jamais pensé à vous demander ce que ça fait, dans l’autre sens.

Si vous avancez que c’est d’une « violence extrême » de parler de sexe biologique au point de coller « Le sexe biologique n’existe pas », pensez à la violence extrême infligée à toutes ces filles par des mutilations sur et à cause de leur sexe (et non leur genre).

Si vous avancez que c’est d’une « violence extrême » de parler de « femme » et non de « personne à vulve », je vous réponds que c’est d’une violence extrême pour moie d’être ramenée à mon entrejambe. 

Si vous avancez que c’est d’une « violence extrême » de dire « les femmes trans ne sont pas des femmes », je vous réponds que c’est d’une violence extrême pour moie d’être assimilée à des personnes qui n’ont rien de commun avec moie en termes de biologie sexuelle. 

Redisons-le, si vous avancez que c’est d’une « violence extrême » que les lesbiennes refusent les pénis, je vous réponds que c’est d’une violence extrême pour elles qu’on leur en impose un. 

En plus, l’expression « violence extrême » m’insupporte au plus haut point. Les mots ont un sens, et les milieux intersectionnels ne cessent de le rabâcher. Apparemment c’est « psychophobe » de dire « fou amoureux », « un film de dingue », « j’hallucine », « sale con », etc. Eh bien moi, je pense que parler de « violence extrême » pour une erreur de pronom ou un accord fautif, c’est absolument disproportionné quand on sait toutes les violences qui touchent spécifiquement les femmes. Petit coucou à Dora Moutot, dont la campagne de haine lancée par Lexie a commencé par un « t’es pas content » au lieu de « t’es pas contente ». Si vous êtes convaincu.e.s de votre identité de genre, une maladresse d’expression ne devrait vous faire ni chaud ni froid !

Pour finir ce parcours dans la critique du genre, en mai, Marguerite Stern a publié une tribune sur sa colère de ne pas être mentionnée dans un film qui porte sur sa création, les collages contre les féminicides, à Cannes. Ça m’a révoltée. Elle m’a donné l’honneur de traduire cette tribune en anglais, pour la publier dans le média britannique The Critic. Le fait de sentir son indignation littéralement au mot le mot m’a d’autant plus confortée dans mes positions. Au passage, chers.e.s transactivistes, je ne sais pas comment vous pouvez vous regarder dans la glace après avoir harcelé et agressé une icône du féminisme, dont le nom mérite d’être gravé dans l’histoire, au point qu’elle doive être hospitalisée. 

Je vais vous faire une confession, chères auditrices : j’adore l’Italie. Je parle italien et j’ai même lu de la poésie italienne du XIVe siècle, c’est dire si je remonte aux racines. Je connais certainement Florence mieux que beaucoup de Florentins et Florentines. Je savoure avec plaisir la bonne nourriture italienne. Chaque été, je vais en Italie. L’histoire italienne, je la connais presque autant que l’histoire française. En plus, avec mon teint basané et mes longs cheveux foncés, on me prend souvent pour une méditerranéenne. Je suis donc une Italienne transnationale. … Quoi ? Comment ça, je ne suis pas Italienne ? Vous n’avez pas le droit de heurter mon ressenti ! C’est d’une violence extrême !  

Rebelles du genre – Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes ? Pour leurs droits ? Pour les enfants ? Po ur la société ? Pour la démocratie ? 

Lily – Je vais la faire courte, du moins essayer, cette fois !

Pour les femmes : Comment peut-on se battre pour les droits d’une catégorie si cette catégorie ne peut plus être définie ? Ainsi, que vaut le féminisme si le mot « femme », au mieux est à préciser avec des termes tels que « cisgenre », « transgenre », « non binaire », au pire est à bannir ? Quand je dis « les femmes », j’ai envie de pouvoir me référer aux personnes femelles sans avoir à réfléchir à dix mille concepts derrière. Si tu es une femelle non femme, eh bien ne te sens pas concerné. Si tu es un mâle non homme, eh bien ne te sens pas concernée non plus. Pour les personnes intersexes, il s’agit effectivement de biologie. Alors, libre à toi de te sentir concerné.e. Si pour toute autre raison métaphysique tu ne te sens pas concerné.e, eh bien… ne te sens pas concerné.e. C’est mon droit de refuser des formulations contre- intuitives. De toute façon, arrêtons la mauvaise foi : vous savez très bien que quand on dit « les femmes », les concernées n’ont pas besoin d’un ou plusieurs adjectifs derrière pour savoir qu’on parle d’elles. 

Et pourtant vous l’avez sûrement entendu et continuerez de l’entendre, même dans ce témoignage, je n’arrive pas toujours à parler d’ « homme » pour « femme trans » et de « femme » pour « homme trans », car mon cerveau est vraiment trop conformé à l’autodétermination de chacun.e. 

Pour les femmes toujours, je pense notamment aux lesbiennes. A celles et ceux qui soutiennent que refuser un « pénis de femme » quand on est lesbienne est d’une violence extrême, vous n’avez jamais pensé à vous dire que c’est tout aussi violent dans l’autre sens ? Et si vous mettez la pression à la lesbienne en question et qu’elle accepte sous contrainte un pénis, rappelez-vous qu’une relation sexuelle par la contrainte, c’est un viol. C’est la loi. 

On atteint même un niveau supérieur quand on traite les lesbiennes de « fétichistes de la vulve », comme si une femme, ce n’était qu’une vulve. Alors j’ai un scoop : quand une femme est attirée par une autre femme, c’est aussi pour l’amour d’un corps développé d’une certaine façon avec ses formes et sa répartition des graisses, un timbre vocal souvent plus doux, l’intercompréhension par un vécu commun, une voix double contre les oppressions, le soulagement d’être avec quelqu’une qui nous ressemble et qui ne représente pas une menace patriarcale. 

Imposer un pénis à une lesbienne, ce n’est ni plus ni moins que de l’homophobie. Il en va de même pour les hommes hétéros, qui ne sont pas transphobes s’ils n’aiment pas les pénis, ou les femmes hétéras, qui ne le sont pas plus si elles ne veulent pas d’une vulve. De toute façon, je pense que le décentrement de sa propre petite personne est quelque chose qui manque vraiment aux transactivistes. 

J’ai un autre exemple sur la question des femmes. Megan Rapinoe, joueuse de football américaine, déjà connue pour avoir refusé de se rendre à la Maison Blanche sur invitation de Trump (ce que je trouve courageux et louable), a récemment publié une tribune qui défend le droit des femmes trans de concourir avec les femmes. Elle explique en effet que la santé mentale d’un jeune garçon transidentifié valait plus que le refus de jeunes filles d’avoir un garçon parmi elles. Mais n’a-t-elle pas pensé à se dire que le confort de plusieurs jeunes filles comptait aussi ? Que ces jeunes filles n’étaient peut-être pas à l’aise de partager un vestiaire avec un jeune garçon, d’autant plus si c’est pendant la puberté ? 

A ce propos, quand j’étais adolescente, j’étais complexée par mon corps, j’avais déjà du mal à me changer dans les vestiaires alors que c’était avec mes copines et qu’on était toutes logées à la même enseigne niveau amour propre. Je ne pense pas que j’aurais accepté qu’un adolescent transidentifié soit avec nous. Ça aurait été violent pour lui, j’en suis consciente, mais, parmi les transactivistes, qui penserait que c’est aussi violent pour toutes les filles en retour ? Ça ne m’aurait certainement pas remplie de joie de le refuser, mais ne serait-ce que mathématiquement parlant, mieux vaut une personne mal à l’aise que quinze. D’ailleurs, ce genre de situation mène une fois de plus à de la misogynie : on préfère expliquer à des filles mal dans leur peau qu’elles doivent se dénuder devant un garçon plutôt que rappeler aux garçons les règles de respect élémentaires pour que leur camarade se soit pas moqué ni rejeté. C’est exactement ce que vous dites dans votre intro : les femmes sont « conditionnées à la gentillesse ». 

Rapinoe a également démenti l’idée que « les femmes trans battent tous les records ». Je me suis renseignée, et elle a raison : c’est très caricatural, et les quelques cas où c’est vrai ne suffisent pas à en faire une généralité. Cependant, même si les femmes trans en question n’arrivent que 5ème, 8ème ou même avant-dernière, elle éliminera de toute façon une femme biologique, femme qui n’aurait pas été éliminée si elle avaient eu l’avantage d’avoir fait sa puberté en tant qu’homme. La mauvaise foi encore, vraiment une marque de fabrique !

Concernant les femmes également, la question de la transidentité fait encore une fois ressortir des doubles standards dans le traitement. Quand Marguerite Stern dit en ces mots qu’être une femme est une réalité biologique, elle subit des violences sans nom. Quand Julien Rochedy dit que les personnes trans sont dégénérées, c’est complètement passé sous silence, alors que c’est de la pure transphobie. Il en va de même pour Dora Moutot : des transactivistes ont collé des stickers « TERF » sur ses livres à la Fnac. Pourquoi n’ont-iels pas collé « FACHO » sur ceux de Zemmour, qui a fait référence à un médecin nazi en camp de concentration pour parler des enfants trans ? 

Pour les enfants : Imagine t’as fait 10 ans d’études pour être psychiatre, et là, t’as une enfant de 8 ans qui te dit qu’elle aime les voitures, ses parents te demandent le feu vert pour des bloqueurs de puberté, et si tu ne le leur donnes pas, tu peux être poursuivi.e pour thérapie de conversion. 

Non, je rigole. Mais imagine quand même. 

Imagine t’as fait 10 ans d’études pour être psychiatre et là t’as une ado qui a passé quelques mois sur Insta et Discord qui veut se faire déchirer un bout de peau pour avoir une bite parce qu’elle s’est auto-diagnostiquée trans demi-boy non binaire gender fluid, et si tu lui refuses le feu vert pour de la T, tu peux être poursuivi.e pour thérapie de conversion. 

Non, je rigole. Mais imagine quand même. 

Nothing to add. 

Pour la société maintenant : A mon sens, soigner la dysphorie par des transformations médicales dangereuses plutôt que par une réévaluation de son propre corps et un suivi psychologique, c’est de l’inconscience. 

On peut faire un parallèle entre la dysphorie de genre et la dysmorphophobie. La dysmorphophobie, pour la faire courte, c’est l’ensemble des troubles générés par l’obsession pour des défauts dans l’apparence. En gros, c’est la dysphorie de l’apparence physique. Prenons le cas d’un trouble dysmorphophobique bien connu : l’anorexie. Déjà, ça n’a pas de sens d’être « contre » l’anorexie ou « contre » la transidentité : c’est là, ça existe, c’est tout. Donc chut, les réacs. Cependant, cela ne nous empêche pas de nous interroger sur les sources du trouble, mais surtout sur les moyens d’y remédier autres que les transformations corporelles. Si une patiente anorexique demande à sa ou son docteur des médicaments pour maigrir encore plus et avoir le corps dont elle rêve, iel ne va jamais lui prescrire quoi que ce soit ! Bien au contraire, iel va l’aider à accepter son corps tel qu’il est, en dépassant justement cette dysphorie de l’apparence physique. Un suivi psychologique et/ou psychiatrique est tout à fait envisageable également.

A l’origine de l’anorexie d’une patiente, on sait très bien qu’il y a le culte du corps excessivement mince – donc maigre – dans les pubs, les magazines, la mode. Pour comment y remédier, je suis loin d’être une spécialiste, mais pour avoir traversé une phase d’anorexie, je peux dire que la réévaluation des qualités de mon corps, comprendre que je peux tout à fait être jolie et plus en chair, qu’un corps cadavérique n’a rien d’idéal, ça m’a beaucoup aidée.

Pour la dysphorie de genre, pourquoi ce serait différent ? L’origine, c’est la genrification extrême de tout : vêtements, jouets, couleurs, livres, sports, métiers, programmes TV, loisirs, produits d’hygiène & cosmétiques, rôle à la maison, image dans les médias et les pubs, et même jusqu’à la nourriture ! Alors pourquoi le soin, ce ne serait pas de détruire ces clichés, de la même façon qu’on détruit l’image du corps maigrissime parfait ? Je reste bien sûr consciente que face à une société aussi conditionnée, la tâche n’est pas aisée. J’y reviendrai. 

Pour finir, je tiens à dire j’apprécie sincèrement quand des personnes transgenres assument ouvertement qu’elles n’ont pas le sexe qu’elles auraient voulu avoir, au lieu de partir dans des démonstrations sans queue ni tête que le sexe biologique n’existe pas. J’ai vu plusieurs interviews de telles personnes, et c’est réconfortant de se dire qu’il y a tout de même quelques réflexions rationnelles. 

Pour la démocratie : Je pense que ce qui représente une menace pour la démocratie dans le transactivisme, c’est le refus de la liberté d’opinion et d’expression. Clin d’œil à ma maman, avec qui j’en ai beaucoup parlé. Disons les choses simplement : si vous n’êtes pas d’accord avec elles et eux,  vous n’avez pas le droit de parler. Les critiques de Marguerite Stern sont mises sur le même plan que les propos haineux de l’extrême droite. Ce n’est même pas caricatural ! En atteste la censure permanente de comptes n’allant pas dans le sens des transactivistes. Le pire, c’est que les moutons qui signalent en masse des critiques du genre n’hésitent eux-mêmes pas à appeler à harceler, insulter, voire proférer des menaces de mort. Evidemment, ces comptes se portent très bien et ne sont jamais inquiétés.

A l’heure où j’écris, le Twitter de Marguerite Stern a été définitivement supprimé, mais récupéré après une procédure d’appel. Voici la preuve qu’il s’agit d’une censure ciblée : une semaine auparavant, son compte avait été réactivé car considéré conforme aux règles de Twitter. Pendant toute la semaine suivante, elle n’a publié strictement rien de polémique. Seule une énième vague de signalements massifs peut en être à l’origine. Hélas, elle y est abonnée. Chers moutons qui signalent, rappelez-vous cette phrase de Beaumarchais dans Le Mariage de Figaro : « Il n’y a que les petits hommes qui craignent les petits écrits. » Donc si vous avez peur de quelque 240 caractères, c’est que vous n’êtes vous-mêmes pas grand-chose. 

Cette censure de la parole n’a guère de précédent depuis l’ère des réseaux sociaux, même pas chez l’extrême droite, où on trouve pourtant des contenus racistes, misogynes, antisémites, homophobes, lgbt+phobes haineux et violents à l’envi.

Là est la menace pour la démocratie : aux yeux des transactivistes, la frontière entre critique et haine n’existe plus. Preuve en sont des posts sur des comptes intersectionnels disant sans ironie que Charlie Hebdo et Valeurs actuelles, c’est la même chose. Donc un journal satirique dans lequel l’ex FEMEN et icône du féminisme Inna Shevchenko écrit, c’est pareil qu’un magazine qui dit en ces mots que les féministes sont « folles » et « hystérisent le débat ».

Rebelles du genre – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner sous ta réelle identité ou de façon anonyme ? As-tu déjà subi des pressions, des menaces, un danger perçu ou réel dans ton entourage (pro, perso, peur pour tes proches, etc.), ou, au contraire, te sais-tu en sécurité pour parler librement ?

Lily – Je souhaite être anonyme car je perdrais des ami.e.s si je faisais mon coming out radfem, or je considère que ces fortes amitiés doivent dépasser les désaccords sur des questions aussi polémiques. 

C’est la première fois que je partage le fruit de mes récentes réflexions, alors je ne suis pas du tout en danger par rapport à mes opinions. Cependant, la peur que peuvent éprouver certaines témoignantes m’indigne, et prouve des pratiques violentes maquillées en pseudo inclusivité.

Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ? 

Lily – Je vais un peu m’étaler, mais c’est la première fois que j’ai l’occasion de le faire. J’aimerais donc partager plusieurs anecdotes qui ont été de véritables déclics pour moie, et qui me maintiendront toujours dans mes positions actuelles. 

Première anecdote : Une personne que j’ai connue comme femme pendant mes études et qui se considère à ce jour comme homme trans non binaire m’a expliqué que refuser un « pénis de femme » quand on est lesbienne ou homme hétéro est transphobe car le rapport que l’on a à un pénis est une construction sociale. A ce titre, un pénis est associé à une façon de s’en servir. Il n’y a pas que les rapports vaginaux, buccaux et anaux, il y a une infinité de choses. Bon… tout ça pour dire que mon copain, hétéro, qui ne pourrait pas toucher une autre bite que la sienne, est transphobe ? Euh… non. 

D’ailleurs, cette même personne se dit « lesbien ». Il m’a écrit un long message, à mon goût bancal, pour m’expliquer pourquoi on pouvait être un homme lesbien. La raison principale, c’est que pas mal de femmes lesbiennes qui transitionnent se retrouvent, de fait, exclues de la communauté à laquelle elles appartenaient. Or, cette exclusion peut être vécue comme un délaissement, un abandon, voire de la transphobie. Il est donc “normal” que les hommes trans antérieurement femmes cis lesbiennes puissent rester « lesbiens », et être acceptés en tant hommes dans des communautés de femmes. Vous suivez ? Ou bien vous trouvez aussi que le transactivisme devient une caricature de lui-même ? 

Deuxième anecdote : Un instagrammeur transgenre de grande audience se fait connaître par un prénom masculin, appelons-le Thomas, qui a remplacé son deadname. Il a dit qu’il s’était « toujours appelé comme ça ». Oui, je trouve ça un peu ridicule. Thomas a d’ailleurs récemment dit qu’il était un homme trans non binaire. Il en a fait part à sa communauté courant mai comme s’il faisait une annonce incroyable, comme une femme annoncerait qu’elle est enceinte à sa famille, par exemple. A ce propos, j’ai l’impression que dans la communauté queer et les milieux intersectionnels, il y a une course à qui aura le plus d’étiquettes, et donc qui subit le plus d’oppressions, et donc quelle parole aura le plus de valeur. Je trouve ça tellement malsain de vouloir comparer les souffrances, et aussi terriblement dangereux : c’est une aubaine pour vouloir supprimer à des gens le droit de parler de leurs problèmes sous prétexte qu’iels souffriraient moins. Le transactivisme, c’est l’un des cas d’école : on en vient à dire que les femmes trans étant plus opprimées que les femmes cis, les femmes cis doivent fermer leur gueule quand on prononce le mot « femme ». 

Bien sûr, cette pseudo hiérarchie d’oppressions entre femmes cis et femmes trans, est une invention pure des femmes trans elles-mêmes, certainement en partie pour nous voler la parole. Or, rappelons-le, ces dernières sont toutes des hommes au départ. 

Mais revenons à Thomas ! Il avait également fait un post pour expliquer que les personnes transgenres sont celles qui cassent les codes… alors que c’est tout l’inverse, de mon point de vue. Il était par exemple fier de nous montrer son déodorant estampillé « homme », validant par extension le fait que les femmes et les hommes ne puissent pas se laver avec le même savon, se raser avec les mêmes rasoirs, se protéger des odeurs avec le même déo ! En se déterminant homme parce qu’on n’aime pas les choses « de femmes », au contraire, on appuie encore plus les stéréotypes de genre. 

Troisième anecdote : D’une manière générale, j’ai l’impression qu’être « non binaire » dans la société dans laquelle on vit, donc ultra binarisée, c’est s’inventer un problème. Je précise bien dans notre société, car dans bien d’autres cultures, la binarité n’est pas instituée. C’est peut-être pour se rendre intéressant.e. Je pense à une « personne à vulve » de grande audience sur Instagram ayant un passing totalement conforme aux stéréotypes de genre féminin qui se dit non binaire. Cela dit, elle correspondrait bien à cette expression, que j’ai dégotée sur un autre compte militant : « personne non binaire afab [assigned female at birth] dont le passing correspond à l’assignation de naissance ».  Là aussi, le transactivisme devient une caricature de lui-même. 

De toute manière, personne ne correspond à 100% à des clichés d’un bord ou d’un autre, tout le monde est donc non binaire, d’une certaine façon… D’ailleurs, selon cette même personne, le genre, c’est comme la couleur préféré : on ne peut pas expliquer pourquoi on est une femme de la même façon qu’on ne peut pas expliquer pourquoi on aime le bleu. En fait, « femme » et « homme », ça ne veut plus rien dire, et c’est affligeant. Ça me fait penser à un tweet dont l’auteur incendiait Marguerite Stern pour avoir utilisé le mot « femme ». Dans le même tweet, il parlait de « personnes qui menstruent » et de « mecs ». Donc pas de « personnes à pénis ». Donc les femmes sont bien invisibilisées, mais pas les hommes. 

Quatrième anecdote : Je suis abonnée à un journaliste et militant transgenre sur Instagram. En toute sincérité, je l’admire beaucoup pour ses réflexions sur des questions de société générales très pertinentes. C’est l’une des rares personnes des milieux intersectionnels qui porte ouvertement sa voix contre l’antisémitisme. Il a écrit un livre qui m’a bouleversée. Comme quoi, personne n’est tout blanc ou tout noir, et ça me semble important de le souligner. 

Il y a quelque temps, ce journaliste a fait une boîte à questions et a répondu à la question « Peut-on être féministe et gender critical ? » Sa réponse : non. En effet, selon lui, l’expression « gender critical » sert juste à ne pas dire « transphobe ». En fait, ça veut simplement dire qu’on ne peut pas critiquer sans être accusée de haine, de rejet. C’est d’une absurdité sans nom ! 

J’aimerais insister sur ce point : le problème que beaucoup de gender criticals ont, c’est qu’il n’y a pas le droit de remettre quoi que ce soit en cause, ni même d’interroger seulement. Cet amalgame entre critique et rejet, violence est vraiment épuisant, et je ne connais aucune autre minorité à ce point hermétique à la critique. Il suffit juste d’appliquer la logique des transactivistes à d’autres domaines pour comprendre à quel point on est dans une censure extrême de la parole. 

Moie, Lily, je suis juive, et je suis la première à critiquer les incohérences et la misogynie de ma religion et à en débattre avec mon grand-père rabbin. Pour autant, suis-je antisémite ? Ce serait la meilleure ! 

Pourquoi peut-on critiquer l’islam sans être islamophobe, mais pas le transactivisme sans être transphobe ? 

Dans les commentaires d’une publication, une personne m’a répondu que penser qu’une femme a une vulve et un homme un pénis était transphobe car ça revient à nier l’existence même des personnes trans. Pourtant, quand on critique la religion en niant l’existence de Dieu, ce qui est tout à fait accepté et, plus encore, un puits sans fond pour débattre, on nierait aussi l’existence même des croyants et croyantes, puisqu’il n’y a pas de Dieu ! Est-ce pour autant qu’on remet en cause l’existence des fidèles ? Ben non, on exprime juste notre opinion ! Bref, la moindre discussion ou tentative de discussion est stérile.

D’une manière générale, j’ai l’impression que créer des mots qui se terminent par « phobe » ou « iste » est le nouveau moyen de mettre à pied toute opinion contraire à la nôtre. Il faut savoir distinguer critique et reproche de l’appel à la haine et à la violence. Ces nouvelles tendances font que parfois, on ne peut plus rien dire. Je ne parle pas du tout des pseudo-blagues misogynes et racistes qu’on connaît bien, mais de la réserve voire la peur perpétuelle de mal nommer les choses quand on veut en parler et d’être toujours transphobe d’une façon ou d’une autre. 

Par exemple, une militante a tweeté « Quand vous dites « les femmes cis et trans » au lieu de « les femmes » et « les femmes et personnes sexisées » au lieu de « les personnes sexisées », vous êtes transphobe ». J’ai beau chercher, me mettre dans la logique des transactivistes… eh bien je ne comprends pas pourquoi. 

Et si je voulais moi-même nommer les choses en bonne et due forme selon les critères des queers, je ne vois clairement pas ce que je pourrais dire d’autre. En fait, quoi qu’on dise, on risque de se faire accuser de transphobie. Et si on va vers la simplicité, il y aura toujours quelqu’un ou quelqu’une pour nous expliquer que non, ça ne va pas. Voici ce que j’ai pu recueillir sur divers comptes transactivistes : 

– si je dis « les femmes », c’est pas assez précis ; si je dis « les femmes cis et trans », il manque les intersexes et les non binaires ;

– si je dis « les femmes cis, trans, non binaires et intersexes », on suppose que ça ne forme pas un tout uni et que les femmes non cis ne sont pas vraiment des femmes puisqu’on les distingue dans la dénomination ;

– il faut dire « les femmes » tout court. Mais le serpent se mord la queue, puisqu’on vient de voir que « les femmes » seul, ça marchait pas ; 

– si je dis « les personnes sexisées », ça vole le mot « racisé » aux luttes antiracistes, et certaines dites femmes qui ont un pénis trouvent ça transphobe. 

Bref, on sort ja-mais de là. Mais genre jamais. Vraiment jamais. Ma conclusion, c’est que j’ai le droit de dire « les femmes » si je veux parler des femelles, et rien ne me semble plus logique. 

Revenons à nos moutons, avec ce journaliste. Selon lui, les femmes cisgenres reproduisent l’oppression patriarcale sur les femmes transgenres. Laissez-moie en douter. 

Je n’ai jamais vu une femme harceler ou agresser une personne transgenre. En revanche, j’ai déjà vu des hommes agresser des femmes transgenres. 

Je n’ai jamais vu de collage de l’Amazone appelant à tuer les femmes transgenres. En revanche, j’ai déjà vu des collages et tags de femmes transgenres appelant à tuer des femmes. 

Je n’ai jamais vu une femme imposer une vulve à une femme transgenre. En revanche, j’ai déjà vu une femme transgenre imposer un pénis à une femme. 

L’adage « Trans tué.e.s, TERFs coupables » et ses déclinaisons démontrent la misogynie inhérente au transactivisme, car 100% des assassins de personnes trans sont des hommes. Mais là encore, c’est clairement plus facile de s’en prendre aux femmes qu’aux criminels. Au fond, c’est comme dans les affaires de viols, où on trouve toujours un moyen de « prouver » que la femme est fautive alors qu’elle a subi un crime (oui, le viol est bien un crime dans la loi, et nous en sommes redevables à Gisèle Halimi). 

La conclusion, c’est que si oppression il y a, cela vient des personnes transgenres et non des femmes. Dès lors, certaines femmes transgenres ne sont que la réplique du système patriarcal oppresseur : on appelle à tuer (« Sauve un trans, butte une TERF »), à violer (les lesbiennes forcées à accepter un pénis par exemple), à silencier (les dérives violentes du transactivisme, le refus de la critique). Si pour les femmes trans, l’oppression c’est de ne pas accéder à des domaines et lieux réservés aux femmes biologiques, il suffit de rester homme : là, elles auront tout ce qu’elles veulent !

Si des transactivistes m’écoutent et s’indignent de mon discours généralisant, j’anticipe la réponse : je ne mets pas tous les œufs dans le même panier, mais il y a une omerta évidente sur les problèmes posés non pas par les personnes trans elles-mêmes, mais par leurs modes d’action et leurs revendications qui n’ont pas lieu d’être. Si vous ne dénoncez pas et ne parlez que de ce qui vous arrange, vous êtes complices. 

Tout le monde est au fait de ces dérives voire violences, et je pense qu’il est de la responsabilité des transactivistes les plus influents, comme @agressively_trans, @lecoindeslgbt, @loulouparfois, de dire explicitement à leur communauté de cesser de harceler. Hannah d’@endolorix est une transactiviste qui commente des tweets transphobes, mais précise à chaque fois de ne jamais aller s’en prendre à qui que ce soit. Pouvons-nous pour autant la remercier, ou est-ce simplement normal de retenir les gens de vider leur haine… et donc de respecter la loi ? Il n’en reste pas moins que beaucoup suivent la démarche contraire, implicitement ou explicitement. Par exemple Lexie d’@aggressively_trans : elle a fait de Dora Moutot sa victime désignée pour un « e » manquant. Quand @lecoindeslgbt a longuement expliqué pourquoi Dora Moutot, toujours était une « TERF », il n’y a pas eu d’appel à la haine, seulement à se désabonner. Mais voilà, les responsables du compte savaient très bien que ça générerait une vague de harcèlement massif contre elle. On en revient au point de départ : ne rien dire, c’est être complice. 

Cinquième anecdote. Tout à l’heure, je disais les femmes trans étant soi-disant plus opprimées que les femmes cis, ces dernières doivent fermer leur gueule quand on prononce le mot « femme ». Je vais illustrer ça tout de suite : j’ai récemment lu un tweet sur une campagne de pub de Tampax avec un homme transidentifié. Qu’un homme trans, c’est-à-dire avec un sexe féminin, fasse ce genre de campagne, pourquoi pas. Mais un mâle, c’est juste le summum de l’indécence, une instrumentalisation des règles pour servir les dérives du transactivisme. Ce genre de campagne n’est là que pour flatter des hommes en leur donnant la parole sur NOS sujets. Point. 

Dans le même genre, dans l’un de vos podcasts, une témoignante évoque un homme transidentifié qui a présenté un certificat médical à son employeur pour endométriose. Mais on se fout de la gueule de qui ? Et quel.le transactiviste relayerait cette info ? Cela dit, si les hommes avaient la moitié du quart de nos douleurs chaque mois, le congé menstruel existerait depuis bien longtemps. 

Sixième anecdote. Allez, une dernière ! Marguerite Stern a récemment créé un site internet pour centraliser son travail, anticipant (à raison) la censure sur les réseaux sociaux. Une personne trans a invité en story ses abonné.e.s à signaler en masse son site, tout en précisant n’en avoir lu qu’une partie car « c’est trop horrible » et en poussant sa communauté à surtout NE PAS lire ! Ça m’a laissée bouche bée. Quand on se met à censurer un contenu sans connaître le contenu en question, il y a vraiment un problème. C’est bien ça, la définition d’un mouton ? 

Concernant Marguerite Stern aussi, elle a récemment fait un test sur Twitter : elle a tweeté « Les femmes sont des homo sapiens femelles ». Ni une ni deux, le tweet est censuré. Elle a tweeté dans la foulée « Les femmes sont des homo sapiens mâles ». Là, ça passe crème. 

Rebelles du genre – As-tu quelque chose à ajouter ?

Lily – Oui, je voudrais ajouter trois petites choses. 

D’abord, malgré mes prises de position devenues radicales, je n’en respecte pas moins les personnes qui se transidentifient. Si une personne me demande de la genrer et de la nommer d’une certaine façon, je pense que c’est normal de le faire, en sa présence comme en son absence. Le problème est plus profond qu’un simple prénom et de simples accords, et je ne veux pas générer un quelconque mal-être qui s’apparenterait à de la méchanceté gratuite. En effet, je pense que transitionner est le résultat d’une société réfractaire au fait que l’on sorte des cases imposées. Entendez par là que si un homme qui aime le maquillage et les talons décide transitionner pour devenir une femme, c’est parce que la société ordonne aux femmes de porter du maquillage et des talons, et qu’elle ne peut pas concevoir qu’un homme aime porter du maquillage et des talons. Plus que ne pas pouvoir le concevoir, elle en vient à l’interdire. Cela se traduit concrètement par les agressions de femmes trans par les hommes eux-mêmes. Aussi, n’oubliez pas que jamais une femme n’ira violenter une femme trans. 

Malheureusement, tant que cet imaginaire collectif ne sera pas restructuré, ce sera toujours plus acceptable d’être une femme transgenre qu’un homme qui aime le maquillage et les talons.  En ce sens, je comprends tout à fait que la transition soit le seul recours possible : puisque je ne peux pas faire comme les femmes, alors je vais en devenir une. Si ça permet à des personnes de mieux se sentir, soit.

Mais ce n’est pas parce qu’on a transitionné qu’on peut se prétendre « femme » à tout point de vue, ainsi s’octroyer de nouveaux droits et revendiquer ce qui revient aux femmes biologiques, comme leurs espaces de parole, le sport et les vestiaires, les foyers pour femmes en détresse, les marches lesbiennes, les têtes de cortège de manifestations féministes, etc. 

A ce propos, récemment, dans un post du média féministe très libéral Madmoizelle, j’ai soutenu J. K. Rowling par rapport à la cancel culture, pas pour défendre ce qu’elle dit, mais défendre son droit de s’exprimer. Ce commentaire a été parmi les plus likés de la publication ! C’est là que je veux en venir : pour moi, c’est la preuve que certaines femmes pensent un minimum comme noues, les critiques du genre, mais qu’elles n’osent pas le dire. Liker, c’est une façon d’adhérer en douce. 

Plus encore, je suis certaine que bien des femmes du féminisme libéral savent, au fond d’elles, que l’engouement autour du transactivisme et son refus de définir des choses juste évidentes n’ont pas de sens. Ces femmes se posent des questions sans oser les poser à un tiers, car le simple fait de rentrer dans le débat fait d’elles des sales TERFs transphobes. Je le sais, car j’en faisais moi-même partie, de ces femmes. 

Je pense que l’effet de groupe a beaucoup à voir dans tout ça. En ayant pour seul possible appui celles qui sont cataloguées comme « TERFs », on peut difficilement se sentir légitime pour critiquer des inepties et des « raisonnements » plus que contre intuitifs. 

Même si elles ne le disent, les femmes savent ce qu’est une femme. La composante commune à toutes les femmes, c’est d’avoir des chromosomes XX ou une variation pour les femmes intersexes et basta. Certaines femmes n’ont pas leurs règles, sont stériles, n’ont pas de poitrine ou pas d’utérus, mais les chromosomes XX, c’est UNIVERSEL. A partir de là, sans chromosomes XX ou intersexualité, se dire « femme », ce n’est pas en être une : c’est s’approprier des codes, de la même façon qu’on peut être Française tout en adoptant les codes culturels des Italiennes. Personnellement, j’aurais adoré être franca-italienne, mais aucune ascendance ne me ramène à la botte. Alors je me contente d’apprendre la langue, la culture et l’histoire, de lire en italien, de voyager en Italie dès que l’occasion se présente. Ce n’est d’ailleurs pas une imitation grossière consistant à manger des pâtes et des pizzas en disant « ma que !!! », comme un homme qui se contenterait de mettre une jupe et du rouge à lèvres pour dire « je suis une femme ». 

Les femmes trans savent qu’elles ont beau se nommer « femme », elles n’en seront jamais une à 100%, malgré tout ce qu’elles peuvent faire pour y ressembler. Je pense que les mille et un raisonnements pour prouver le contraire sont l’expression d’une frustration intérieure. Je veux dire que les personnes trans compensent le fait qu’elles n’aient pas le sexe biologique qu’elles auraient souhaité en démontrant (lol) que le sexe biologique n’existe pas.  

Ensuite, je pense que les gens qui se disent gender criticals tout en clamant que les garçons doivent jouer au foot et porter des pantalons tandis que les filles doivent jouer à la dînette et porter des jupes sont en réalité tout sauf gender criticals desservent complètement notre lutte. Ces personnes rétrogrades ne sont pas mes allié.e.s, je le clame haut et fort. Comme je viens de le dire, c’est à cause des gens comme ça que naissent la dysphorie de genre et tout ce que ça engendre. Le but des gender criticals n’est pas de dire « Le rose, c’est pour les filles », mais « Le rose n’a pas de genre ou de sexe. » Dire que le bleu c’est pour les garçons et le rose pour les filles, c’est du sexisme déguisé en critique du genre, ce n’est donc pas de la critique du genre. 

Ainsi, en tant que critique du genre comme construction sociale, je refuse d’être assimilée aux « féministes » type Némésis, Antigones, ou, d’une manière générale, aux groupes identitaires et/ou intégristes. Ce sont à cause de telles personnes que les féministes radicales sont associées à l’extrême-droite. Pour elles, la transidentité (comme la prostitution, d’ailleurs) est à écarter pour des questions de bonnes mœurs et par refus de ce qui n’est pas dans les rangs. Pour les féministes radicales, c’est une réflexion autour des droits de la femme qui s’impose, et non pas un rejet pur et simple parce que ce n’est pas conventionnel. J’ai d’ailleurs horreur des conventions. 

Enfin, j’aimerais rendre femmage à une femme que j’ai mentionnée à plusieurs reprises : Marguerite Stern. Depuis quelques mois, elle est devenue petit à petit une véritable modèle pour moi à bien des égards. La force et l’énergie qu’elle a dégagées avec FEMEN, l’idée géniale au sens littéral de porter nos luttes aux yeux de toustes dans la rue par des collages percutants, le maintien de ses convictions coûte que coûte malgré le harcèlement massif, ses séries de podcasts qui ne peuvent pas laisser indifférent.e… Tes mots m’ont accompagnée mai et juin durant, tant et si bien que j’avais l’impression que nous marchions ensemble. Depuis, tu es pour moi autant synonyme d’enseignement que de libération. Merci, Marguerite. 

Je suis ravie d’avoir enfin pu m’exprimer librement, même si anonymement. C’est soulageant de pouvoir dire « les femmes » pour se référer aux… femmes ! J’ai beaucoup blablaté, mais c’est la première fois que je peux le faire, alors j’en profite. Merci de m’avoir écoutée jusqu’au bout.

Rebelles du Genre – Merci d’avoir écouté notre parole, et n’hésitez surtout pas à la partager le plus largement possible.

S’’il vous plaît, signez la déclaration des droits des femmes basés sur le sexe : www.womensdeclaration.com

Rejoignez-nous, n’ayez plus peur. Ensemble, nous ferons changer les choses.

Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail.

A bientôt pour un nouveau témoignage de “rebelles du genre”.

Rebelles du genre – Épisode 45 – Magda

Magda – Je suis une femme de 37 ans. Je suis féministe depuis une quinzaine d’année et j’ai milité pendant quelques années dans une association qui proposait des activités et des rencontres en non-mixité. J’ai fait des études de sociologie. Je vis à la campagne.

Rebelles du Genre – Bonjour et bienvenue sur le podcast Rebelles du Genre. Nous sommes des femmes, militantes pour l’affirmation et la protection des droits des femmes basés sur le sexe, et donc notre biologie. Le sexe est la raison de notre oppression par les hommes, et le genre en est le moyen. Nous sommes les rebelles du genre. Nous observons aujourd’hui avec fureur des hommes qui envahissent nos espaces, agressent nos sœurs, revendiquent nos droits. Conditionnées à la gentillesse et touchées par leur victimisation, les femmes mettent en général un certain temps à comprendre l’arnaque du mouvement transactiviste, et commencent souvent par soutenir cette idéologie. Puis elles ouvrent les yeux, constatent sa violence, et la refusent. Ce podcast est là pour donner la parole à des femmes qui expliqueront pourquoi et comment elles sont devenues critiques du genre et qui témoignent de leur parcours. Écoutons leur parole. 

Magda – Depuis petite, j’observe avec étonnement les comportements sexistes. J’ai un souvenir précis de me voir observer les filles qui se jetaient sur les crayons roses. Ça m’agaçait ! Du coup, j’en prenais un noir.

Une fois adolescente, je me suis sérieusement demandé pourquoi les femmes se maquillaient, et pas les hommes.

Je suis devenue féministe vers 20 ans après avoir travaillé dans un milieu professionnel très macho. Mais j’ai pu mettre des mots plus clairs sur mon positionnement quand j’ai découvert la sociologie critique et la sociologie du genre, quelques années plus tard. J’ai toujours eu une approche anti-essentialiste donc anti-genre. Les quelques cours que j’ai eus à la fac en sociologie du genre m’ont permis d’aborder la notion du genre comme définissant un système oppressif qui classe les individus en deux groupes sociaux distincts et hiérarchisés, en fonction de leur sexe . Ça me confortait dans ce que j’avais observé depuis la maternelle donc pour moi c’était évident. D’ailleurs  longtemps j’ai  pensé que toutes les féministes luttaient pour l’abolition du genre. 

En 2012 je suis allée faire une année de master à Paris et j’ai fait une recherche sur un sujet féministe et disons, « LGBT ». C’est à ce moment que j’ai compris qu’il y avait un autre usage du mot « genre ». D’un côté, le genre comme un système oppressif qui classe les individus en deux et qui est intrinsèquement lié à la sexuation des individus (mâle/ femelle). De l’autre le genre comme synonyme, disons de « personnalité » de goûts et de manière de se présenter aux autres, de s’habiller etc. Dans cette approche, disons « postmoderne », il suffirait de mettre le genre au pluriel – « les genres » – pour qu’il arrête d’être oppressif et devienne même un outil de libération des individus. 

C’est à cette époque que j’ai compris qu’en tant que féministe, j’étais censée être solidaire du mouvement trans, soutenir les revendications trans. Or, j’ai toujours considéré que le transgenrisme était un symptôme de notre société sexiste et non une solution au problème. J’étais peu concernée par cette question à l’époque, mais ça a commencé à me poser sérieusement question quand j’ai aperçu les conséquences théoriques et politiques que produisaient se rapprochement entre le féminisme et le transgenrisme. Notamment le fait que le concept du « genre » était de moins en moins utilisé et que l’était de plus en plus le concept «  des genres », au pluriel donc.

L’année d’après j’ai monté un collectif féministe avec des potes dont l’objet était de créer et favoriser des moments et des espaces en non-mixité.

Et là, ce sont les conséquences pratiques et politiques de ce lien entre le transgenrisme et le féminisme que j’ai vues. Par exemple, on a commencé à nous reprocher d’utiliser le mot « sororité ». Moi et mes potes on découvrait ce concept et on l’expérimentait à fond. ça nous faisait énormément de bien ainsi qu’à plein d’autres filles et femmes donc pour moi c’était déjà quelque chose de très grave. Ces personnes qui nous reprochaient d’utiliser ce terme avaient un profil bien précis : c’était des jeunes femmes qui toutes venaient de grandes agglomérations et semblaient penser qu’elles nous apportaient la lumière. 

A cette époque je critiquais beaucoup l’idéologie trans. Je ne le faisais pas dans n’importe quelles situations mais j’en parlais assez facilement quand même. Mais quelques mois plus tard, c’était fini : j’avais intégré le fait que c’était complètement tabou d’en parler.

A cette période – donc c’était en 2014 –  j’ai participé à un événement qui réunissait une quarantaine de femmes pendant plusieurs semaines en non-mixité – à l’époque on avait encore le droit de dire « non-mixité ». Pendant l’événement qui a duré plusieurs semaines, on faisait sans arrêt des tours de pronoms. Je crois que c’était à chaque réunion le matin. C’était d’autant plus ridicule qu’il n’y avait pas de personnes trans parmi nous. Moi, j’avais envie de dire “je m’en fous, appelez-moi comme vous voulez. ça n’a pas d’importance pour moi”. A l’époque, je jouais beaucoup sur mon androgynie, et j’étais dans un certain rejet, disons du fait d’être une femme, en tous cas c’était pas quelque chose que j’avais envie de valoriser. J’avais envie de me projeter au-delà du genre, mais dans une perspective critique, pas dans une perspective identitaire. Donc ce délire autour des pronoms, ça me saoulait vraiment, je trouvais ça ridicule et le comble c’est que je me retrouvais obligée de me positionner. 

Soit on était« elle », soit on était « il » ; on était  « iel » on pouvait aussi dire un jour « elle » un jour « il »… Mais dire « je m’en fous, votre truc ne m’intéresse pas », c’était pas possible car ça aurait été jugé comme oppressif pour toutes les personnes pour qui ça avait de l’importance. Donc j’étais obligée de dire tout les matins « je suis une femme » alors que j’aurais juste voulu être perçu comme une personne, point barre !

Après cet événement  j’ai eu envie de prendre du recul par rapport au féminisme. Je n’y trouvais vraiment plus ma place. Je voyais l’évolution qui était en train de se faire et qui m’inquiétait beaucoup, et pour laquelle je me sentais totalement impuissante. Au début, j’étais contente d’être à la campagne, dans un environnement où le féminisme queer était pas encore arrivé jusqu’à nous.

Petit à petit, j’ai senti les choses évoluer. D’abord j’ai eu vent d’un texte que Christine Delphy avait relayé qui parlait de la pression que subissaient de plus en plus les lesbiennes pour avoir des relations sexuelles avec des « femmes trans »  non opérées. 

Une copine m’a ensuite raconté comment elle et ses potes ont annulé une intervention de Christine Delphy suite à la diffusion de ce texte. Ça semblait évident à ma copine que je soutenais leur action. Cette copine s’est ensuite « identifiée » comme un homme et j’ai été incapable de lui dire ce que je pensais de tout ça. 

Rebelles du genre –  Pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes ? Pour leurs droits ? Pour les enfants ? Pour la société ? Pour la démocratie ? 

Magda – Cette idéologie pose des problèmes éthiques, politiques, logiques, démocratiques… 

Bon déjà la rationalité, la logique et la science sont des choses hyper importantes pour moi. Du coup, je suis hyper choquée qu’une idéologie aussi irrationnelle s’impose partout et bien au-delà de la sphère militante. 

Le premier problème logique est la définition queer du mot « femme ». Une femme serait une personne qui se sent femme. Définition totalement insignifiante car on ne peut pas définir un terme par lui-même. Imaginons un dictionnaire qui définirait le mot chaise comme « une chaise est un objet qui ressemble à une chaise ». Cela n’a aucun sens !

Également, depuis quand un sentiment suffit à définir la réalité ? Depuis quand, parce qu’une personne a une idée sur elle-même, cette idée est vraie ? Si je pense être une femme noire, est-ce que cela fait de moi une femme noire ? Si je pense être née au moyen-âge, est-ce que je suis effectivement née au moyen-âge ? 

Chaque personne se fait des idées sur le  monde et sur elle-même et toutes ces idées ne sont pas vraies ! C’est bien gentil de dire « tout ce que tu penses est vrai », mais c’est faux. Si je ressens être chirurgienne est-ce qu’il faut me laisser opérer des gens pour ne pas me vexer ? Si je pense être un oiseau, est-ce qu’il faut m’encourager à m’envoler ?

Un autre problème : « l’identité de genre » serait un « sentiment profond », mais « différent selon chaque individu », une chose que l’on ne pourrait pas quantifier, analyser, étudier, quelque chose d’indéfinissable…. Bref, dans ces conditions, la notion d’identité de genre ne peut pas être une notion scientifique !

Le pire c’est quand on essaie de comprendre ce qu’est le genre selon le féminisme queer. 

Initialement, le genre permettait de parler de toute la part sociale – dans le sens de non biologique – dans les différences entre les femmes et les hommes. 

Le genre c’est le sexisme tout simplement ! Le fait que les filles soient éduquées comme ci et les garçons comme ça, avec toutes les conséquences sociales, psychologiques et politiques que cela a. 

Le genre, c’est le lien que la société patriarcale fait entre le sexe et les attentes sociales. Le genre est donc nécessairement un truc binaire et nécessairement un truc lié à la sexuation. Quand je dis ça je n’ai pas un point de vue normatif, je suis pas en train de dire « le genre doit rester binaire » mais je décris une réalité. Ce n’est pas parce que cette réalité ne me plaît pas qu’elle n’existe pas ! Le genre, c’est binaire puisque ça renvoie à la manière dont les sociétés sexistes et patriarcales organisent les relations entre les femmes et les hommes et définissent les rôles sociaux de chacune et chacun.

Je sais que l’on va me répondre que le sexe binaire est aussi une construction sociale. Sauf que, jusqu’à preuve du contraire la sexuation des humains est binaire : il y a des femelles et il y a des mâles comme pour tous les mammifères. En science du vivant, il y a un consensus absolu sur ce sujet, il n’y a même pas de débat. Prétendre que le sexe est non binaire, cela relève du révisionnisme scientifique !

 Le seul argument qui est avancé pour “prouver” que le sexe binaire serait une construction sociale est le fait que certaines personnes naissent avec une situation d’intersexuation. Or ces situations sont rares, et relèvent d’un point de vue strictement biologique d’une anomalie. L’intersexuation est souvent le fait d’une pathologie qui peut induire infertilité et problèmes de santé.

Donc oui il y une faible part de la population qui « échappe » à la binarité de la sexuation, mais est-ce que cela veut dire que la sexuation n’est pas binaire ? Non. Est-ce qu’on doit remettre en question le fait que les humains sont des bipèdes parce que certaines personnes naissent avec une seule jambe ?

En fait, ça parait fou de devoir insister sur des faits aussi avérés. La très grande majorité des  humains sont soit mâle soit femelle. Et à la différence des autres animaux, il y a chez les humains un truc qui s’appelle le genre, ou le sexisme, ou les rôles sociaux de sexe : appelons ça comme on veut. C’est toute la part sociale, culturelle qui vient définir comment les humains sont censés se comporter selon qu’ils soient mâles ou femelles. 

Donc, le genre c’est un truc nocif contre lequel les féministes se battent depuis des décennies. C’était tout le propos du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir résumé par la formule « on ne nait pas femme, on le devient. ». Elle ne disait pas qu’il n’y avait pas de sexuation binaire, mais que la différence biologique entre les femmes et les hommes ne doit pas avoir de conséquences sur leur destin social.

Avec le développement du féminisme queer et postmoderne, on ne parle plus “du genre” mais “des genres”. A quoi correspond les genres dans cette logique ? Le fait de pouvoir s’habiller de telle ou telle manière, de porter des attributs masculins et des attributs féminin… Ah, ça veut juste dire avoir son propre style vestimentaire ! Déjà, réduire les questions de genre a des notions d’habillement c’est très réductif. Le genre c’est surtout des dispositions intériorisées ; des manières d’être au monde différenciées ; des manières d’interagir avec soi, avec le monde et avec les autres, différentes selon qu’on a été élevé comme une fille ou comme un garçon. Le genre, pour moi, c’est avant tout ce qui fait que les femmes ont moins confiance en elles, et ont tendance à faire passer leurs propres intérêts après celui d’autrui et surtout après celui des hommes. Et le fait que les hommes ont au contraire tendance à penser que le monde tourne autour de leur petite personne. Le genre, c’est ce qui explique que de nombreuses femmes, toutes les femmes hétérosexuelles peut-être, ont déjà fait l’expérience de subir un rapport sexuel dont elles n’avaient pas envie. Il y a les viols bien sûr, mais aussi toute les fois où les femmes se forcent pour faire plaisir à leur partenaire ou éviter les tensions dans le couple, voire parfois pour éviter un viol. 

Le genre, c’est le fait que de nombreux hommes sont capables de prendre du plaisir sexuel en forçant l’autre et en niant donc complètement sa personne. En gros, les femmes préfèrent se forcer plutôt que de décevoir leurs mecs et les mecs préfèrent forcer leurs femmes plutôt que de gérer leur propre frustration. 

Du coup le fait que le genre deviendrait un truc cool et souhaitable dès qu’il est mis en pluriel… Je comprends pas ! 

Il faut lutter pour un monde où les individus peuvent développer leur propre personnalité et leur propre trajectoire sociale indépendamment de leur sexe. Je rêve d’une société où notre destin social ne serait pas conditionné au fait d’être née femelle ou mâle. Quel est donc l’intérêt de valoriser la « diversité des genres » ? Je pense que les tenants de cette notion « des genres » au pluriel manquent cruellement de radicalité et de perspective critique. Ces personnes semblent incapables de penser le monde sans cette notion de genre. Mais le comble c’est que pourtant elles pensent être à la pointe de la radicalité !

Ce qui est bizarre dans la pensée queer, c’est que coexistent à la fois l’idée qu’être queer c’est «  ne pas être conforme aux normes de genre ».  Mais en même temps l’idéologie queer va nous dire implicitement que le genre, en tant qu’un système qui attribue des rôles sociaux différenciés selon le sexe, n’existe pas. Donc être queer ce serait ne pas se conformer à quelque chose qui n’existe pas ! Gros illogisme…  

Pourquoi je dis ça ? Parce que selon l’idéologie trans, quand un enfant né on ne constate pas son sexe mais on lui assigne un sexe-genre de manière aléatoire. Le genre, c’est injuste et nocif, mais ce n’est pas attribué de manière aléatoire ! Il y a une corrélation absolument totale entre le fait de naître avec les attributs mâles et le fait de se voir considéré comme un petit garçon. C’est pareil pour les filles. Ce qui est logique puisque les mots garçons et les mots filles ont été inventés pour référer aux enfants de sexe mâle et aux enfants de sexe femelle. On peut avoir la chance de naître dans une famille qui nous élève autant que possible en dehors du sexisme, mais cela ne change rien au fait que pour la société dans son ensemble on est un garçon si on naît avec un pénis et on est une fille si on naît avec une vulve, et cela a des conséquences dans la manière dont les normes sociales vont nous façonner. 

Mais selon l’idéologie trans, il n’y a aucune corrélation de fait entre le genre et le sexe, ce qui revient à dire que le genre n’existe pas puisque le genre c’est justement le lien entre le sexe des individus et les attentes sociales que fait peser la société sur les individus. 

Ce discours queer devient plus logique si on comprend que pour cette idéologie, il y a quelque chose qu’on peut qualifier d’essence masculine et d’essence féminine, et que cette essence serait déconnectée de la sexuation biologique. Evidemment, elles et ils n’utilisent jamais cette terminologie, mais pourtant si on creuse un tout petit peu la question il faut admettre que leur notion « d’identité de genre » est synonyme d’essence masculine, féminine ou non binaire . 

En gros, la personne aurait d’un côté son corps et d’un côté son « identité de genre ». Cette séparation corps-esprit permet de faire une analogie entre l’identité de genre et la notion religieuse d’âme. Donc en gros quand un bébé humain de sexe femelle née la société lui attribue à défaut une « identité féminine » mais parfois il y a erreur, car en fait ce bébé de sexe femelle à une « identité de genre masculine »…. Je ne comprends pas comment une pensée aussi essentialiste et irrationnelle peut avoir un tel succès à notre époque et dans les sphères sociales les plus instruites et critiques… C’est tout simplement sidérant !

Il y a un truc qui explique bien selon moi toutes les aberrations de cette idéologie.Elle confond en permanence deux types de registres : d’un côté il y a le registre descriptif et analytique, qui constate des réalités qu’elles nous plaisent ou non. C’est le registre qui est censé être celui de la communauté scientifique quand les chercheurs et chercheuses font bien leur travail en tous cas ! Et de l’autre le  registre prescriptif, qui prescrit des normes, qui dit ce que le monde devrait être, c’est le registre militant. 

Les deux registres sont d’égales importance sociales pour moi à condition qu’on les présente pour ceux qu’ils sont et qu’on ne mélange pas les deux pour faire une grosse bouillie indigeste !

Quand les idéologues queer disent « il n’y a pas de lien entre le sexe et le genre », ils sont dans un registre normatif. Ils veulent dire « il ne devrait pas y avoir de lien ». Là on est d’accord, il ne devrait pas y avoir de lien entre notre sexe et notre destin social mais, pour le moment, il y a une très très forte corrélation entre les deux et pour la combattre il faut d’abord pouvoir la nommer et la décrire. Les idéologues queer préfèrent être dans le déni comme si en disant « ça n’existe pas », ça va arrêter d’exister. Et du coup, ces militants de la pensée queer nous accusent d’être essentialistes parce qu’ils prennent notre discours descriptif et critique pour un discours prescriptif et normatif. Est-ce que c’est de la mauvaise foi ou est-ce que c’est de la bêtise ? Je ne sais pas. 

Les notions qui constituent l’idéologie transgenre sont à la fois illogiques et a-scientifiques. 

Donc, je ne comprends pas comment autant de personnes a priori sensées et intelligentes peuvent se faire les défenseurs voire les passeurs de cette idéologie. 

Tout ça va quand même très loin ! Parce que le planning familial, association féministe historique et largement subventionnée par l’Etat, qui fait de nombreuses interventions en milieu scolaire et accompagne des ados et jeunes adultes sur des questions de contraception, de santé sexuelle et tout ça, soutient dans son lexique trans que le sexe est un spectre, qu’un homme peut avoir une vulve ou encore que le pénis n’est pas un organe masculin.Il fallait oser !

Ce qui me surprend le plus, c’est de constater que de nombreux représentants et représentantes du mouvement zététique et sceptiques semblent convaincus de la pertinence de cette idéologie. 

Il y a quelques mois j’ai voulu me rapprocher de la communauté zététique parce que la démarche sceptique me plaît énormément. Le fait de réfléchir à comment faire la part des choses entre les croyances et les savoirs. Le fait de douter, notamment face à des assertions extraordinaires, surprenantes. Le fait de  réfléchir aux biais cognitifs, à tout ce qui nous éloigne d’une juste connaissance du monde et de nous-même… Voilà en tous cas comment je vois la zététique et le scepticisme scientifique. La zététique nous dit par exemple « ce n’est pas parce qu’une personne est persuadée de communiquer avec des personnes défuntes qu’elle le fait vraiment ». On a besoin de preuve pour accepter cette idée comme vraie. La personne ne ment pas forcément, elle peut vraiment penser communiquer avec des personnes défuntes. Dans ce cas son sentiment est bien réel, mais le fait auquel il renvoie ne l’est pas. La zététique prétend passer à l’épreuve des faits ce type de croyances. Le parallèle avec le sentiment profond d’une personne d’être de l’autre sexe ou genre est intéressant à faire. Quand des hommes prétendent qu’ils sont en réalité des femmes et qu’ils revendiquent le droit d’accéder à tous les espaces réservés aux femmes (les espaces de non mixité politique, les espaces lesbiens, les vestiaires, toilettes, les saunas, le sport féminin) il est tout à fait normal et juste que les femmes leur demande de prouver leur affirmation car la demande de ces hommes n’est pas anodine ni sans conséquences… Leur permettre d’accéder à leur demande peut avoir des effets importants sur les femmes, sur leur bien-être physique et mental, mais aussi sur leur sécurité. 

Le fait de ne pas croire sur parole une personne qui me dirait « je suis née dans le mauvais corps » ne veut pas dire que je manque de respect à cette personne. Ça ne veut pas dire que je pense qu’elle ment ou que son sentiment n’est pas réel. Mais vouloir être gentille avec les gens ne veut pas dire croire en tout ce qu’ils disent, et même quand ça concerne leur « être profond » entre guillemets. On a tous déjà entendu dire d’une personne croyante « je sens sa présence, il est avec moi». Je peux avoir du respect, de l’empathie et de l’attention pour cette personne même si je ne crois pas en Dieu. Pourtant je pense que Dieu n’existe pas, jusqu’à preuve du contraire, et donc qu’il ne peut pas être réellement avec cette personne. 

Que certaines personnes soient persuadées d’être de l’autre sexe ou genre, cela ne me dérange pas en soi. Mais j’estime que j’ai le droit de ne pas partager leurs croyances, comme j’ai le droit de ne pas croire en Dieu. 

Alors, la zététique qui soutient l’idéologie transgenre, c’est le monde à l’envers. Le monde à l’envers, c’est aussi les critiques qui sont faites à nous autres, féministes critiques du transgenrisme. On nous accuse d’être essentialistes parce qu’on rappelle que le genre et le sexisme sont des faits sociaux qui sont corrélés à un fait biologique : le sexe. Évidemment, cela ne veut absolument pas dire que les comportements sexistes sont causés par la biologie ! Ni que le sexisme est légitime éthiquement ! 

Mais quand des féministes indiennes font campagne contre les avortements sélectifs, il est totalement insensé et injuste de leur reprocher de faire preuve d’essentialisme. Et pourtant pour militer contre cette violence faite aux filles, il faut nécessairement qu’elles fassent le lien entre deux faits :  un fait social et un fait biologique. D’un coté, le fait de procéder à des avortements sélectifs, de l’autre le fait que les fœtus peuvent être mâle ou femelle et que se sont les fœtus femelles qui sont avortés. 

Ce détournement de la notion d’essentialisme et cette confusion entre le registre prescriptif et le registre descriptif est vraiment dingue de la part de personnes ayant pourtant les outils intellectuels pour comprendre notre point de vue. Ne pas être d’accord avec nous ok, mais ne même pas restituer correctement nos arguments soit c’est très stupide soit c’est complètement malhonnête. 

Je ne comprends pas cet aveuglément et cette mauvaise foi ! Ça me stresse vraiment beaucoup à vrai dire. Je me suis vraiment beaucoup interrogée sur moi-même, sur ma manière de voir les choses. J’ai retourné le truc dans tous les sens, me disant que ce n’était pas possible que des personnes partageant la même manière de voir les choses que moi sur bien des points, un même rapport à la rationalité, une même analyse du monde social, pouvaient trouver de la logique et de la cohérence à l’idéologie trans. 

Donc peut-être que c’est moi qui ne comprenait rien ? Alors j’ai lu et relu, et regardé et écouté tout ce que j’ai pu du côté du féminisme queer. J’ai vraiment essayé de trouver de la logique dans tout ça, mais je n’en ai pas trouvé. Mais je n’ai pas non plus trouvé de réponses vraiment satisfaisantes sur pourquoi tant de personnes a priori intelligentes et sensées adhèrent à ces croyances.  

Je n’ai pas trouvé de réponse, à part que ces personnes arrêtent de réfléchir dès qu’on aborde la question trans parce qu’elles veulent à tout pris être inclusives, être des bonnes féministes, ou être « dans le coup » en adhérant à l’idéologie très en vogue, perçue comme la pointe de la radicalité de la gauche…

Ce qui me semble très inquiétant, c’est que ces croyances sont en train de s’imposer dans tous les espaces sociaux. C’est flippant.

Ces idées relèvent de la croyance et non pas du savoir, donc c’est déjà un très gros problème que les chercheurs, les soignants (médecins, psychologues), les institutions, les partis politiques, les journalistes, diffusent et utilisent des notions illogiques et a-scientifiques. C’est une nouvelle religion, d’une certaine manière, qui se pare d’un vernis de progressisme et est en train de s’imposer à tout le monde.

Le pire, c’est que ça s’impose dans le cadre du droit. Actuellement, de nombreux Etats dits démocratiques imposent une idéologie contraire aux savoirs scientifiques les plus élémentaires. Le pire, c’est que de plus en plus la contestation de cette idéologie va devenir illégale, puisque tout discours critique peut-être qualifié de « transphobe ».

Est-ce qu’il y a des équivalents dans l’histoire des démocraties contemporaines ? Des États démocratiques qui imposent des idées révisionnistes et criminalisent toute critique de ces idées ? J’ai l’impression qu’on est en pleine dystopie… Je ne sais pas vers quoi on va mais ça ne me suggère vraiment rien de bon…

Je trouve aussi que cette idéologie est très problématique sur la vision de la personne et de l’organisation sociale qu’elle véhicule. 

La personne d’abord. L’idéologie trans fait la promotion d’une vision identitaire. L’approche identitaire, pour moi, c’est exactement l’inverse de ce qu’elle prétend être. C’est censé libérer les personnes des « étiquettes », des « assignations sociales », mais en vérité c’est une vision très figée, très essentialiste et très cloisonnante de ce qu’est une personne. 

Pour moi, ce qui fait qu’on est ce qu’on est, c’est le fruit d’une histoire ; une histoire personnelle mais aussi collective. Et l’histoire ne s’arrête jamais, donc on évolue en permanence, en fonction de notre relation à notre environnement, en fonction de notre réflexivité , en fonction de tout plein de choses qu’il n’est pas toujours facile de percevoir mais qu’il est pourtant très passionnant et selon moi très utile d’analyser. 

A l’inverse, dans la logique identitaire, on te dit « tu es ça » et point barre ; faut pas chercher à comprendre. Il devient tabou de dire que l’environnement familial, social, culturel a un impact sur ce qu’on est. Donc en plus d’être irrationnelle et contraire à tous les savoirs en sciences sociales et en psycho, cette vision identitaire est très aliénante parce que ça retire à la personne la possibilité de réflexivité sur ses manières de fonctionner, son rapport au monde, à soi et aux autres. 

Pourquoi ne pas faire la promotion d’un monde débarrassé du sexisme et du genre plutôt que de créer toujours plus de catégories, d’étiquettes comme « trans », « non binaire », « gender fluid », « a-genre » etc. ?

C’est surtout quand on pense aux enfants étiquetés trans qu’on voit comment cette dimension identitaire est ultra nocive. Quand un enfant a certains goûts, certaines manières de fonctionner qui ne sont pas conformes aux normes sexistes, au lieu de valoriser cet enfant parce qu’il a une personnalité originale, et de l’aider à être heureux ainsi malgré la pression sociale qu’il va effectivement subir pour être plus conforme, on l’étiquette « trans » et on le dirige vers un parcours de médicalisation. On enferme cet enfant dans une catégorie très contraignante, alors même que l’enfance comme l’adolescence sont des moments de grand chamboulement. Qui peut nier qu’une petite fille très conforme aux stéréotypes de genre peut devenir une adulte très critique du genre. Ou qu’une petite fille très “tomboy” peut devenir une adulte très “féminine”, et épanouie ainsi.

C’est complètement irresponsable de diriger des enfants et des ados dans des parcours de transition qui ont des conséquences si fortes. Il y a des conséquences physiques et médicales irréversibles, quoi qu’en disent les défenseurs de la cause trans. Tout ça est tout de même assez bien documenté, maintenant. Et là je ne parle même pas des conséquences sociales et psychologiques…

Enfant, j’avais une réelle angoisse par rapport au fait d’être une fille. Je n’ai pas du tout aimé avoir mes règles, ni voir ma poitrine pousser. J’ai refusé obstinément de mettre un soutien-gorge jusqu’à ce que je cède sous la pression de ma mère et de mes copines. J’avais tellement honte quand mon père me faisait des remarques qui me rappelait qu’il me voyait avant tout comme une fille ! Je trouvais la masculinité tellement plus cool ! J’observais les garçons et je me demandais quoi faire pour être comme eux. 

J’ai beaucoup réfléchi, depuis, à la manière dont je me suis construite étant enfant et à mon rapport au fait d’être une fille. Bien sûr, comme tous les enfants, j’avais intériorisé la hiérarchie sexuelle et j’avais une certaine conscience qu’être une fille était moins valorisé qu’être un garçon. Mais je pense que c’est surtout le rapport que j’avais avec mes parents et la dynamique familiale dans son ensemble qui explique ce complexe que j’avais d’être une fille. 

Heureusement pour moi, je suis née à une époque où les réseaux sociaux n’existaient pas et où l’étiquette « enfant trans » n’était pas encore aussi répandue. Pourquoi je dis heureusement ? 

Parce que je préfère être une adulte en bonne santé, qui ne doit pas prendre un traitement hormonal à vie. Je préfère avoir eu la possibilité de réfléchir à pourquoi je me sentais mal en tant que fille et d’avoir compris que le problème ne venait ni de moi ni de mon corps, mais d’un système social qui dévalorise les personnes de sexe féminin, et que ce système peut être changé. 

Parce que je suis contente de ne pas m’être retrouvée avec une étiquette très rigide et aliénante de « personne trans », et avoir pu résister aux normes sexistes à ma manière et à mon rythme. Sans en faire une obsession non plus, sans penser qu’être une personne non conforme aux normes de genre est ce qui me définit plus que tout, parce que je suis bien d’autres choses que ça !

Parce que j’ai pu me libérer du genre autant qu’il est possible de le faire dans une société sexiste et non à l’inverse m’être la question du genre au centre de ma vie comme le font souvent les personnes trans.

Et j’ai pu apprendre qu’il n’était pas honteux d’être une femme et qu’il était très agréable de se solidariser avec les autres femmes, même si une partie de moi aurait trouvé beaucoup plus cool, beaucoup plus facile, d’une certaine manière, de devenir un homme et de fuir la féminité et tout son corollaire de trucs chiants. 

Encore maintenant, je ne suis pas complètement  à l’aise avec le fait d’avoir un corps et un sexe de femme. Dans certaines situation, mon corps et mon sexe de femme me provoquent un sentiment de honte, de vulnérabilité. J’ai comme l’impression que ce sexe me met en danger, me trahit.  Mais pourtant, je ne vois vraiment pas en quoi me faire enlever la chatte pour me faire greffer un faux pénis serait quelque chose de subversif politiquement. Pareil sur le fait de garder mon corps mais de prétendre que je suis un homme. Mon corps est en bonne santé, il fonctionne bien. Ça n’a pas été facile, mais j’ai appris à l’apprécier. Le problème ce n’est pas mon corps, ce n’est pas moi, c’est le monde dans lequel j’ai grandi et dans lequel  je vis qui est un problème et qu’il faut changer. 

De plus en plus d’enfants, tous ceux qui ne sont pas suffisamment conformes aux stéréotypes sexistes, vont se retrouver étiquetés et dirigés vers un parcours lourd de conséquences médicales, sociales, psychologiques. Au lieu de remettre en question la dynamique familiale et même la société dans son ensemble c’est tellement plus simple de coller une étiquette à un enfant et de le mettre sous traitement !

Dans une société qui protège les personnes mineures, ça paraît complètement décalé, incroyable au premier sens du terme, « incroyable » qu’on puisse bloquer la puberté d’un enfant en bonne santé. Ca paraît complètement fou, et pourtant, c’est bien réel. C’est ce qui est en train de se passer dans les sociétés occidentales. 

D’un point de vue collectif, politique évidemment que cette vision est totalement libérale, ultralibérale même. On ne change pas le système, on prétend juste donner les possibilités aux individus de se mouvoir dans le système comme bon leur semble. 

Au lieu d’abolir le genre, on permet juste aux personnes d’en « changer ». Imaginons un parallèle. Dans une société hiérarchisée,  au lieu d’abolir les privilèges et les inégalités sociales; on autorise juste les personnes à monter ou descendre dans la hiérarchie, mais sans réellement changer le système et sans s’interroger sur les conditions sociales de possibilités de cette mobilité sociale. Bon, c’est à peu près ce qui se passe dans nos sociétés libérales ! Mais là curieusement, quand il s’agit de la question transgenre, dans tous les milieux ont dit « amen » d’une même voix  !

Ce projet politique que l’idéologie trans nous prépare, c’est une société où la liberté individuelle devient la norme suprême sans qu’on réfléchisse aux conditions de cette liberté, à sa signification, à ses conséquences sociales et collectives. Je pense qu’on peut pas faire abstraction, quand on parle de « liberté individuelle », de se poser quelques questions. Par exemple : 

Est-ce que je cesse d’être aliénée sous prétexte que j’ai l’impression d’être libre ?

Est-ce que si tout le monde a l’impression d’être libre, la société devient égalitaire ? 

Comment faire en sorte que la liberté de certaines et certains n’empiète pas sur celle des autres ?

Est-ce juste qu’un homme trans-identifié impose sa présence dans des espaces de non-mixité ?

Le pire, c’est le lien entre le transgenrisme et le transhumanisme. Voir comme un progrès social le fait que des personnes utilisent la technologie médicale pour modifier leur corps afin de le mettre en adéquation avec l’idée qu’elles s’en font, ça me dépasse…. Le transgenrisme est une grande porte ouverte au transhumanisme. C’est hyper flippant.  

Rebelles du genre – Qu’est-ce qui t’a décidée à témoigner de façon anonyme ou sous ta réelle identité ? As-tu déjà subi des pressions, des menaces, un danger perçu ou réel dans ton entourage (pro, perso, peur pour tes proches, etc.), ou, au contraire, te sais-tu en sécurité pour parler librement ?

Il y a 2 mois, quand j’ai commencé à réfléchir à ce témoignage, je ne me sentais pas vraiment en sécurité. Je n’avais aucune raison objective d’être inquiète mais pourtant je ne me sentais pas en sécurité. Les accusations publiques de transphobie, les chasses aux sorcières sur les réseaux sociaux, les agressions en manif, bref la terreur que font régner le trans-activisme et ses alliés a un effet psychologique fort et durable sur chacune d’entre nous. Même en étant très loin de toutes ces menaces et ces accusations, j’ai senti cet effet. Ces dernières années j’ai pris beaucoup mes distances par rapport au militantisme féministe par facilité. Ça me semblait impossible de dire ce que je pensais, mais je ne voulais pas non plus mentir. Mais depuis quelques mois je me sens plus à l’aise pour exprimer ma position. Déjà, parce que j’en ai marre de me taire, que ça m’est trop pénible. Aussi, je me sens ré-assurée par la mobilisation qui est en train d’émerger. Rebelles du genre, notamment, me fait beaucoup de bien. 

Il y a quelques mois, j’ai eu une conversation marquante avec ma sœur, avec qui on parle beaucoup de ce sujet. Elle me disait : dans vingt ans, je veux pouvoir me dire que j’ai fait partie de celles qui ont lutté. Et je me suis dit “mais oui” ! Il se joue maintenant un truc hyper fondamental pour les femmes, et c’est le moment d’agir. J’ai souhaité rester anonyme, alors ma sœur a pris le relai en lisant mon témoignage. On se soutient beaucoup sur ce sujet.

Rebelles du genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme ?

Magda – Oui. La dernière fois que j’ai participé  à un événement féministe, c’était gratiné…

Le contexte : petit festival de campagne, organisé par des femmes, avec des artistes femmes exclusivement mais pour un public mixte. Avec deux copines, nous avons proposé des discussions autour de la sexualité. Le festival en était à sa seconde édition. La première année, la question trans n’est presque pas présente (mis à part qu’un homme “on binaire » entre guillemets a joué sur scène alors que l’objet du festival était de ne faire jouer que des femmes, mais bref…). La seconde année, le féminisme queer était déjà nettement plus présent… Exemple : l’une de nos discussions était sur le thème « orgasme et éjaculation féminine ». Mais au moment d’inscrire le titre de notre  atelier sur le programme, on nous a gentiment indiqué qu’il n’était pas possible d’utiliser le terme « féminine ». Le titre de l’atelier sur l’éjaculation féminine est donc devenu « orgasme et éjaculation »… Incroyable ! Lors de la première édition, nos discussions étaient en non mixité. 

Mais la seconde édition, nous avons préféré faire tout en mixité car on craignait qu’on nous le reproche le terme «  non-mixité » et qu’on nous impose le terme « mixité choisie ». Du coup, on a tout fait en mixité comme ça, pas d’embrouille… Ce qui est évidemment dommage, de ne plus pouvoir faire de non-mixité dans un festival féministe !

Lors d’une de nos discussions (c’était pas sur le thème de l’orgasme féminin mais sur un autre thème), il y avait un homme qui visiblement prétendait être une femme. C’était un homme d’âge moyen, plutôt grand et costaud, et qui avait vraiment l’air d’un homme. Je suppose qu’il ne prenait pas de traitement hormonal ou pas depuis longtemps. La seule chose qui nous indiquait qu’il était censé être une femme, c’est le fait qu’il portait une petite robe à fleurs et qu’il essayait de parler avec une petite voix douce ! Super cliché ! Cet homme faisait partie de l’équipe d’organisation, censée être exclusivement féminine. Ce que j’ai trouvé intéressant, c’est l’effet que la présence de cet homme – censé être une femme dans le corps d’un homme – a eu sur les personnes présentes, ou au moins sur moi. Donc quand cet homme, au physique tout ce qu’il y a de plus masculin, mais habillé avec une petite robe à fleurs, prenait la parole tout le monde l’écoutait religieusement. En fait, je ne peux pas affirmer que tout le monde l’écoutait avec plus d’attention que les autres personnes intervenantes. Ce qui est sûr, c’est que moi je l’ai écouté avec une attention et surtout une précaution toutes particulières. J’ai beau être très critique de la transidentité, j’ai écouté cet homme avec une précaution, un respect pour sa parole particulièrement intenses. Pourquoi ? Et bien après y avoir réfléchi, voilà ce que j’en ai conclu : cette personne me semblait totalement pathétique et j’étais gênée pour lui. Et je ne voulais pas qu’il se sente mal à l’aise ni que le ridicule de la situation crée du malaise au sein du groupe. Donc en tant que femme bien éduquée et conditionnée à protéger l’égo masculin, j’ai tout fait pour refouler mon esprit critique pendant quelques minutes et c’est mon côté « le pauvre, prenons soin de lui, il fait vraiment trop de la peine » qui a pris le relai. Je ne peux pas être sûre que les autres personnes ont ressenti quelque chose de similaire ; mais peut être que si. Et du coup, peut être que c’est à cause de notre envie d’être bienveillantes, en tant que femmes et d’autant plus en tant que femmes de gauche, vis à vis des personnes fragiles, marginalisées, discriminées…. qui empêche absolument toute autre posture qu’une posture de réception passive de la parole de ce type de personnes, donc un homme qui veut être considéré comme une femme, et qui est donc censé faire partie d’une descatégories les plus opprimées qui soit.

Je doute beaucoup que j’étais la seule à trouver cette personne profondément ridicule et pathétique et à cacher mon sentiment dans une surenchère de précaution et d’attention. C’est un sacré coup de force de la part des mecs quand même ! Arriver à devenir le centre de l’attention dans des espaces féminin et féministes ! 

J’ai donc décidé de me retirer de ce festival pour l’année suivante. Mais sur le coup je me suis tu,  j’ai subi et il m’a semblé totalement impossible, impensable même, d’engager le moindre débat. Dans ce festival je suis sûre, du moins j’espère, qu’on était nombreuses à ne pas être à l’aise avec la manière dont les choses évoluent. Seulement comment se reconnaître pour en parler, pour se soutenir, pour s’organiser ? Nous sommes, chacune, apeurées, isolées, muettes. Nous avons tellement peur de nous faire ostraciser, traiter de transphobes. Je me suis retirée de l’animation de ce festival, mais j’ai décidé d’y aller tous les ans afin d’observer la place grandissante que risque d’y prendre l’approche queer et le transgenrisme dans les prochaines éditions. Et peut-être petit à petit trouver le courage et les moyens d’y diffuser un point de vue critique. 

Rebelles du genre – As-tu quelque chose à ajouter ?

Magda – Oui. Je pense que dans ce débat les mots qu’on utilise sont très piégés. On vit dans une société sexiste depuis des millénaires, donc ça a des conséquences très fortes sur le langage. Le mot « femme » est à double sens. Dans son sens disons le plus neutre, le plus descriptif, il signifie «  une individue humaine de sexe femelle ». Mais vu qu’on vit dans une société sexiste, ça veut dire bien d’autres choses puisque ça renvoie à ce qu’est censée être une femme selon les normes sexistes (par exemple une personne maternante, douce, fragile, émotive, disponible sexuellement pour les hommes….) C’est le même problème pour les mots « masculin » et « féminin » qui peuvent renvoyer au biologique, c’est-à-dire quelque chose de factuel et d’indépendant de toute norme sociale, ou au contraire ça peut être très chargé de sens moral et normatif. Par exemple, en disant  «la vulve est un organe féminin », je constate un fait, je ne fais en aucun cas un jugement de valeur. Par contre, dire d’une femme qu’elle est « féminine » renvoie aux normes sexistes, par exemple au fait qu’elle met du maquillage ou qu’elle est jolie et souriante. Ainsi les termes « femmes », « hommes », « masculin », « féminin », ont vraiment un double sens – logique puisqu’ils ont été façonné dans le cadre d’une société sexiste. Cette ambiguïté de la langue devrait obliger toutes les personnes qui veulent parler de questions de genre à définir précisément les mots et leurs usages et à faire preuve de précision et de rigueur pour éviter les malentendus et les contresens. 

Au lieu de ça, nous avons des chercheuses, des chercheurs, des idéologues et des militantes et militants qui maintiennent un véritable flou artistique dans l’usage des termes et des notions. Ce qui empêche le développement d’un débat intelligent et constructif. Jusqu’à quel point cette confusion relève de la bêtise ou bien de la malhonnêteté, ça, c’est vraiment la question qui m’interpelle le plus…

Rebelles du Genre – Merci d’avoir écouté notre parole, et n’hésitez surtout pas à la partager le plus largement possible.

S’il vous plaît, signez la déclaration des droits des femmes basés sur le sexe : www.womensdeclaration.com

Rejoignez-nous, n’ayez plus peur. Ensemble, nous ferons changer les choses.

Si vous souhaitez témoigner, contactez-nous par mail.

A bientôt pour un nouveau témoignage de “rebelles du genre”.

Rebelles du genre – Episode 44 – Sophie Robert

Bonjour les Rebelles du genre, merci pour votre accueil.

Je m’appelle Sophie Robert, je suis réalisatrice et productrice de films documentaires, d’émission plateau, dédiés au sciences humaines en général mais avec un focus sur la psychologie et la psychiatrie fondées sur les preuves, avec une démarche scientifique.

Je me suis beaucoup intéressée aux handicaps, aux handicaps cognitifs et à la maladie mentale, et à la manière dont toutes ces réflexions irriguent les comportements sociaux. Voilà.

Et donc je suis en train de finaliser la réalisation d’un documentaire de 2 fois 60 minutes qui s’appelle “ Mauvais genre : un scandale sanitaire” qui est dédié au transactivisme et… alors il faut bien faire la distinction entre transexuel, transgenre et transactivisme mais c’est dédié à cette vague épidémique qui frappe les pays de l’Ouest et qui frappe la France de plein fouet, alors avec un petit temps de retard avec les pays anglo-saxons. Qui touche énormément de gens de tous âges mais beaucoup de jeunes et notamment de filles, et beaucoup de jeunes avec autisme et de sjeunes avec des problématiques psychiatriques variées, des jeunes futur.e.s homosexuel.le.s qui s’interrogent et qui sont happé.e.s dans cette espèce de secte et qui va conduire à des mutilations et à des démarches irréversibles. Avec pas mal d’adultes qui les orientent dans ce sillage de la « transindustrie » et qui s’en mettent plein les poches.

Donc vous pourrez retrouver des informations sur ce film, le teaser et des éléments sur la campagne de financement participatif sur mon site dragonbleutv.com. 

Donc DRAGONBLEUTV.COM

Sophie Robert –  Alors j’ai découvert il y a à peu près 3 ans, enfin 2 ans et demi 3 ans, cette histoire et cette idéologie et la manière dont cela affectait de plus en plus de personnes, à travers des post de féministes, de contacts féministes.

Il faut savoir que pendant tout mon travail de 10 ans sur la psychanalyse, j’étais vraiment en contact avec des parents d’enfants autistes et qui expliquaient la souffrance que ça causait toutes ces idéologies complètement rétrogrades et pendant très longtemps je me demandais mais elles sont où les féministes, mais elles sont où les féministes, mais où elles sont les féministes ? Et j’étais heu, très désolée et puis j’ai découvert grâce à OLF et grâce à différentes personnes, mais sur le tard en fait, il y a 3, 4 ans : « mais on est là! et on suit ton travail et puis ça fait des années qu’on le relaie » Ah bon ? et donc on a pris ces contacts là et c’est là que je suis passée des handicaps cognitifs, de la psychologie et la psychiatrie, à agréger en fait – et à retrouver contact – puisque quand j’ai commencé à militer, il y a un certain temps, c’était dans les milieux féministes et à retrouver contact avec un certain nombre de personnes qui diffusaient des informations donc féministes. Alors j’ai découvert qu’il y avait une distinction en même temps entre libfem et féministes radicales. J’ai dit : « Ah bon il faut une distinction ? Ok. Je suis féministe radicale » et etc etc. 

Et donc j’ai commencé à découvrir des posts en fait, des messages, sur de faits hein, des messages sur des faits, des phénomènes qui se passaient aux Etats-Unis, en Angleterre en Australie, sur c’était essentiellement sur des restrictions de droits de personnes, de femmes, de lesbiennes, et de femmes qui se trouvaient dans l’interdiction de parler de leur, de tout ce qui était féminin, de tout ce qui était la biologie féminine.

Ou des intrusions en fait, d’hommes autogynéphiles, identifiés femmes, qui forçaient les portes de lieux extrêmement féminins. Je pense que ça a commencé comme ça.

Et puis au départ c’était des messages épars, qui n’étaient même pas commentés, en fait, c’était de l’information. Et puis il y en a eu de plus en plus . Et puis l’information concomitante c’était « mon message a été censuré par Facebook », « mon message a été censuré par Twitter ». Et j’étais observatrice en fait pendant un certain temps. Et puis c’était des signaux faibles.

Et il y a des gens bizarres partout, dans la vie, dans toutes les strates de la société. On se posait la question de savoir si ce sont des choses bizarres qui arrivent et qui vont s’étouffer d’elles-mêmes, parce que ça arrive régulièrement dans des tas de sujets, ou est-ce que ce sont des signes avant-coureurs de quelques chose de beaucoup plus grave, de beaucoup plus important, qui est en train de se structurer ?

Donc j’étais observatrice. Et puis effectivement ça s’est passé comme ça et le mouvement s’est amplifié. 

Les personnes qui étaient censurées lorsqu’elles diffusaient des informations l’ont été de moins en moins. Il y avait énormément de menaces, de rétractation, d’agressions en fait, des transactivistes dès que quelque chose qui ne va pas dans leur sens sort.

Et puis il y en a eu quand même moins. Enfin, c’est-à-dire que la parole a quand même pu se libérer un petit peu sur les réseaux sociaux. Ça a pu se libérer.

Donc j’ai commencé il y a à peu près 18 mois à rediffuser, à relayer, des informations critiques du genre et surtout qui dénoncent, en fait, des problématiques posées par le transactivisme. 

Et au départ ce n’était absolument pas ni commenté ni liké. J’ai beaucoup beaucoup de contacts, certains de ces posts ont été supprimés puis d’autres ont fini par rester mais ça n’a été ni commenté ni liké, mais je diffusais régulièrement des informations. Mais je recevais de plus en plus de messages en MP sur facebook (parce que moi je communique surtout, essentiellement, sur Facebook) de gens qui me remerciaient, de psychologues, de psychiatres, de personnes en milieu des arts et du spectacle, qui me remerciaient de les informer sur ce qui se passe.

Et beaucoup me disaient : « On n’ose pas s’exprimer publiquement, c’est tellement polarisé. Dans le milieu de la zététique, pareil. Mais on est contents  que tu nous diffuses toutes ces informations. » Vous voyez. Et là, je me dis : “mais c’est pas possible” !

J’ai vécu avec les psychanalystes il y a 10 ans, avec les campagnes de diffamation, 7 années de procédures. J’adore me battre contre des fondamentalistes. Quelque part il y a des choses qui sont assez similaires dans le rejet de la nature, le fait de catégoriser les gens. Il y a des choses qui sont, des choses, un empilement de choses complètement contradictoires, et je me dis « mais je vais me retrouver dans la même situation, bon bah soit » .

Donc j’ai commencé au départ simplement à relayer des informations en me disant il faut que je parfaisse ma connaissance du phénomène avant de pouvoir vraiment m’exprimer, donc voilà j’y ai passé 1 an et demi 2 ans.

Je me suis remise sur twitter pour heu… Je ne communique quasiment pas sur twitter mais ça me permet de communiquer avec les radfem anglo-saxonnes. Donc je parle anglais et du coup j’ai pu acquérir beaucoup beaucoup d’informations et aujourd’hui donc je relaie, je relaie et je commente. Et je produis ma propre pensée, structurée, sur toutes ces questions.  Et je me suis dit voilà il faut…les gens ne sont pas au courant en fait, évidemment personne ne veut être contre des trans. Je veux dire il y a des gens qui ont des problèmes, ils ont besoin de ci de ça, on a envie de détruire personne. Ce n’est pas du tout la question. On a envie d’éviter qu’ils se mutilent, surtout quand c’est des gamins, et qui s’embarquent…. Il y a des gens qui ont des problèmes psychiatriques, et qui s’embarquent dans des situations qui vont détruire leur existence.

Les gens n’osent pas produire une pensée et ils n’arrivent pas à relayer une info. C’est le boulot des journalistes et les journalistes mainstream ne font pas ce boulot là en France.

Donc je produis ce documentaire qui s’appelle « Mauvais genre : un scandale sanitaire », en me disant je vais me concentrer sur l’aspect scandale sanitaire. Il y a bien d’autres aspects dans cette problématique trans et idéologie du genre qui sont directement une agression aux femmes, là on est vraiment dans le Rapid Onset Gender Dysphoria, c’est l’aspect sanitaire de la problématique.

Alors il faut savoir qu’il y a une vraie atteinte à la liberté d’expression, une vraie censure économique. La censure par rapport à toute cette idéologie du genre elle existe parce que les médias ne font pas leur travail et parce que, en temps que réalisateur et producteur, on ne peut pas solliciter, et je dis « on » et c’est dans le monde, il y a des artistes qui sont déplateformés parce qu’ils ont des propose critiques du transactivisme. Il y a des tas de gens qui sont censurés, il y a des journalistes qui travaillent sans argent, il y a plein de gens qui sont licenciés. Il y a une pression économique phénoménale.

Ce qui fait que les besoins sont d’autant plus importants parce que toutes les informations qui sont distribuées au public sont biaisées, sont univoques, sont strictement dans un seul sens.

Donc j’ai eu un peu de financement de particuliers ou d’associations, que je ne peux pas citer, tout le monde exige une discrétion absolue. Donc j’ai eu un embryon de financement qui m’a permis de faire ce travail, qui est bien avancé, on va dire que le film est terminé à 80%. Et puis c’est surtout de l’autofinancement, je ne me suis pas payée un centime bien sûr et j’ai surtout beaucoup de sacrifices et heu une mise en danger, une vraie mise en danger économique, parce que j’ai strictement rien derrière pour vivre, et il faut que je puisse payer des techniciens, monteurs et différentes personnes.

Aujourd’hui il me manque un minimum de 8000€ pour terminer ce film, mais qui est déjà très bien avancé. Et si je peux le terminer il pourra être diffusé dès… enfin ça va dépendre du financement hein mais dès cet automne ou début de l’hiver.

Et là l’idée c’est d’avoir un outil synthétique, concret, complet, qui permette, qui s’adresse à tout un chacun mais qui s’adresse aussi aux pouvoirs publics, qui s’adresse aux psychologues, aux psychiatres, pour dire voilà on a posé les enjeux du débat, de manière synthétique, sourcée, maintenant il va falloir prendre position. Vous ne pouvez pas faire l’autruche.

Rebelles du genre – Je trouve que 8000pour sauver des enfants ce n’est vraiment pas cher, donc s’il vous plaît : contribuez ! Merci.

Sophie Robert – La prise de conscience c’est sur le… Je vais faire un parallèle avec le combat par rapports aux fondamentalistes de la psychanalyse d’il y a 10 ans, et où j’ai travaillé vraiment très seule pendant plusieurs années avant de découvrir «Autistes sans frontières » et avant d’être happée et découvrir l’envers du mur, et d’être portée par cette communauté de gens qui m’ont dit merci, qui voilà.  

Et puis aujourd’hui je me retrouve dans un autre contexte mais avec heu… Il faut savoir qu’énormément de jeunes trans sont autistes, ou TDAH. Alors pas tous hein, on ne va pas mettre tout le monde dans le même panier mais il y a une fragilité spécifique des personnes autistes et TDAH, avec une identification très formelle à des codes sociaux, avec une rigidité cognitive, avec des mécanismes d’influence, qui sont particulièrement fragiles. Et il faut repartir au front pour les protéger , y compris les protéger d’eux même, parce qu’il y a une pression à l’intérieur des groupes et des associations qui est phénoménale. Et qui rajoute de la misère à la misère.

Je suis un peu désespérément optimiste, j’ai cette grande joie dans mon travail de faire des choses qui ont énormément de sens. J’ai découvert notamment à travers les féministes radicales en France et aussi aux États-Unis et au Royaume-Uni, une véritable bande de guerrières ! Il faut le dire ! Entre J.K. Rowling et Maya Forstater, l’Alliance LGB, et tant d’autres qui font un travail remarquable. 

J’ai observé ça depuis 2 ans sur Twitter notamment et c’est phénoménal ce qu’il se passe. C’est la réaction à ce climat d’agression idéologique et pratique de l’idéologie du genre poussé par le transactivisme qui a suscité beaucoup de destruction mais aussi des gens qui se sont défendus et qui ont réagi. Tout un réseau d’intelligence très chouette où j’ai l’impression de retrouver ce qui se passait dans le milieu de l’autisme mais dans une toute autre dimension, où finalement dans un milieu où les gens sont complètement écrasés certains sortent du lot, créent des associations, montent des structures à tour de bras et pas seulement pour sauver leurs gamins mais pour sauver tous les gamins des autres. Ils déploient une énergie colossale au sein d’une intelligence de réseau tout aussi colossale. 

Et donc je suis toutes ces personnes, j’ai l’impression que beaucoup de choses reposent sur les épaules de quelques individus qui s’agrègent entre elles. Cette intelligence de réseau réveille des gens et se révèle dans l’adversité. 

Ça m’a vraiment réjouie, ça me donne beaucoup d’espoir par rapport à plein de choses et j’ai hâte de finir mon film et de pouvoir dire à toutes ces personnes « J’arrive ! Je suis là ! On va disposer d’un outil qui va permettre de toucher des gens francophones en plus de tout ce que vous faites. I’m coming ! » 

Voilà je suis un peu comme une gosse qui a envie de participer à ce jeu. Parce que oui, c’est dramatique, des vies sont détruites, il y a énormément de violences, mais c’est quelque chose qui donne du sens, en fait. J’ai des collègues qui font des films sur les jeunes qui sont jeunes, les vieux qui sont vieux, les baraques à frites, et moi je fais des films sur les psychanalystes orthodoxes et le transactivisme.

Quand mon film, qui a révélé le scandale sanitaire de la prise en charge obsolète des personnes avec autisme par la psychanalyse misogyne et arriérée, « Le mur – la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme », est sorti, on était un petit peu dans la même situation. Les psychologues et psychiatres TCC, qui fondent leurs pratiques sur des preuves scientifiques, étaient muselés par des psychanalystes extrêmement agressifs qui avaient le pouvoir. Mon film a été utilisé pour solliciter des chercheurs aux États-Unis et ailleurs qui ont réagi, en France aussi, il y a eu le rapport de l’HAS (Haute Autorité de Santé) sur l’autisme et ça c’est fait, en fait : le rapport de force a fini par s’inverser progressivement.

Et là, je pense qu’il faut résister aux pressions, que de plus en plus de personnes s’expriment afin que le rapport de force change. Je pense qu’on assiste en direct à la naissance d’une idéologie. C’est comme une nouvelle religion, il y a vraiment des aspects religieux dans la structure du discours entre autre choses, dont les agressions liées au sexe, contre les femmes et les homosexuels. Il y a aussi l’embrigadement des jeunes, la prise de pouvoir, l’absence de débat, « c’est comme ça », toute la société prêtent allégeance et se conforme, alors que ça exige de remettre en question des éléments absolument fondamentaux y compris la protection des mineurs et de leur intégrité physique. C’est incroyable d’observer des médecins, des psychiatres, abdiquer leur rôle et avoir des réactions qui sont complètement insensées, décalées, hors de toute réflexion scientifique et de leur rôle traditionnel. On est dans un no man’s land et ça gonfle, ça mousse…

Rebelles du genre – Oui c’est exactement cela, c’est ce renoncement à la pensée scientifique, parce qu’on est séduit, convaincu, ou apeuré, qui est de l’ordre du dogme.

Sophie Robert – Tout cela est construit sur des contradictions insolubles et les idées complètement délirantes. Du coup, les gens sont sidérés intellectuellement, cessent de penser, de réfléchir, et se mettent à développer cette idéologie complètement déconnectée de la réalité.

Rebelles du genre – C’est exactement le mot qui me venait, le mot « sidération ». C’est comme si : “soit tu réfléchis, soit tu y crois”.

Sophie Robert – C’est ça, exactement.

Rebelles du genre –  Alors du coup comment ça se fait qu’il y a des gens qui gardent cette pensée critique, d’après toi ?

Sophie Robert – Je pense qu’on peut aussi facilement perdre cette pensée critique. On peut avoir de la compassion pour des gens qui ont une problématique mais à un moment donné quand on m’agresse et qu’on agresse des gens devant moi, quand on prétend qu’on va défendre les rôles sexuels alors qu’en réalité on les stérilise et on les mutile… les mots ont un sens ! La réalité, elle compte.

Je voulais aussi dire que c’est très important que les gens comprennent la distinction entre les transgenres et les transsexuels « old school », et le transactivisme. Le transactivisme est une idéologie, c’est un parapluie qui recouvre des comportements de plein de gens qui se considèrent comme des alliés (beaucoup de mascus/incels), des gens qui ne sont pas trans ni concernés par la transindustrie, ou pour des raisons professionnelles. Ce sont des gens qui utilisent la terminologie de cette idéologie qui avance comme un cheval au galop sans aucun garde-fou sur les réseaux sociaux pour casser, détruire, s’imposer, obtenir du pouvoir.

Il y a des trans qui ne sont pas du tout d’accord avec ça, et qui observent la situation en étant consternés. Il y a des trans qui sont conscients que derrière l’appellation transgenre, transactivisme, il y a des gens qui poussent leurs propre agenda qui n’a rien à voir avec la transidentité et certainement pas avec la dysphorie de genre. Réciproquement, il y a des transactivistes extrêmement agressifs qui ne sont pas trans, pas concernés, mais qui utilisent ces outils pour casser, pour détruire, pour s’imposer. Il y a des gens qui ont des troubles de la personnalité borderline, des gens très agressifs. C’est pour beaucoup de mecs l’occasion d’attaquer la notion de consentement et d’aller emmerder les lesbiennes. Casser toutes les limites, tous les droits obtenus par les femmes contre le patriarcat. Quand les masculinistes se mettent une bannière rose et bleue, du rouge à lèvres et une jupe, ils ont tous les droits. Y compris de dire que l’attirance pour le même sexe est quelque-chose de transphobe ou que le fait de refuser la présence d’un homme dans un club de femmes serait transphobe. En fait, ils ont absolument tous les droits. C’est quelque chose qui n’a rien à voir avec la dysphorie de genre, avec la souffrance réelle d’un très petit pourcentage de la population confronté à des vraies problématiques, pour lesquelles moi, j’estime qu’il y a du traumatisme derrière. Il y a urgence pour une réelle prise en charge par la psychologie et la psychiatrie avec des professionnels correctement formés en psychotraumatologie, et surtout pas des mutilations sexuelles.

Rebelles du genre – : Et des soins, et peut-être aussi changer la société pour que les filles puissent se dire que finalement être une fille ce n’est pas horrible. Car il y a aussi de ça, des filles qui fuient la féminité et tout ce que ça signifie.

Sophie Robert – Oui, et puis les stéréotypes de genre ne sont que des stéréotypes, c’est quand même incroyable de remettre en question le fait qu’être une femme ce n’est pas porter du maquillage et une jupe. Cette idéologie de genre réifie, glorifie les stéréotypes, tout y est défini à partir des stéréotypes. C’est terrifiant.

Rebelles du genre –  Du coup ça m’amène à la question suivante, pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes et pour leurs droits, pour les enfants, pour la société, pour la démocratie ?

Sophie Robert – Alors j’ai commencé un petit peu à en parler tout à l’heure, parce que c’est une idéologie, c’est un mouvement qui est prosélyte. Si ça ne concernait qu’un petit nombre de personnes qui mettraient leur vie en danger, à la limite ce ne serait pas si grave, mais c’est un mouvement qui est intensément prosélyte. Sous le parapluie transactiviste, des tas de gens poussent leurs agendas de business, ou des agendas d’appropriation de pouvoir au sens le plus large du terme et notamment identifier le maximum de personnes. Plus il y a de personnes qui s’identifient à une bannière, plus cette bannière a du pouvoir dans la société. Donc agréger des gamins de plus en plus jeunes, voilà le truc. Donc c’est une menace réelle, parce qu’en plus ils exigent que toute la société se conforme à ça. Par exemple, l’expression des pronoms. Même les fondamentalistes religieux n’ont pas fait ça, même les islamistes ne demandent pas ça aux gens. C’est à dire qu’on est censés demander aux personnes les pronoms avec lesquels on doit s’adresser à eux en leur absence quand on parle d’eux à une autre personne. C’est quand même dingue, c’est comme dire vous devez porter allégeance à mon Dieu, même quand j’ai le dos tourné, en toutes circonstances. C’est juste hallucinant.

Rebelles du genre – Alors ça m’amène à la question suivante: pourquoi penses-tu que cette idéologie est une menace pour les femmes, pour leurs droits, pour les enfants, pour la démocratie? 

Sophie Robert – Comme je l’ai dit tout à l’heure, parce que c’est une idéologie, c’est un mouvement qui est prosélyte. Si ça ne concernait qu’un petit nombre de personnes qui font des bêtises avec leur vie, à la limite, ce ne serait pas si grave. Mais c’est c’est un mouvement qui est prosélyte parce que sous le parapluie transactiviste il y a des gens qui poussent leur agendas de business, des agendas d’appropriation de pouvoir au sens le plus large du terme, notamment identifier le maximum de personnes. 

Plus il y a de personnes qui s’identifient à une bannière, plus cette bannière a du pouvoir dans la société donc c’est une menace réelle parce qu’en plus, ils exigent que toute la société se conforme à ça. donc par exemple à l’expression des pronoms, des pronoms délirants…. Il faut quand même expliquer ce que c’est aux gens que les pronoms : même les religieux fondamentalistes ne font pas ça ; même les islamistes ne demandent pas ça aux gens… C’est-à-dire qu’on censés demander aux personnes les pronoms avec lesquels on doit s’adresser à eux en leur absence ! Lorsqu’on parle d’eux à une autre personne ! C’est quand même dingue ça… C’est comme si on disait vous devez prêter allégeance à mon dieu, mais vous devez le faire quand j’ai le dos tourné en fait! Vous devez le faire en toute circonstances, même quand je ne suis pas là ! 

Déjà, c’est juste hallucinant. 

Et alors ils inventent des trucs… Il y a un enseignant en Irlande, dans une école catholique d’Irlande qui a été incarcéré à l’heure actuelle. Parce qu’il a été mis à pied parce qu’il a refusé d’utiliser les pronoms d’un élève à problème, il a refusé d’être mis à pied, il est revenu en classe en disant “ma place est en classe” et bien il est incarcéré maintenant. 

Ils se sont attaqués aux lesbiennes, ensuite ils se sont attaqués aux féministes radicales, en balançant des menaces de viols et de meurtres, que les réseaux sociaux ont  laissé faire et tout le monde a dit « alléluia » enfin, beaucoup de gens ont dit “chouette les féministes s’en prennent plein la gueule, ça nous arrange”. Après ils se sont attaqués de manière simultanée à tous les droits des femmes, dans toutes les frontières, des droits acquis pour les femmes, dans les milieux sportifs, dans les prisons… Les sportifs auto-déclarés, des autogynéphiles qui se sont investis dans des lieux féminins…et caetera … Et aujourd’hui ils s’attaquent aux hommes, attention! Maintenant c’est leur tour! 

C’est extrêmement grave, et ça ne s’arrêtera pas tant qu’on ne les arrêtera pas c’est-à -dire que c’est des gens qui cherchent à agréger, qui sont dans une démarche prosélyte, il faut agréger le maximum de personnes, ils cherchent la confirmation, ils cherchent la soumission en fait. Il faut se soumettre.

J’ai des choses qui me font particulièrement mal au cœur, ils s’attaquent aux femmes de pouvoir : des femmes qui ont une représentation… JK Rowling ! Enfin voilà, elle est extraordinaire, c’est notre reine! (rires) Elle est géniale. 

Ils s’attaquent à des personnes qui sont moins connues mais qui sont connues dans l’histoire, Alison Bailey, Maya Forstater…. Mais je pense à cette chanteuse Adèle, aux MTV, il y a un an, parcequ’ils ont décidé de ne plus faire de récompenses genrées, Adèle qui dit “ mais moi j’adore être une femme” . 

Et qui s’est pris des seaux de merdes et d’injures derrière… et je lui dis : “Ne courbe pas l’échine, ne courbe pas l’échine….”

Ils ne s’arrêteront pas. Ce sont des agressions qui ne sont pas symboliques en plus, elles sont très concrètes. ça se passe sur les réseaux sociaux , enfin, c’est plus que ça ce sont des agressions extrêmement concrètes. Pour soumettre! Pour ramener les femmes aux cuisines, hein ! Pour soumettre tous les gamins, toutes les femmes aux stéreotypes de genre hein, parceque ça devient la norme, on a plus le droit d’être une femme “butch”, une femme un peu masculine, faut être dans les stéréotypes,ou alors  il faut adopter l’autre stéréotype, et pour soumettre tout le monde en fait. Soumettre à l’idéologie ! C’est un monde de fous. 

Rebelles du genre – Et chaque personne qui cède fait un peu plus céder le barrage, et le flot est de plus en plus fort, et ça devient de plus en plus difficile de s’opposer. 

Sophie Robert – Exactement! et ça se traduit concrètement par des mutilations sexuelles, il faut savoir que les transactivistes minimisent tout, en disant c’est du cherry picking, c’est minoritaire, il faut savoir qu’aujourd’hui en France, une adolescente de 14 ans peut se faire inscrire sur une liste pour une double mastectomie au bout de la 3ème séance (*chez un psy) la 3ème séance! 14 ans! Et puis cette séance a lieu en visio! et puis il faut savoir que le planning familial oriente les gamines vers la stérilisation et la mutilation sexuelle sans leur faire voir aucun psychologue, psychiatre, ni aucun endocrinologue. Ce sont des médecins lambdas, qui ne connaissent rien,  parce que les gens qui s’auto-déclarent spécialistes du genre, ce sont des idéologues, point barre!

Ils prescrivent de la testostérone, et ils n’ont aucune connaissance de ça.

Les conséquences : en quelques mois, la voix des femmes se “masculinise” de façon irréversible, les hormones sexuelles “contraires” sont des agressions biologiques contre tout le système reproducteur et la sexualité; Et au bout de 5 ans, c’est le maximum, 5 ans de testostérone pour les filles, c’est hystérectomie, parce que sinon c’est cancer. Il y a de plus en plus de cancers chez les jeunes, chez les jeunes trans! Il n’y a même pas besoin d’attendre 5 ans en fait… ce sont des choses qui arrivent…Et j’ai même entendue parler d’ablation du vagin! Parce qu’ ils sont pris dans cet espèce de truc où c’est une agression! Il faut écouter les trans qui sont raisonnables et qui disent: ce n’est que de la conformation sexuelle; il faut vraiment être conscient des choses. 

Ça peut limiter effectivement la dysphorie de genre, pour certaines personnes qui sont réellement dysphoriques, tout petit pourcentage la plupart des transactivistes n’ont rien à voir avec ça, c’est un effet de mode. Et la dysphorie elle ne disparaît pas! Et de toute façon, c’est quelque chose d’extrêmement mutilant. 

Raison pour laquelle il faut le faire quand on est adulte!

Rebelles du genre – Pour que je sois sûre d’avoir bien compris : aujourd’hui en France, il y a des mineurs à qui on a prescrit de la testostérone ? 

Sophie Robert – Bien sûr ! 

Rebelles du genre – Des mineurs ? 

Sophie Robert – Bien sûr et on les met sur la liste d’attente pour la mastectomie! Parce qu’ il y a un an d’attente, et dans certains endroits il y a deux/trois ans d’attente donc pour qu’ils puissent subir des mastectomies en étant mineurs! c’est pas interdit ! C’est à dire qu’on s’offusque de ce qui se passe aux états unis ou en Angleterre, qui est pourtant très transactiviste, il y a des médecins qui ont été poursuivis parce qu’ils ont fait des opérations chirurgicales sur des mineurs, mais c’est autorisé en France ! 

Rebelles du Genre – Il faut savoir que le médecin psychiatre, le pédopsychiatre auquel j’ai été opposée cette semaine sur un débat sur M6 qui sera bientôt diffusée, a soutenu que c’est faux, qu’il n’y a pas de testostérone avant 16 ans, qu’il n’y a pas de chirurgie avant 18 ans, que les bloqueurs de puberté c’est juste un bouton “pause”, c’est complètement réversible et n’ont pas d’effets sur la santé et quand j’ai effectivement parlé de la nécessité d’hystérectomie au bout de 4 à 5 ans de testostérone il m’a dit que c’était un mensonge. Je l’ai traité de menteur sur le plateau, mais à mon avis ça va être coupé hein!

Sophie Robert – C’est un mensonge ! C’est  quelque chose qui est archi sourcé, et je l’ai sorti dans mon film, les effets sur la santé sont dévastateurs. Et ces effets sont irréversibles et ça a été archi sourcé, les bloqueurs de puberté et ainsi de suite. 

Rebelles du Genre – Le moins qu’on puisse dire c’est que ça raccourcit l’espérance de vie des personnes qui en prennent, donc je pense que je vais être coupée au montage mais je l’ai dit, et on m’a répondu que non, c’était faux. 

Sophie Robert – Je cherchais… je ne sais pas si je vais retrouver ce mail… “Urgence transition enfants” c’était un tweet, un message qui date de cet été, c’est une association transactiviste qui s’appelle inter ruralité qui dit “les TS sont contenues mais pour combien de temps? “ Alors ils disent: “à l’association nous avons trois personnes mineures, qui ont commencé la transition – donc commencé la transition ça veut dire  prendre des hormones – trois personnes mineures avec des parents charmants et ouverts mais démunis face à l’absence d’une équipe médicale pour faire la suite…” Ils ne disent pas l’âge des enfants mais c’est évident que tout ça ça s’adresse à des mineurs. 

Rebelles du Genre – Et puis j’étais avec une mère d’Ypomoni sur le plateau et ils ont des centaines de témoignages qui vont dans ce sens-là. 

Sophie Robert – Et le problème c’est que les psychiatres, les psychologues, le plus grand nombre, qui sont opposés à ça qui sont très mal à l’aise avec ça, qui ne sont pas dans ce délire, ils déclinent, ils disent “je ne suis pas compétents pour répondre à votre demande”, parceque les gamins sont coachés entre eux, sont coachés par des adultes pour savoir ce qu’il faut demander, qu’est ce quil faut dire pour avoir tout de suite un parcours de réassignation sexuelle, c’est du genre “il faut mutiler son sexe pour correspondre à son genre”. Et du coup, les parents sont obligés de s’orienter pour aider leur gamins comme ils peuvent, vers des gens qui s’auto-déclarent compétents, et ce s gens là sont tous dans la réassignation sexuelle, ils sont dans le WPATH, dans les recommandations pour les chirurgies de réassignation sexuelles. Il n’y a pas autre chose. 

Il faut savoir que pendant des décennies, il y eu plein d’études qui ont été faites elles vont toutes dans le même sens, les personnes qui déclaraient une dysphorie de genre à l’adolescence, ou d’incongruence de genre , c’était des retards de développement, et 75 à 90% d’entre eux, ça se soigne tout seul en entrant dans l’âge adulte. Ok? 

D’abord je pense que tous les adolescents sont plus ou moins dysphoriques, “qu’est ce qui se passe dans mon corps? Je suis pas d’accord….oh la la ça va trop vite”  et puis pour certains, c’est plus compliqué parceque traumatismes, parce que proto-homosexuel qui comprend pas trop ce qui lui arrive, parce que retard de développement. Il y a plein de raisons, mais il y avait un tout petit pourcentage pour lesquels la dysphorie était résiduelle et résistante. 

Aujourd’hui tous ces gamins sont directement orientés vers des chirurgies de réassignation sexuelle et puis ils contaminent pleins de gamins qui sont pas du tout dysphoriques en fait… et qui sont pris dans cet espèce de paillette où être hétéro bien dans sa peau, c’est super moche en fait !

Certains sont en train de se réveiller, beaucoup en Angleterre, aux Etats- Unis, en Australie disent aujourd’hui “ J’ai plus de seins, j’ai plus d’utérus, j’ai 20 ans, pourquoi est-ce que vous m’avez orienté la dedans? Bon ok je l’ai demandé à corps et à cris mais j’étais une gamine! J’avais des problèmes psychiatriques, qu’est ce qui s’est passé je veux récupérer mon corps!“ 

C’est violent…

Rebelles du Genre – Qu’est-ce qui t’a décidé à témoigner et plus particulièrement, est-ce que tu te situes dans un cadre où tu subis des pressions, des menaces, est-ce que tu sens que parfois tu peux être mise en danger par rapport à cette question, ou est-ce que tu te sens complètement libre de t’exprimer ?

Sophie Robert – Alors je prends la liberté de m’exprimer. Je considère que plus on m’empêche de m’exprimer, plus j’ai envie de m’exprimer. 

La liberté d’expression est un droit chèrement acquis. Particulièrement pour les femmes, mais pour tout le monde et si on ne s’en sert pas, il n’existe pas. Je veux dire, c’est terrifiant ! 

J’ai été taxée d’être raciste ou islamophobe parce que je relaye des posts de femmes qui en Iran sont emprisonnées parce qu’elles enlèvent leurs voiles, c’est parfaitement odieux ! J’ai été taxée de tout un tas de trucs donc évidemment, j’ai déjà commencé à subir des pressions (alors on me parle de transphobe) mais je vais avoir des pressions, des agressions, voilà, je suis là, je suis prête (rire), je vous attends, j’ai un avocat, c’est bon quoi ! (rires). 

La liberté d’expression, on doit la défendre, on doit la garder. Qu’est-ce qui est en jeu enfin ? Moi j’ai pas envie de vivre dans une société où ces choses-là durent sans qu’on fasse quoi que ce soit. Je me regarde dans la glace (rires), je suis contente de moi, je ne peux pas faire l’autruche, c’est incompatible avec mon tempérament. 

Soit j’extériorise en faisant quelque chose de créatif et d’informatif dans mon travail de documentariste, en l’occurrence, c’est comme ça que j’exprime mes émotions et ma pensée par rapport à ces choses-là, soit je me fais une tumeur (rires), il n’y a pas de neutralité : soit je m’autodétruis, soit j’agis politiquement. Mon truc, c’est de transformer en énergie créative, positive, tout ce que je ressens. 

Je pense que c’est un devoir de citoyen, chacun fait ce qu’il peut à son niveau avec les outils dont il dispose mais c’est un devoir. 

C’est des gamins ! Enfin, ils s’attaquent aujourd’hui à des enfants ! On est dans un espèce de rouleau compresseur idéologique, ils s’attaquent à des gosses !

J’ai trouvé des vidéos de responsables de cliniques de réassignation sexuelle où ils expliquent qu’il n’y a pas d’âge (parce que c’est maintenant le nouveau truc), il n’y a pas d’âge pour transitionner, ils s’attaquent à des gamins pré-verbaux, avant 3 ans! Et il y a une bonne femme complètement hallucinée qui dit d’une petite fille qui va devenir trans-homme après, il y a une vidéo où elle s’arrache les barettes, on essaie de lui mettre des barettes dans les cheveux,-  alors les filles c’est les barrettes dans les cheveux ! Moi j’ai jamais pu mettre des trucs comme ça sur la tête de ma fille, elle s’arrachait tout ! (rires) – Et en fait, mais c’est dingue, et elle dit “voilà” complètement hallucinée, elle s’enlève les barrettes dans les cheveux, c’est une manière d’exprimer le fait que cette personne, cet enfant est trans” Et je vais vous dire un truc encore plus gore, c’est possible… 

Parce que trans, c’est un cheval lancé au galop sans aucune limite, un cheval fou… 

Aujourd’hui la mode c’est les asexuels, alors c’est parti avec avec la chirurgie non-binaire. Je montre ça, j’explique tout ça avec des images bien gores dans mon film. Au départ, les chirurgies de réassignation sexuelle, c’est pour bricoler en fait, mutiler un garçon pour le transformer en pseudo-fille ou une fille transformée en pseudo-garçon. Mais il y a des chirurgiens, des docteurs Mengele qui ont inventé le concept d’une chirurgie non-binaire. A priori, ça fait “soft” non-binaire. 

Non.

Derrière la bannière trans, il y a plein de gamins et notamment des gamins autistes qui disent “en fait je suis terrifié par la sexualité”. En fait, beaucoup ont des problèmes de contact, de toucher, de problématiques sociales et disent “je suis asexuel, je suis asexuel” et c’est ça qui les dérange. et bien il y a des chirurgiens qui leur mettent dans la tête qu’il faut conformer son corps à son genre asexuel et donc il faut tout couper. Et les chirurgies non-binaires c’est couper les tétons, couper le nombril, je ne savais même pas que c’était possible de couper un nombril mais apparemment c’est possible, et de couper tout dans l’entrejambe pour que dans l’entrejambe ce soit aussi lisse que Ken ou Barbie. Donc chez les garçons le pénis, les testicules et le scrotum et ça, c’est des chirurgies qui s’appellent “nullification sexuelle, le nullo” et la justification dite par ces chirurgiens c’est de dire : l’idée c’est de rendre le corps conforme au genre, au genre asexuel, qu’il n’y ait pas de ligne de démarcation, que ce soit parfaitement lisse, que le corps soit parfaitement lisse: couper les tétons etc, et tout ce qu’il y a en bas. Et ça a été autorisé par la WPATH par l’organisation mondiale des médecins transactivistes. Il y a des médecins et ça a été mis en évidence par Genevieve Gluck et le site extraordinaire REDUXX qui font un travail extraordinaire là-dessus. Il y a trois médecins qui ont participé à la rédaction du DSM et à l’élargissement du parapluie, le parapluie transactiviste, ce n’est plus du M to F, c’est Male to Nullo, c’est les eunuques en fait. Excusez-moi, j’hésite dans ce que je dis parce que tout me vient en anglais dans la tête, c’est de la documentation anglaise mais… Cela a commencé à arriver en France, je sais qu’aujourd’hui on pratique l’ablation des tétons chez les filles autistes, ça se fait en France aujourd’hui, d’accord ? 

Ca n’a rien à voir avec de la réassignation sexuelle, avec une histoire de “je suis né(e) dans un corps de garçon ou de fille”, c’est l’ablation des tétons ! 

Parce qu’ils vont prendre des médecins qui sont des docteurs Mengele, vont aller dans le sens des problématiques sensorielles des personnes autistes pour conformer leurs corps à ça. 

C’est monstrueux ! C’est monstrueux ! 

Et tout ça, c’est remboursé par la Sécu en plus. Voilà. Donc il faut que ça s’arrête. Ils veulent m’attaquer, qu’ils m’attaquent, je suis là, je suis prête.

Rebelles du Genre  J’ai lu l’article de REDUXX, en fait cette histoire de “Male to Eunuque”, mais en fait, c’est des pédocriminels derrière…

Sophie Robert – Alors oui, ce que j’ai voulu dire c’est que, ils ont été récompensés pour avoir élargi le truc, à l’identification à des eunuques. En fait, ce sont des sites du fétichisme des mutilations sexuelles. Il y a un vrai courant chez les frappadingues de fétichisme. Alors il y a des gens qui pratiquent ça sur eux, c’est vraiment des gens qui ont des problèmes psychiatriques gravissimes qui sont embarqués là-dedans et il y en a d’autres qui le regardent, des gens qui éprouvent de la jouissance orgasmique à regarder ces mutilations sexuelles et à être témoins. Et il y a des films de mutilation sexuelles qui se vendent sur des sites dédiés dans le Dark Web.

Rebelles du Genre –  Je suis au bord du malaise…

Sophie Robert – Bon voilà il n’y a pas de limite, il faut qu’on s’arrête, il faut qu’on les arrête.

Rebelles du Genre –  En plus je crois que j’ai lu que ces personnes-là, ces hommes, on peut dire des personnes mais ce sont des hommes réellement, qui notamment étaient sollicités pour contribuer à la rédaction du DSM, la nouvelle version du DSM.

Sophie Robert – Oui, tout à fait.

Rebelles du genre – C’est-à-dire le manuel [diagnostic et statistique des troubles mentaux] …

Sophie Robert – Ca devient une identité, attention, c’est toujours le discours idéologique, ça devient une identité donc “à respecter” etc, mais une identité qui nécessite de la chirurgie mutilante pour respecter cette identité. Ce qui va arriver, c’est en train d’arriver, le WPATH, l’organisation mondiale des médecins transactivistes, est en train d’établir ses huitièmes recommandations, et alors ce qui est très intéressant, je fais une parenthèse, c’est une personne transexuelle qui m’a donné ces informations-là et qui est aussi critique du genre que nous, qui veut rester discrète et pas connue. j’ai eu ces informations par des personnes trans, par une personne trans et ils sont tout un groupe et ils ne sont pas du tout d’accord avec ce qui est en train d’arriver, c’est important de le savoir. Ils sont en train de préparer les huitièmes recommandations qui sont récupérées par l’ex SoFECT qui est l’émanation française du WPATH, Trans Santé France, c’est de dire ce qui s’appelle de “l’auto-détermination éclairée”. Auto-détermination éclairée, c’est-à-dire que , et c’est dit expressément dans leurs recommandations, la détermination de l’identité de genre n’appartient qu’à la personne qui l’exprime, pas au médecin, quel que soit son âge. Mais par contre, l’objectif, c’est d’obtenir la réassignation sexuelle… Tout le bordel : bloqueurs de puberté, hormonothérapie et chirurgie derrière… Et comme ils sont conscients que en fait la plupart des médecins, des psychologues et des psychiatres sont contre en fait, ils ne sont pas d’accord du tout avec ça, donc il n’y en pas pas suffisamment, il y a une explosion des demandes, mais une explosion des demandes et des listes d’attentes mais phénoménales ! Ils veulent quelque part forcer la main en passant outre l’avis médical, c’est-à-dire qu’il n’y a plus besoin de diagnostics pour pouvoir orienter directement n’importe qui, en faisant la demande, vers des cliniques de réassignation sexuelle, tout ça remboursé par la Sécu. 

Voilà… (rires) Je suis désolée, je te vois t’affaisser dans ton fauteuil (rires)

Rebelles du genre – Attends, en fait …  la nullification des autistes, moi euh…

Rebelle du genre 2 – Pareil, je suis un peu sous le choc là, j’avoue que ça m’a vraiment euh…

Rebelles du genre – J’ai juste envie de pleurer là, c’est…

Rebelle du genre 2 – Moi aussi…

Rebelles du genre – En tous cas merci parce que c’est exactement ce qu’on a besoin d’entendre en fait…

Rebelles du genre 2 – C’est important franchement, c’est important d’être informés là-dessus, je crois que moi j’en apprends tous les jours malheureusement quoi, malheureusement j’en apprends…

Rebelles du genre – C’est sûr…

Sophie Robert – Par rapport aux agressions que cette idéologie fait peser sur les femmes, il y a le fait d’identifier des femmes à des stéréotypes féminins, de limiter la femme à un stéréotype féminin et d’interdire par la présence en fait de ces hommes auto-identifiés femmes dans les cerles féministes, d’interdire de parler des règles, interdit de parler de nos ménopauses, interdit de parler d’IVG, interdit de parler des cycles féminins, cette espèce de prise de pouvoir… Et aussi il y a la disparition des femmes homosexuelles en fait. Il y a une disparition sociale, une espèce d’exigence de conformation de toutes les femmes qui ne correspondent pas aux canons stéréotypés de la beauté, de devoir se conformer à des hommes. Et c’est une agression qui est faite aux femmes. Et sans noues, en fait… Et d’observer ce spectacle de ces filles qui pour s’émanciper, se coupent les seins, se masculinisent, c’est prendre au premier degré l’expression “garçon manqué”, mais c’est monstrueux ! C’est monstrueux ! Ça ne va pas du tout ! Mes amies qui se définissent féministes ou pas, je veux dire, indépendamment de l’orientation des gens, on est toutes, on a toutes passé un passage à l’adolescence, si on était adolescentes aujourd’hui, on serait là-dedans, on serait prises là-dedans ! Du jour au lendemain, vous attirez les regards des vieux monsieurs alors qu’ils ont l’âge d’être votre grand-père (rires) “Mais attendez, moi j’ai pas envie de ça hein ! Je suis désolée, qu’est-ce qui se passe ? Je suis pas d’accord, mon corps il pousse pas à la même vitesse, je suis pas d’accord ! J’ai pas envie de m’emmerder à être dans le maquillage et ces trucs-là et les talons, je me casse la gueule, je m’en fous, ça ne m’intéresse pas !” Et bien si on était dans ce rouleau compresseur idéologique, j’en ferai certainement avec en plus, l’intransigeance, la volonté, l’intransigeance de l’adolescence, j’en aurai tiré la conclusion que j’étais un garçon manqué, au premier degré. J’ai envie, à travers tout ça, de sauver les autres filles… il faut sauver ces gamines, quoi! 

Rebelles du Genre – Oui, et pour revenir sur les lesbiennes, ce que tu disais, c’est à la fois elles sont mises sous emprise de ces hommes qui disent “Moi, je suis une lesbienne à pénis”… ou alors, elles sont… des hommes, littéralement. Elles transitionnent, parce que, étant lesbiennes, eh bien, elles ne peuvent pas exister, en tant que femmes, et donc prétendent être des hommes. Le nombre de… Sur le plateau, c’était exactement ça que j’avais en face de moi : une fille qui, maintenant, est “un garçon”, et qui vit avec une fille. Donc… Voilà. Voilà, voilà.

Sophie Robert – Oui.

Rebelles du Genre – Donc l’éradication des lesbiennes, leur mise sous emprise, enfin pour moi c’est vraiment le groupe le plus… le plus largement… j’allais dire “terrorisé” littéralement.

Sophie Robert – Tout à fait.

Rebelles du Genre – Parce que c’est vraiment une mise sous terreur, en fait. Et ça, c’est quelque chose qui est, pour moi qui ne le suis pas, totalement insupportable.

Sophie Robert – Il y a un mécanisme qu’il faut bien comprendre, c’est que, comme tout ça repose sur quelque chose de complètement délirant et complètement idéologique, que les conséquences de ces réassignations sexuelles sont extrêmement mutilantes, ça pousse les gens, malgré eux, à faire du prosélytisme. Parce qu’ils ont besoin : c’est tellement délirant, évidemment ça ne soigne pas. D’abord, ça ne soigne pas une dysphorie qui n’existait pas à la base. Et quand les gens sont réellement dysphoriques, de toute façon ils disent bien que ça ne les soigne pas. Il y a des périodes de dépression, ils sont obligés d’aller toujours plus loin, toujours plus loin, toujours plus loin… quitte à reprocher à la société leur propre mal-être. Et, du coup, ils sont poussés à chercher l’approbation et la légitimité dans la société, pour justifier leur propre démarche. Et donc, plus ils vont arriver à convaincre d’adolescents ou de jeunes autour d’eux, de devenir trans, plus ça va les soulager de leurs propres erreurs, en fait! C’est un mouvement qui suscite en lui-même du prosélytisme. Mais c’est terrifiant à observer.

Rebelles du Genre – Le truc, c’est que c’est aussi une démarche un peu absolutiste, mais qui va, bien évidemment, dans un cul-de-sac, et je pense que ça explique probablement une partie des suicides que l’on observe, des jeunes filles qui se disent trans. Non pas parce que l’on n’accepte pas le fait qu’elles soient trans, mais parce qu’elles-mêmes se rendent compte que, en fait, c’était une chimère! 

Sophie Robert – Bien sûr!

Rebelles du Genre – Et que ça les a amenées, ben, à se détruire elles-mêmes, voire à être complices de mutilations chez d’autres personnes, et c’est difficile à supporter.

Sophie Robert – Tout à fait.

Rebelles du Genre – As-tu une anecdote à raconter sur un événement qui t’a marquée concernant la transidentité ou le transactivisme?

Sophie Robert – Moi, il y a deux choses qui me touchent. 

C’est le spectacle de belles intelligences et de personnes qui résistent à ce rouleau compresseur, et qui se révèlent dans l’adversité. La manifestation d’intelligence humaine, ça, c’est le côté positif, je trouve ça génial.

Et un autre événement, c’est que j’ai passé deux heures au téléphone, il y a quelques jours, avec une personne trans, qui était exactement sur le même point de vue que moi, me disant : “Moi, je veux vivre ma vie le plus discrètement possible. Je passe pour une femme, je ne veux absolument pas être connu, mais ce qui se passe, c’est absolument scandaleux. Sous la bannière “trans”, on fait passer des informations qui sont fausses auprès des gamins, pour endoctriner les gamins.” Et je lui ai dit : “Mais ce serait vraiment bien de pouvoir en parler sur un plateau.” Et lui : “Mais on n’est pas prêts à ça!” Parce qu’ils ont très très peur. Ils ne veulent pas apparaître comme trans. 

Ca, c’est quelque chose que je pense qu’il est important, peut-être, de développer : c’est qu’il y a une contradiction complète entre cette espèce de mode, de personnes qui se revendiquent trans pour limiter toutes les frontières, pour casser tout, pour revendiquer, revendiquer, revendiquer… et la réalité de la vie des personnes trans “old school”, qui ont toujours existé, bien sûr, depuis très longtemps, et qui ont toujours existé, aussi, dans les cercles féministes, mais à une époque où c’était super discret, et qui ne revendiquent rien, qui veulent vivre leur vie tranquille, et qui sont extrêmement lucides sur le fait que “une femme trans est un homme”, point. Voilà. Et qui sont extrêmement raisonnables et extrêmement lucides. Et ils cherchent à protéger les enfants, parce qu’ils se rendent compte qu’en leur nom, on fait des choses qui sont totalement inacceptables. 

Et ça, je trouve que ça participe de ce courant d’intelligence collective, et j’espère que mon film va contribuer à ce que ces paroles se délient, encore plus, soient plus visibles, que les gens aient des informations, enfin voilà. Pour faire nombre. Et remettre un peu de raison dans tout ça.

Rebelles du Genre – Dernière question : as-tu quelque chose à ajouter?

Sophie – Ce que je souhaiterais… Très concrètement, j’ai besoin de sous pour finir mon film, je suis désolée d’être prosaïque! 

Parce que j’ai fait des sacrifices énormes qui sont complètement insensés, et parce que c’est un vrai souci. Pour faire un film qui a de l’ambition, il faut payer des techniciens, tout un tas de trucs… En plus il fait deux fois 60 minutes, il est long! Et on va essayer de faire quelque chose d’un peu artistique, quand même! Il faut des moyens, et si vous allez dans “Dragonbleutv.com”, et sur la colonne de droite, il y a écrit : “campagne de financement participatif, Mauvais genre : un scandale sanitaire”. Il n’y a pas de petit don, et je peux vous garantir que chaque euro sera utilisé en temps de montage, et ce sera vraiment utile, quoi.  

Je dis ça parce que j’ai toujours tendance à être un peu “s’en va-t-en guerre”, les gens s’imaginent, “ha Sophie, elle s’en sort, elle fait des trucs, et out… Non, non! C’est vraiment compliqué, je vous assure que c’est vraiment compliqué. Et mon film, si je n’ai pas ces financements-là, je ne pourrai pas le sortir, c’est clair!

Rebelles du Genre – Donc on appelle toutes nos auditrices et tous nos auditeurs à contribuer à ce film qui sera certainement un outil précieux pour sauver des enfants et protéger les droits des femmes.

Sophie Robert – Merci à vous. Merci infiniment.

Rebelles du Genre – Merci Sophie!

S’’il vous plaît, signez la déclaration des droits des femmes basés sur le sexe : www.womensdeclaration.com

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